Les sources de l’histoire médiévale chapitre 2 : « Sources écrites : les condit
Les sources de l’histoire médiévale chapitre 2 : « Sources écrites : les conditions de production » chapitre 3 : « Sources écrites : les contextes d’élaboration » chapitre 4 : « Sources figurées : images et signes » Certains supports nous sont peu parvenus en raison de leur caractère non pérenne. Ainsi, alors que les tablettes de cire étaient très usitées au Moyen Âge, seules 150 environ pour toute l’Europe sont encore conservées. Concernant les palimpsestes, il y a peu d’attestations de remploi de parchemins grattés pour accueillir un nouveau texte après le Xe siècle. La transcription manuscrite demande un effort physique difficile à reconstituer. La production dans un cadre ecclésiastique (scriptorium) est évaluée, pour un moine clunisien, au mieux à moins d’une heure le matin et environ deux heures l’après-midi. La vitesse quotidienne moyenne d’une copie calligraphiée oscille, pour toutes les époques, autour de 2,5 à 2,8 feuillets par jour. Ce qui explique la variété des mains dans des manuscrits produits dans un temps assez court, la lenteur de la confection, et la cherté du livre. A Bologne, à la fin du XIIIe siècle, un livre de base de l’enseignement du droit (Codex juris civilis ou Décret) vaut l’équivalent d’une maison de moyenne importance. Dans la France du XVe siècle, une Bible (non luxueuse) vaut l’équivalent de deux vaches. Le système de la pecia universitaire (observé dans des grandes villes d’université à compter du troisième quart du XIIIe siècle, mais guère au XVe siècle, et surtout pour les manuscrits théologiques et juridiques) vise à réduire les délais de copie : « mis en pièces », le manuscrit est réparti entre ses différents cahiers, que des copistes différents peuvent chacun de leur côté louer et recopier sans attendre qu’un manuscrit entier soit disponible. Il n’y a pas de gain de prix, mais seulement de temps. Cela permet aussi aux autorités de contrôler la « correction » des textes qui circulent. On a trouvé à l’abbaye de Saint-Victor de Paris 893 des 1081 manuscrits décrits en 1514, alors que la bibliothèque de Charles V n’a fourni qu’une centaine de manuscrits, alors qu’elle contenait environ 1200 volumes en 1380. Il y a donc souvent un problème de représentativité. Les monogrammes apposés au bas des actes de Philippe Ier et de Louis VI reprennent la structure caractéristique du monogramme de l’empereur Louis le Pieux (?-840), fils de Charlemagne. Le mode de datation des actes ou des documents revêt un aspect politique. Ainsi, en période de compétition (1198-1208 dans l’Empire), les rédacteurs d’actes affichent leur hostilité ou leur camp en datant les années de règne du roi évincé ou de tel compétiteur, voire en datant du « règne du Christ » pour exprimer leur sentiment de la vacance du pouvoir. Ces indications permettent donc de cartographier les zones d’influence politique. Fin XIIe siècle, un nouveau type de document naît de nouvelles pratiques judiciaires : l’enquête. Celle-ci consigne l’essence, puis le détail des dépositions. Maniée dans le cadre de la procédure « romano-canonique » que diffusèrent très rapidement dans toute la chrétienté les juges délégués de la Curie, pour régler des différents touchant les églises, leurs droits et meurs propriétés. L’enquête devient aussi l’outil de l’Inquisition, mais aussi de tout type de tribunal et d’affaire, et notamment des causes de canonisation ou de la réforme des administrations princières. Ainsi, on peut citer les enquêtes sur les abus des représentants locaux sous Saint Louis, ou celles portant sur le patrimoine de la couronne (enquêtes sur les eaux et forêts dès le règne de Philippe Auguste). Ces enquêtes ont la plupart du temps des contraintes telles qu’une liste préétablie de demandes, des questions suggestives de l’enquêteur. Il y a aussi beaucoup de pertes ou d’éparpillement archivistique : ainsi, l’enquête réalisée en 1282 à Saint-Denis en vue de la canonisation de Saint Louis n’est plus connue que par quelques fragments. Les chancelleries, les notaires, les collectivités (communautés religieuses, villes) gèrent la mémoire des actes passés et des décisions prises. Au tournant des XIIe et XIIIe siècles, la minute impose au notaire de conserver dans ses propres archives le premier état, condensé, qu’il a donné à la rédaction de l’acte ensuite remis aux parties, et, dans les chancelleries (qui importeront plus tard l’art de la minute), la révolution de l’enregistrement, toujours avant remise au destinataire, de l’acte émis. Le premier exemple de minute est conservé à Gênes en 1154. Pour la Curie pontificale innove en conservant délibérément les documents sur les temps longs, en 1198, dès le début du règne d’Innocent III. La royauté anglaise « enrôle » les actes à partir de la même époque. La chancellerie française saute le pas au début du XIVe siècle. La pratique se diffuse ensuite vers les grandes principautés, quelques seigneuries et certains groupes de diocèses (notamment anglais et espagnols). Ainsi, pour la Curie pontificale, on compte 4000 lettres dès origines au milieu du XIe siècle, 270 000 de 1198 à 1378. Mais la Curie pontificale n’enregistrait encore au XIIIe siècle que 10 à 20 % de la production. De 1307 à 1568, la chancellerie du roi de France n’enregistre que les actes à valeur perpétuelle; soit environ un acte par jour pour une production moyenne de 125 actes par jour. Les textes hagiographiques proposent des exemples de vie et des « légendes » (= ce qu’il faut lire), supports de l’édification et de la dévotion. Le Moyen Âge dispose très vite de grands modèles (Vie de saint Martin par son disciple Sulpice Sévère ; recueils de Grégoire de Tours et de Grégoire le Grand…). Ce type de production est présenté à des publics variés, dans des langues variées (notamment vernaculaire), à des fins variées : intégration à la liturgie ou aux lectures à voix haute (par exemple au réfectoire), compilations savantes organisées selon le calendrier (martyrologes), ou encore florilèges (légendiers à vocation encyclopédique dont La légende dorée de Jacques de Voragine n’est qu’un représentant). Il existe aussi d’autres sources, notamment les authentiques de reliques, de petits billets ou actes placés avec les reliques qu’ils servent à identifier. Les coutumiers précisent les conditions d’application de la règle dans un établissement ecclésiastique. Ils expliquent notamment la répartition des attributions entre les différents offices qui régentent l’organisation, notamment sur la vie quotidienne (temps de l’année et temps de la journée…). Les documents nécrologiques indiquent les noms des personnes à commémorer, membres de l’établissement et d’établissements unis en associations de prière, ou au contraire élargis à tous ceux qui ont demandé une célébration anniversaire, contre fondation. On parle alors d’obituaire. A partir du Xe siècle apparaît un nouveau genre lié à la commémoration des morts, le rouleau des morts. Celui-ci est porté successivement dans chacun des établissements associés en prière pour leur annoncer le décès d’un personnage, un abbé par exemple. Chaque établissement délivre un reçu et parfois y ajoute, souvent en vers, sa douleur, promet des célébrations, annonce les décès survenus dans sa propre communauté. A partir du XIIe siècle, l’obituaire s’enrichit de la mention des donations qui alimentent l’obit. Les sermons conservés constituent des compilations très variées : collections de sermons choisis, groupes de textes notés par le prédicateur (parfois de rares autographes sous forme de brouillons ou de textes récrits) ou un auditeur. Les compilations sont des sélections de textes souvent récrits, proposés en modèle. Ainsi, Pierre de Limoges a compilé 27 sermons du maître Ranulphe de La Houblonnière, sermons connus par 25 manuscrits, pour un total de 300 prêches dans sa carrière. Certaines compilations ne sont pas classées dans l’ordre des jours et fêtes mais selon le type de public visé. Le prédicateur possède aussi divers outils : les compilations d’exempla, les textes bibliques, les florilèges patristiques, les artes predicandi (manuels), ou encore les distinctiones qui donnent le sens des mots clés de la Bible. Il existe aussi une littérature de dévotion et d’instruction chrétienne qui offre des traités spécifiques destinés à un public large comme les Arts de prière (artes orandi), des traités de récits mystiques qui narrent souvent des visions, de Révélations ou d’itinéraires de l’âme (Visions d’Hildegarde de Bingen, Navigation de saint Brendan). Les miroirs du prince constituent aussi une pièce de l’instruction du laïc par le clerc.Comme les traités d’éducation, ils évoluent en intégrant d’autres schémas tels que grille aristotélicienne des vices et des vertus (déjà chez Gilles de Rome qui écrit pour le futur Philippe IV), exemples pris dans le monde contemporain, voire conseils pratiques. Le droit canon s’appuie sur les décisions (canons) des conciles et synodes, et sur les réponses des papes à des questions diverses (décrétales). Les collections canoniques se développent avec la présentation et l’intervention du compilateur dans la Concordia discordantium canonum, dite encore Decretum, de Gratien (Bologne, vers 1140), qui dégage une doctrine de la confrontation des positions diverses. La science « du décret » s’illustre par les commentateurs de Gratien (décrétistes), les collections de décrétales dues à des enseignants puis à la papauté elle-même dans le cours du XIIIe siècle (Liber extra de Grégoire IX, Sexte de Boniface VIII, Clémentines uploads/Histoire/ les-sources-de-lhistoire-medievale.pdf
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- Publié le Sep 26, 2022
- Catégorie History / Histoire
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