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Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés J 1 002 − 1 Conception idéale d’un problème de génie chimique par Estéban SAATDJIAN Docteur d’État, Docteur-Ingénieur Master of Science, Bachelor of Science Professeur à l’École Nationale Supérieure des Industries Chimiques (ENSIC) e génie chimique est une science pluridisciplinaire en évolution constante depuis sa création au début du XXe siècle. La mécanique des fluides, l’infor- matique, le génie biologique, l’électrochimie, les mathématiques, la photochimie, etc., sont quelques-unes des disciplines qui ont influé sur le génie chimique pendant les trois dernières décennies. Il serait impossible de résumer en si peu de pages toutes les nouveautés, avec leurs conséquences, qui se sont produites depuis 25 ans. L’objectif sera de proposer une voie « idéale » que l’ingénieur pour- rait suivre afin de concevoir, mettre en œuvre et optimiser un procédé. Le terme « idéal » ayant ici une définition thermodynamique, dans la réalité, peu de cas pourront effectivement suivre la démarche proposée. Par ailleurs, il est certain que toutes les considérations importantes ne peuvent pas être prises en compte dans ce qui suit. Par contre, si l’ingénieur trouve une adéquation entre les grandes lignes de l’algorithme proposé sur la figure 1 et son problème actuel, la réussite du projet sera presque toujours garantie. 1. Projets de conception............................................................................. J 1 002 - 2 2. Étape 1. Études au laboratoire : propriétés physiques, caractéristiques cinétiques... ............................................................... — 2 3. Étape 2. Schéma global du procédé................................................... — 3 4. Observations intermédiaires................................................................. — 3 5. Étape 3. Recherche/développement ................................................... — 3 6. Étape 4. Optimisation de l’ensemble du procédé........................... — 4 7. Conclusions ............................................................................................... — 4 L CONCEPTION IDÉALE D’UN PROBLÈME DE GÉNIE CHIMIQUE ____________________________________________________________________________________ Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. J 1 002 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés 1. Projets de conception Le dimensionnement d’une unité de production pour l’industrie chimique nécessite une extrapolation des données obtenues au labo- ratoire. Or le passage d’une échelle réduite à une échelle grandeur nature bouleverse profondément tout le fonctionnement de l’instal- lation. Le lecteur sceptique pourrait se poser la question suivante : étant donné que les équations de conservation de masse, de quantité de mouvement et d’énergie ne dépendent pas de l’échelle, les lois de la cinétique non plus, quelles sont les raisons qui causent ce phénomène ? Au laboratoire, deux liquides visqueux se mélangent de façon homogène ; dans les réacteurs tubulaires, la dispersion radiale peut être négligée ; le contact entre la phase liquide et une phase gazeuse en forme de bulles peut souvent être modélisé en utilisant des hypothèses simplificatrices, les pertes d’énergie sont faibles, etc. Par contre, si l’installation industrielle est calculée en extrapolant l’appareillage de laboratoire, le résultat obtenu sera surprenant. Que peut-on faire ? Quelle différence y a-t-il entre l’approche suivie il y a 30 ans et celle proposée aujourd’hui ? Une réponse partielle à ces questions se trouve dans la « philo- sophie » de l’ingénieur, sa méthode de travail, les outils mis à sa disposition. Il y a 30 ans, l’ingénieur considérait chaque opération comme une « boîte noire » et le rendement optimal était recherché par modification des flux entrants. Les techniques de mesure ont évolué et, aujourd’hui, l’ingénieur a la possibilité d’étudier l’intérieur de l’opération. Un deuxième grand bouleversement est dû au déve- loppement de l’informatique. Des calculs impossibles il y a 30 ans peuvent être effectués en moins de 5 minutes avec les ordinateurs actuels. L’ingénieur peut avoir accès à une quantité presque infinie de données et les traiter simultanément. Les calculs longs et répétitifs ne prennent que peu de temps aujourd’hui grâce aux logiciels conçus dans ce but. L’ingénieur dispose ainsi, et il faut s’en réjouir, de beau- coup plus de temps pour améliorer le procédé. Il en a besoin parce que la compétition économique dans le monde est devenue très rude et la réussite d’une entreprise est souvent liée à sa capacité d’innover. Dans ce qui suit, nous allons suivre, étape par étape, le déroule- ment d’un projet de conception d’une unité industrielle. Nous avons décomposé le tout en quatre blocs qu représentent des tâches dis- tinctes (figure 1). Deux grandes décisions doivent être prises : une première à la fin du dimensionnement global et une seconde à la fin des quatre étapes, pour décider de la mise en chantier de l’unité. 2. Étape 1. Études au laboratoire : propriétés physiques, caractéristiques cinétiques... La première phase de la mise au point d’un nouveau procédé a lieu dans un laboratoire ; des réactions nouvelles y sont étudiées. Ces réactions nouvelles sont, dans certains cas, rendues possibles parce qu’un catalyseur nouveau, ayant une meilleure sélectivité ou moins onéreux, a été mis au point. Dans d’autres cas, ce sont des réactions connues mais non exploitées industriellement qui regagnent en intérêt. Les raisons peuvent être multiples : — un profond changement géopolitique causant une augmenta- tion ou une diminution du prix des matières premières ; — une nouvelle réglementation qui limite considérablement la quantité rejetée d’un produit polluant ; — des études médicales montrant qu’une des substances utilisées provoque des troubles graves ; — une découverte fondamentale en recherche qui rend le procédé rentable ; — etc. Au laboratoire, les objectifs sont de déterminer la vitesse de réac- tion en fonction des paramètres importants (température, pression, concentrations) et d’évaluer les propriétés physiques des substances intervenant dans le procédé (masse volumique, viscosité, conduc- tivité thermique, propriétés thermodynamiques, etc.). En liaison avec l’ingénieur responsable du schéma global du procédé (§ 2), on recherchera les données nécessaires aux calculs des unités de sépa- ration en amont et en aval du réacteur. Cette recherche peut être expérimentale (mesure de la rhéologie d’un fluide non newtonien avec un rhéomètre) ou théorique (calcul de l’enthalpie libre d’excès par « contribution du groupe »). La mise au point de modèles per- mettant de prévoir ces propriétés pour des corps liquides est une des réussites des dernières décennies, bien que ces modèles soient encore assez limités. Le développement de l’informatique a profondément modifié les appareils utilisés au laboratoire puisqu’aujourd’hui la presque- totalité de ces outils sont reliés à un microordinateur. Les thermo- balances, les calorimètres, les chromatographes, les spectromètres, etc., sont ainsi équipés afin de sauvegarder et de traiter les mesures effectuées. Les avantages sont multiples, mais la rapidité et la précision obtenues sont les gains les plus importants. Parmi les appareils nouveaux mis en service récemment, citons le couplage Figure 1 – Partie de l’algorithme global d’un projet, concernée par le génie chimique ___________________________________________________________________________________ CONCEPTION IDÉALE D’UN PROBLÈME DE GÉNIE CHIMIQUE Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés J 1 002 − 3 spectromètre de masse/ chromatographe et les techniques de fluorescence. Enfin, au laboratoire sont conçus les capteurs qui permettent de suivre la variation d’une propriété donnée in situ. 3. Étape 2. Schéma global du procédé Conjointement aux travaux de laboratoire, le dimensionnement de l’unité pilote ou de production est préparé par un ingénieur du bureau d’études. Pour produire une quantité donnée de produit, l’ingénieur calcule tous les appareils intervenant dans le procédé, du réacteur jusqu’à la pompe, le diamètre de chaque tuyau, et choisit le matériau qui sert à le fabriquer. Ce travail est assez long et répétitif, parce que les données peuvent changer souvent en cours de dimen- sionnement. Aujourd’hui, la tâche de cet ingénieur est facilitée par des logiciels de dimensionnement d’installations de génie chimique. La bonne utilisation de ces logiciels assure la conservation de la masse totale dans chaque installation. Les longs calculs mathéma- tiques (par exemple la résolution des systèmes d’équations linéaires nécessaires pour calculer un nombre total de plateaux d’une colonne) sont effectués rapidement. Pour certaines opérations, et notamment celles où deux phases sont en contact, il se peut que l’ingénieur ne dispose pas de données suffisantes pour le dimensionnement de l’installation. Des coeffi- cients d’échange qui caractérisent les transferts thermiques ou mas- siques sont souvent propres au système étudié. Afin de bien calculer ce type d’appareil, la construction de maquettes froides ou éventuel- lement chaudes est impérative. L’ingénieur du bureau d’études devra donc défendre et imposer ces réalisations coûteuses auprès de sa Direction. Ces opérations étant souvent critiques dans le procédé, un dimensionnement erroné peut conduire à une production nette- ment inférieure à celle qui est prévue. L’analyse économique du procédé, un des facteurs les plus importants dans les décisions éven- tuelles, peut ainsi être inexacte. L’ingénieur effectuant ces calculs devra utiliser toute son expé- rience acquise après des années en bureau d’études et sur les chan- tiers afin de soumettre à sa Direction une proposition réaliste. Si c’est le cas, de nombreuses « journées/homme » seront gagnées par la suite. Bien entendu, de multiples modifications restent à faire à ce projet intermédiaire, mais si la solution finale s’écarte trop de celui- ci, quelques uploads/Ingenierie_Lourd/ conception-ideale-d-x27-un-probleme-de-genie-chimique-pdf.pdf

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