LA REVUE DES MUSÉES DE FRANCE REVUE DU LOUVRE 2014 – no 4 La restauration de la

LA REVUE DES MUSÉES DE FRANCE REVUE DU LOUVRE 2014 – no 4 La restauration de la Victoire de Samothrace ÉVÉNEMENTS Patricia GUILLERMIN 4 ORGNAC L’AVEN (Ardèche). Cité de la Préhistoire Une cité de la Préhistoire vient d’ouvrir ses portes en Ardèche Ludovic LAUGIER, Daniel IBLED 8 PARIS. Musée du Louvre et Anne LIÉGEY La restauration de la Victoire de Samothrace Isabelle BARDIÈS-FRONTY 12 PARIS. Musée de Cluny-musée national du Moyen Âge L’Ivoire de Trébizonde, une nouvelle œuvre byzantine au musée de Cluny Muriel BARBIER 15 ÉCOUEN. Musée national de la Renaissance La salle des tissus à nouveau ouverte au public Gérard MABILLE 17 VERSAILLES. Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon Un don exceptionnel : la commode de Louis XV du château de Choisy Amaury LEFÉBURE 20 RUEIL-MALMAISON. Musée national des châteaux de Malmaison et Bois-Préau Une paire de vases pots-pourris en porcelaine de la manufacture royale de Berlin, cadeau de la reine Louise de Prusse à l’impératrice Joséphine Éric NECKER 23 GRAVELOTTE (Moselle). Musée de la Guerre de 1870 et de l’Annexion Guerre et histoire au musée David LIOT 27 REIMS. Musée des Beaux-arts Une salle à manger d’Émile Gallé, un chef-d’œuvre d’intérêt patrimonial majeur Benoît DECRON 31 RODEZ. Musée Soulages Un nouveau « musée de France » ÉTUDES Louise DETREZ 36 La vente des vases antiques de la collection Durand en 1836 : et Marielle PIC occasions manquées et choix opportuns pour les musées Victor M. SCHMIDT 46 La Vierge d’humilité de Niccolò di Buonaccorso Nano CHATZIDAKIS 58 Une icône crétoise de saint Georges à cheval au musée du Louvre La diffusion du thème du saint cavalier « en parade » dans les icônes crétoises des XVe et XVIe siècles Stefania MASON 70 De Palma le Jeune à Girolamo Forabosco : nouvelles identifi cations de tableaux vénitiens dans les collections publiques françaises Cyril DUCLOS 80 Une table à écrire de Jean-Henri Riesener et un fauteuil de Georges Jacob pour le Garde-Meuble de Monsieur, frère de Louis XVI Hervé CABEZAS 86 L’empreinte de la guerre de 1914-1918 dans les collections du musée Antoine Lécuyer à Saint-Quentin 98 EXPOSITIONS 106 MÉMOIRES 2013-2014 École du Louvre. Institut national du patrimoine Sommaire 2014 – no 4 EN COUVERTURE : La Victoire de Samothrace. Paris. Musée du Louvre. Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (voir article de Ludovic Laugier, p. 8). 70 ÉTUDES XVIe-XVIIe SIÈCLES RDMF 2014 • 4 Le répertoire des tableaux italiens conservés en France, entrepris par l’INHA, permet de découvrir ou de reconsidérer des œuvres parfois oubliées ou mal attribuées. On verra ainsi comment d’intéressants exemples de peinture vénitienne sont conservés dans les musées de Chaalis, de Chambéry, de La Fère, d’Aix-en-Provence, de Nantes et du château de Fontainebleau, grâce, le plus souvent, aux donations de grands collectionneurs. Résumés en anglais p. 107 et en allemand p. 109 De Palma le Jeune à Girolamo Forabosco : nouvelles identifi cations de tableaux vénitiens dans les collections publiques françaises par Stefania Mason E n dehors des célèbres peintures vénitiennes exposées dans la salle des États du Louvre, le patrimoine français peut réserver encore des surprises parmi l’immense quantité de tableaux exécutés par des artistes de la lagune demeurés anonymes. Leur étude est maintenant rendue possible grâce au Répertoire des tableaux italiens dans les collections publiques françaises (XIIIe-XIXe siècles) [RETIF] de l’Institut National d’Histoire de l’Art, élaboré sous la direction de Michel Laclotte et de Nathalie Volle et consultable en ligne depuis 20081. Ce Répertoire a en effet pour objectif, non seulement de faire connaître et de valoriser ce patrimoine, mais aussi de pousser les chercheurs à proposer de nouvelles attributions pour les trop nombreuses œuvres demeurant encore dans les limbes de l’anonymat2. Comme le fait remarquer Stéphane Loire dans un important essai sur la fortune des maîtres de la lagune, on peut constater, durant la période analysée (1798-1940), « un rythme relativement régulier d’acquisitions [de tableaux vénitiens] par les musées français »3. Bien qu’il s’agisse souvent de copies ou de productions secondaires, un tableau simplement attribué à un « anonyme » ou à une « école » peut parfois être l’œuvre d’un maître vénitien doté d’un nom et d’un prénom, comme nous allons le voir pour plusieurs œuvres appartenant aux collections publiques françaises. XVI e-XVII e SIÈCLES Ci-contre : 1. Jacopo Palma le Jeune. Judith et Holopherne. S. IACOBUS / PALMA. 1610. Huile sur toile. H. 1,40 ; L. 1,80. Paris. Musée du Louvre. Département des Peintures. Inv. 8549. 71 ÉTUDES XVIe-XVIIe SIÈCLES RDMF 2014 • 4 Palma le Jeune Nous avons déjà eu l’occasion d’étudier la fortune de Palma le Jeune (Venise vers 1550-Venise 1628)4 dans les collections françaises et d’évo- quer la présence de plusieurs de ses toiles en France dès le XVIIe siècle, certaines y étant même parvenues de son vivant5. L’étude du patrimoine des musées et des collections publiques rassemblé dans le Répertoire, jointe à des contrôles in situ, a permis de repérer plusieurs autres de ses peintures. Acquises en général au XIXe siècle par legs, et sous les attributions les plus diverses, elles sont venues compléter le catalogue, déjà riche, d’un artiste qui fut le protagoniste indiscuté de la scène picturale vénitienne entre la fi n du XVIe et le début du XVIIe siècle, après la disparition des grands maîtres, dont il recueillit l’héritage en l’adaptant à l’esprit de son époque. Avant d’entrer dans le détail des nouvelles attributions, il faut prendre la peine de s’attarder sur un tableau qui n’est certes pas inédit, mais qu’une restauration d’une grande fi nesse permet désormais de mieux apprécier, tout en confi rmant qu’il s’agit d’une des plus intéressantes œuvres de Palma conservées en France : Judith et Holopherne (fi g. 1), datable vers 1610 et reproduite à l’eau-forte en 1611 par Giacomo Franco6. On possède par ailleurs une première esquisse de cette composition, rapidement tracée à la plume et à l’encre brune, où Palma se concentre sur la position des deux femmes. Elle est conservée dans le précieux volume intitulé Studio de dissegni di Giacomo Palma, mis en page par Anton Maria Zanetti le Vieux (Venise, Museo Correr)7. Cette toile se signale par des qualités picturales que son récent nettoyage a remises en évidence, et qui jouent sur le bleu et le jaune du vêtement de Judith, rehaussés par le rouge de sa longue ceinture, et sur le jaune-vert de celui de sa servante ; elle se distingue aussi par un choix de composition qui confère à la scène une tonalité tout à fait particulière, à tel point qu’une telle originalité vis-à-vis de la tradition a autorisé une comparaison avec les œuvres réalisées à la même époque par Orazio (1563-1639) et Artemisia Gentileschi (1593-1656)8. Palma situe en effet l’épisode biblique de nuit, à l’intérieur d’une tente rouge, et établit une relation spéculaire entre les deux femmes, Judith et sa servante, devenues presque jumelles ; elles sont représentées au moment où elles mettent dans un sac la tête d’Holopherne, dont le corps, montré, comme pour les deux protagonistes, en un raccourci saisissant, semble s’abattre sur le spectateur en déversant sur lui le sang qui jaillit de son cou tranché. Cette composition si resserrée acquiert un surcroît d’intensité 1 72 ÉTUDES XVIe-XVIIe SIÈCLES RDMF 2014 • 4 dramatique sous le pâle éclairage de la lune, visible au centre, et d’une lampe à plusieurs chandelles, sur la droite. La présence de cette toile dans les collections du musée du Louvre est attestée à partir de 18249. On doit à deux célèbres admirateurs de la peinture vénitienne l’arrivée en France, en 1888, d’une autre œuvre de Palma, acquise sans doute sous le nom de Jacopo Tintoretto (Venise 1518-Venise 1594). Les époux Édouard André (1833-1894) et Nélie Jacquemart (1841-1912), à la recherche de pièces destinées à leur collection, choisirent, parmi les nombreux antiquaires alors en activité à Venise, la galerie de Consiglio Ricchetti – représentée par David et Mazzo –, qui se vantait de posséder des peintures de Titien, de Salviati, des Bellini, de Vincenzo Catena, ainsi que de consistants ensembles de sculptures antiques10. Aujourd’hui conservé au musée Jacquemart-André de l’abbaye royale de Chaalis, aux côtés d’autres œuvres attribuables à Palma ou à son entourage11, le Portrait d’homme à la barbe grise (fi g. 2) immortalise un de ces vieillards anonymes représentés par Palma aussi bien sur ses portraits que parmi les témoins qui apparaissent dans ses tableaux historiques ou religieux. Suivant un processus de simplifi cation qui abolit l’espace environnant ou le cadre architectural représentés habituellement par d’autres peintres vénitiens de la même époque, le champ visuel se limite ici à un plan resserré sur le visage, légèrement tourné vers le spectateur, en une 2. Jacopo Palma le Jeune. Portrait d’homme à la barbe grise. 1600-1605. Huile sur toile. H. 0,52 ; L. 0,45. Abbaye royale de Chaalis. Musée Jacquemart-André. Inv. 2034. 3. Jacopo Palma le Jeune. Saint Jérôme pénitent. Vers 1596. Huile sur toile. H. 0,931 ; L. 0,828. Chambéry. Musée des Beaux-arts. Inv. M935. image dont la morne mélancolie est accentuée par les cernes sous les yeux uploads/s3/ revue-du-louvre-2014-n4.pdf

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