ENCYCLOPÉDIE BERBÈRE DIRECTEUR DE LA PUBLICATION GABRIEL CAMPS professeur éméri
ENCYCLOPÉDIE BERBÈRE DIRECTEUR DE LA PUBLICATION GABRIEL CAMPS professeur émérite à l'Université de Provence LA.P.M.O., Aix-en-Provence CONSEILLERS SCIENTIFIQUES G. CAMPS (Protohistoire et Histoire) H. CAMPS-FABRER (Préhistoire et Technologie) S. CHAKER (Linguistique) J. DESANGES (Histoire ancienne) O. DUTOUR (Anthropobiologie) M. GAST (Anthropologie) COMITE DE REDACTION M. ARKOUN (Islam) E. BERNUS (Touaregs) D. CHAMPAULT (Ethnologie) R. CHENORKIAN (Préhistoire) M. FANT AR (Punique) E. GELLNER (Sociétés marocaines) J.-M. LASSERE (Sociétés antiques) J. LECLANT (Égypte) T. LEWICKI (Moyen Age) K.G. PRASSE (Linguistique) L. SERRA (Linguistique) P. TROUSSET (Antiquité romaine) M.-J. VIGUERA-MOLINS (Al Andalus) UNION INTERNATIONALE DES SCIENCES PRÉ- ET PROTOHISTORIQUES UNION INTERNATIONALE DES SCIENCES ANTHROPOLOGIQUES ET ETHNOLOGIQUES LABORATOIRE D'ANTHROPOLOGIE ET DE PRÉHISTOIRE DES PAYS DE LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE INSTITUT DE RECHERCHES ET D'ÉTUDES SUR LE MONDE ARABE ET MUSULMAN ENCYCLOPÉDIE BERBÈRE XIV Conseil - Danse Publié avec le concours du Centre National du Livre (CNL) et sur la recommandation du Conseil international de la Philosophie et des Sciences humaines (UNESCO) ÉDISUD La Calade, 13090 Aix-en-Provence, France ISBN 2-85744-201-7 et 2-85744-741-8 La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une part, « que les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non des tinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de ses auteurs ou des ses ayants-droit ou ayants-cause, est illicite » (alinéa 1 er de l'article 40). Cette représentation ou reproduction par quelque pro cédé que ce soit constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et sui vants du Code pénal. © Édisud, 1994. Secrétariat : Laboratoire d'Anthropologie et de Préhistoire des pays de la Méditerranée occi dentale, Maison de la Méditerranée, 5 bd Pasteur, 13100 Aix-en-Provence. C89. CONSEIL (voir Djemaa) C90. CONSTANTINE (voir Cirta) Le carrefour de l’Est algérien Dans un Est algérien doté de plus de profondeur que l’Oranie, et articulé sur le boulevard des Hautes Plaines, il y avait place pour une capitale intérieure. A égale distance du littoral et de l’Aurès, Constantine se dresse au contact de deux mondes, montagnes telliennes, humides et boisées, au nord, Hautes Plaines semi-arides et céréalières au sud. A travers toute l’Algérie, une telle position a suscité des nœuds d’échanges. Cette ligne de contact est recoupée par un axe de passage N-S : vallée du Safsaf, vallée de Smendou qui, par un ensellement entre Djebel Chettabah et Djebel Ouasch, permettent d’accéder à la marche d’escalier des Hautes Plaines, et trouvent leur prolongement dans le couloir de Batna. Cet axe Skikda-Batna place ainsi Constantine à égale distance de Sétif et de la frontière tunisienne, à 450 km d’Alger et autant de Tunis. Cette position de contrôle de la voie méridienne, à l’endroit où elle s’insinue entre les deux masses montagneuses, se trouve d’être favorisée localement par un autre élément : la présence en contrebas, d’une des plus grosses sources de toute l’Algérie, celle du Hamma (850 litres/seconde), qui a donné à la ville les jardins péri-urbains indispensables au cours de l’histoire à toute ville maghrébine. L’on comprend que de tels atouts appelaient une grande ville. Depuis deux millénaires, par une continuité rare au Maghreb, Constantine joue un rôle capital dans l’Est algérien. Sa position centrale et ses articulations relativement aisées dans le sens N-S comme W-E lui permettent de commander à ce vaste espace. Capitale du Beylik du Levant à l’époque turque, chef-lieu d’un des trois départements coloniaux un siècle durant, elle est aujourd’hui, dans le cadre d’une Algérie en développement, la capitale économique et culturelle de l’Est. Lorsque un site devient un handicap En fait, il y a eu divorce entre cette situation et le site originel de la ville. Le site urbain virtuel que la situation d’échange appelait se trouve à une quinzaine de kilomètres plus au sud, dans le secteur d’El Khroub : c’est là que s’ouvrent les horizons, que convergent les voies naturelles de circulation. La présence sur cet emplacement du plus grand marché rural de l’Est, du carrefour ferroviaire, de l’aérodrome, d’autres équipements encore témoigne de cette « vocation » de la région d’El Khroub. Mais l’histoire en a décidé autrement. Elle a accroché la ville à un nid d’aigle, ceinturé de deux côtés par un canon profond, et dominant sur le troisième côté le bassin du Hamma par un escarpement de près de 300 mètres de dénivellation. A ce cadre la ville doit non seulement sa célèbre passerelle, mais aussi l’un des sites urbains les plus étonnants qui soient au monde. Certes, il est bien d’autres cas d’oppidum dans l’histoire. Mais l’originalité de Constantine est que cet oppidum soit resté habité deux millénaires durant, que la ville en soit restée prisonnière, qu’il ait généré à partir de lui le développement d’une vaste agglomération. Depuis deux siècles la ville se bat avec son site. Retenons de ce combat deux moments forts. Le premier est relatif au moment où la ville a dû déborder hors du Rocher. Dès la fin du XVIII e siècle, quelques petits faubourgs avaient été projetés au-delà du canon. Mais c’est la colonisation qui organisa systématiquement cette extension de la cité, sous forme de trois faubourgs (Bellevue, Sidi Mabrouk, Faubourg Lamy), et assura le fonctionnement de l’ensemble au prix de la construction de plusieurs ponts et Constantine et l’Est algérien (D’après M. Côte) Vue générale de Constantine (Photo F. Bertrandy) Débouché des gorges du Rhumel dans la plaine du Hama (Photo F. Bertrandy) La passerelle de Sidi M’cid et les gorges (Photo F. Bertrandy) passerelles, de la percée de trois artères dans la vieille ville, de l’arasement de la colline du Coudiat, du remblaiement de la dépression fermant le Rocher sur la quatrième face (« la Brèche »). Les extensions du XX e siècle se sont faites en relative continuité avec celles qui les ont précédées, sur les différentes collines qui entourent le Rocher. Mais dans les années 1970, est arrivé ce qui arrive dans leur histoire à certaines villes dans le monde : Constantine a rempli son site. Celui-ci est limité par une ceinture de versants gréseux (Djebel Ouasch) ou d’escarpements calcaires (Djebel Chettabah, Hadj Baba), sur lesquels l’urbanisation peut difficilement s’étendre. Pour la seconde fois, mais à une échelle nouvelle, la ville s’est heurtée aux limites de son site. Il lui a fallu sauter le pas, franchir l’écran en reportant son urbanisation dans les vallées situées au-delà. Là, elle a retrouvé quatre bourgades, anciens villages de colonisation au milieu de leur terroir : elles ont été choisies comme noyaux de la nouvelle urbanisation. Ainsi, le Grand Constantine se développe sous forme d’une agglomération comprenant une ville-mère et une série de satellites dans un rayon d’une quinzaine de kilomètres. Le plus gros de ces satellites, et celui promis à l’avenir le plus brillant, est celui d’el Khroub, parce que bien doté par la nature. La ville renoue aujourd’hui avec son site virtuel. Centre historique et centre économique On parle à Constantine du « Rocher », comme à Alger de la « Casbah ». C’est une médina classique, avec le décrochement de ses artères, l’ombre de ses venelles, les passages sous voûtes et son urbanisme en impasses. C’est aussi un riche patrimoine historique et architectural, à travers le jeu de ses toitures de tuiles rondes, ses vieilles mosquées, la beauté de certaines demeures particulières à patio, et le joyau qu’est le Palais du Bey. Mais le Rocher a connu un destin très particulier. Dans la plupart des villes maghrébines, la colonisation a créé une ville européenne juxtaposée à la médina. A Constantine, le projet de ville nouvelle à Sidi Mabrouk n’ayant pas abouti, les autorités coloniales surimposèrent à la vieille ville une trame moderne: ouverture de trouées avec façades occidentales, reconstruction du quartier S-W où habitèrent les Européens. Ces décisions allaient être lourdes de conséquences jusqu’à aujourd’hui. Le centre des affaires ne s’est pas dissocié catégoriquement du centre historique comme cela a été le cas à Alger. Il a débordé sur les abords de la « Brèche » et sur le Coudiat, mais est resté solidement arrimé à la médina, activités traditionnelles dans les rues anciennes, activités modernes dans les rues coloniales. De ce fait le Rocher est une des rares médinas maghrébines à avoir conservé sa fonction de centre ville. La présence de 3 000 établissements commerciaux et artisanaux (40 % de ceux de la ville), d’une centaine de grossistes en habillement, d’équipements de commandement (administratifs, bancaires, culturels), lui assure un rayonnement sur toute la ville et même sur la région. L’image de centre ville qu’a le Rocher est très forte dans l’esprit de tous les Constantinois, et a contribué à faire échouer les projets de transfert du centre des affaires vers l’extérieur. Or cette médina, qui a gardé toute sa vitalité, est paradoxalement dans un état de délabrement inquiétant. La période de la guerre a connu en effet un phénomène de substitution de population, les vieilles familles citadines parties en périphérie remplacées par des ruraux uploads/Histoire/ encyclopedie-berbere-volume-14.pdf
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- Publié le Fev 09, 2021
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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