1 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove Table des matières 03 Biograp

1 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove Table des matières 03 Biographie 16 Œuvres phares 43 Importance et questions essentielles 53 Style et technique 63 Où voir 69 Notes 81 Glossaire 92 Sources et ressources 98 À propos de l’auteur 99 Copyright et mentions 2 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove Oscar Cahén (1916-1956) arrive au Québec en 1940 à son corps défendant, comme réfugié chassé d’Europe. Pourtant, en quelques années seulement, cet artiste énergique aux émotions complexes aura donné beaucoup d’envergure à l’illustration et à la peinture au Canada. Quand il meurt subitement, en 1956, il figure parmi les illustrateurs les plus réputés au pays. Il aura eu par ailleurs une influence sensible sur d’autres peintres abstraits, avec lesquels il formera le célèbre groupe des Painters Eleven. 3 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove ENFANT DE PLUSIEURS NATIONS Une photographie montre Oscar Maximilian Cahén tout sourire, en compagnie de deux autres adolescents non identifiés, au palais Zwinger, à Dresde, en Allemagne. Il faussera sa date de naissance pour être admis à l’Académie nationale des arts appliqués de cette ville en mars 1932, dès l’âge de 16 ans1. La photo déchirée porte les marques des bouleversements à venir : le déferlement nazi qui forcera sa famille à fuir l’Allemagne, la séparation d’avec ses parents et l’arrivée au Canada comme réfugié interné. Oscar Cahén, à droite, en compagnie d’un couple non identifié en visite au palais Zwinger à Dresde, v. 1932. Il faudra des décennies après la guerre pour reconstruire le palais, détruit en grande partie détruit par un bombardement en tapis en février 1945. Fils de Fritz Max et d’Eugenie Cahén, Oscar naît le 8 février 1916 à Copenhague. Son père est d’abord professeur d’histoire de l’art, puis correspondant vedette du journal allemand Frankfurter Zeitung dans la capitale danoise2. Traducteur d’Apollinaire pour le périodique expressionniste Der Sturm, Fritz Max Cahén se fait également connaître comme critique d’art3. Espion pendant la Première Guerre mondiale, il est aussi, en 1916, secrétaire et confident du comte Brockdorff-Rantzau, qui représentera l’Allemagne aux négociations du Traité de Versailles4. De 1920 à 1932, les missions journalistiques du père mènent la famille à Berlin, à Paris et à Rome. Adolescent, Oscar suit des cours d’art dans ces deux dernières villes, mais nous n’en savons actuellement rien de plus5. À Dresde, il reçoit une formation en illustration et en dessin publicitaire au studio-école de Max Frey (1874-1944). À l’époque, beaucoup considèrent la publicité et l’illustration populaire comme l’art des temps modernes. Quant à l’affiche, c’est l’art du peuple, puisqu’elle décore les espaces extérieurs et stimule la capacité d’appréciation esthétique du public. 4 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove Caricature d’Oscar Cahén parue en 1934 dans Osveny, un journal tchèque. La légende dit : « Mon mari est un ange. » « Tu as de la chance… Le mien est encore vivant! » GAUCHE : Couverture de la première édition américaine du livre de Fritz Max Cahén, Men Against Hitler, 1939. DROITE : Oscar Cahén, Sans titre (559), 1931, encre sur papier, 95,3 x 69,9 cm, The Cahén Archives, Toronto. Il s’agit d’une affiche dessinée par Cahén durant ses études à l’Académie nationale des arts appliqués de Dresde. FUITE En 1930, Cahén père, d’allégeance sociale-démocrate, est attaqué alors qu’il tente de s’adresser à la foule pendant une assemblée nazie. Deux ans plus tard, il se joint à un réseau clandestin anti-Hitler6. Comme il est de sang juif, la famille perd la citoyenneté allemande en 1933 quand les nazis prennent le pouvoir. Le 3 août 1933, la famille fuit Dresde, poursuivie par 40 membres des sections d’assaut nazies. Oscar est dans un tel état nerveux que son père craint de voir éventé le projet familial : passer la frontière tchèque7. En mai 1934, les Cahén sont à Stockholm, où Oscar poursuit sa formation artistique8. Il organise à Copenhague une exposition de ses œuvres, et les critiques sont favorables à son « art publicitaire raffiné9 ». Les Cahén retournent à Prague en mars 1935; Fritz Max y dirige un groupe de résistants et se remet à l’espionnage10. Oscar améliore la situation financière délicate de la famille grâce à des commandes d’art publicitaire, des dessins érotiques et des caricatures11, dont beaucoup sont des blagues contre Hitler12. L’un de ces dessins, publiés dans Der Simpl, un magazine satirique créé par des réfugiés allemands, montre deux femmes à demi nues. L’une d’elles dit : « Mon mari est un ange. », ce à quoi l’autre répond : « Tu as de la chance… Le mien est encore vivant! » 5 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove GAUCHE : Affiche créée par Vilém Rotter pour l’Exposition internationale de Prague, en 1934. DROITE : Oscar Cahén, Sans titre (084), 1939, encre et aquarelle sur carton, 68,6 x 54 cm, The Cahén Archives, Toronto. William Pachner (né en 1915), illustrateur établi, met gracieusement une partie de son atelier à la disposition d’Oscar, appauvri, avec lequel il forme une sorte de partenariat avant de partir pour les États-Unis13. Le jeune homme absorbe rapidement le style fluide de son collègue14. Oscar Cahén, Sans titre, v. 1943, découpures d’œuvres parues dans des publications inconnues; environ 6 x 9 et 7 x 10 cm, The Cahén Archives, Toronto. Ces caricatures sont des portraits de Hirohito, empereur du Japon; Benito Mussolini, premier ministre d’Italie; Adolph Hitler, chancelier d’Allemagne; et Heinrich Himmler, chef des SS. Sur chacune, Cahén inscrit les mots « based on Szik [sic] » (d’après Szik), attestant de cette manière l’influence de l’illustrateur et caricaturiste Arthur Szyk, un Juif polonais dont les caricatures ont une large diffusion pendant la Seconde Guerre mondiale. Le fils se joint au groupe du père, qu’il aide en passant illégalement en Allemagne pour des motifs inconnus, en plus de finaliser une vente d’armes négociée par Fritz Max15. En 1937, la police tchèque interroge les Cahén au sujet d’un équipement illégal de radio à ondes courtes trouvé parmi les affaires d’Oscar (pour la diffusion de propagande antinazie) et perquisitionne l’appartement familial16. Peu après, Fritz Max se rend aux États-Unis, dans le but annoncé de rédiger un article sur la démocratie américaine pour un journal tchèque17. Eugenie et lui ne se reverront pas avant 20 ans. Au milieu de l’année 1937, Oscar entre à l’école d’art publicitaire Rotter, à Prague, pour y enseigner et y travailler, comme au studio Rotter. Cette grande agence publicitaire fondée par Vilém Rotter (1903-1960), l’un des graphistes les plus progressistes d’Europe, sert de gros clients, notamment parmi les constructeurs automobiles. Le jeune homme doit malheureusement renoncer à cet emploi après quelques mois, puisque l’État interdit aux réfugiés de travailler18. Il organise alors son émigration aux États-Unis19. 6 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove C’est toutefois en Angleterre qu’Eugenie et lui se sauvent de justesse le 3 mars 1939, douze jours avant l’occupation de Prague par les nazis. De hauts fonctionnaires tchèques leur délivrent des passeports en souvenir des services rendus par Fritz Max et malgré quelques réticences dues à la participation d’Oscar aux radiodiffusions et au trafic d’armes20. LES ANNÉES DE GUERRE AU QUÉBEC Oscar ne peut pas davantage travailler en Grande-Bretagne, mais il continue de dessiner. En mai 1940, le gouvernement britannique décide de procéder à l’internement des réfugiés, craignant qu’il se trouve parmi eux des espions allemands. À 24 ans, Cahén embarque sur un bateau prison appelé Ettric en compagnie de plus de 2000 hommes, juifs allemands pour la plupart, officiellement considérés comme prisonniers de guerre et étrangers ennemis. Il arrive à Montréal le 13 juillet 194021. Restée en Grande-Bretagne, Eugenie y sera internée de mai 1940 à décembre 1941. Elle ne reverra pas son fils avant sept ans. Groupe de détenus derrière les barbelés du camp d’internement N, à Sherbrooke, au Québec, le 19 novembre 1945, Bibliothèque et Archives Canada. 7 OSCAR CAHÉN Sa vie et son œuvre de Jaleen Grove GAUCHE : Illustration de Cahén pour une nouvelle de John Norman Harris intitulée « Mail », parue dans Maclean’s, 1950. DROITE : Photographie d’un prisonnier portant l’uniforme du camp N, Sherbrooke (Québec), v. 1940-1942. Photographie de Marcell Seidler, l’un des détenus, qui rend secrètement compte de la vie du camp à l’aide d’un appareil photo maison, dit à sténopé. GAUCHE : Oscar Cahén, Sans titre, v. 1941, aquarelle sur papier, 14,6 x 21,6 cm, collection de Beatrice Fischer. Cahén poste ces aquarelles à Beatrice Fischer alors qu’il est interné au camp N,à Sherbrooke (Québec). Elles représentent probablement le paysage autour du camp. DROITE : Oscar Cahén, Sans titre, v. 1941, aquarelle sur papier, 14,6 x 21,6 cm, collection de Beatrice Fischer. Parmi les affaires d’Oscar Cahén se trouve ce poème, écrit en allemand : Je vis dans la crasse d’une usine vétuste… J’ai une cour, une salle des machines, Des gardes et des barbelés. Nous sommes 700, à ne rien faire d’autre Que regarder au-delà, en colère, et jurer. Nous sommes nourris, habillés chaudement uploads/s3/ 16 .pdf

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