Annuaire français de droit international Les paiements illicites dans le commer

Annuaire français de droit international Les paiements illicites dans le commerce international et les actions entreprises pour les combattre Mme Catherine Yannaca-Small Citer ce document / Cite this document : Yannaca-Small Catherine. Les paiements illicites dans le commerce international et les actions entreprises pour les combattre. In: Annuaire français de droit international, volume 40, 1994. pp. 792-803; doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1994.3221 https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1994_num_40_1_3221 Fichier pdf généré le 10/04/2018 ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL XL - 1994 - Editions du CNRS, Paris LES PAIEMENTS ILLICITES DANS LE COMMERCE INTERNATIONAL ET LES ACTIONS ENTREPRISES POUR LES COMBATTRE Catherine YANNACA-SMALL INTRODUCTION Les pratiques de corruption soulèvent de très graves problèmes sur les plans politique, économique, social, juridique et éthique. Elles ne sont évidemment pas d'origine récente; ce phénomène survit depuis des siècles et on le rencontre tant au niveau national qu'international. En effet, la conclusion des transactions nationales et internationales et surtout des marchés publics, dépend trop souvent du versement d'importantes sommes d'argent ainsi que d'autres faveurs envers des personnes exerçant une influence déterminante sur les signataires des marchés (hommes politiques, agents publics et plus généralement des personnes ayant un pouvoir public). En outre, l'expansion et la globalisation de l'économie mondiale ont donné de nouvelles dimensions au problème. Par ailleurs, la déréglementation des marchés financiers, la quasi-élimination des contrôles des changes et l'informatisation des systèmes de paiements, ont rendu encore plus complexe la lutte contre ce phénomène. Indépendamment de toute considération morale, les pratiques de corruption entravent le développement du commerce international, en faussant la concurrence, en majorant le coût des transactions et en restreignant le fonctionnement des marchés libres et ouverts. D'autre part, leurs effets dévastateurs sur la bonne gestion des affaires publiques sont bien connus ; elles minent la base politique des gouvernements en détruisant la confiance publique dans les institutions publiques et en réduisant l'efficacité administrative et la performance économique. Elles sont particulièrement néfastes pour les pays en développement lors qu'elles constituent un détournement important de l'aide au développement. En plus, dans les pays en développement, la corruption peut être la cause d'une mauvaise allocation de ressources, des fonds initialement destinés à des écoles ou à des hôpitaux étant détournés par des responsables publics qui reçoivent des paiements illicites et canalisés vers des projets de moindre importance. (*) Catherine Yannaca-Small, administrateur à la Division des Investissements internationaux, mouvements de capitaux et de services, Direction des Affaires financières, fiscales et des entreprises, Organisation de coopération et de développement économique, OCDE. Ancien élève de l'Ecole Nationale d'Administration (Cycle international). Avocat au Barreau d'Athènes, Grèce ; admise à l'ordre des avocats de Paris. Les idées représentées dans cet article sont celles de l'auteur et n'engagent pas l'OCDE. L'auteur tient à remercier M. Christian Schricke, Jurisconsulte de l'OCDE, qui a généreusement offert ses commentaires sur cet article. LES PAIEMENTS ILLICITES DANS LE COMMERCE INTERNATIONAL 793 Dans ce processus, aucun pays, qu'il soit développé ou en développement, ne peut prétendre être à l'abri du phénomène. Le temps où on parlait de corruption en montrant du doigt les pays en développement comme les receveurs principaux des paiements illicites, est résolument passé. Aujourd'hui la corruption est reconnue comme un phénomène global ; on la rencontre dans un grand nombre des principaux pays industrialisés, bien que la richesse et les traditions politiques y limitent, jusqu'à un certain point, les pertes économiques et les dommages sociaux qu'elle peut occasionner (1). L'opinion publique dans la plupart des pays est restée longtemps indifférente à la corruption dans le cadre du commerce extérieur. Ceci est reflété dans le traitement qui est réservé à cette conduite par les lois et les règlements. Ainsi, bien que depuis longtemps, pratiquement tous les pays aient un corpus de règles et de pratiques destinées à lutter contre la corruption et les paiements illicites, le droit national de la plupart des pays ne s'applique qu'aux actes commis dans le pays en cause ou à la corruption des agents publics nationaux et ne vise expressément ni les actes commis à l'étranger ni la corruption des agents publics étrangers. Même dans le cas où les lois sont rédigées en termes suffisamment généraux pour être applicables à la corruption des agents publics étrangers, ou dans le cas où la jurisprudence permet leur application extraterritoriale dans certaines circonstances, ces possibilités sont restées non utilisées. Dans les discussions qui ont eu lieu jusqu'à tout récemment sur cette question au niveau international, la raison principale avancée pour justifier le champ restreint de compétence dans la matière, mises à part les difficultés d'ordre pratique, parait être le sentiment que le rôle du droit national à l'égard de la corruption se limite à la protection de l'intégrité des institutions publiques nationales. Ainsi, la lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans le cadre des transactions commerciales internationales relevait de la seule et unique responsabilité des pays de ces agents publics et l'action des pays des entreprises qui offraient les paiements était considérée comme de l'ingérence dans les affaires de ces autres pays. La législation des Etats-Unis constitue à cet égard une exception. Adoptée après le scandale provoqué par les affaires de pots de vins versés par la société Lockheed pour acquérir les marchés aéronautiques à l'étranger, la loi américaine intitulée «Foreign Corrupt Practices Act» (FCPA), promulguée le 19 décembre 1977 et modifiée par YOmnibus Trade Act de 1988, incrimine la corruption (tentée ou consommée) des agents publics étrangers dès lors que l'infraction a été commise par une entreprise constituée aux EtatsUnis ou y ayant son principal établissement. La FCPA peut également couvrir les sociétés étrangères qui ont émis des titres négociés sur les places boursières américaines. Pour pallier cette carence des législations nationales en matière de paiements illicites, la communauté internationale, consciente des dangers qui en découlent, s'est saisie de ce problème au sein de diverses instances internationales. Dans le passé, les Nations Unies, l'OCDE, la Chambre de Commerce Internationale, se sont penchées sur les moyens de lutter efficacement contres les paiements illicites, avec des résultats très variables. Aujourd'hui, des efforts nouveaux ont été entrepris dans le cadre de l'OCDE et de la Chambre de Commerce Internationale et pour la première fois dans le cadre du Conseil de l'Europe. (1) Symposium sur la corruption et la bonne gestion des affaires publiques, 13-14 mars 1995, Paris, OCDE. Discours d'ouverture de Jean-Claude Paye, Secrétaire général de l'OCDE. 794 LES PAIEMENTS ILLICITES DANS LE COMMERCE INTERNATIONAL I. - EFFORTS DÉPLOYÉS DANS LE PASSÉ CONTRE LA CORRUPTION INTERNATIONALE A. Nations Unies (2) a) Historique L'Assemblée générale a adopté le 15 décembre 1975, par consensus, une résolution 3514 (XXX) intitulée «Mesures contres les actes de corruption commis par les sociétés transnationales et autres, leurs intermédiaires et d'autres pratiques en cause», par laquelle elle a condamné tous les actes de corruption commis en violation des lois et réglementations des pays d'accueil. Cette résolution a réaffirmé le droit pour tout Etat de légiférer, d'enquêter et de prendre toutes mesures juridiques appropriées, en conformité avec ses lois et réglementations, à l'encontre des entreprises et autres parties impliquées dans de tels actes de corruption. En outre, l'Assemblée générale a invité le Conseil économique et social à charger la Commission des sociétés transnationales d'inscrire à son programme de travail la question des pratiques de corruption commises par les sociétés transnationales et de formuler des recommandations sur les moyens qui permettraient de prévenir efficacement ces pratiques. En application de la résolution de l'Assemblée générale 3514 (XXX), la Commission des sociétés transnationales a examiné cette question lors de sa deuxième session, qui s'est tenue à Lima en 1976. La Commission a pris note de la proposition soumise par le Gouvernement des Etats-Unis en vue de l'élaboration d'un accord international et d'un programme d'action et elle a décidé de transmettre cette proposition, pour discussion, au Conseil économique et social. Lors de sa 61e session, le Conseil économique et social a examiné cette question et a décidé, par sa résolution 2041 (LXI) du 5 août : «... de créer un groupe de travail intergouvernemental spécial chargé de procéder à un examen du problème des pratiques de corruption et en particulier des actes de corruption commis dans le cadre de transactions commerciales internationales par des sociétés transnationales et autres, leurs intermédiaires et autres parties en cause et d'étudier en détail la portée et le contenu d'un accord international visant à prévenir et éliminer les paiements illicites, sous quelque forme que ce soit, à l'occasion des transactions commerciales internationales. » Le groupe de travail intergouvernemental spécial a tenu sa première session en novembre 1976. Il a fait place à un « Comité spécial sur les paiements illicites », qui a tenu sa dernière session en mai 1979. Durant ces trois années, un projet d'accord a été mis au point par le Comité. A la demande des Etats-Unis, des consultations ont eu lieu à Paris entre les pays membres de l'OCDE en juin 1978 en vue d'harmoniser la (2) « Les pratiques de corruption et plus particulièrement les paiements illicites dans les transactions commerciales internationales : concepts et sujets relatifs à la rédaction d'un uploads/Finance/ droit-fiscal-paiement-illicite-dans-le-ci.pdf

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  • Publié le Apv 17, 2022
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