La déconstruction des bâtiments : premiers enseignements L'ADEME, en partenaria

La déconstruction des bâtiments : premiers enseignements L'ADEME, en partenariat avec le ministère chargé du logement a lancé en 1998 un appel à maître d'ouvrages pour la réalisation de 10 opérations exemplaires de déconstruction de bâtiments. Ces 10 opérations sont maintenant toutes terminées sauf une : 6 concernent des logements sociaux, 2 des lycées et 2 des friches industrielles. Toutes ces opérations ont bénéficié de subventions de l'ADEME pour les surcoûts de maîtrise d'œuvre et les surcoûts de travaux. L'ensemble des chantiers se sont déroulés entre 1999 et 2001. L'objectif est d'apprécier les conditions dans lesquelles la déconstruction peut se développer par une analyse technique, économique, organisationnelle et environnementale de ces 10 opérations, en traitant notamment des délais, de la sécurité, des coûts engendrés et des quantités de déchets valorisés. Un guide est en cours de rédaction et sera publié fin du 1er trimestre 2002. De manière générale, les enseignements à retenir, à partir des 9 opérations achevées, sont les suivants : 1 - Organisation des travaux Les travaux de déconstruction (et donc la dépose des matériaux et équipements préalablement à l'abattage de la structure du bâtiment) ne posent pas de problèmes importants. Ils nécessitent cependant : - la mise en place de mesures de sécurité adéquates pour la réalisation des travaux en terrasse (dépose des complexes d'étanchéité,…), en façades (dépose isolation extérieure, dépose des bardages amiante ciment,…), mesures de protection pour l'utilisation des trémies d'ascenseurs pour l'évacuation de déchets, maintien des gardes corps en façades durant la dépose des matériaux et équipements du second œuvre, protections individuelles pour les travaux sur charpente, pour la dépose de matériaux dangereux (amiante, en particulier), renforcements provisoires de planchers (étaiements)… - l'utilisation d'engins de petites tailles complémentaires pouvant intervenir dans les étages pour la dépose de cloisons et le chargement des déchets (bobcat, minipelles…) - l'utilisation d'équipements et de bennes d'entreposage supplémentaires pour les différentes natures de déchets du second œuvre - des délais supplémentaires (en général, doublement de la durée des travaux) dûs à la dépose préalable. 2 - Données économiques - travaux Le coût des travaux de déconstruction (dépose des matériaux et équipements du second œuvre, abattage de la structure, transport et élimination des déchets, avec concassage sur site ou hors site des bétons de démolition, hors dépose des matériaux contenant de l'amiante) varient de 25 à 45 euros HT / m2 SHOB, sauf pour une opération (entrepôt : 15 euros HT / m2 SHOB). Il faut noter que la déconstruction permet au maître d’ouvrage d'éviter, dans certains cas, des coûts liés à l'achat de matériaux pour le remblaiement des excavations de l'opération même (3 opérations) ou pour la réalisation d'aménagements dans le cadre d'autres opérations (une opération). - maîtrise d'œuvre, au sens large (intégrant les études préalables) Les coûts de maîtrise d'oeuvre des 10 opérations achevées varient de 5 % à 25 % du montant HT des travaux. On peut cependant raisonnablement penser que, pour des opérations futures courantes de déconstruction et sans doublons maîtres d'œuvre / co-maîtres d'œuvres "environnement" (ce qui a été le cas sur certaines des 10 opérations), ces coûts se situeront entre 5 % et 15 %. Les surcoûts de maîtrise d'œuvre sont constitués par l'audit préalable, l'analyse des filières d'élimination, l'estimation é conomique, un DCE plus conséquent et plus précis et un suivi et une analyse du chantier plus importants. Les montants relativement élevés de ces surcoûts constatés s'expliquent notamment par des exigences élevées en terme de suivi et d'informations à recueillir demandées aux bureaux d’études missionnés pour ces opérations ainsi que par le fait qu'en démolition traditionnelle, la mission de maîtrise d'œuvre est très peu développée. 3 - Gestion et élimination des déchets La gestion des déchets sur les chantiers et leur tri ne posent pas de problèmes particuliers. Il est cependant nécessaire de disposer d'espaces suffisants pour les bennes (difficultés donc pour les opérations en quartiers denses et pour les opérations concernant des immeubles anciens), de s ensibiliser et de former les intervenants qui ont une très faible connaissance de la problématique relative aux déchets et de modifier quelques pratiques traditionnelles telles le jet des déchets à partir des étages (ce qui pose des problèmes de sécurité), l'enfouissement sur site de déchets non inertes, le brûlage qui peut avoir un impact sur l'air et la santé,… La déconstruction permet de valoriser les déchets suivants : - le bois, dans certains cas, par valorisation énergétique ou recyclage - le verre, dans certains cas (concurrence du verre ménager) - les métaux (déchets du second œuvre, équipements techniques et armatures pour béton) - et surtout les déchets minéraux (hors plâtre) et principalement la structure béton des bâtiments, par concassage et dé ferraillage. Pour tous les autres matériaux ou équipements, il n'existe pas (ou très rarement) de filières de valorisation, le recyclage étant en outre interdit pour les déchets de matériaux contenant de l'amiante. La difficulté à valoriser les déchets du second œuvre provient de : - un faible degré de tri de ces déchets dans le secteur de la démolition et donc l'inexistence de ces déchets pour les entreprises et les maîtres d'ouvrages (avec une tendance à considérer qu'il n'y a que du béton et des déchets minéraux, le terme "gravats" largement usité dans la profession résumant assez bien cette position) - l'inexistence de filières du fait de gisements non mobilisés, conséquence du premier point - la complexité des produits du bâtiment (du fait des différentes fonction qu'ils doivent assurer) et donc la nécessité, en plus du tri, de séparer les différents composants - la concurrence des déchets ménagers ou d'entreprises d'autres secteurs (verre ménagers, bois,…), mieux caractérisés et moins complexes. Le plâtre en enduit et plus généralement les matériaux à base de plâtre fortement associés à la structure des bâtiments limitent les possibilités de valorisation des déchets minéraux et en particulier des produits issus de leur concassage tels les granulats recyclés (étant entendu que tous les autres produits plâtre sont déposés préalablement à l'abattage de la structure). Les taux de valorisation obtenus sont les suivants : - tous types de déchets confondus : à plus de 90 % pour 9 opérations et seulement à 17 % pour une opération, taux très faible du fait de la présence très importante de plâtre (lycée Raspail à Paris à structure métallique et tenue au feu par cloisons plâtre -mâchefers) - uniquement déchets du second œuvre: autour de 20 % pour les opérations de logements sociaux (structures BA) et à plus de 70 % pour 4 opérations (friche industrielle, lycée, entrepôt et logements ouvriers anciens,), opérations pour lesquelles, certains matériaux en quantités importantes (planchers en bois, charpente et structure métalliques, verre plat courant, radiateurs en fonte, notamment) ont pu bénéficier d'une filière de valorisation. Il est important de noter la part prépondérante des déchets minéraux issus de la structure des bâtiments ou des fondations et des aménagements annexes. Leur recyclage a pour conséquence immédiate un taux de valorisation global très élevé. D'un point de vue qualitatif, la déconstruction permet incontestablement d'améliorer la qualité des déchets minéraux recyclés en granulats et valorisés en en techniques routières ou valorisés en remblaiement et aménagements paysagers. En l'absence d'exigences claires de la réglementation et des normes, les filières peu techniques telles les deux dernières citées, une valorisation est assez souvent réalisée mais avec des déchets pouvant contenir des éléments indésirables et des substances dangereuses. A noter également la nécessité de valider certaines filières et en particulier la valorisation énergétique des déchets de bois. 4 - Insertion de personnes en difficultés et créations d'emplois Dans la plupart des opérations, des personnes en difficultés ont été embauchées pour la durée de réalisation du chantier, voire plus. Dans tous les cas, la déconstruction induit un nombre d'heures de travail plus important qu'en démolition traditionnelle, ce nombre étant fonction du degré de tri et de la complexité des bâtiments à déconstruire. Les premières analyses fournissent un nombre moyen d'heures supplémentaires d'environ 60 % à 80 %. 5 - Méthodes de prescription, appel d'offres et relations contractuelles L'intégrations des exigences environnementales dans les Documents de Consultation des Entreprises (DCE) n'a pas posé de problèmes particuliers, à partir du moment où le Code des Marchés Publics est respecté et où la concurrence entre entreprises n'est pas faussée. L'ajout du taux de valorisation des déchets, dans la liste des critères de choix des offres, est de ce fait tout à fait réalisable. L'audit des bâtiments avant démolition par un bureau d'études (maître d'œuvre) est indispensable et représente le seul moyen, pour les entreprises, de chiffrer correctement leurs offres et pour le maître d'ouvrage de les comparer par la suite. La limite de la mission de l'auditeur doit être clairement établie (audit non destructif et absence de caractérisation des déchets par des essais au laboratoire –sauf détection d'amiante et peinture au plomb-, pour les 10 opérations, objet de cette synthèse). Une visite du site et une visite intérieure des bâtiments est fortement recommandée. Elles peuvent être très utile aux entreprises pour établir leurs offres, notamment en l'absence de plans, en général uploads/Ingenierie_Lourd/ 9-deconstruction.pdf

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