janvier 2021 Rapport Les effets de la crise Covid-19 sur la productivité et la

janvier 2021 Rapport Les effets de la crise Covid-19 sur la productivité et la compétitivité Deuxième rapport du Conseil national de productivité JANVIER 2021 LES EFFETS DE LA CRISE COVID-19 SUR LA PRODUCTIVITÉ ET LA COMPÉTITIVITÉ Deuxième rapport Président Philippe Martin Membres Olivier Blanchard, Laurence Boone, Gilbert Cette, Chiara Criscuolo, Anne Epaulard, Sébastien Jean, Margaret Kyle, Xavier Ragot, Alexandra Roulet, David Thesmar Auteurs Vincent Aussilloux, Dimitris Mavridis Adam Baïz, Matthieu Garrigue CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 3 JANVIER 2021 AVANT-PROPOS Ce deuxième rapport du Conseil national de productivité (CNP) se concentre sur les conséquences de la crise économique et sociale sans précédent générée par la Covid- 19 sur la productivité et la compétitivité de la France1. Pour rappel, la plupart des États membres de l’Union européenne qui partagent l’euro ont mis en place un CNP : ces conseils organisés en réseau sont chargés d’analyser les évolutions et les déterminants de la productivité et de la compétitivité dans leur pays, en tenant compte des interactions avec les autres États membres. L’objectif est une meilleure coordination des politiques économiques au sein de la zone euro. La crise de la Covid-19 a montré l’importance d’une telle coordination. Le rapport présente notamment une comparaison des plans d’urgence et de relance annoncés par les pays européens – avec un recensement détaillé et quantifié – et évalue leurs impacts potentiels sur les déséquilibres courants en zone euro. Face à la vague prévisible de faillites, il avance aussi plusieurs options afin d’éviter la sortie d’entreprises viables et productives. Enfin, le rapport consacre un chapitre à la question de la performance médiocre de la France en matière de formation initiale et continue, lourde de conséquences sur la productivité. Ce rapport a bénéficié d’un important travail de fond des rapporteurs – Vincent Aussilloux, rapporteur général, Dimitris Mavridis, Adam Baïz, Matthieu Garrigue, Amandine Brun-Schammé (France Stratégie), Alexandre Bourgeois, Matthieu Lequien (Insee), Noémie Lisack (Banque de France), Paul Cusson (Direction générale du Trésor), Sébastien Grobon (Dares) – que je tiens à remercier pleinement au nom de l’ensemble du CNP pour leur engagement et leur professionnalisme. Ce rapport a été écrit dans une situation de crise inédite où les économistes se sont trouvés fortement sollicités. Je voudrais donc particulièrement remercier les membres du CNP qui s’expriment ici en totale indépendance du pouvoir économique et politique et qui ont partagé leurs réflexions sur les conséquences de la crise de la Covid-19. 1 Voir le premier rapport : CNP (2019), Productivité et compétitivité : où en est la France dans la zone euro ?, juillet, 144 pages. Les effets de la crise Covid-19 sur la productivité et la compétitivité CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 4 JANVIER 2021 Ces spécialistes de macroéconomie, productivité, innovation, commerce international et marché du travail ont nourri comme l’année dernière les travaux du CNP de la diversité de leurs expertises. Nous avons produit ce rapport alors que nous sommes en plein cœur de la crise de la Covid-19. L’analyse de ses conséquences économiques ne peut donc être que préliminaire et modeste. De nombreuses questions restent sans réponse et devront faire l’objet de nouvelles analyses dans les prochains rapports du CNP. Philippe Martin Président du Conseil national de productivité CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 5 JANVIER 2021 TABLE DES MATIÈRES Synthèse ........................................................................................................... 7 Chapitre 1 – Covid et productivité ............................................................... 19 Chapitre 2 – Plans d’urgence, plans de relance et déséquilibres en zone euro ................................................................................................... 65 Les effets de la crise Covid-19 sur la productivité et la compétitivité CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 6 JANVIER 2021 Chapitre 3 – Compétences et productivité .................................................. 85 Annexes ........................................................................................................ 127 Annexe 1 – Le Conseil national de productivité ............................................. 129 Annexe 2 – Variations sectorielles de l'activité .............................................. 131 Annexe 3 – Tableau comparatif des plans d’urgence et de relance .............. 135 Annexe 4 – Dispersion des compétences des adultes .................................. 163 CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 7 JANVIER 2021 SYNTHÈSE Quel impact de la crise actuelle sur la productivité ? La crise actuelle ne ressemble à aucune des récessions précédentes par son ampleur, sa soudaineté et son impact sectoriel très hétérogène. Elle diffère aussi par sa nature, avec un choc qui vient de l’extérieur de la sphère économique, frappant l’économie à la fois du côté de l’offre et de la demande. Cette crise se singularise également par l’ampleur des dispositifs de soutien d’urgence à l’économie : en 2020, la France a annoncé des mesures de soutien d’urgence et de relance à hauteur de 7,6 % de son PIB de 2019 (185 milliards d’euros) hors mesures de liquidités et de garanties, avec pour ces dernières un plafond de 17 % du PIB. Le déficit public prévisionnel est de 11,3 % du PIB en 2020, dont le financement sera facilité par la politique elle-même sans précédent de la Banque centrale européenne. Pendant le premier confinement (17 mars-10 mai), l’activité économique a beaucoup plus chuté que l’emploi salarié. Pour l’année 2020 dans son ensemble, l’Insee prévoit une baisse du PIB de 9 % et une baisse de l’emploi salarié de 2,3 %. Cela indique une importante rétention de main-d’œuvre de la part des employeurs, favorisée notamment par le recours au chômage partiel, qui peut s’interpréter comme une forte baisse de la productivité du travail. Cette crise se traduit par des coûts nouveaux, par exemple pour lutter contre l’épidémie, et par des coûts unitaires plus élevés du fait de la réduction de la capacité de production. Par ailleurs, ce sont plutôt des secteurs caractérisés par une productivité du travail relativement faible – et des interactions sociales fortes – qui sont davantage percutés. C’est le cas par exemple de l’hébergement-restauration ou des services aux ménages, mais pas d’un secteur très touché tel que l’aéronautique. À court terme donc, un effet de composition sectorielle de la crise va plutôt jouer en faveur de la productivité agrégée mais avec pour contrepartie que ce sont ces secteurs plus intensifs en emploi qui sont les plus touchés. Cet effet de composition sectorielle ne devrait pas être permanent. La chute dramatique de la productivité des secteurs les plus touchés est probablement transitoire – en particulier du fait de l’arrivée du vaccin. La crise pourrait cependant avoir des conséquences durables sur la productivité si elle affecte les mécanismes qui déterminent sa vigueur, à la fois en termes de réallocation et d’innovation, par exemple Les effets de la crise Covid-19 sur la productivité et la compétitivité CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 8 JANVIER 2021 via la baisse des dépenses de R & D. Un des enjeux cruciaux de la politique économique aujourd’hui est en effet d’éviter que le choc économique de la crise sanitaire ne se transforme en choc persistant, en particulier sur la productivité. En situation normale, la « sortie » des entreprises les moins efficaces contribue positivement à la productivité et à la croissance car elle permet le développement des entreprises plus efficaces et l’arrivée de nouveaux entrants. Cependant, en temps de crise, ce mécanisme de réallocation peut entraîner la défaillance d’un trop grand nombre d’entreprises productives. En effet, la hausse des faillites pendant les récessions, qui entraîne des pertes d’emplois à grande échelle et des difficultés financières, est associée à un gaspillage important et évitable de ressources. Les entreprises ont souvent des relations contractuelles spécifiques à la fois coûteuses et difficiles à remplacer. Cet effet de désorganisation est particulièrement présent aujourd’hui, notamment en raison d’importants effets de réseau qui viennent amplifier les chocs sectoriels, mais aussi de l’intégration croissante de certaines entreprises dans les chaînes de valeur, de plus en plus complexes et mondialisées. La récession de 2020, dans certains secteurs industriels, pourrait entraîner des défaillances de sous-traitants produisant des composants stratégiques. La crise se traduit par une situation paradoxale où, jusqu’à maintenant, les faillites sont en diminution de 36 % pour l’ensemble des entreprises et de 29 % pour les PME par rapport à 2019. Les politiques d’urgence et de relance ont permis une « mise en hibernation » de nombreuses entreprises qui explique cette chute des défaillances. Notre analyse empirique suggère cependant que les défaillances actuelles, même en nombre réduit, sont déterminées comme en période normale par la productivité et la dette des entreprises. Les défaillances des entreprises des secteurs les plus touchés sont plus nombreuses que dans les autres secteurs mais les aides publiques – chômage partiel, fonds de solidarité, PGE, etc. – ont permis d’absorber une grosse partie du choc. Cette mise en hibernation était nécessaire et nous considérons qu’elle a été efficace. En effet, l’analyse empirique tend à conclure que les mesures mises en place par le gouvernement ont, jusqu’ici, permis d’éviter que des entreprises productives ne soient mises en défaillance. Dans le débat qui inévitablement émergera sur le nécessaire retrait des mesures de soutien, il sera important de bien mesurer et comparer les risques respectifs. Notre rapport en propose la hiérarchisation suivante. 1. Un premier risque est de subir un nombre élevé de défaillances d’entreprises productives ou d’entreprises « systémiques » avec un effet d’entraînement sur les Synthèse CONSEIL NATIONAL DE PRODUCTIVITÉ 9 JANVIER 2021 chaînes de valeurs. Ce risque a jusqu’ici uploads/Industriel/ cnp-2021-deuxieme-rapport-janvier.pdf

  • 29
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager