L'articulation des thèmes du « Phèdre » Author(s): Geneviève Rodis-Lewis Source
L'articulation des thèmes du « Phèdre » Author(s): Geneviève Rodis-Lewis Source: Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, T. 165, No. 1, PLATON (JANVIER-MARS 1975), pp. 3-34 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41091675 Accessed: 14-09-2016 19:26 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at http://about.jstor.org/terms Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Philosophique de la France et de l'Étranger This content downloaded from 129.199.59.249 on Wed, 14 Sep 2016 19:26:36 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms L'articulation des thèmes du « Phèdre » « De tonalités variées et harmonieux dans son ensemble » peut s'appliquer au Phèdre1 ? La diversité caractérise aussi ses comme tateurs, mais l'accord est loin de se faire sur la composition, ad rable ou exécrable2, comme sur les intentions des éléments du dialogue : le premier discours de Socrate est-il une caricature sans portée, ou traduit-il déjà une inspiration positive ? L'enthousiasme poétique qui anime ensuite le déploiement du mythe a-t-il, ou non, valeur philosophique ? L'amour pédérastique est-il accusé, excusé ou sublimé ? Est-il l'essentiel du propos, ou seulement le sujet des discours dont la forme rhétorique ferait alors l'unité de la réflexion 1. 277 c : IIoixiXouç... xai 7iavapfJLOviouç, appliqué au Phèdre par E. Bourguet, Sur la composition du Phèdre, Revue de métaphysique et de morale (= R.M.M.), 1919 (26), p. 345. Pour simplifier nous latiniserons la graphie des termes grecs, sauf pour les citations. Les références simples aux dialogues de Platon seront insérées dans le texte, sans rappel du titre quand il s'agit du Phèdre. 2. On cite souvent le schlechte Komposition de H. Raed er, Piatons philo- sophische Entwickelung, Leipzig, 1905, p. 267, sans relever que l'auteur discute ceux qui en font un argument en faveur de l'inexpérience de la jeunesse, alors que lui-même considère le Phèdre comme plus tardif. Mais comme il admet que le dialogue ne répond pas à l'idéal d'un tout organique, cela devient une marque de vieillesse ! (L. Robin, notice éd. Budé, p. xxvi). P. Shorey, What Platon said, Chicago, 1933, p. 198, parle de gothic art, aux motifs disparates. En faveur de l'unité, Bourguet, art. cit. R.M.M., 1919, pp. 335-351 ; W. C. Helmbold et W. B. Holther, The unity of Phaedrus, University of California Classical Philology, 1952 (14), pp. 387-417 (point de vue purement littéraire, p. 409) ; G. E. Mueller, Unity of Phaedrus, The classical Bulletin (Saint-Louis Univer- sity), 1957 (33), pp. 50-53 et 63-65. Wilamowitz-Moellendorff parle d'oeuvre admirable (Platon, Berlin, 2e éd. 1920, t. I, p. 487), après avoir reconnu que la multiplicité des thèmes éveille d'abord une impression de « disharmonie » (p. 460), mais il y a complémentarité entre les exigences logiques du vrai et l'enthousiasme du véritable amour (ibid.). Parmi les études en faveur de l'harmonie, nous n'avons pu trouver l'article de A. Tumarkin, Ilsburgs Neue Jahrbücher, 1925 (1), pp. 17-31 (mentionnée par Helmbold et Holther, art. cit., p. 412, n. 12) et l'ouvrage de Z. Diesendruck, Stuktur und Charakter des platonischen Phaidros, Vienne et Leipzig, 1927 (c. r. par L. Robin, dans Revue des études grecques (= R.E.G.), 1932 (45), pp. 115-116, et plusieurs men- tions dans sa notice de l'éd. Budé). This content downloaded from 129.199.59.249 on Wed, 14 Sep 2016 19:26:36 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms 4 REVUE PHILOSOPHIQUE critique1 ? Et si Platon condamne le style de l'éloge final d'Isocrate va de l'approbation sans réserve à la raillerie cinglante2. Sur le sens de l'appel à la méthode d'Hippocrate, les discussions se multiplient non moins, au point que les tentatives pour préciser la référence au Corpus hippocratique s'arrêtent à des traités différents. Et l'allusion connexe à Périclès et à la « météo- rologie » d'Anaxagore complique encore le débat. Le Phèdre accumu- lerait-il les « énigmes »3 pour le seul divertissement du lecteur ? Enfin, ce dialogue étant « écrit », serait-il, selon Platon lui-même, incapable de répondre à nos questions après la disparition de son auteur ? Avec le thème de l'écriture, drogue ou poison4, el in cauda venenum, ne voilà-t-il pas, plutôt qu'un organisme bien consti- tué (264 c), un étrange monstre avec plusieurs têtes et une queue double ? 1. Pour R. Hamel, Analyse critique du Phèdre de Platon, Mémoires de V Académie des Sciences de Toulouse, 1859, pp. 4-5, le sujet est la rhétorique, les trois discours servant d'exemples. Cf. H. Bonitz, Platonische Studien, 1886, pp. 276-280, suivant Schleiermacher : la rhétorique est l'idée principale (p. 277), mais en tant qu'elle repose sur la philosophie (pp. 278, 286). Helmbold et Holther, art. cit. supra, p. 390, insistent sur la double relation thématique : discours sur l'amour, amour du discours. Pour L. Stefanini, Piatone, 2e éd. Padoue, 1949, t. II, p. 68, la profonde unité du Phèdre vient de l'Eros, géné- rateur de discours vivants. Cf. Y. Brès, La psychologie de Platon, Paris, 1968, p. 251 : « L'utilisation la plus authentique de l'amour est le Xoyoç » ; et pp. 252-253. 2. Après Schleiermacher, Wilamowitz, Platon, t. II, p. 122, y voit un grand éloge sans trace d'ironie ; Gomperz, un « cartel » offrant à Isocrate une colla- boration (Isokrat u. die Sokratik, Wienerstudien, 1906 (28), pp. 1-42, ici p. 38). Pour une raillerie (Spott), Raeder, op. cit., p. 276, n. 1, et 277 citant Pflei- derer, Sokrat u. Plato, p. 287, parlant de dérision (Hohn). L. Robin, La théorie platonicienne de Vamour, Paris, 1905, p. 105 : « persiflage cinglant » ; et notice éd. Budé, p. clxxiii. V. R. L. Klee, Théorie et pratique dans la cité platonicienne, Revue d'Histoire de la Philosophie, 1930, pp. 351-352, considère comme des éloges (à l'inverse des précédents dialogues : Gorgias, Phédon, Euthydème) les références du Phèdre à Périclès, Anaxagore et Isocrate. R. Flace- lière, L'éloge d'Isocrate à la fin du Phèdre, R.E.G., 1934 (47), pp. 224-232, nuance : « au lieu de tout condamner » (comme dans YEulhydème), « il lui reconnaît une eminente supériorité sur ses rivaux » (p. 232, sans préciser). Depuis Thompson (Appendice II de son édition du Phèdre, que nous n'avons pu avoir), on a multiplié les parallèles entre certains passages du Phèdre et d'Isocrate. Nous n'avons cherché et retenu que ceux qui apportent des éléments d'interprétation. Pour les discussions sur Hippocrate, cf. infra, ad loc. 3. A propos de l'adresse à Isocrate, Gomperz parle des Phaidrosrätsel (art. cit., p. 38). Rätsel se trouve aussi chez H. Gundert, à propos du lien entre poésie et philosophie, Enthusiasmos und Logos bei Piato, Lexis, 1945 (2), pp. 25-46, ici p. 35. Sans généraliser, comme Schleiermacher disant que Platon parle par énigmes pour exercer la sagacité du lecteur (critiqué par Raeder, op. cit., p. 255), il semble bien que le Phèdre invite à lire entre les lignes... 4. L'ambiguïté du pharmakon (230 d, 274 e), remède, drogue, ou poison est développée par J. Derrida, qui rapproche ce thème du nom de la nymphe Pharmakeia (229 c) : La pharmacie de Platon, Tel Quel, 1968 (32-33) ; repris dans La dissémination, Paris, 1972, pp. 69-197, surtout 78-80 et 108-118. This content downloaded from 129.199.59.249 on Wed, 14 Sep 2016 19:26:36 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms G. RODIS-LEWIS. - THÈMES DU « PHÈDRE » 5 Le Phèdre se présente bien comme un « jeu », à l qu'écrit1, et dans sa partie centrale, l'hymne « jo hommage à l'Amour. Et il évoque un jeu de sociét nom d'un héros homérique un personnage contem thème du jeu se retrouve sous ces masques, dans Gorgias3, à laquelle Platon emprunte certains vêtem pour mieux faire ressortir, par opposition, le « série Car la discussion avec les rhéteurs, qui tisse la tram n'a pas pour simple prétexte les développements l'âme et la beauté ; et il ne suffît pas même de nou deux thèmes dominants en faisant de l'amour le « p discours » (Banquet, 210 a), pour justifier l'entrelacement des thèmes annexes : médecine, écriture ou délire... Gomme dans une symphonie, ils apparaissent dès l'ouverture5, sur fond ostinato de 1. 276 b, 276 d-e, 111 e , et la conclusion, 278 b, s'appliquant à l'ensemble du Phèdre. 2. 261 b-c : Gorgias serait Nestor, le plus « sage » des Grecs ; Ulysse le Rusé désignerait Thrasymaque (cf. 267 c : « le colosse de Chalcédoine », habile à retourner les foules) ou Théodore (le Byzantin, 266 e). Palamède d'Elèe (261 d) correspond bien à l'Eléate Zenon, inventeur d'une dialectique négatrice (qui a inspiré aussi Gorgias, auteur d'une Défense de Palamède, évoquant l'opposition sagesse-folie : § 25, dans J.-P. Dumont, Les sophistes. Fragments et témoignages, Paris, 1969, p. 98). M. J. Milne, uploads/Litterature/l-x27-articulation-des-the-mes-du-phe-dre-rodis-lewis.pdf
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- Publié le Mar 15, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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