9 Chapitre 1 Le cadre européen des finances publiques Dans le cadre de l’Union
9 Chapitre 1 Le cadre européen des finances publiques Dans le cadre de l’Union économique et monétaire européenne, l’article 119 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) impose « le respect des principes directeurs suivants : prix stables, finances publiques et conditions monétaires saines et balance des paiements stable » afin de favoriser la convergence des économies. Depuis le traité de Maastricht en 1992, deux critères encadrent les finances publiques. Le montant total de la dette publique d’un pays ne doit pas dépasser 60 points de PIB et le déficit budgétaire public ne doit pas être supérieur à 3 points de PIB. Ces dispositifs visaient à prévenir les déficits publics excessifs avant l’adoption de la monnaie unique en 2002, en garantissant que la situation financière des États de l’Union européenne soit homogène dans le cadre d’une certaine discipline budgétaire. La recherche de soutenabilité des finances publiques est une préoccupation relati- vement récente. Elle s’explique par la hausse de l’endettement public et son impact dans l’économie, du fait du départ des investisseurs par crainte de l’insolvabilité du pays et de l’amplification du déficit par le paiement d’intérêts prohibitifs. La crise de la dette publique grecque, débutée en 2008, avec un risque de propagation à l’Irlande, au Portugal et à l’Espagne en 2010 a questionné la pertinence des critères de conver- gence européenne. I. Une perte de souveraineté financière et budgétaire ? Du fait de l’encadrement européen, l’action de l’Union européenne est parfois perçue comme une remise en cause de la souveraineté budgétaire d’un pays. Les débats récurrents sur l’objectivité du seuil de déficit de 3 points de PIB en sont une illustra- tion. Ainsi, lors du renforcement du contrôle de la Commission européenne durant la crise de la dette, une proposition de loi constitutionnelle garantissant la souverai- neté du peuple en matière budgétaire a été enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale le 20 octobre 2010. La souveraineté financière est définie comme une composante de la souveraineté des peuples. Il s’agit du droit des représentants des citoyens à établir librement le budget de l’État. Depuis l’influence du courant des Lumières et avec la Révolution française, le vote des contributions publiques et l’autorisation d’ouvrir des crédits sont inhérents 10 aux systèmes démocratiques. L’article XIV de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen proclame d’ailleurs que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée ». La souveraineté budgétaire apparaît ainsi comme un principe constitutif de la République, illustrant l’indépendance du pouvoir législatif. Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union écono- mique et monétaire a relancé le débat en 2012 sur la perte de souveraineté budgé- taire. Le Conseil constitutionnel a néanmoins estimé que les dispositions du traité ne procédaient pas à des transferts de compétences en matière de politique économique ou budgétaire et ne portaient pas atteinte aux conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale (décision n° 2012-653 DC du 9 août 2012). La France participe aux instances européennes de décisions et a approuvé les traités ; il n’y a donc pas de confiscation de la souveraineté par l’Union européenne. L’appréhension des citoyens à l’égard d’une perte des pouvoirs nationaux témoignerait surtout des contraintes et des incertitudes entraînées par la mondialisation de l’éco- nomie qui impose un multilatéralisme entre des États interdépendants, tant au niveau européen que dans un nouvel ordre mondial. II. Une gouvernance des finances publiques renouvelée ? Pour évaluer la dette et le déficit public, les comptes des différents organismes doivent être consolidés dans le cadre d’une comptabilité nationale. L’État a donc la responsabilité d’assurer un pilotage des finances publiques alors que les diffé- rents organismes, regroupant les collectivités territoriales ou les administrations de la Sécurité sociale, disposent de personnalités morales propres et d’une autonomie. Dans ce contexte, des instances ont été mises en place pour mieux appréhender la situation financière et les voies d’amélioration possibles avec l’ensemble des acteurs. La définition d’une trajectoire financière commune, notamment dans le cadre du débat d’orientation des finances publiques au Parlement, n’est en effet pas suffisant pour responsabiliser chacun. De 2006 à 2008, une conférence nationale des finances publiques a regroupé l’État, les collectivités territoriales et la Sécurité sociale. Elle visait à dégager les voies d’une maîtrise des dépenses publiques et de la dette. Une conférence sur le déficit, organisée à l’initiative du Président de la République en 2010, a établi un diagnostic partagé sur la situation des finances publiques. La même année, le rapport de Paul Champsaur et de Jean-Philippe Cotis mettait en exergue la dégradation des comptes publics depuis 30 ans et les risques qui en découlaient. Une dette trop élevée réduirait l’efficacité de la politique économique, les acteurs écono- miques préférant épargner, car ils anticiperaient une hausse de la fiscalité, au lieu de consommer. 11 Une conférence des finances publiques, regroupant toutes les administrations publiques, a été créée en 2014 mais a été supprimée, sans jamais avoir été convoquée. En 2017, les états généraux des comptes de la Nation ont associé les parlemen- taires, les élus locaux mais aussi les partenaires sociaux, afin de garantir le partage de la responsabilité en matière de trajectoire de finances publiques. Des conférences nationales des territoires ont réuni les collectivités territoriales, sous l’égide du Premier ministre, à la stratégie de redressement des comptes publics. Dans son rapport sur la « stratégie de finances publiques pour la sortie de crise » (2021), la Cour des comptes a préconisé d’organiser un débat national associant toutes les parties prenantes sur les enjeux de soutenabilité en amont du vote des lois de programmation des finances publiques. Une instance pérenne de concertation, constituée de représentants des différentes administrations serait associée à la maîtrise des finances publiques et fixerait les règles de partage des impôts et de garantie de ressources entre administrations. Pour en savoir plus • www.consilium.europa.eu (dispositifs européens sur la discipline budgétaire). • Loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Fiches relatives au thème 1. Un approfondissement du pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne 2. Une trajectoire fondée sur le solde structurel 3. Le Haut conseil des finances publiques, garant de la trajectoire budgétaire 4. Un objectif d’équilibre des comptes publics face à des déficits pérennisés 5. Un nouveau pilotage des finances publiques ? 12 Fiche 1 Un approfondissement du pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne Le pacte de stabilité et de croissance (PSC) a été adopté en 1997, lors du Conseil européen d’Amsterdam. Il met en œuvre le suivi de la discipline budgétaire avec une cible de dette publique d’au maximum 60 points de PIB et de déficit budgétaire public d’au maximum 3 points de PIB. A. Les volets préventif et correctif, socles de la discipline budgétaire : 1997-2007 1) Le pacte de stabilité et de croissance a mis en place un volet préventif du dérapage budgétaire. Lors du semestre européen, les pays membres de l’Union européenne présentent en mars ou en avril des programmes annuels de stabilité (pour les États de la zone euro) ou de convergence (pour les autres États). Ils indiquent les objectifs à moyen terme (OMT) envisagés pour atteindre une situation budgétaire saine, c’est- à-dire un solde structurel à l’équilibre. Des programmes nationaux de réformes définissent les axes économiques à mettre en œuvre. La Commission européenne évalue ces programmes et peut adresser des recommandations aux États membres. Un système d’alerte permet également au Conseil de l’Union européenne de formuler des pistes d’ajustement. Le Parlement européen en est alors informé. 2) Le volet correctif repose sur la procédure de déficit excessif (PDE) lorsque le solde budgétaire des administrations publiques d’un État membre dépasse les 3 points de PIB. Le Conseil peut déclencher la procédure sur la base d’une recommandation de la Commission européenne. L’État concerné dispose d’un délai de six mois pour mettre en œuvre de premières mesures de redressement. Pour les pays de la zone euro, des sanctions financières peuvent être imposées par le Conseil à la majorité quali- fiée : le dépôt non rémunéré effectué auprès de la Banque centrale européenne (BCE) peut être transformé en amende et, dans ce cas, les montants déposés ne seront pas restitués. La sanction n’a jamais été utilisée. 3) En 2005, le pacte a été assoupli. Les sanctions financières ayant un effet en partie pro-cyclique, une plus forte flexibilité budgétaire a été appliquée durant les périodes de ralentissement de la croissance. Les circonstances exceptionnelles et les réformes structurelles engagées sont davantage prises en compte pour examiner la situation de l’État. Ce dernier échappe à la sanction s’il se trouve dans une situation de récession, c’est-à-dire avec une diminution du PIB plus de deux trimestres succes- sifs. Enfin, le délai pour réduire le déficit est rallongé jusqu’à deux ans. 13 4) En 2019, l’Espagne est le dernier pays à uploads/Finance/ extrait-7.pdf
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- Publié le Fev 11, 2022
- Catégorie Business / Finance
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