C O M P T E - R E N D U café politique DETTE ET FISCALITÉ Jeudi 26 avril 2012 L
C O M P T E - R E N D U café politique DETTE ET FISCALITÉ Jeudi 26 avril 2012 Le Truskel 12, rue Feydeau 75002 Paris organisatrice rédactrice : Pauline Gavrilov Ingénieur-conseil, militante PS Christiane Taubira députée de Guyane, représentante particulière auprès de François Hollande Pascal de Lima économiste en chef, enseignant à l’I.E.P Paris Thomas Piketty directeur de recherche à l’EHESS, professeur d’économie à l’Ecole d’économie de Paris 2 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é Le café politique s’est déroulé en présence d’une centaine de personnes dont de nombreux professionnels de la finance et de la banque, de fonctionnaires du ministère des Finances, de représentants syndicaux (SNUI-Sud Trésor) de la Direction générale des finances publiques (DGFIP), de militants du Parti socialiste, de sympathisants et d’habitants notamment de la 1ère circonscription de Paris. INTRODUCTION Pauline Gavrilov a énoncé le contexte et les enjeux du débat liés à l’assainissement des finances publiques : faire progresser la réflexion sur les 2 problématiques de la dette et de la fiscalité à partir des résultats de recherches scientifiques, afin de permettre l’élaboration d’un dispositif juste, équitable et efficace qui permette de participer au redressement économique de la France dans le cadre du programme pour le changement de François Hollande en 2012. Les intervenants ont été présentés avec leur statut, leur ordre de passage et leur sujet d’étude 1/Pascal de Lima sur la dette, 2/Thomas Piketty sur l’imposition et 3/Christiane Taubira sur la cohérence politique des mesures et des idées. P. Gavrilov a précisé que le dialogue avec la salle serait privilégié et que par conséquent chaque intervenant disposerait de 10 minutes pour exposer son sujet. Ensuite, le dialogue pourrait s’engager avec la salle. 3 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é 1. QUEL TRAITEMENT ÉQUITABLE DE LA DETTE ? Pascal de Lima Pascal de Lima a construit son exposé selon 2 axes principaux 1/ explication des mécanismes de création de la dette publique et 2/ mises en évidence des solutions justes et équitables. 1.1 CRÉATION DU MÉCANISME DE LA DETTE PUBLIQUE P. de Lima a introduit son analyse du mécanisme de création de la dette en précisant le montant colossal de la dette qui est de 1 700 milliards euros, soit 85,3 % du PIB (insee – 3ème trimestre 2011) et il l’a comparé en ordre de grandeur avec les 5 milliards de pertes accumulés par le trader Jérôme Kerviel pour le compte de la Société générale en 2008. Il a expliqué que le montant de la dette s’accroissait dans le présent contexte, car la parité fixe entre le franc et l’euro a mis un terme aux spéculations sur les taux de change ; en revanche, elle n’a pas mis fin aux spéculations sur les taux d’intérêts, bien au contraire. Or, les taux d’intérêt étant très supérieurs au taux de croissance, le montant des intérêts payés aux institutionnels - banquiers et assureurs- qui prêtent de l’argent à l’Etat augmentent de façon exponentielle. D’où la nécessité de favoriser la croissance, notamment pour résorber la dette. Il a également montré que selon les chiffres de la Cour des comptes, la question de la dette était un problème structurel lié aux déficits publics récurrents et non directement conjoncturel (engendré par la crise financière actuelle) et c’est la raison pour la laquelle il fallait réfléchir à l’élaboration et à la mise en œuvre de mécanismes innovants d’évaluation 4 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é des dépenses publiques qui prennent en considération les effets de feed- back afin d’ajuster les politiques publiques dans le temps et d’améliorer ainsi leur l’efficacité, notamment budgétaire. 1.2 MISE EN ÉVIDENCE DE SOLUTIONS JUSTES ET PÉRENNES POUR RÉSOUDRE LA DETTE P. de Lima a ici introduit la nécessité de repenser la place et la fonction de la monnaie dans notre société. Dans le prolongement des travaux de John Rawls et de sa théorie de la justice (1971), P. de Lima a souligné le fait que la monnaie n’était qu’une création fictive et que l’argent pouvait se retourner contre l’homme si son rôle n’était pas défini précisément. La gestion de la monnaie doit respecter le principe d’égalité des chances, car elle est un bien public et elle est liée à la notion de maximisation du bien-être ou du bonheur social. L’émission de la monnaie par le crédit bancaire introduit en ce sens un biais, puisque les banques – organismes privés créent un bien public de façon privée. Le questionnement de la nationalisation des banques prend ici tout son sens. P. de Lima a mis en évidence le caractère européen de la dette du fait de l’intégration financière et il a énoncé deux méthodes pour la maîtriser: soit la diversification des actifs financiers, soit au contraire leur spécialisation. La spécialisation est plus risquée, car elle fait peser l’entier risque sur l’investisseur, en cas de chute des cours. La diversification autorise la mutualisation des titres investis et donc la répartition du risque ; toutefois elle ne protège pas du risque de contagion. P. de Lima a évoqué la sortie de l’Allemagne de la zone euro. Cette solution étudiée par de nombreux économistes, présenterait l’avantage 5 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é de rompre avec la parité fixe entre le deutsche mark et l’euro et donc de pouvoir dévaluer l’euro tout en maintenant un mark fort, ce qui permettrait aux Etats du Sud de retrouver une certaine marge d’action politique. Une dévaluation permettrait de limiter le poids de la dette, de même que l’inflation pourrait rééquilibrer les chances entre les fortunés et les non possédants. La dévaluation de l’euro permettait en outre une relance des exportations. Toutefois, cette solution n’est pas sans risque, car elle pourrait mettre hors jeu les pays pauvres économiquement et présenterait un risque de démantèlement du projet européen, fondé historiquement sur le couple franco-allemand. P. de Lima a terminé son exposé en présentant l’une des solutions équitables pour soutenir la croissance qui serait le soutien à la recherche et à l’innovation, par exemple l’attribution du Crédit d’impôt à la recherche (CIR) aux PME et non plus exclusivement aux grandes entreprises. 2. MISE EN ŒUVRE D’UN MODÈLE D’IMPOSITION JUSTE ET ÉQUITABLE Thomas Piketty Thomas Piketty a introduit son exposé en rappelant que la dette représentait 80% d’une année de PIB, alors que les patrimoines équivalent à 6 années de PIB. Les ressources existent ; il faut par conséquent réussir à les mobiliser. Un système fiscal juste est donc indispensable. T. Piketty a contesté le mythe d’une dette détenue par l’étranger, en rappelant dans le même temps que les français possèdent autant de patrimoine à l’étranger que les étrangers ont de patrimoine en France. 6 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é T. Piketty a caractérisé le modèle d’imposition français à la fois par son injustice, son inefficacité et sa trop grande complexité, d’où la nécessité de repenser de façon globale et structurelle l’impôt sur le revenu en France. 2.1 NOUVEAU MODÈLE D’IMPOSITION – RÉAPPROPRIATION PAR LE CITOYEN DU SYSTÈME D’IMPOSITION T. Piketty a expliqué que le système d’imposition français était injuste car il frappait en premier lieu les classes populaires et les classes moyennes, alors qu’il était plus favorable aux classes aisées. Autrement dit, dès le prélèvement des différents impôts - impôt sur le revenu : IRPP et CSG / impôt sur le capital : ISF, TS / TVA) il existe une inégalité, puisque seul l’impôt sur le revenu est progressif et que même dans ce cas, son taux n’est pas calculé de façon suffisamment progressive. Le taux effectif d’imposition diminue en effet au fur et à mesure que le revenu augmente. Par conséquent, l’imposition n’est pas suffisamment équitable en France. A cela s’ajoute le fait que les revenus du travail sont plus taxés que les revenus du capital dans notre société, ce qui confère au système actuel un caractère éminemment « régressif » qui s’oppose à l’esprit « progressif » postulé dans la conception de notre système d’imposition. L’épanouissement des talents et de la création est dès lors fortement refréné, ce qui ne profite pas à la relance de la croissance. T. Piketty a indiqué qu’il était nécessaire de mettre en œuvre une réforme structurelle du système d’imposition français si l’on souhaitait le rendre plus juste et plus efficace. Plus juste en ce sens qu’il serait plus redistributif et qu’il permettrait ainsi une meilleure cohésion sociale et plus efficace en ce sens qu’il favoriserait la croissance au détriment de la « rente ». 7 café politique • d e t t e e t f i s c a l i t é Il a notamment mis l’accent sur la nécessité de lutter contre la trop grande complexité du uploads/Finance/ cafe-politique-dette-et-fiscalite.pdf
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- Publié le Mai 15, 2021
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