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Votre document sur labase-lextenso.fr - 28/07/2021 22:59 Le traitement de la dette sociale en période de crise Issu de Revue française de finances publiques - n°154 - page 237 Date de parution : 01/05/2021 Id : RFFP2021-154-021 Réf : RFFP mai 2021, p. 237 Auteur : Par Anne-Claire Dufour*, * Maîtresse de conférences en Droit Public, IPAG de l'Université de Nantes, Droit et Changement Social (UMR 6297). RÉSUMÉ Dotée d’une autonomie de gestion, de ressources affectées et d’instruments financiers variés, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) créée en 1996 vise à alléger la trésorerie des régimes de Sécurité sociale et à éteindre, dans un délai raisonnable, la dette qui lui est confiée. En période de crise, elle apparaît comme un outil opportun, justifiant que sa durée de vie soit prolongée. Having a management autonomy, allocated resources and various financial instruments, the Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES ie social debt amortization fund) created in 1996, aims to mitigate the funds of the social security schemes and extinguish the debt it has been entrusted with within a reasonable period of time. In a crisis period it turns out to be an appropriate tool justifying its lifetime to be extended. Dès leurs premiers pas, les régimes de Sécurité sociale ont été confrontés à des difficultés financières1, dont la presse et les débats publics n’ont ensuite cessé de se saisir2. À partir des années 1970, la progression des ressources de la Sécurité sociale essentiellement assises sur la masse salariale n’a plus correspondu au rythme de croissance des dépenses assumées en matière de santé et de pensions. Les Gouvernements successifs ont cherché à résorber le déficit du régime général tantôt en augmentant les recettes (hausse des cotisations ou affectation de ressources fiscales) tantôt en limitant la progression des dépenses. Les travaux de la Commission des comptes de la Sécurité sociale créée en 19793, ont permis d’appréhender la situation financière de la Sécurité sociale et de révéler la permanence du déséquilibre du régime général. Si les années 2000 à 2002 ont été marquées par des soldes légèrement excédentaires, une nouvelle détérioration des finances sociales est intervenue à partir des années 2003 conduisant notamment à une réforme de l’assurance maladie. Depuis 2002, la Sécurité sociale a toujours été en déficit, les recettes ne suffisant pas à couvrir les dépenses. Proche de 10 Mds€ sur la période 2003-2008, le déficit s’est très nettement creusé en 2009 (29,6 Mds€) sous l’effet de la crise économique. À compter de 2011, la situation financière des régimes de base et du FSV s’est progressivement améliorée si bien qu’en 2018, le déficit s’est élevé à 1,4 Md€ et seuls la branche maladie et le FSV étaient encore déficitaires. La situation s’est dégradée en 2019 (– 5,5 Mds€) notamment du fait des mesures d’urgence économiques et sociales adoptées en décembre 2018 en réponse au mouvement des « Gilets jaunes ». Pour 2020, la loi de financement de la Sécurité prévoyait un déficit de 5,9 Mds€ principalement imputable à la branche maladie et à la branche vieillesse4. Ces prévisions sont évidemment devenues obsolètes avec la pandémie de la Covid-19. Pour faire face à la crise sanitaire et économique, les pouvoirs publics ont pris des mesures d’ampleur dont les conséquences financières sont encore difficilement chiffrables pour la protection sociale5. La mise à l’arrêt d’une grande partie de l’économie a entraîné des pertes de recettes considérables pour la Sécurité sociale tandis que les dépenses prévues dans le champ de l’Objectif national d’Assurance maladie (ONDAM) risquent un dépassement sans commune mesure avec ceux jusqu’ici observés6. Entendu le 22 avril 2020 par la commission des affaires sociales du Sénat, le ministre des Comptes publics indiquait que, selon des prévisions encore provisoires et optimistes, le déficit de la Sécurité sociale devrait atteindre 41 Mds€ en 2020. Quelques semaines plus tard, il annonçait un déficit de 52,2 Mds€7, finalement réévalué à 44,4 Mds€ dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021. Le financement de ce déficit et des déficits attendus pour les prochaines années nécessite le recours à l’emprunt et est à l’origine d’une nouvelle dette pour les régimes de Sécurité sociale. Cette dette sociale ne constitue qu’une partie de ce qui est parfois désigné comme la « dette Covid » laquelle regroupe non seulement la dette de la Sécurité sociale mais aussi celle de l’UNEDIC, celle des collectivités territoriales et celle de l’État8. Le traitement de la dette sociale, original au sein de ce qui est actuellement pratiqué pour le reste de la dette publique, est plus classique si on l’observe à l’aune de ce qui a déjà été réalisé dans le prolongement de la crise économique de 2008-2009. En adoptant le 7 août 2020 une loi organique9 et une loi ordinaire10, la majorité présidentielle a considéré que la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) était la structure appropriée pour porter la dette sociale née du Covid (I) et a donc admis de prolonger à nouveau sa durée de vie (II). I. – LA CONFIRMATION DE LA CADES COMME INSTRUMENT PRIVILÉGIÉ DE TRAITEMENT DE LA DETTE SOCIALE La prise en charge des déficits de la Sécurité sociale a d’abord pesé uniquement sur les régimes de Sécurité sociale (§1) avant d’être en majeure partie transférée à un organisme dédié à la gestion de la dette : la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) (§2). Lors de la crise sanitaire et économique liée au Covid, à l’instar de ce qui avait eu lieu pendant la crise de 2008-2009, la question du transfert de la dette à la CADES s’est posée. Une fois tranché en faveur d’un tel transfert, de nouvelles recettes ont dû être affectées à la CADES (§3). §1. La dette sociale portée par l’ACOSS Malgré les reprises de dette par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) (cf. infra), une partie de la dette sociale (23 Mds€ en 201811) reste portée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) qui, depuis 196712, « assure la gestion commune des besoins de trésorerie des branches du régime général13 ». Pour faire face aux décalages ponctuels entre l’encaissement des recettes et l’exécution des dépenses, l’ACOSS s’est, dans un premier temps, tournée vers la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), auprès de laquelle elle dispose d’un compte, et qui lui accorde des avances. Après le premier choc pétrolier, les difficultés de trésorerie ont rendu nécessaire une convention passée le 18 juin 1980 entre l’ACOSS et la Caisse des Dépôts pour organiser le système d’avances consenties par la CDC : « Les avances de trésorerie donnent lieu à des intérêts débiteurs, mais à l’inverse il est normal que la CDC verse à l’ACOSS des intérêts créditeurs lorsque la trésorerie est excédentaire14 ». En décembre 1982, l’ACOSS a dû recourir à des avances du Trésor, qui lui a consenti des avances à très court terme au moyen d’un compte spécial, situation qui avait déjà été utilisée dans les années 195015. Dans les années 1990, les difficultés financières de la Sécurité sociale ont imposé à l’ACOSS d’emprunter des sommes très élevés auprès de la CDC. Ainsi, en 1993, l’ACOSS a été autorisée à souscrire auprès de la Caisse des dépôts et consignations un emprunt de 110 MdsF, dont la charge a été transférée au budget de l’État16. Fin 1995, l’ACOSS a eu recours à trois prêts de la Caisse des dépôts et consignations d’un montant total de 137 milliards de francs, qui ont permis un rétablissement précaire de sa trésorerie. Les prêts consentis à l’ACOSS font peser sur cette dernière d’importants frais financiers, plus de 8 milliards de francs d’intérêts pour l’année 199617. En 1996, tandis que la dette sociale est transférée à la CADES, le législateur organique prévoit que la possibilité pour l’ACOSS de recourir à des ressources non permanentes pour couvrir ses besoins de trésorerie, est plafonnée par un montant fixé annuellement en loi de financement de la Sécurité sociale. La loi organique relative aux lois de financement de la Sécurité sociale (LOLFSS) du 2 août 2005 a confirmé cette possibilité de recourir à des ressources non permanentes puisque la loi de financement « arrête la liste des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement habilités à recourir à des ressources non permanentes, ainsi que les limites dans lesquelles leurs besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources18 ». Si la formulation suggère que les ressources non permanentes visent seulement à couvrir des besoins de trésorerie, les plafonds d’emprunt, fixés à des niveaux très élevés et non censurés par le juge constitutionnel, autorisent en pratique l’ACOSS à financer l’endettement. Le premier Président de la Cour des comptes Philippe Séguin, observant la situation de la trésorerie du régime général en 2007, s’alarmait déjà : « Ces autorisations d’emprunt n’ont plus rien à voir avec des ajustements de trésorerie infra-annuels, ce qui est pourtant leur raison d’être : elles servent à combler des déficits structurels croissants et génèrent une dépense d’intérêts également croissante sur laquelle il faut appeler uploads/Finance/ dufour-le-traitement-de-la-dette-sociale-en-periode-de-crise.pdf
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- Publié le Jul 01, 2022
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