5 Les Sukuk islamiques versus les obligations conventionnelles : une analyse co
5 Les Sukuk islamiques versus les obligations conventionnelles : une analyse comparative ROUGGANI Khalid NABIL BOUAYAD Amine AQRAB Otman Laboratoire d’Economie et de Gestion (LEG), Université Sultan Moulay Slimane, Faculté polydisciplinaire de Khouribga 6 Résumé : La finance islamique au Maroc commence à intégrer le tissu économique du pays, avec une cadence lente mais sure, à travers des réformes juridiques et fiscales. Tout en apportant un souffle fort au financement de l’économie à travers ses différents produits innovants et créatifs. À cet égard cet article a pour objectif d’éclaircir les points de convergence et de divergence entre les Sukuk islamiques et leurs homologues conventionnels, à travers une démarche reposant sur une étude des données statistiques. Par conséquent le résultat de notre analyse montre l’utilité des Sukuk islamiques comme étant un instrument protéiforme de refinancement alternatif aux obligations, et pouvant répondre à tout type de demande. Mots clés : Les Sukuk islamiques, les obligations conventionnelles, le droit musulman des affaires. 7 INTRODUCTION Depuis 2008, l’avènement de la crise financière a fragilisé le système financier mondial, jusqu'à créer une crise économique. Cette conjoncture économique défavorable a détérioré tant des entreprises que des Etats. Le monde a découvert un dysfonctionnement économique et financier grave, par ailleurs, les « banques islamiques » ont été moins touchées par cette crise. Face à cette circonstance, la finance islamique - en tant que finance éthique - tente d’apporter une autre vision du commerce et de l’investissement en se basant principalement sur le principe de partage des pertes et des profits, la prohibition de l’intérêt et l’adossement de tout financement à des actifs réels. La finance islamique n’a pas cessé de proposer sur le marché Entre autres des produits beaucoup plus créatifs et innovants, par exemple, on trouve les Sukuk islamiques. Les Sukuk constituent dans l’industrie financière islamique des instruments phares apportant, d’une part, des alternatives fortement intéressantes en terme de rentabilité, et pouvant répondre à tous les agents économiques ayant des besoins de financement ou de liquidité, et d’autre part, ils apportent une solution de diversification aux investisseurs soucieux de trouver des produits financiers conformes à leurs attentes. L’inscription au Sukuk et son inclusion par les principaux fournisseurs d’indices ont rendu cet instrument important non seulement plus attrayant, mais aussi en tant que moteur privilégié du marché des capitaux de l’industrie. A l’échelle internationale, les émissions mondiales totales des Sukuk se sont élevées à 116,7 milliards de dollars américain en 2017, soit une augmentation impressionnante d'environ 32% en volume par rapport à l’année précédente. A son tour, le Maroc a procédé à une émission inaugurale des Sukuk souverains d’un milliard de dirhams en octobre de 2018, avec un taux de rendement espéré de 2.66 % amortissable sur 5 ans et qui a été souscrite par des banques participatives, des banques conventionnelles, des OPCFM, des compagnies d’assurances et autres, cette émission a été basée sur les Sukuk- Ijara1. Dans cette perspective les Sukuk constituent pour le Maroc un instrument financier inévitable, permettant de garder son autonomie financière, économique voire même politique. Ce mode de financement permet de mobiliser l’épargne inexploitée qui échappe du système 1 Bulletin officiel N° 6714, 24 –mouharrem 1440 (4 /10/2018) 8 classique, que ce soit des particuliers, des institutions ou des Etats, vers des investissements rentables et des activités économiques génératrices de revenus. Dans ce contexte, une question centrale qui se pose et s’impose est la suivante : Quels sont les points de convergence et les points de divergence entre les Sukuk islamiques et leurs homologues les obligations conventionnelles ? Pour traiter cette problématique, cet article s’articule autour de deux axes, le premier axe abordera le cadre conceptuel et l’état des lieux des Sukuk islamiques, quant au second axe, il sera dédié à une analyse comparative entre les Sukuk islamiques et les obligations. 9 I. UNE APPROCHE CONCEPTUELLE DES SUKUK ISLAMIQUES A. Définition des Sukuk islamiques Les Sukuk constituent un instrument de refinancement par excellence dans l’industrie financière islamique, un moyen phare de la gestion de liquidité des banques islamiques, ainsi qu’un outil de régulation pour l’Etat. Les Sukuk islamiques s’inscrit dans le cadre du droit musulman des affaires, ce dernier réglemente les transactions commerciales et financières entre les individus. Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous avons estimé indispensable de bien nous baser sur un certain nombre de concepts clés autour desquels s’articulera notre étude. 1. Définition des Sukuk de l’AAOIFI2 Selon l’organisation internationale d’audit et des normes comptables pour les institutions financières islamiques (AAOIFI), les Sukuk sont : « des certificats de valeur égale représentant des parts indivises de propriété d’actifs tangibles, d’usufruits ou de services ; ou la propriété d’actif d’un projet particulier ou d’une activité d’investissement spécifique. ». D’après cette définition, les sukuk islamiques constituent une part de propriété dans l’activité d’investissement à laquelle ont été émis. 2. Définition des Sukuk par Islamic financial services board Cet organisme de standardisation de l’industrie financière islamique basé au BAHREIN, a pour objectif d’édicter des normes standards internationales afin d’assurer la solidité et la stabilité de l’industrie des services financiers islamiques, quant à lui les Sukuk : « sont des certificats représentant un droit de propriété indivis d’actifs tangibles. ». 3. Définition des Sukuk en droit marocain : Le législateur marocain a considéré les Sukuk comme étant des valeurs mobilières. Celles- ci dans l’article 243 de la loi 17-95 sont émises par les sociétés anonymes. Ces titres financiers 2 (Accounting and Auditing Organization for Islamic Financial Institutions): L’organisation de comptabilité et d’audit pour les institutions financières islamiques est une organisation internationale autonome à but non lucratif. Créée le 26 février 1990 à Alger suite à l’accord et l’association des institutions financières islamiques, puis elle a été établie et officialisée le 26 mars 1991 au Bahreïn comme étant une organisation internationale indépendante. 10 sont définis par la présente loi comme étant des actions formant, le capital social, les certificats d’investissement et les obligations. Avec la promulgation de la loi n° 33-06, le législateur marocain a diversifié son offre en termes des titres financiers et ce dans l’article 7.1 les Sukuk sont définis comme étant « les certificats de Sukuk sont donc des titres représentant un droit de jouissance indivis de chaque porteur sur des actifs éligibles acquis ou devant être acquis ou des investissements réalisés ou devant être réalisés par l’émetteur de ces titres. »3. Les Sukuk sont des produits financiers adossés à un actif tangible à échéance fixe, le « Sakk » (singulier des Sukuk) confère un droit de propriété sur les actifs de l’émetteur, et son porteur reçoit une partie du profit attaché au rendement de l’actif sous-jacent. L’intérêt est remplacé dans ce cas par un profit prévu à l’avance à risque quasi nul. Cette forme d’obligation est similaire à l’Asset-Backed Securities (ABS), à la différence que les Sukuk ne versent pas d’intérêts mais des revenus corrélés aux actifs sous-jacents4. D’après ces trois définitions nous pouvons déduire que les Sukuk islamiques représentent des certificats à parts égales donnant droit à la copropriété d’actifs tangibles, et qui sont rattachés à l’économie réelle. Par contre les obligations conventionnelles qui représentent des titres de créances sur son émetteur, émis pour emprunter des fonds sur le marché financier, en contrepartie d’une rémunération à taux fixe. Sans savoir où vont être employés ces fonds. B. Les types d’émetteurs des Sukuk islamiques Les Sukuk peuvent être émis par les entreprises aussi bien que par les Etats, de façon générale les émetteurs des Sukuk islamiques se subdivisent en quatre grandes catégories d’émetteurs, nous allons les présenter comme suit : 1. Les Sukuk souverains Ce sont des titres pouvant être émis par l’Etat pour les personnes physiques ou morales n’ayant pas intérêt à se refinancer à travers les bons de trésor que l’Etat puisse émettre. 2. Les Sukuk corporates 3 Bulletin officiel N° 6184-28 Chaoual 1434(5/9/2013). 4Belmahfoud Imane: 'La Finance Islamique: Solution à La Crise?', Groupe Institut Supérieur de Commerce et administration des entreprises Centre de Casablanca Mémoire de Fin d’Étude Option: Finance, année universitaire: 2012/2013, P 19. 11 Ce sont des titres émis par les sociétés financières (les institutions participatives) ou non financières (les entreprises) dans le cadre de leurs politiques de refinancement du cycle d’investissement. 3. Les Sukuk quasi-souverains Ce sont des titres émis dans le cadre de partenariat public-privé. 4. Les Sukuk des institutions financières Ce sont des titres émis par des institutions financières à savoir les banques et les assurances, le graphique ci-après présente les émissions mondiales par type d’émetteur en 2018 libellés en millions de dollars Américain. Figure 1 : les émissions des Sukuk par type d’émetteur en 2018 Source : Elaboré par l’auteur sur la base de données des IIFM5 5 International Islamic Financial Market est Le marché financier international islamique (IIFM) : le marché financier international islamique, crée n 2002 à Bahreïn par les banques centrales de Bahreïn, du Brunei, de l’Indonésie, de la Malaisie, du Soudan, et de la banque islamique de développement 78% 11% 9% 2% Emissions des Sukuk par type d'emetteur en 2018 Souverains Quasi souverains Entreprises Institutions financières uploads/Finance/ 1-pb 8 .pdf
Documents similaires
-
12
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Nov 08, 2022
- Catégorie Business / Finance
- Langue French
- Taille du fichier 0.5781MB