Vol. 97 - Octobre 2003 Jean-Louis VIGNES et Yves JEHANNE L’hydrométallurgie par
Vol. 97 - Octobre 2003 Jean-Louis VIGNES et Yves JEHANNE L’hydrométallurgie par Jean-Louis VIGNES IUFM de Créteil vignes@limhp.univ-paris13.fr et Yves JEHANNE Ingénieur en génie chimique RÉSUMÉ Depuis la rentrée scolaire 2002, des expériences d’hydrométallurgie sont introduites dans le programme de chimie de spécialité en terminale S. Cet article fait le point sur cette métallurgie, fondée sur la chimie des solutions, largement employée industriellement. De nombreux exemples et en particulier celui du zinc illustrent ce procédé. Les nouveaux programmes de spécialité en terminale S introduisent des expériences d’hydrométallurgie. Nous nous proposons dans cet article de faire une mise au point sur ce procédé en insistant sur l’illustration des concepts chimiques (acido-basicité, oxydo- réduction) étudiés en classes de première et terminale. Nous ne développerons pas des notions qui, bien qu’importantes dans les procédés industriels, n’entrent pas dans le cadre de l’enseignement secondaire. Par exemple, les concentrations des solutions industrielles sont souvent élevées et l’assimilation des activités avec les concentrations n’est plus pos- sible. De même, nous avons peu pris en compte les phénomènes cinétiques, qui concer- nant, en général, des réactions en phase hétérogène (solution et particules ou surfaces solides), sont difficiles à modéliser. L’hydrométallurgie est un procédé industriel d’élaboration de métaux mis en œuvre à différentes étapes du cycle d’un métal (cf. figure 1 page ci-après). C’est d’abord un procédé de métallurgie consistant à extraire un élément métallique - généralement à l’état oxydé - d’un minerai et à le réduire sous forme d’un métal pos- sédant la pureté souhaitée. Son importance est considérable : elle fournit, par exemple, plus de 90 % de la production mondiale de zinc primaire (1), 80 % de celle d’or, 20 % de celle de cuivre. Elle intervient également dans l’extraction de l’uranium et les métallur- gies de l’aluminium, cadmium, cobalt, nickel, argent, tungstène, terres rares… Le terme d’hydrométallurgie est également employé pour des procédés de traitement de minerais ne conduisant pas nécessairement au métal mais s’arrêtant, par exemple, à l’obtention d’un oxyde de pureté donnée. L’opération finale de réduction est, dans ce cas, absente. U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 1281 (1) On appelle métal primaire celui provenant directement des activités minières par opposition au métal recy- clé, parfois dénommé secondaire ou de deuxième fusion. U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 1282 L’hydrométallurgie Le Bup no 857 (1) Figure 1 : Schéma général de l’élaboration des métaux. L’hydrométallurgie est en concurrence avec la pyrométallurgie qui est un procédé très ancien, employé dès le VIe millénaire avant J.-C. pour réduire des oxydes de cuivre et obtenir le métal. Son importance est telle que les découvertes pyrométallurgiques ont donné leur nom à diverses époques préhistoriques (âges du bronze, du fer). L’hydrométallurgie est aussi un procédé employé lors du recyclage de divers métaux : or, zinc, cuivre… Vol. 97 - Octobre 2003 Jean-Louis VIGNES et Yves JEHANNE C’est également - contrairement à la pyrométallurgie - un procédé : ♦appliqué à l’échelle industrielle récemment : fin du XVIIIe siècle pour le cuivre, fin du XIXe siècle pour l’or, début du XXe siècle pour le zinc. Son développement est lié à celui de la chimie et à la découverte de ses lois ; ♦qui utilise, en général, des solutions aqueuses, donc des températures proches de l’am- biante ; ♦qui pollue peu l’atmosphère mais qui génère des effluents liquides qui faut traiter et stocker. C’est enfin un procédé qui repose sur la chimie des solutions et qui permet d’illus- trer par des exemples concrets divers concepts et techniques enseignés dans le secondaire : acido-basicité, oxydoréduction, complexation, électrolyse, solubilité, précipitation, filtra- tion, purification… Des expériences d’illustration des procédés effectivement employés industriellement peuvent facilement être mises en œuvre par les élèves (2). 1. L’AMONT DE L’HYDROMÉTALLURGIE 1.1. Les minerais Les éléments extraits par hydrométallurgie sont à l’origine inclus dans un minerai qui peut être défini comme une roche naturelle contenant un ou plusieurs des éléments susceptibles d’en être extraits dans des conditions économiques satisfaisantes afin d’ali- menter les activités humaines. La formation des gisements de minerais résulte de processus géologiques variés (commandés en grande partie par les lois de la chimie) qui ont conduit à une accumula- tion importante de certains éléments en un lieu donné. Ces processus concernent, en général, des éléments chimiquement proches (appartenant à une même colonne, une même famille ou un même bloc du tableau périodique) et en conséquence, les minerais sont des mélanges complexes de divers éléments, en général à l’état oxydé en ce qui concerne les éléments métalliques, présents dans des composés variés (sulfures, oxydes, carbonates, sulfates, chlorures, phosphates…). Parmi ces éléments certains sont intéres- sants, d’autres inutiles (ils se retrouveront dans les stériles ou gangue) ou toxiques (mer- cure, arsenic, radon…). Les teneurs sont extrêmement variables : de 65 % en masse pour le fer à quelques ppm pour l’or. 1.2. La minéralurgie ou concentration des minerais Pour des raisons principalement économiques, il est généralement nécessaire de trai- ter le minerai, sur le lieu d’extraction, afin d’augmenter sa teneur en éliminant la plus grande partie possible de la gangue. Cela va du simple tri manuel comme dans les mines U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 1283 (2) Voir, par exemple dans le BUP, la série d’articles : « Une vie de zinc », « Une vie de cuivre », « Une vie d’aluminium » [1-3]. L’hydrométallurgie Le Bup no 857 (1) de charbon du XIXe siècle jusqu’au tri automatique par luminescence induite par les rayons X employé actuellement dans des mines de diamants [4]. Les techniques de séparation font appel, en général, aux différences de propriétés physiques entre les éléments valorisables du minerai et la gangue. Parmi ces techniques on peut citer la gravimétrie, le magnétisme, la radioactivité et surtout la flottation - qui met en jeu des différences de tension superficielle - principale technique de concentration des minerais sulfurés. Afin de séparer, il est nécessaire, au préalable, de concasser puis de broyer le minerai afin d’atteindre « la dimension de libération » des éléments valori- sables, souvent de quelques centaines de µm. Lors de ces traitements l’élément métal- lique valorisé reste, le plus souvent, sous la forme chimique qu’il possédait dans le minerai. Par exemple, la teneur en zinc passe de 4 à 20 % en masse dans le minerai à 40 à 60 % dans le concentré. Pour l’uranium on passe d’environ 0,2 % à 70 % (3). 1.3. Le grillage Ce traitement métallurgique concerne les minerais sulfurés. C’est un prétraitement qui consiste à transformer les sulfures métalliques (4) en oxydes. La réaction de base est la suivante [5] : MS 3/2 O MO SO (s) 2(g) (s) 2(g) " + + Lors de cette opération, pour faciliter la lixiviation ultérieure, il faut conserver la finesse initiale des particules ce qui nécessite d’éviter de trop hautes températures qui induisent un frittage (5). Cela n’est pas le cas en pyrométallurgie où, au contraire, un frit- tage partiel est souhaité. Les techniques de grillage seront en conséquence différentes : l’hydrométallurgie privilégiera le lit fluidisé avec des températures d’environ 900 °C pour le grillage de la blende - principal minerai de zinc [6]. Lors du grillage, les impuretés présentes dans le concentré sous forme de sulfures seront également transformées en oxydes ou parfois éliminées (HgS donne Hg volatil). Le SO2 formé lors du grillage est transformé sur place, par le procédé de contact [7], en acide sulfurique et ainsi il n’est pas surprenant de constater que les producteurs de zinc, cuivre, plomb… sont également fournisseurs d’acide sulfurique. Par ailleurs, cette production est, souvent, en partie consommée sur place lors des opérations de lixi- viation. U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 1284 (3) La minéralurgie de cet élément est une exception car il subit lors de sa concentration une transformation chimique, d’oxyde en uranate (par exemple MgUO 4). (4) Les sulfures qui forment les principaux gisement de Zn, Pb, Cu, Ni, Hg… posent des problèmes lors des traitements lors des traitements de lixiviation en hydrométallurgie. Il en est de même pour les traitements pyrométallurgiques [6]. (5) On appelle frittage, un phénomène de diffusion de matière, à haute température, à l’état solide, qui se tra- duit par la formation de ponts entre les particules suivie d’un grossissement des grains. Le solide acquiert ainsi une plus grande cohésion. uploads/Industriel/ article-bup-14690.pdf
Documents similaires










-
28
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 28, 2021
- Catégorie Industry / Industr...
- Langue French
- Taille du fichier 0.1773MB