Etude de cas 2 Le Cirque Enchanteur Cours : Entrepreneuriat Licence AES Rani J.

Etude de cas 2 Le Cirque Enchanteur Cours : Entrepreneuriat Licence AES Rani J.DANG dang@unice.fr 1 Le cas du Cirque Enchanteur La réunion suivante se déroule dans la caravane qui sert de bureau au Cirque Enchanteur au début de l’année 2004. Christophe Meunier1, Directeur : Bonjour Guillaume Martin, je suis très content que vous soyez présent ce jour. Le tutoiement est un peu la norme dans notre métier. Y voyez-vous un inconvénient ? Non ? Très bien ! Mon équipe et moi-même nous interrogeons en ce moment beaucoup sur l’avenir de notre cirque et tes conseils nous seraient vraiment précieux. Toutes les personnes présentes autour de cette table ne sont pas de mon avis, je tiens à te le signaler, mais je pense qu’il nous faut intégrer, nous aussi, le même type de raisonnement stratégique que celui mis en œuvre par les entreprises privées. Cela en fera hurler certains qui ne veulent pas assimiler notre cirque à une entreprise privée, mais je fais le pari que tu vas parvenir aussi à les convaincre par tes conseils ! D’ailleurs, dans l’entreprise où travaille ma femme, ils sont actuellement en cours d’audit de leur performance globale, et j’aimerais bien pour ma part que nous progressions sur notre responsabilité sociale de telle sorte que l’on puisse communiquer là-dessus. Sont présents aujourd’hui autour de cette table Florence, notre directrice artistique, Kusaï, notre directeur technique, Cédric, notre directeur administratif et financier et Cécile, notre responsable de la distribution. Hors Jacques qui est notre directeur musical et qui ne pouvait se libérer ce jour, tu as devant toi l’équipe de direction au complet ! Je suis obligé d’avoir une licence d’entrepreneur de spectacle, qui m’a été délivrée à titre personnel (et elle est incessible) par le préfet du département, licence que je dois renouveler tous les trois ans, pour la direction de ce cirque. Je souhaiterais d’abord te donner quelques indications sur notre histoire. Notre cirque est né en 1983 sous l’impulsion d’un groupe de musiciens, de cracheurs de feu et de jongleurs. D’emblée nous avions une idée assez précise du projet artistique que nous voulions avoir, combinant deux éléments qui restent encore clés dans nos spectacles, même si aucun spectacle ne ressemble au précédent : d’abord la musique chaude et très cuivrée, qui est écrite par Jacques, est toujours jouée en direct par les artistes ; ensuite un travail sur des images « merveilleuses » (que nous obtenons par des illusions, du théâtre d’ombre, ou de multiples facéties visuelles). Nous nous sommes volontairement dès notre origine détachés des codes en vigueur dans le cirque traditionnel et c’est pourquoi on nous classe dans le nouveau cirque. Je pense que nous reviendrons sur cette distinction par la suite, mais la première chose qu’il vous faut savoir est que notre projet est avant tout esthétique. Cela a notamment pour conséquence que nous consacrons toujours une partie de l’année à la conception de nouveaux spectacles : en 2003 nous n’avons pas tourné de juin à octobre inclus pour créer notre prochain spectacle. Il nous semble en effet très important de pouvoir avoir du temps pour renouveler notre inspiration artistique, et pour faire un travail en profondeur sans nécessité de résultat 1 Je tiens à dédier ce cas à Christophe Meunier qui m’a fait partagé sa passion du cirque et du spectacle vivant à de multiples reprises. 2 immédiat. Certains nous pousseraient plutôt à faire des tournées plus longues, mais nous savons aussi que les tournées incessantes ne nous permettraient plus de faire cet indispensable travail de recherche. Guillaume Martin, Consultant en stratégie : Combien de représentations avez-vous données en 2003 ? Cédric Couture, Directeur administratif : 66 spectacles en 2003 contre 90 en 2002. Cela a un impact tu le verras sur notre chiffre d’affaires, malgré un prix de vente moyen plus élevé. Globalement, nous avons fait 21 représentations à guichet fermé en janvier-février à Lille (14 319 spectateurs), puis 7 représentations à Bruges (en Belgique, 4 812 spectateurs), 18 représentations à Marseille (12 258 spectateurs) et 4 à Zandvoort (2 455 spectateurs aux Pays- Bas) au mois de mai. La tournée a repris seulement en fin d’année (novembre et décembre) à Saint Gaudens (en Haute-Garonne, 7 représentations, 4 703 spectateurs), Jarnac (en Charente, 5 représentations, 3 427 spectateurs) et Saint Etienne (4 représentations). Nous comptons de même faire un nombre « réduit » de spectacles (environ 70 représentations) en 2004 pour travailler sur notre prochain spectacle. Pour le moment, notre tournée passe par La Rochelle, Bruxelles, Salins les Bains, Nantes, Recklinghausen (en Allemagne), Venlo (aux Pays-Bas), Caen, Blagnac et Saint Quentin en Yvelines. Certains cirques en font moins que nous : le Cirque Baroque par exemple a donné 32 représentations en 2003, 27 en 2002, et 25 en 2001. En moyenne d’ailleurs, les artistes de rue indépendants ont tendance à donner 67 représentations par an et les petites troupes autour de 44 représentations. En 2003, on estime que 117 spectacles2 de « nouveau cirque » ont été créés ! Florence Empana, Directrice artistique : Je pense qu’il vaut mieux être clair tout de suite sur ce que nous entendons par cirque traditionnel et nouveau cirque, nous ne sommes pas les seuls à faire la distinction puisqu’un rapport a montré récemment que les deux formes co- existaient dans tous les pays de la Communauté Européenne3. Cela va peut être te surprendre mais il n’est déjà pas facile de cerner précisément ce que recouvre le cirque dans son ensemble. Je reprendrai une classification qui consiste à séparer l’univers du cirque en 7 arts4 même si beaucoup de monde ne considère pas encore le cirque comme un art (jusqu’en 1979, il était sous la tutelle du ministère de l’Agriculture !): arts clownesques, arts du dressage, arts aériens, arts acrobatiques, arts de la manipulations d’objet, arts inclassables (avaleurs de sabre, transformistes, ventriloques,….), et finalement l’art du cirque. Je vais être brève mais je pense que cela te permettra de mieux saisir notre projet esthétique. Les arts clownesques se sont très tôt affranchis du cirque : quelques compagnies comme Les Macloma, la Clown Compagnie, les Matapeste, le Prato, la Compagnie Maripaule B. et Philippe Goudard l’on sauvé du ridicule au milieu des années 70. Gilles Defacques par exemple a fait de son Prato « Théâtre international de quartier » à Lille un havre pour tous les clowns du monde entier. Il y a environ 11 grandes compagnies actuellement. Les nouveaux clowns se distinguent par leur finesse, la polyvalence de leur talent, leur travail sur 2 Selon le rapport Bertrand Latarjet “Pour un débat national sur l’avenir du spectacle vivant », Compte rendu de mission confiée par le Ministre de la Culture, 2004. 3 « The situation of the Circus in the EU Member States”, Education and Culture Series, European Parliament’s Committee on Culture, Youth, Education, the Media and Sport, March 2003. De manière assez significative, au Japon, l’expression “Nouveau Cirque” n’est même pas traduite en japonais, pour souligner l’origine française de ce nouveau genre. 4 « Les Arts du Cirque » de Jean-Michel Guy, Chroniques de l’AFAA, 20001. 3 les apparences (à commencer par celles du clown), leur refus de toute facilité. Plus ou moins théâtral, chorégraphique, musical, parlé, acrobatique, l’art du clown part, plus que jamais, dans toutes les directions. La même évolution est visible dans les arts de la manipulation d’objet qui fédèrent une quinzaine de compagnies. Le jonglage français se veut poétique, lent, dansé, épuré et porteur de significations plus complexes que la seule mise en valeur d’une compétence. Une nouvelle génération est en train de surgir qui aborde des thèmes durs (la souffrance, l’emprisonnement,…) et se détache de plus en plus de la jonglerie pure pour se rapprocher de la magie, du théâtre gestuel,… Au sein des arts du dressage, l’art équestre a évidemment une place à part car il est à l’origine du cirque et nous avons en France trois lieux d’exception : le Cadre Noir de Saumur, qui est le conservatoire de l’art équestre où l’on trouve les meilleurs chevaux-danseurs « classiques » ; le cirque d’Alexis Gruss, « Cirque National à l’Ancienne » subventionné par l’Etat français depuis 1982 (le cirque a 150 ans d’existence), et le théâtre équestre de Zingaro. Mais il existe de nombreuses autres compagnies qui mettent les chevaux au cœur du spectacle : Compagnie Cheval en Piste, Théâtre du Centaure, O Cirque,… La France compte actuellement plusieurs grandes troupes d’arts aériens : les Arts Sauts, Tout Fou To Fly, Les Tréteaux du Cœur Volant,… Comme le jonglage, le trapèze est en train de découvrir mille potentialités cachées. Les Arts Sauts par exemple en couchant les spectateurs dans des Transats, changent complètement le sens de la voltige. Les Elastonautes ont aussi poussé fort loin l’art aérien en créant « l’homme volant » qui nage dans l’air plus qu’il n’y vole. La corde aérienne, la corde volante et les tissus ont aujourd’hui de nombreux adeptes. L’art de l’acrobatie n’a curieusement pas donné beaucoup d’œuvres longues qui se suffisent à elles-mêmes. Il existe cependant des uploads/s3/ cas-2-cirque-enchanteur-entrepreneuriat-l3aes.pdf

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