L’eau, une ressource vitale : le rôle de la chimie publié avec le n° 381 de L’A

L’eau, une ressource vitale : le rôle de la chimie publié avec le n° 381 de L’Actualité Chimique, janvier 2014 Le dossier III l’actualité chimique - janvier 2014 - n° 381 L’eau, une ressource vitale : le rôle de la chimie L’ éradication des épidémies par la vaccination et par le traitement chimique des infections a été un objectif majeur, relativement bien atteint pour la tuberculose, la poliomyélite et de nombreuses autres maladies contagieuses au cours du dernier siècle. L’espérance de vie qui dépasse les 80 ans dans les pays développés en témoigne, mais il ne faut pas sous-estimer un facteur essentiel de la modifi cation du tableau des maladies chez nos concitoyens : le développe- ment généralisé de l’hygiène et de l’accès à l’eau potable. La preuve en est régulièrement donnée par la résurgence d’épidémies comme la dysenterie, le choléra et bien d’autres dans les pays atteints par des catastrophes naturelles, comme ce fut le cas lors du grand tremblement de terre du 12 janvier 2010 à Port-au-Prince en Haïti. La France et la plus grande partie de l’Europe ne risquent pas, sauf de manière tout à fait ponctuelle, de subir de telles catastrophes, non plus que de souffrir de la raréfaction de la ressource en eau. Notre exigence, légitime, d’une eau douce non contaminée au sortir de nos robinets, dans nos sources et nos lacs, dans nos fl euves et nos nappes phréatiques, est à l’origine d’une recherche académique et industrielle de très haut niveau dans le domaine de l’analyse et du traitement de telles contaminations, et notamment de la détection de traces et d’ultra-traces de polluants. Dans ce contexte, et pour s’associer à l’Année internationale de l’eau en 2013, nous avons décidé de pré- senter dans ce premier numéro de l’année une chronique, confi ée à Jean-Claude Bernier, et ce dossier déta- chable, qui s’appuie sur les plus récents travaux de nos spécialistes de l’Institut de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (Irstea), de l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE) et, bien sûr, de l’Université et du CNRS. Rose Agnès Jacquesy Rédactrice en chef © dusk-Fotolia.com Les micropolluants dans les écosystèmes aquatiques Enjeux de recherche en France et en Europe Patrick Flammarion Résumé La présence de micropolluants chimiques dans les écosystèmes aquatiques est très largement documen- tée. Ces pollutions inquiètent les populations et les pouvoirs publics ont lancé un certain nombre d’actions ou plans pour suivre et maîtriser ces contaminations. Certains micropolluants sont dits « émergents » du fait des lacunes dans la connaissance de leur comportement dans l’environnement sur le long terme (dans les eaux, les sols, l’air, les organismes vivants) et leur impact sur la santé et la vie des écosystèmes et des ci- toyens. Même si les études scientifi ques ont déjà apporté des éléments permettant de suivre certaines de ces substances ou d’en quantifi er les risques, les questions adressées à la recherche restent nombreuses et font l’objet de collaborations internationales sur cet enjeu largement partagé. Mots-clés Eau, écosystèmes aquatiques, micropolluants, contaminants émergents, recherche, innovation. Le dossier IV l’actualité chimique - janvier 2014 - n° 381 L e baromètre IRSN 2012 sur la perception des risques et de la sécurité met en « bonne » place la pollution des eaux parmi les risques environnementaux [1] : « La pollution de l’eau (37 %), la pollution de l’air (33 %) et l’effet de serre (25 %) restent le trio de tête des préoccupations environne- mentales des Français, comme elles le sont depuis plus de dix ans au-delà des variations annuelles. En 2011, c’est elle qui inquiète le plus les Français (+ 8 points), qui la placent au premier rang de leurs préoccupations environnementales. Depuis 2000, c’est la première fois que cette préoccupa- tion se détache autant de celles concernant la pollution de l’air et l’effet de serre. » Parmi les pressions qui s’exercent sur l’état des eaux en Europe, celles liées à leur qualité chimique font partie des plus signifi catives. Les pollutions chimiques entraînent leur dégradation et sont donc susceptibles d’avoir un impact négatif sur la santé publique et les écosystèmes aquatiques. Ainsi, par exemple, le bilan récent de la présence de micropolluants dans les milieux aquatiques continentaux montre que 93 % des points suivis dans les cours d’eau sont contaminés par des pesticides [2], avec toutefois, pour près de 70 % d’entre eux en 2011, une concentration totale moyenne inférieure à 0,5 μg/L. Les points au-delà de ce seuil se situent dans les régions céréalières, de maïsiculture ou de viticulture, notamment dans le Bassin parisien, dans le Sud- Ouest et le long du Rhône, ou à tradition maraîchère, comme en Martinique et en Guadeloupe. Les trois pesticides, ou leurs résidus, les plus quantifi és en France métropolitaine sont les mêmes tous les ans depuis 2007 : l’AMPA (métabo- lite entre autres de l’herbicide glyphosate), suivi du glypho- sate lui-même et de l’atrazine déséthyl. S’agissant de la potabilité des eaux, l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environ- nement et du travail) a publié en septembre dernier un rap- port [3] qui conclut que pour les 106 substances étudiées, « les variations régionales des concentrations de pesticides dans l’eau ne modifi ent pas les conclusions des évaluations de risque conduites à l’échelle nationale connues à ce jour, la contribution de l’eau à l’exposition alimentaire globale aux pesticides étant généralement faible (< 5 %). » Cette étude recommande de maintenir, voire de renforcer, « l’effort de surveillance de l’eau de distribution, dans les unités de distri- bution de petites tailles et pour les substances pour les- quelles il n’a pas été possible de conclure dans la présente étude », mais aussi de conduire des travaux de recherche supplémentaires afi n de « mieux connaître les effets sur la santé de certains pesticides ainsi que d’estimer les effets cumulés et les effets aux faibles doses pour les pesticides de type perturbateurs endocriniens. » La chimie se doit naturellement d’être au cœur de la poli- tique publique de préservation des ressources aquatiques, notamment de la directive européenne cadre sur l’eau (DCE), cadre des politiques européennes de l’eau depuis 2000. La DCE a ainsi fi xé l’objectif du bon état chimique et écologique des eaux continentales et littorales. En cohérence avec les politiques européennes, la France a lancé des plans natio- naux : renouvellement du plan national « Micropolluants » (arrivant à échéance en 2013) et mise en œuvre du plan « Résidus de médicaments dans l’eau » (échéance 2015) – voir l’article de F . Orias et Y. Perrodin à la fi n de ce dossier. De quelles substances chimiques parle-t-on ? Dans les milieux aquatiques, les micropolluants re- couvrent des familles chimiques très variées (métaux, sol- vants, pesticides…) (voir tableau). Parmi ces substances, une partie seulement fait l’objet d’un suivi pour le diagnostic de l’état chimique des masses d’eau. La DCE prévoit que cette liste des substances prioritaires soit revue régulière- ment, car depuis cinquante ans, le nombre de substances chimiques trouvées dans l’eau est en augmentation régulière (fi gure 1). Suite à l’accord d’avril dernier entre le Parlement euro- péen et les États membres, douze nouvelles substances prioritaires vont devoir être surveillées et respecter les seuils de présence dans les milieux aquatiques. Elles s’ajoutent aux 41 substances déjà répertoriées, l’objectif affi ché étant de parvenir à un bon état chimique au plus tard le 22 décembre 2027. En parallèle, trois substances pharmaceutiques re- joignent la liste des polluants qui doivent faire l’objet d’une surveillance particulière en vue, le cas échéant, de les inclure dans la liste des substances prioritaires. Il s’agit de deux hormones de synthèse (17 alphaéthinylestradiol, 17 bêta estradiol) et l’anti-infl ammatoire difl ofénac (acide 2-[2-(2,6-dichlorophényl)aminophényl]éthanoïque) (fi gure 2). Abstract Micropollutants in aquatic environment: a challenge for research in France and Europe The presence of chemicals in aquatic environment is well documented. People feel concerned by these aquatic pollutants and a number of governmental plans have been launched to monitor and control these pollutions. A number of pollutants are “emerging” because of the knowledge gaps about their environmental behavior over the long term (in water, soil, air, biota) and their health or ecotoxicological risks. Although scientifi c studies have provided results that help to monitor some of these substances or to quantify the risks, the research challenges are numerous and are widely shared through international collaborations. Keywords Water, aquatic environment, micropollutants, emerging pollutants, research, innovation. Figure 1 - Augmentation du nombre de substances chimiques, identifi ées et suivies, dans les écosystèmes aquatiques (d’après [4]) (reproduit avec l’aimable autorisation d’Olivier Perceval, DR). Le dossier V l’actualité chimique - janvier 2014 - n° 381 En effet, au cours des dernières années, des inquiétudes sont apparues concernant la présence de certains polluants dits émergents dans l’eau potable et les écosystèmes aqua- tiques. Ces substances sont soit de nouvelles substances (nouvellement synthétisées), soit des substances chimiques déjà présentes mais que l’on vient seulement d’être capable d’analyser. De nombreuses lacunes subsistent dans la connaissance de leur comportement dans l’environnement sur uploads/Geographie/ 2014-381-janvier-dossier-eau-hd-5.pdf

  • 19
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager