CONCEPTION PARASISMIQUE DU PONT ST-CHARLES EN UTILISANT DES TECHNIQUES D’ISOLAT

CONCEPTION PARASISMIQUE DU PONT ST-CHARLES EN UTILISANT DES TECHNIQUES D’ISOLATION PARASISMIQUE Nikolay Velev1, Christian Lemay1, Frédéric Légeron2 1DESSAU, Montréal, Québec, Canada 2Département De Génie Civil, Université De Sherbrooke, Sherbrooke, Québec, Canada RÉSUMÉ Cet article examine l’utilisation d’isolateurs sismiques pour la construction d’un nouveau pont d’étagement sur le Chemin St-Charles au-dessus de l’autoroute 40 à Terrebonne, Québec, décrit le système utilisé dans la cadre de ce projet, les difficultés rencontrées et les procédures de conception employées. Les deux méthodes de conception parasismiques, la méthode « standard » avec le développement de rotules plastiques à la base des colonnes et l’isolation sismique, sont présentées et comparées. La philosophie de conception, la méthode spectrale et la procédure itérative impliquées dans la conception des ouvrages isolés sont décrites brièvement. Cet article présente également une discussion sur d’autres questions concernant l’utilisation et la conception des isolateurs sismiques comme les essais à grande échelle, les détails constructifs, la durabilité et la conception préliminaire des isolateurs pour appuyer la procédure itérative entre le concepteur et le fabricant d’appui. 1. Introduction La protection sismique des ponts est l’un des défis parmi les plus intéressants pour les ingénieurs en structure. Le système de protection sismique doit permettre de contrôler les mouvements de la structure sous séisme, réduire le plus possible les efforts sismiques et assurer une fonctionnalité à l’ouvrage en fonction des besoins d’exploitation post-sismique. Parmi les systèmes de protection sismiques, ceux combinant isolation et amortissement est une technique très intéressante. Les avantages de cette technique ont été démontrés par de nombreux travaux expérimentaux et aussi par leur bon comportement lors des séismes passés. L'idée de base de l'isolation sismique est de réduire les efforts en découplant les mouvements du sol et des appuis de ceux du tablier. Ceci conduit à un déplacement relatif entre la structure et le sol, qui peut être minimisé par la dissipation d'énergie par amortissement. Dans les ponts, notamment les ponts d’urgence, les fondations sont généralement dimensionnés pour résister aux efforts élastiques où légèrement moins si la conception à la capacité conduit à légèrement réduire les efforts sismiques. L'isolation peut réduire les efforts élastiques jusqu'à 75% et ceci se traduit dans les économies de coûts directs. De plus, dans le cas d’un tremblement de terre, même très important, un système isolé a une fonctionnalité post-sismique supérieure à un pont conçu en utilisant des rotules plastiques qui doivent s’endommager pour dissiper l’énergie sismique. Malgré ces avantages, l'isolation sismique est rarement incorporée dans la pratique courante au Québec et plus généralement au Canada. 2. Principes de l’isolation parasismique Le principe de l’isolation sismique est de découpler les mouvements du tablier de ceux des appuis, afin de limiter les efforts sur les appuis. En pratique, l’isolation complète est difficile à réaliser, et on utilise des dispositifs flexibles qui permettent d’augmenter la période de vibration 23-1 de l’ouvrage. En augmentant la période, l’accélération spectrale de conception est réduite comme on le voit sur la figure 1 présentant le spectre de design tel que montré dans les commentaires de la norme S6-06. En diminuant les efforts, les déplacements différentiels entre la structure et les appuis deviennent importants. Ceci conduit à une conception d’isolateurs à grande course ainsi que des joints de chaussée et des repos sismiques de grande dimension et donc à des surcoûts importants. Le comportement typique d’isolateur est représenté à la figure 2. On observe sur cette courbe que les systèmes d’isolation procurent aussi assez souvent un amortissement non négligeable. Cet amortissement conduit à réduire encore les efforts, et aussi à mieux contrôler les déplacements. Si ces déplacements différentiels importants peuvent être contrôlés en augmentant l’amortissement, le pont doit être suffisamment rigide sous les charges de service, comme le freinage et le vent et le système d’isolation doit aussi être capable d’assurer le rôle des appuis classiques au jour le jour, c'est-à-dire transmettre les efforts du tablier aux fondations. De nombreux systèmes d’isolation permettent également recentrage du tablier pendant et après le séisme. Le but de cette exigence n’est pas uniquement de réduire les déplacements résiduels après le séisme, mais surtout de prévenir les déplacements cumulatifs durant le tremblement de terre. -400 -300 -200 -100 0 100 200 300 400 -150 -100 -50 0 50 100 150 Lateral Displacement (mm) Lateral Force (kN) Figure 1: Principes d’isolation sismique (CCCPR, ACNOR 2006) Figure 2: Comportement typique d’isolateur Le Chapitre 4, article 10 du Code canadien sur le calcul des ponts routiers (ACNOR, S6-06) donne les exigences spécifiques de conception et les méthodes de conception à ce type de structure, mais sans donner de procédures et de directives pour aider les concepteurs. L’un des défis majeurs du concepteur voulant isoler un ouvrage, c’est que chaque fabricant a développé des technologies spécifiques et que le comportement des isolateurs est variable d’un fabricant à l’autre. Ceci est un problème lors de l’attribution des marchés publics qui doit laisser une saine concurrence entre les fabricants sans pour autant pénaliser l’optimisation de l’ouvrage. Le concepteur doit donc évaluer plusieurs systèmes disponibles pouvant être utilisés sur l’ouvrage étudié et des gammes de réductions d’efforts en fonction des technologies disponibles. Une fois la technologie sélectionnée (généralement suite à l’appel d’offres), le concepteur et le fabricant d’isolateurs doivent coordonner leurs efforts pour assurer une conception optimale de l’ouvrage. 23-2 3. Cas du viaduc St-Charles 3.1 Description de la structure Le nouveau pont d’étagement passe au-dessus de l’Autoroute 40 en biais de 50o. La géométrie de la route, l’autoroute à franchir et les positions des piliers du pont existant ont été les éléments déterminants dans le choix des portées (voir figure 3). Le nouveau pont a été construit à côté du pont existant et ses piles ont été alignées avec les piles existantes. Les piles existantes ont déjà été renforcées par l’ajout des supports latéraux pour créer une forme en V (voir figure 4a). Pour uniformiser l’apparence des deux ponts, la géométrie des nouvelles piles a été choisie pour reproduire les piles existantes (voir figure 4b). Selon ces considérations, le tablier du pont est formé d’une structure composite continue de quatre travées de 24 m, 43.5 m, 43.5 m et 24 m, pour une longueur totale de 135 m. Fig. 3: Viaduc St-Charles, Ville de Terrebonne, QC a) pont existant b) nouveau pont St-Charles Fig. 4: Viaduc St-Charles – coupe transversale 23-3 Les poutres sont appuyées sur des appareils d’appui unidirectionnels en élastomère confiné sur les piles latérales et sur les culées. Des isolateurs sismiques sont installés sur la pile centrale. L’isolation a été favorisée pour ce projet malgré la relative nouveauté de ce système, car les conditions géotechniques auraient conduit à des fondations très dispendieuses et difficiles à réaliser. L’isolation permettait de limiter les efforts sur les fondations et ceci permettait de rentabiliser largement le surcoût des isolateurs par rapport à des appuis traditionnels. Seule la direction longitudinale de l’ouvrage a été isolée. Dans la direction transversale, l’ouvrage se comporte comme un ouvrage classique avec toutes les piles fixes transversalement, de même que les culées. Ce choix a été imposé par la proximité du nouveau pont par rapport au pont existant et la volonté de limiter les déplacements relatifs du pont pour réduire la possibilité d’impact entre les deux structures et les dommages possibles qui en résulteraient. 3.2 Isolateurs de pont St-Charles La difficulté majeure reliée à ce projet a été de faire face au manque d’informations et d’expérience québécoise en matière de conception et de construction de ponts isolés. Les composantes principales d’appuis antisismiques du pont St-Charles sont les assemblages multi- rotationnels avec des surfaces de glissement (figure 5). Les charges verticales et la demande de rotation sont transférées à la pile à travers des appuis à disque. La capacité latérale est assurée par un goujon en acier ancré dans la plaque de maçonnerie. b) Coupe a) Plan d’appareil d’appui c) Détail B Fig. 5: Appareils antisismiques – pont St-Charles 23-4 Dans ce projet, les isolateurs choisis combinaient l’isolation à des ressorts en élastomère et à un dissipateur d’énergie par friction entre les plaques supérieures d’appareil d’appui connectées aux poutres et les surfaces de glissement sur les appuis (voir figure 5). Les deux éléments, les propriétés des ressorts ainsi que le coefficient de friction, peuvent être ajustés pour rencontrer le niveau de réponse sismique désiré pour la structure. La surface de glissement développe une force de friction Qd, qui dépend du produit de la force verticale du poids mort (D) et du coefficient de friction. Le coefficient de friction du PTFE utilisé sur la surface d’inox dépend de la pression et de la surface de contact et varie de 0,06 à 0,10. La rigidité post-élastique des ressorts Kd varie de 0.0002D à 0.001D (kN/mm), avec une valeur typique de conception de 0.0015D. La valeur initiale de rigidité de 1.5 kN/mm, correspondant à 0,001D, par appui a été utilisée. La force développée par les ressorts est égale au produit de la rigidité poste-élastique Kd et le déplacement d’appui di, (Kd x di). La force sismique FEQ développée par l’appui est la somme de la force de uploads/Ingenierie_Lourd/ 19-conception-parasismique-pont-saint-charles-techniques-isolation-parasismique.pdf

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