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FACEBOOK LaRotonde TWITTER @LaRotonde WEB www.larotonde.ca Volume LXXXIII N 05 YOUTUBE La RotondeVideo - L e j o u r n a l i n d é p e n d a n t d e l ’ U n i v e r s i t é d ’ O t t a w a - - Match Panda - À un poil de la victoire Il n’était même pas 10 h, samedi der­ nier, et l’alcool ruisselait déjà dans les rues de la Côte de sable. Les fêtards, fièrement vêtus de gris et de grenat, défilaient et se pavanaient en pe­ tites foules. Échanges conviviaux et hourras festifs résonnaient d’une rue à l’autre. Mais qu’est-ce qui était au cœur de toutes ces célébrations? Si vous avez répondu le match Panda, où s’affrontent l’Université d’Ottawa (U d’O) et Carleton sur le terrain de football, vous n’avez certainement pas tort. Toutefois, est-ce vraiment le match ou la célébration elle-même qui est en premier plan? Une rivalité mise en scène Dès ses origines, le Match Panda n’était pas la manifestation d’une rivalité spor­ tive de longue date. Plutôt, l’évènement cherchait à édifier une rivalité entre les deux universités d’Ottawa. Les rivalités sportives sont souvent des manifestations de conflits plus pro­ fonds. Par exemple, prenons les anciens Nordiques de Québec et les Canadiens de Montréal. Alors que les Nordiques de Marcel Aubut se sont alliés au na­ tionalisme naissant de Lévesque, les Canadiens de Serge Savard appuyaient ouvertement le fédéralisme de Trudeau. Le choix était politique et les couleurs de chandails étaient symboliques. À l’époque des premières éditions du Match Panda, Carleton et l’U d’O avaient tout ce qu’il fallait pour entrer dans cette tradition. L’U d’O, alors une universi­ té pontificale majoritairement franco­ phone et administrée par des Oblats, était reconnue pour ses penchants éli­ tistes. En revanche Carleton, en plus d’être une université anglophone à ten­ dances populistes, était la première uni­ Le Panda Un regard anthropologique COMITÉ ÉDITORAL www.larotonde.ca éditorial section versité non confessionnelle en Ontario. Les différences étaient palpables. Toutefois, la situation moderne est tout le contraire. La concurrence entre les universités est une mise en scène; c’est un jeu que l’on joue pour se faire plaisir. On mémorise des chants et on encou­ rage notre équipe, mais l’institution que l’on fréquente ne joue qu’un rôle mini­ mal dans notre sentiment identitaire. Fêtes civiques et grands évène­ ments de divertissement Les fêtes civiques, nées de la philoso­ phie des Lumières, devaient rassem­ bler tous les peuples en hommage au Culte de la raison. L’hédonisme car­ navalesque ne tarda cependant pas à s’emparer des premières Fêtes de la Raison, où le vin coulait à joyeux flots et où les jolies jeunes femmes étaient nommées déesses. D’innombrables manifestations de di­ vertissement destinées au grand pu­ blic, qui font figure de fêtes civiques de nos jours, ont hérité de cette trans­ formation. On peut penser à la Fête du Canada, à l’Halloween ou au Jour de l’an, par exemple. Le Match Panda n’y fait pas exception. Dans le temple laïque qu’est la Place TD, les exploits athlétiques sont secondaires à l’atmosphère festive. Certes, on garde le compte du score, mais les amis, l’in­ toxication et la parade des styles et des corps priment sur l’appréciation tech­ nique du jeu. Même la victoire importe peu : que l’on gagne ou que l’on perde, la fête continuera. Le football est ainsi devenu un prétexte pour s’adonner à des activités habituellement mal perçues, comme boire dans la matinée ou s’épou­ moner en entonnant des chants de ral­ liement insultants. Comme source de divertissement, d’amusement et d’épanouissement sexuel et émotionnel de la communau­ té estudiantine, le Match Panda diffère peu des festivals musicaux. Ce sont des spectacles, des occasions événemen­ tielles qui suspendent les normes quo­ tidiennes où l’on se lance dans l’intoxi­ cation, la fête et la sexualité. Si ça vous amuse, faites la fête Loin de nous la volonté de prendre un ton moralisateur. Au contraire, l’hédo­ nisme des fêtes civiques trouve sa place dans une société hyper-bureaucrati­ sée. Toutefois, il semble exister un mot d’ordre diffusé à grande échelle : on doit faire acte de présence à ces évènements. C’est comme ça, dit-on, qu’on vivrait « l’expérience uOttawa ». C’est l’aspect fun de la vie universitaire, l’exutoire nécessaire au déplaisir de l’expérience étudiante. C’est l’affirmation quasi pa­ triotique de l’esprit universitaire. Mais lorsqu’on déconstruit l’évènement, ces arguments perdent leur charme. En fin de compte, le Panda, c’est une occa­ sion de flirter, de se péter la face et de (dé)gueuler. Rien de plus, rien de moins. ILLUSTRATION : ANDREY GOSSE Didier Pilon redaction@larotonde.ca www.larotonde.ca ACTUALITÉS section Clémence Labasse actu1@larotonde.ca Le désinvestissement est une solution « brutale et inefficace ». Voilà la conclu­ sion d’un rapport produit par le Centre Carleton pour l’innovation des commu­ nautés (CCIC) et faisant suite aux reven­ dications répétées du mouvement Fossil Free pour que l’Université d’Ottawa (U d’O) cesse d’investir dans le secteur pé­ trolier. La Rotonde s’est penchée sur ce rapport à l’impartialité contestée. DES CONCLUSIONS SANS APPEL? Tessa Hebb, auteure du document in­ titulé « Fossil Free Campaign Orienta­ tion Paper for University of Ottawa »*, rend une conclusion sans équivoque sur la question du désinvestissement: « La plupart des investisseurs responsables et des experts ne croient pas que le dé­ sinvestissement des énergies fossiles est une stratégie efficace (…) ». Dans le rapport, il est mentionné que 30 universités, 167 fonds d’investissement et 656 investisseurs privés se sont déjà engagés à retirer leurs investissements des compagnies d’énergie fossile, totali­ sant 50 milliards de $ en actifs. Malgré cela, Hebb conseille à l’U d’O de ne pas suivre cette voie, jugée inefficace. LES DÉFENSEURS DU DÉSINVESTISSEMENT Noémie Lavoie, militante de Fossil Free, dit ne pas comprendre pourquoi l’Uni­ versité ne désinvestit pas, surtout en considérant le nombre important d’ini­ tiatives durables mises en place sur le campus. « Je crois que l’Université est consciente de l’importance du dévelop­ pement durable, mais qu’elle a peur pour son portefeuille », a-t-elle déclaré. Pour Jessica Forrest, professeure ad­ jointe en biologie et signataire d’une lettre ouverte pour le désinvestissement avec 90 autres professeurs, la réponse de l’Université est un comble, compte tenu de son slogan actuel: « C’est in­ consistant avec le message de ‘Défier les conventions’. Si on veut défier les conventions, on devrait se désengager YASMINE MEHDI de ces compagnies [pétrolières] qui sont très conventionnelles. » Le ton condescendant employé dans la rédaction du rapport est aussi l’objet de vives critiques de la part de Fossil Free. Noémie Lavoie s’est dit choquée de lire que: « Les étudiants gaspillent des res­ sources précieuses et du temps avec ces campagnes […]. » En réponse à cela, Tessa Hebb s’est fen­ due d’un commentaire sur le caractère « absolument essentiel pour l’humanité » de sa perspective, en faisant valoir que celle-ci permettrait un changement ma­ jeur dans notre société. L’AUTEURE DU RAPPORT Interrogée sur l’intégrité de son texte, l’auteure a mis en avant sa réputation comme l’une des chercheures les plus estimées au monde dans le domaine des investissements responsables. Au sujet du désinvestissement, elle déclare: « Quand quelqu’un vend ses parts de marché, quelqu’un d’autre les achète. Les compagnies ne reçoivent donc au­ cun message de cette transaction et la Désinvestissement de l’industrie pétrolière Or noir : Un rapport qui fait tache d’encre PHOTO : GABRIELLE PILLIAT plupart du temps, le nouvel acheteur n’est pas intéressé à promouvoir une économie faible en carbone. » Agacée par cet argument qu’elle juge dépassé, Jessica Forrest rétorque: « On peut toujours dire que quelqu’un d’autre va prendre la relève, mais ce n’est pas une raison pour ne pas agir. » Tessa Hebb souligne cependant que l’Université lui a demandé de fournir une opinion et non une analyse ob­ jective sur le sujet. « Chacun d’entre nous, en tant que citoyen et en tant que chercheur, a le droit à son point de vue », a-t-elle déclaré. OÙ SONT LES CHIFFRES? Malgré leurs divergences, les interve­ nants ont un point en commun : per­ sonne ne sait à combien se chiffrent exactement les investissements de l’U d’O dans le secteur pétrolier. Noémie Lavoie confie: « On n’a pas les chiffres exacts parce que l’Université n’a jamais accepté de nous les donner. Nos estimations sont basées sur ce que d’autres universités ont réussi à avoir. » La somme de 55,4 millions de $ en in­ vestissements directs dans le secteur pétrolier est mentionnée dans un do­ cument de l’U d’O publié en 2004 et déterré par Misha Voloaca, un autre bénévole de Fossil Free. Ce chiffre re­ présente 10% du portfolio du fond de pension des professeurs de l’U d’O. Les investissements indirects, ou les inves­ tissements du fond de dotation, ne sont toutefois pas compris. Tessa Hebb n’a pas non plus eu accès au portfolio des investissements de l’U d’O; selon elle par souci d’indépendance pour son rapport. Interpellée sur le sujet, les représentants de l’U d’O n’ont pas pu se uploads/Finance/ la-rotonde-edition-du-5-octobre-2015.pdf

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  • Publié le Nov 27, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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