AJDI AJDI Février 2017 Février 2017 Société immobilière 90 Étude La jurispruden
AJDI AJDI Février 2017 Février 2017 Société immobilière 90 Étude La jurisprudence relative à l’évaluation des parts sociales de société est rare sur la décennie écou- lée et plus précieuse encore s’agissant des seules sociétés civiles immobilières (SCI). Précisons que l’évaluation de tous les types de sociétés procède des mêmes approches. La qualifi cation de « part sociale » est d’ailleurs commune aux sociétés en nom collectif (SNC), aux sociétés à responsabilité limitée (SARL) et aux SCI. En sus du choix adapté des méthodes, associées à d’éventuelles pondérations, épreuve déjà délicate si l’on se réfère aux débats judiciaires sur le sujet, la démarche de l’expert devient plus complexe en- core lorsqu’il s’agit de considérer les nécessaires abattements. En eff et, la juste valorisation des parts sociales ne saurait ignorer la considération, notamment de la situation de l’associé sortant, du caractère plus ou moins contraignant des statuts ou, encore, de l’évi- dente absence de marché pour ce type de cession. Ces points d’appréciation répondent aux exigences de la défi nition de la valeur vénale des titres non cotés, telle que donnée par la haute cour, à savoir « en tenant compte de tous les éléments dont l’en- semble permet d’obtenir une évaluation aussi proche que possible de celle qu’aurait entraîné le jeu de l’off re et de la demande dans un marché réel ». par Philippe Favre-Reguillon Favre-Reguillon MRICS, REV, CFEI ® , expert en estimations immobilières C.2.2 près la cour d’appel et la cour administrative d’appel de Lyon, expert agricole et foncier CNEFAF, gérant du cabinet IFC Expertise et directeur du Centre de formation à l’expertise immobilière (CFEI) ÉVALUATION DES PARTS SOCIALES DE SCI : ANALYSE PRATIQUE D’UNE DÉCENNIE DE DÉCISIONS JUDICIAIRES L ’article 1843-4 du code civil, modifi é par l’ordonnance n o 2014- 863 du 31 juillet 2014, en son article 37, a fêté ses deux ans il y a quelques mois. Tout en ayant maintenu le recours à un expert pour déterminer la valeur des droits sociaux dans un contexte de sortie d’associé, et dont « les conclusions s’imposent aux parties ainsi qu’au juge », comme rappelé par la Cour de cassation il y a peu (Com. 4 déc. 2012, n o 11- 26.520), ladite ordonnance a ajouté l’obligation nouvelle pour l’éva- luateur d’appliquer, lorsqu’elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties (pacte d’associés). Il est très clairement fait référence, et préférence, aux modalités d’évaluation telles que défi nies par les parties elles-mêmes lors de la rédaction des statuts, le législateur renvoyant donc prioritaire- ment celles-ci à leurs responsabilités. Ainsi, les choses sont simples dans une première période si les associés de la société civile immobilière peuvent se débrouiller du problème en s’associant les services d’un expert aux seules fi ns de mettre en pratique leur propre défi nition statutaire de la valorisa- tion à retenir. Malheureusement pour les parties concernées les intérêts sont souvent divergents. La Cour de cassation a de longue date établi, et constamment rap- pelé, (Civ. 1 re , 2 déc. 2015, n o 14-26.962), que « la valeur vénale des titres non cotés en bourse doit être appréciée en tenant compte de tous les éléments dont l’ensemble permet d’obtenir une évaluation aussi proche que possible de celle qu’aurait entraîné le jeu de l’offre et de la demande dans un marché réel à la date à laquelle ces titres doivent être évalués ». Il peut donc être utilement souligné que l’évaluation de parts so- ciales procède des mêmes règles pour l’ensemble des sociétés dites « de personnes ». Il n’est, en sus et au cas par cas, que question d’une adaptation des méthodes. La SCI ne saurait être considérée comme une ex- ception, sauf à observer que ses parts sociales sont principalement valorisées des actifs immobiliers qu’elles intègrent. Sur cette base, il convient donc de retenir les mé- thodes les plus appropriées, fonction de l’impor- tance et de la nature des revenus générés, ou pas. Sera également à étudier l’ensemble des circons- tances objectives pouvant affecter la libre cessibilité du ou des biens à évaluer : la valeur à défi nir, in fi ne , est loin de se résumer à la seule valeur originelle des biens immobiliers telle qu’elle a pu être portée au bilan de la société. Enfi n, la notion d’actualisation de valeur est essen- tielle. La haute cour (Com. 16 sept. 2014, n° 13- 17.807, D. 2014. 2446, note J.-M. Desaché et B. Dondero ; ibid . 2015. 2401, obs. J.-C. Hallouin, E. Lamazerolles et A. Rabreau ; Rev. sociétés 2015. 19, note J. Moury) a récemment consacré le fait que, à défaut de précision dans les statuts de la société concernant la date à laquelle les parts devaient être évaluées, c’est à bon droit que le tiers estimateur avait fi xé celle-ci à « la date la plus proche de la ces- sion future ». Attardons-nous maintenant sur l’illustration pra- tique et judiciaire des principes ainsi posés, mais également sur la notion même de SCI. AJDI AJDI Février 2017 Février 2017 Société immobilière 91 Étude Étude Approche patrimoniale ou privilégiant la rentabilité ? Fonction du type de SCI, mais également des revenus que ces der- nières génèrent, ou pas, il convient, en matière d’évaluation de parts sociales, de privilégier une approche plus qu’une autre. D’éven- tuelles pondérations seront utilisées en ce sens. Il ne peut, en effet, être adopté le même raisonnement pour tous les types de SCI. Les approches visent à appréhender soit la valeur du patrimoine de l’entreprise, soit sa rentabilité sur la base de ses fl ux fi nanciers. Les pondérations consacrées par la jurisprudence auront pour ob- jectif de positionner au mieux le curseur. La valeur mathématique Logique de patrimoine d’abord, avec la valeur mathématique (VM) (ou patrimoniale), par opposition à la valeur de rentabilité (VR) ou de productivité (VP). Elle est à privilégier pour les sociétés patrimo- niales 1 ou de « taille modeste » (Reims, 10 juin 2014, n o 12/02548). Ce point a été validé dans son principe en 1982 par la Cour de cassa- tion (Com. 1 er févr. 1982, n o 79-17.155) 2 qui avait, à l’époque, consi- déré que cette méthode était la seule possible pour l’évaluation du capital foncier d’un groupement foncier agricole (GFA). Structure dont l’objet patrimonial est, en effet, pour le moins prééminent. Cette valeur s’obtient par la somme des éléments de l’actif du bilan diminuée des éléments du passif réel (dettes à long, moyen et court terme) et des provisions. La VM résulte donc de la valeur nécessairement actualisée, au jour de l’expertise, des actifs moins les dettes (Com. 16 sept. 2014, n o 13-21.222) 3 et sur la base de la valeur vénale actualisée à dire d’experts du (des) immeuble(s), issue de la mise en œuvre des méthodes traditionnelles d’évaluation immobilière (comparative, fi nancière ou professionnelle dans le cas d’un bien monovalent, se- lon la défi nition donnée à l’art. R. 145-10 du code de commerce). Il est ainsi défi ni une valorisation brute des parts sociales sur la base de ce qu’il est d’usage d’appeler l’actif net comptable (ou capitaux propres de la SCI) ainsi réévalué des éventuelles plus-values immobilières. À ce titre, il a été récemment confi rmé (CAA Paris, 30 mars 2012, n o 11PA02281) que la valeur vénale réelle de titres non cotés pou- vait valablement être déterminée par la seule VM, en se fondant sur l’actif net de la société quand il était établi que la valeur de celle-ci était étroitement liée à celle de son patrimoine. Laquelle position est également admise lorsqu’il s’agit d’une SCI dont l’objet essentiel est la détention et la gestion d’un patrimoine privé (Com. 19 janv. 2010, n o 09-10.836). Dans le même esprit, notons une décision récente (Bordeaux, 29 janv. 2014, pourvoi rejeté par Com. 9 juin 2015, n o 14-16.465). Le juge, relevant que la Direction générale des fi nances publiques avait retenu la valeur mathéma- tique des parts sociales par actualisation de l’actif net comptable, en comparant les valeurs vénales des immeubles de même type et en intégrant le passif réel d’après les comptes de la société, a décidé qu’il en résultait donc que « dès lors, cette évaluation était la plus pertinente pour une SCI qui ne faisait que louer (ou vendre) son patrimoine immobilier et dont la valeur est surtout liée à ses caractéristiques physiques et géographiques ». Dont acte. ( 1 ) Guide de l’évaluation , DGI, 2006. p.17 : « Le choix de privilégier la valeur mathématique s’impose principalement pour les sociétés patrimoniales. » Ce guide a été consacré par un arrêt de la CAA de Nancy (CAA Nancy, 13 mai 2015, n o 14NC01321) qui fait référence à ses préconisations, et ce à plusieurs reprises. ( 2 ) Com. 1 er févr. 1982, n o 79-17.155 : il est retenu, dans cet arrêt fondateur de la haute cour, que dans un contexte de parts représentatives d’un capital foncier, uploads/Finance/ evaluation-des-parts-sociales-de-sci-par-ph-favre-reguillon-ajdi-02-20171.pdf
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- Publié le Apv 06, 2021
- Catégorie Business / Finance
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