Marges Revue d’art contemporain 08 | 2008 L’art à l’heure de la société de serv
Marges Revue d’art contemporain 08 | 2008 L’art à l’heure de la société de services Art conceptuel une entologie Sous la direction de Gauthier Hermann, Fabrice Reymond et Fabien Vallos, Paris, MIX, 2008, 517 p. Stéphane Reboul Édition électronique URL : http://marges.revues.org/583 ISSN : 2416-8742 Éditeur Presses universitaires de Vincennes Édition imprimée Date de publication : 15 octobre 2008 Pagination : 122-123 ISBN : 978-2-84292-252-8 ISSN : 1767-7114 Référence électronique Stéphane Reboul, « Art conceptuel une entologie », Marges [En ligne], 08 | 2008, mis en ligne le 15 octobre 2009, consulté le 30 septembre 2016. URL : http://marges.revues.org/583 Ce document est un fac-similé de l'édition imprimée. © Presses universitaires de Vincennes 122 Le parti pris des auteurs est de présenter des œuvres conceptuelles exclusivement textuelles afin de les « greffer » sur la « branche » de la littérature – d’où le sous- titre « entologie » (littéraire) qui se réfère à « enter », racine grecque du mot « greffe ». Cette sélection met en valeur une des ten- dances de l’art conceptuel opportunément élargie aux mouvements qui vont de Fluxus au Process Art. Elle correspond à sa période d’émergence où une surenchère entre les artistes les a conduits à mener jusqu’à son terme une désubstantialisation (plutôt qu’une dématérialisation) des œuvres par le langage verbal. Pour certains critiques, cette période qui se termine au début des années 1970, est la seule à pouvoir être qualifiée d’art conceptuel. Cette publication est une répétition de ce geste inaugural, une pétition qui se rapproche du manifeste. Elle mime littéralement certaines publications de cette époque (revues, catalogues, livres d’artiste), qui contenaient principalement des textes: sobriété de la mise en page (une même police de caractère pour tous les artistes qui sont présentés par ordre alphabétique), épaisseur du contenu (517 p.), un prix bon marché. L’ouvrage est de fait une somme d’informations sur l’art conceptuel: il est principalement constitué par les œuvres textuelles des 41 artistes – parmi lesquels on redécouvre des person- nalités peu exposées, par exemple Donald Burgy, Gino de Dominicis, Simone Forti, Lee Lozano, Alan Sonfist, etc. –, dont certains de leurs textes théoriques sont présentés en annexe (en séparant les textes/œuvres des textes/théoriques, les auteurs ont suivi la position de la majorité des artistes dont seul le mouvement Art & Language fait exception); suit un dossier composé par les analyses de critiques. On relève celle d’Em- manuel Hacquard, un métalogue qui exem- plifie l’usage de l’énoncé simple et de la visée performative chez certains artistes (même si leur articulation demeure problématique). Art conceptuel une entologie Sous la direction de Gauthier Hermann, Fabrice Reymond et Fabien Vallos Paris, MIX, 2008, 517 p. 123 L’édition se clôt sur une postface de Fabrice Reymond et sur une bibliographie consé- quente. Le second parti pris, consistant à n’avoir sélectionné que les textes n’ayant pas encore été traduits en français, donne accès à de nouveaux textes pour le public francophone. Tout point de vue focalise l’attention sur certains aspects: un morceau, une interpré- tation qui opère des coupes. Il n’y a pas de corpus sans découpe. Mais un stylet trop pointu ne risque-t-il pas d’assécher son sillon ? L’art conceptuel avait-il besoin d’une telle greffe: est-il à ce point mori- bond? Leur parti pris perd de sa cohérence lorsque les auteurs cherchent à le légitimer par un discours « historiciste ». Constituer une origine, une définition générique, une authenticité, est en contradiction avec leur intention de promouvoir la « mutabilité » de ces œuvres. Leur approche aurait pu s’enri- chir en prenant en compte – ou au moins en évoquant – d’autres points de vue. Car cer- taines omissions deviennent un aveugle- ment qui discrédite l’intérêt de cette recherche éditoriale. Par exemple, la pré- sentation de la série de textes de John Bal- dessari, Ingres and Other Parables (1972), n’indique pas qu’ils étaient accompagnés de photographies dans la publication du livre d’artiste éponyme. Si le mérite de ce livre est de nous faire apprécier ces œuvres/textes pour eux-mêmes, il n’aurait rien perdu en signalant que leur qualité était aussi de pouvoir s’associer à d’autres matériaux. La capacité générative du texte y aurait gagné en mutabilité. Le texte est tis- sage et métissage. En dissociant systémati- quement le texte/œuvre conceptuel des autres matériaux, il reconduit un formalis- me, un purisme greenbergien qui, s’il n’est pas absent de l’art conceptuel, n’est pas pour autant sa caractéristique dominante. Une des contributions de l’art conceptuel des années 1960 a été de reconfigurer les rapports entre le lisible et le visible: de nou- veaux modes de « figuralité » – si ce n’est de figuration – où l’image dans le texte dia- logue avec le texte dans l’image. Cet ouvrage est néanmoins un outil de recherche passionnant. Pouvait-il éviter d’être partial et partiel? C’est aussi sa par- tialité, son engagement radical qui le rap- proche de l’état d’esprit de cette époque et lui donne tout son intérêt. Stéphane Reboul uploads/s3/ art-conceptuel.pdf
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- Publié le Aoû 19, 2022
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