Envelopper les objets Pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siè
Envelopper les objets Pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siècle à nos jours Denis Woronoff Pandora par Loison (cour du Louvre) Source : Wikicommons Denis Woronoff, né en 1939, est professeur émérite d’histoire de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne. Ancien élève de l’Ecole normale supérieure, il a été successivement enseignant à l’ENS, chercheur au CNRS et professeur à la Sorbonne. Il a dirigé l’Institut d’histoire moderne et contemporaine, laboratoire propre du CNRS, et l’équipe pluridisciplinaire « Institutions et dynamiques historiques de l’économie » (unité mixte de recherches CNRS, Universités Paris I, Paris VIII, Paris X et ENS Cachan). Il est spécialiste de l’histoire de l’industrie- principalement dans le domaine de la sidérurgie et des mines- et des techniques ainsi que du patrimoine industriel. A ce titre, il participe au conseil scientifique de plusieurs musées et centres de culture technique. Parmi ses publications : Histoire de l’industrie sidérurgique en France pendant la Révolution et l’Empire, Editions de l’EHESS, 1988 ; Histoire de l’industrie en France, du XVI° siècle à nos jours, Le Seuil, 1994 ; François de Wendel, Presses de Sciences-Po, 2001 ; (En coédition), Les images de l’industrie en France de 1850 à nos jours, Editions du CHEFF , 2002 ; La France industrielle. Gens de ateliers et des usines,1890-1950, Le Chêne, 2003 ; (En coédition) L’acier en France, produits et marchés, de la fin du XVIII° siècle à nos jours, Editions universitaires de Dijon, 2006, (En coédition) Politiques industrielles d’hier et d’aujourd’hui en France et en Europe, Editions universitaires de Dijon, 2009 ; (En coédition), Tisser l’histoire. L’industrie et ses patrons, XVI°-XX° siècle. Mélanges offerts à Serge Chassagne, Presses universitaires de Valenciennes, 2009. 3/122 Envelopper les objets: pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siècle à nos jours ▲ Retour à la page du sommaire Sommaire Préface Introduction Première partie Une protection nécessaire (vers 1700 - années 1830) Transporter, conserver - Quelles marchandises ? - Les risques du voyage - Garder en magasin Mettre en œuvre - Matières premières - Qui emballe ? - Techniques - Un usage parcimonieux - Au détail Distinguer - Marques - Mesures - Excellence Deuxième partie A l’échelle industrielle (années 1830 - années 1950) Changements de destinataires - La Révolution ferroviaire et l’élargissement des marchés - Les grands magasins et l’invention du consommateur - De la boutique au réseau La panoplie des moyens - Bois et osiers : des matériaux indispensables - Papier et carton : de nouveaux débouchés - Une autre fibre : le jute - La noblesse du verre - L’âge des métaux Modes d’emploi - Entre le vrac et le sac - Les lieux de l’emballage - Les gens et les pratiques - La prépondérance de l’alimentaire - Le monde des objets Troisième partie Succès et excès (des années 1950 à nos jours) Mutations sociales, révolution commerciale - Un pays en mouvement - Libre service, « discompte » et grandes surfaces - De nouvelles habitudes Modernité technique - L’irruption des plastiques - Les progrès des autres matériaux L’utile et le beau - Les enjeux du design - Formes et décors - Quand l’emballage devient objet d’art Concurrences - Quels matériaux ? - Quels marchés ? - Tendances Maîtriser l’emballage - Restreindre - Récupérer Sources et travaux Les mots ou phrases en bleu sont des liens qui permettent de naviguer dans le document. 4/122 Envelopper les objets: pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siècle à nos jours ▲ Retour à la page du sommaire L’ idée de ce livre est née d’un étonnement déjà ancien. L’his- toire de l’industrie en France, au sens de la main intelligente, s’est construite sur l’étude des entreprises et des façons de produire, plus que sur des produits. Mais au fond, ces der- niers n’ont pas été oubliés : en témoignent les réflexions associées d’his- toriens, d’économistes et de sociologues sur les normes et sur les qualités. En prenant, à rebours, le chemin de l’usine à partir de sa production, on peut espérer comprendre l’une par l’autre. Ces marchandises circulent jusqu’à leur point de vente et de consommation, qu’il s’agisse d’un marché de proximité ou de l’Outre-Mer. On sait assez bien comment se boucle le cycle. Mais dans ce transport, les produits ne vont pas nus, ou toujours en vrac. Comment sont-ils protégés, présentés, autrement dit, emballés ? A leur arrivée, avant d’être proposés à la vente, sont-ils autrement arrangés ? On le devine, ces emballages, au sens de la pratique et de son résultat, ont un coût, qui intéresse l’histoire de la production et des échanges, com- portent des savoir-faire, utilisent des matériaux. Ils s’exécutent dans un espace de l’atelier ou de l’usine, à la fois concret et symbolique. Ce tra- vail est rarement signalé, encore moins valorisé, parce qu’il est de l’ordre de l’évidence. Tout juste en apprend-on davantage lorsque le métier est périlleux, comme celui des ouvrières des manufactures d’allumettes, au contact du soufre. Dernier apport de l’étude des emballages : ils expriment une vision, modeste et évidemment non formulée, du rapport à ces objets, celui qu’entretiennent les fabricants, celui que vont soutenir leurs clients. Dans une époque préoccupée jusqu’à l’obsession par l’envahissement des emballages, mais en même temps fascinés par eux, il n’est sans doute pas inutile de rappeler deux données. La question de l’emballage n’est pas née du second après – guerre. Elle a grandi avec l’économie marchande mo- derne, disons en France depuis le XVIII°siècle. D’autre part, cette question ne se résume évidemment pas à sa dimension de « design ». Un sac de farine sorti d’une minoterie, un cageot de melons envoyés par un producteur du Midi ont la même dignité historique qu’un coffret à bijoux ou un carton 5/122 Envelopper les objets: pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siècle à nos jours ▲ Retour à la page du sommaire à chapeau. L’étude en longue durée, la prise en compte de l’ensemble des emballages, dans leur banalité massive, devraient nous faire avancer. Il sera beaucoup question de denrées alimentaires. En volume comme en intérêt social, celles-ci l’emportent sur toutes autres marchandises. De nos jours encore, la question de l’enveloppe, désormais activement protectrice, de ces biens de consommation courante est le point nodal de l’emballage. Cela dit, il faut mesurer l’extrême variété des matières en cause. Il s’agit, par exemple d’outils et de tableaux, de laines, de verres, de médicaments. La métallurgie, dont on imagine que le transport des produits lourds ne suscite pas d’inquiétude, connaît des problèmes identiques. Un haut-four- neau de Franche-Comté envoie sous l’Empire des charrettes de matériel à des commerçants de la région. Il s’agit essentiellement de poêles en fonte, démontés. Que disent fréquemment les destinataires ? Cette fonte moulée, donc fragile, n’était pas protégée. La maladresse de conducteur est à l’origine de quelques dégâts. La pluie a parfois fait rouiller certaines par- ties insuffisamment couvertes. A l’arrivée, faute d’indications précises, des pièces ont été confondues, entre marchands, rendant le montage impos- sible. Les fonctions principales de l’emballage, protection, identification, sont ainsi clairement évoquées. Est-ce là un souci d’économie ancienne ? Quand les ingénieurs de la SNECMA, au Creusot, ont achevé un de ces moteurs de haute précision, ils se préoccupent avec la même application de l’emballage des pièces. Des caisses de carton avec des intercalaires ac- cueillent ces éléments particulièrement fragiles et pour lesquels le client ne tolèrera pas la moindre rayure. Constante des schémas. Pourtant, des évolutions de grande ampleur apparaissent. Une des difficultés est la dis- tinction longtemps pertinente entre l’emballage de transport et l’embal- lage, ou l’absence d’emballage, à la vente. Ainsi, sur un bateau de pêche les poissons sont rangés dans des caisses et débarqués tels quels. Ensuite, au port ou dans un commerce distant, chaque client achète son poisson qui passe de main en main. Il y a vingt ans encore il était enveloppé dans une feuille de papier-journal. Il part dans un petit sac en plastique, désor- 6/122 Envelopper les objets: pour une histoire de l’emballage en France, du XVIIIe siècle à nos jours ▲ Retour à la page du sommaire mais. Dans une grande surface, le poisson aurait été surgelé et préemballé. Les pratiques évoluent. Les notions mêmes d’emballage et de condition- nement se brouillent quand un parfum est présenté en aérosol ou un plat prêt à consommer, dans sa « peau ». Des matériaux nouveaux ont radicale- ment modifié notre perception de l’enveloppe des marchandises. En une cinquantaine d’années, les plastiques, PVC, PET ont apporté des solutions inédites mais aussi pesé sur notre mode de consommation. Cette intrusion sans équivalent de la technique n’aurait pas eu un impact aussi profond et ra- pide si la révolution commerciale des années 1960, libre-service et grandes surfaces, n’avait donné le champ libre à toutes ces audaces. Jadis l’emballage dérobait à la vue, maintenant il expose, il exhibe même. Le consommateur peut se demander ce qu’il a gagné. Il a, semble-t-il, l’embarras du choix mais le conditionnement est intense. Si les gestes de Christo ont tant séduit des opinions européennes peu familières uploads/Histoire/ dw-histoire-emballage.pdf
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Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 05, 2021
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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