Automne 2017 ­ Numéro 32­ La lettre de l'I­tésé 15 Eclairages LE SOLAIRE AU MAR

Automne 2017 ­ Numéro 32­ La lettre de l'I­tésé 15 Eclairages LE SOLAIRE AU MAROC : SITUATION ET PERSPECTIVE par Maryème KETTANI, CEA/DAS/I­tésé Afin de réduire son empreinte écologique et dans un objectif de baisse de la dépendance historique du Maroc à l’importation des énergies fossiles, ce dernier a depuis 2009 adopté une stratégie nationale de promotion des énergies renouvelables (ENR). L’objectif du royaume est de porter la part des énergies renouvelables à 42% (dont 14% de solaire) du mix électrique en 2020 et à 52% en 2030, et d’atteindre une capacité installée de toits solaires dans le résidentiel de 2500 MWc en 2030 grâce au net metering1. L’objectif de cet article est d’évaluer les perspectives de développement de l’énergie solaire au Maroc au vu de l’évolution historique de la situation énergétique du pays et des instruments publics mis en place afin d’encourager la pénétration de cette énergie dans le mix. Une telle analyse permettra de faire ressortir les potentiels verrous à lever dans le cadre du déploiement des politiques publiques en faveur du solaire au Maroc et de proposer en conséquences des axes d’amélioration en vue des objectifs cibles à atteindre à l’horizon 2030. Situation économique L ’histoire contemporaine du Maroc indépendant fait ressortir deux phases de développement. Une première dite de développement protégé (modèle de l’import substitution, Friedrich List) puis une deuxième phase d’ouverture économique à partir des années 1980. Parallèlement aux changements opérés dans la politique macroéconomique, les réformes libérales se succèdent. Des filières industrielles telles qu’automobile et aéronautique ont alors commencent à émerger, et le secteur industriel s’est progressivement diversifié, tiré par la croissance des secteurs de la chimie, des équipements automobiles ou encore de l’électronique. Toutefois, dans le processus de transformation structurelle de l’économie marocaine, la productivité du secteur manufacturier reste entravée par les distorsions2 provenant d'une allocation perfectible des ressources. S’ajoutent à ce qui précède des enjeux essentiels que l’économie marocaine devrait être en mesure de relever tels que le renforcement de la formation professionnelle, l’intégration entre firmes étrangères et nationales garantissant des spillovers positifs (learning by doing or hiring), ou encore le développement de l’innovation et de la R&D. La question du modèle de croissance économique reflète une productivité encore faible et une faible progression des facteurs de production (capital et travail) vers les secteurs à forte valeur ajoutée. La croissance économique au Maroc est tributaire de la pluviométrie. Le pays a traversé en 2016 une des plus graves sécheresses qu’il ait connues ces dernières années. La croissance économique en 2016 s’est donc chiffrée à 1,1% contre 3,8% en 2010 (Banque Mondiale). L’agriculture pesait en 2016 pour 13 % du PIB, soit une légère baisse de 1% par rapport à 2010 (en valeur ajoutée)3, l’industrie quant à elle a affiché une progression de 1% en 6 ans s’établissent à 30% du PIB. Enfin, le secteur tertiaire a représenté 57 % du PIB en 2016, comme en 2010 (Banque Mondiale). En termes de balance commerciale, le Maroc a importé pour 45 % du PIB (+ 3% comparé à 2010) de produits et services et a importé pour 35 % du PIB la même année4 soit une légère diminution de 2% en 6 ans. Depuis l'indépendance, le Maroc s'est lancé dans d'importants investissements pour développer son économie et de ce fait, la demande en énergie ne fait que croître depuis plusieurs années. Sa progression est estimée entre 6% et 7% par an5 tirée par la croissance démographique (+1,4% en 2016)6 et la modernisation du mode de vie. Cette forte croissance des besoins énergétiques a donc poussé les décideurs politiques à revoir leur stratégie énergétique en mettant le développement de l’énergie solaire au cœur des priorités du royaume. Profil énergétique Offre et demande énergétique L’approvisionnement total en énergie primaire (Atep) du Maroc a atteint 19,4 millions de tonnes d’équivalent pétrole (Mtep) en 2015 vs 18.7 Mtep en 2012 (AIE). L’offre énergétique a considérablement augmenté depuis 2002 16 La lettre de l'I­tésé ­ Numéro 32 ­ Automne 2017 Eclairages où elle se chiffrait seulement à 6,9 MTEP. Le bouquet énergétique est dominé par les énergies fossiles, presque entièrement importées. Figure 1 : Bouquet énergétique du Maroc en 2015 (source AIE) La part du pétrole (brut + produits pétroliers) s’établit en 2015 à 60,6% de l’Atep, contre 22,9 % pour le charbon. La part des biocarburants et des déchets est quant à elle de 7%, suivie par le gaz naturel (5,2%). Enfin, l’électricité et les énergies renouvelables (éolienne et hydraulique) contribuent à elles trois pour 10,4 % de l’Atep. L’offre de gaz naturel a considérablement progressé dans le mix énergétique depuis 2002 (de 30 millions de mètres cubes à plus de 900 millions par an)7. L’offre provenant du pétrole et de source hydraulique a doublé entre 1990 et 2015, alors que la part de l’énergie éolienne a triplé sur la même période. En revanche, l’offre issue du charbon a diminué alors que la part des biocarburants et des déchets affiche la plus faible progression. La consommation d'énergie primaire par habitant au Maroc se chiffre en 2015 à 0,56 tep, ce qui représente 30 % de la moyenne mondiale (1,89 tep/hab) et 84 % de la moyenne africaine (0,67 tep/hab)8. La consommation finale d’énergie a été multipliée par 2,7 en 25 ans passant de 5,6 Mtep en 1990 à 15 Mtep en 2015. 73,3% de la consommation d’énergie finale provient des produits pétroliers, contre 8,9% pour les biocarburants et les déchets et 17,2% pour l’électricité (AIE). Figure 2 : Consommation finale d’énergie par secteur (source AIE) La consommation finale d’énergie a progressé dans quasiment tous les secteurs d’activité sauf celui de l’industrie (où la consommation de charbon a nettement diminué durant cette période). La progression la plus importante est celle du transport (+11,7%), suivie du secteur agricole et des forêts ainsi que le résidentiel (2,7% chacun). En revanche, suite à une baisse importante de consommation du charbon, l’industrie affiche une baisse de l’ordre de 14% de sa consommation finale d’énergie par rapport à 1990. A eux trois, les secteurs du résidentiel, de l’industrie, et du transport totalisent plus de 80,9% du total de la consommation finale d’énergie au Maroc en 2015. Malgré leur progression, les secteurs agricoles, tertiaires, en plus des usages non énergétiques sont encore loin derrière. Energie journalière et pointe maximale En 2016, la puissance maximale appelée à la pointe s’est établie à 6050 MW (26 Juillet) soit 190 MW de puissance additionnelle par rapport à l’année précédente à la même période. L’énergie journalière maximale (121 259 MWh) en 2016 enregistre une hausse de plus de 8% comparée à 2015. Figure 3 : Energie journalière maximale appelée (source ONEE) Emissions de CO2 Les émissions de CO2 du Maroc se chiffrent en 2014 à 53,11Mt de CO2. Les émissions liées à l’énergie ont été multipliées par 2,5 entre 1990 et 2014 (AIE). Les émissions/habitant ont quant à elles doublé, mais restent faibles, de l’ordre de 1,57t CO2 par habitant. Cette quantité d’émission équivaut à 35 % de la moyenne mondiale (4,47Mt/hab), et est supérieure de 64% à la moyenne africaine qui s’établit en 2014 à 0,96 Mt/hab (AIE, 2016). L’accroissement des émissions de CO2 s’explique principalement par le développement socio­économique qu’a connu le Maroc durant les dernières décennies, sa croissance démographique, et l’augmentation de la consommation énergétique des secteurs productifs. Automne 2017 ­ Numéro 32 ­ La lettre de l'I­tésé 17 Eclairages Marché électrique Contexte Le marché électrique marocain est principalement organisé autour d’une entreprise nationale, l’Office National de l’Électricité et de l’Eau Potable/Branche électricité (ONEE). L’ONEE est verticalement intégrée et occupe (jusqu’à présent) à l’échelle nationale toute la chaîne de valeur électrique : production, transport, distribution, appel des moyens de production et équilibrage. L'Office est responsable de la production et de la livraison de l'énergie électrique à tous ses abonnés. La distribution de l'énergie électrique est assurée soit directement par l'ONEE, soit par les régies et les gestionnaires délégués. Le projet de loi N 38­16 stipule le transfert (de l’ONEE) au MASEN9 de tout moyen de production et infrastructures de production de l’électricité, qu’ils soient finalisés, en cours d’achèvement ou en cours d’élaboration qui utilisent les sources d’origine renouvelable, à l’exception des stations de transfert d’énergie par pompage, des infrastructures de production de l’électricité dédiée aux heures de pointe et à la stabilité du système électrique national. Tous les projets PV en cours Noor IV (70 MW), Noor Laayoune (50 MW), Noor Boujdour (50 MW), Noor Tafilalt (de 75 MW à 100 MW) relèvent désormais du MASEN et non de l’ONEE. La longueur totale du réseau électrique marocain en 2012 est de 22062km dont 6,6% à 400Kv, 39,4% à 225Kv et 54% à 60Kv. Les échanges sur les interconnexions sont en progression tant avec l’Espagne qu’avec l’Algérie mais est beaucoup plus importante avec le voisin européen10 que maghrébin. L’une des volontés du Maroc est de renforcer les échanges intra Maghreb qui sont encore très faibles aujourd’hui. Production et demande d’électricité La production totale d’électricité a atteint 31216 GWh en 2015 (dont 57% provenant du charbon, du fioul, uploads/Industriel/ 05-lettr-itese-automne-2017-eclairage-le-solaire-au-maroc.pdf

  • 24
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager