Ouvrier-Buffet C. & Perrin-Glorian M.J. (éd.) (2009) Approches plurielles en di

Ouvrier-Buffet C. & Perrin-Glorian M.J. (éd.) (2009) Approches plurielles en didactique des mathématiques. Laboratoire de didactique André Revuz, Université Paris Diderot. pp. 277-293. Modélisation et interactions entre mathématiques et biologie : l’expérience du master professionnel didactique de l’université Paris Diderot Michèle Artigue, Yann Dartois, Nicolas Pouyanne et Guy Rumelhard Groupe Modélisation – IREM Paris 7 Résumé De plus en plus, les curricula mettent l’accent sur la nécessité de connecter l’enseignement des mathématiques à celui des autres disciplines scientifiques et à des situations de la vie réelle, et par voie de conséquence sur la modélisation mathématique. Comme en témoigne l’ouvrage issu de l’Étude ICMI 14 consacrée à la modélisation et aux applications des mathématiques dans l’enseignement, très souvent, les enseignants de mathématiques, de par leur formation, sont peu préparés à une telle évolution. Ils n’ont aucune expérience d’un réel travail de modélisation et leurs interactions avec les enseignants des autres disciplines sont limitées. C’est notamment le cas en France et ceci nous a conduits à proposer un enseignement de modélisation, au sein du master professionnel Didactique de l’université Paris Diderot. Dans cette contribution, après avoir décrit l’organisation de cet enseignement, nous centrons la réflexion sur les interactions entre mathématiques et biologie qu’il permet de mettre en place. Nous le faisons en présentant et analysant un certain nombre de projets qui ont été réalisés par les étudiants depuis la création de cet enseignement. 1. Introduction De plus en plus, les curricula mettent l’accent sur la nécessité de connecter l’enseignement des mathématiques à celui des autres disciplines scientifiques et à des situations de la vie réelle, et par voie de conséquence sur la modélisation mathématique (Conseil scientifique des IREM1 2004). Comme en témoigne l’ouvrage issu de l’Étude ICMI2 14 consacrée à la modélisation et aux applications des mathématiques dans l’enseignement (Blum et al., 2007), très souvent, les enseignants de mathématiques, de par leur formation, sont peu préparés à une telle évolution. Ils n’ont aucune expérience d’un réel travail de modélisation et leurs interactions avec les enseignants des autres disciplines sont limitées. C’est notamment le cas en France et ceci nous a conduits à proposer un enseignement de modélisation, au sein du master professionnel Didactique de l’université Paris Diderot. Dans cette contribution, après avoir décrit l’organisation de cet enseignement, nous centrons la réflexion sur les interactions entre mathématiques et biologie qu’il permet de mettre en place. Nous le faisons en présentant et analysant un certain nombre de projets qui ont été réalisés par les étudiants depuis la création de cet enseignement. Dans cet enseignement, la priorité a été donnée au vécu d’une expérience de modélisation sans se situer d’emblée dans une perspective de transposition didactique. Organiser et faire vivre ces expériences avec des projets renouvelés chaque année, permettre leur capitalisation progressive, a mobilisé jusqu’ici l’énergie du groupe modélisation de l’IREM. La contribution qui a été présentée au colloque n’avait d’autre prétention que de décrire une expérience sans aucun doute originale, dans le contexte français tout au moins, et permettre d’échanger à son propos. Dans la dernière partie du texte, nous revenons cependant sur les choix didactiques effectués dans cet enseignement et sur les conséquences qu’ils nous semblent avoir sur les types de travaux et d’apprentissages réalisés par les enseignants-étudiants l’ayant suivi. Ceci 1 IREM : Institut de Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques. 2 ICMI : International Commission on Mathematical Instruction. MATHEMATIQUES & REALITES –ARTIGUE, DARTOIS, POUYANNE & RUMELHARD 278 nous conduit à questionner cet enseignement à la lumière de travaux didactiques récents sur la modélisation et sa place possible dans la formation des enseignants, tels ceux présentés dans l’étude ICMI déjà citée ou dans les deux numéros spéciaux publiés en 2006 par la revue Zentralblatt für Didaktik der Mathematik. Ce questionnement n’est ici qu’ébauché, mais il montre, nous l’espérons, en quoi l’expérience menée pourrait nourrir une recherche didactique concernant la formation des enseignants et formateurs d’enseignants à la modélisation qui reste, même au niveau international, très limitée. 2. L’enseignement de modélisation du master didactique Cet enseignement a été créé lors de l’habilitation du master professionnel didactique destiné à la formation de formateurs d’enseignants en 2004-20053. Il s’agit d’un enseignement optionnel de 3 ECTS suivi chaque année au deuxième semestre par une vingtaine d’étudiants. Il a été créé pour les étudiants du master professionnel spécialité mathématiques qui sont des enseignants ayant au moins cinq ans d’expérience professionnelle mais est aussi ouvert aux étudiants du master recherche et aux étudiants du master professionnel spécialité sciences physiques et chimiques. Cependant vu le faible effectif de cette spécialité, pour l’instant seul un enseignant de physique a suivi cette option. Après une introduction à la modélisation (3 séances de 3 heures) qui débute par une perspective historique et épistémologique, introduit le cycle de modélisation sous une forme inspirée de (Blomøj & Jensen, 2003) et organise la rencontre avec quelques exemples de modélisations, l’enseignement est organisé autour de l’accompagnement de projets réalisés par des groupes de 3 ou 4 étudiants, exceptionnellement 5. Il alterne sur le semestre des séances de travail de groupes sur les projets, des apports de connaissance en fonction des besoins exprimés par les étudiants, et des présentations et discussions collectives sur les projets en cours de réalisation. Après les soutenances orales, une ou deux séances sont consacrées à un travail plus spécifique sur les questions posées par la transposition didactique des projets réalisés dans l’enseignement ou en formation d’enseignants. Les présentations informatiques préparées pour les soutenances orales et les mémoires écrits des différents groupes sont collectés sur un cédérom pour chaque étudiant et ces derniers ont également accès à tous les mémoires des années précédentes. De plus, un certain nombre de mémoires sont retravaillés par les membres du groupe modélisation pour être mis en ligne sur le site web de l’IREM. Un questionnaire d’évaluation a été élaboré en 2006 et proposé aux étudiants qui avaient suivi l’enseignement les deux premières années. Il a également été soumis aux étudiants ayant suivi l’enseignement en 2007-2008. Comme cela a été mentionné dans l’introduction, cet enseignement s’adresse à un public dont on suppose qu’il a une expérience très limitée des pratiques de modélisation et de l’interdisciplinarité même si certains des enseignants concernés ont une expérience d’encadrement des Travaux personnels encadrés (TPE) au lycée ou se sont investis dans certains des dispositifs qui, tels les Itinéraires de découverte (IDD), au collège, peuvent engager de telles pratiques. Notre point de vue est qu’une réflexion didactique sur ces pratiques et la façon dont elles peuvent être transposées dans l’enseignement secondaire ne peut faire sens sans une expérience personnelle préalable. C’est pourquoi la priorité est donnée dans l’enseignement à ce vécu d’une expérience de modélisation et à son analyse réflexive, sans lier automatiquement le travail réalisé à une exploitation en classe ou en formation. Les sujets de projets s’autorisent ainsi en particulier à sortir du cadre des seules mathématiques de l’enseignement secondaire même si l’expérience montre que les 3 Michèle Artigue, Guy Rumelhard et François Sauvageot ont mis en place cet enseignement. Modélisation et interactions entre mathématiques et biologie 279 mathématiques engagées restent élémentaires et ne sont pas, au moins dans leur forme, celles que l’on rencontre dans les enseignements de modélisation des masters de mathématiques. Les premiers exemples collectivement travaillés dans la partie introductive sont des exemples historiques : modèles du système solaire de Ptolémée à Copernic et Kepler, travaux de Bernoulli sur la variole, modèles d’évolution de populations… Ils servent à mettre en évidence les questions épistémologiques posées par la modélisation telles qu’elles sont abordées par exemple dans les écrits de G. Israël (Israël, 1996) et N. Bouleau (Bouleau, 1999), des questions trop souvent occultées dans ses transpositions scolaires : pluralité des modèles que l’on peut associer à un même fragment de réalité, complémentarité/concurrence entre modèles, importance du travail de critique des modèles et diversité des façons d’y répondre, adaptabilité des modèles qui rend souvent problématique leur invalidation, problèmes posés par les changements d’échelle dans la modélisation, rapports entre modélisations déterministes et stochastiques, diversité des fonctionnalités de la modélisation et des rapports à la modélisation suivant les domaines concernés… Ces exemples historiques servent aussi à introduire de façon élémentaire un certain nombre d’outils mathématiques de base de la modélisation discrète ou continue. Une demi-séance est également consacrée à la présentation et l’analyse d’un projet réalisé une année antérieure et à ses éventuels prolongements pour aider à préciser les attentes. Les étudiants sont ensuite libres du choix de leur projet mais, chaque année, le groupe modélisation prépare un certain nombre de thèmes de projets et les présente aux étudiants. La présence au sein du groupe modélisation de l’IREM d’un biologiste, Guy Rumelhard, a conduit à proposer régulièrement des projets en relation avec les sciences de la vie et la biologie. C’est sur ces interactions modélisatrices entre mathématiques et biologie qui se sont révélées progressivement au fil des années que nous avons choisi de centrer notre contribution au thème Mathématiques et Réalité du colloque. 3. Rencontres entre mathématiques et biologie Le mot modélisation désigne un type bien précis de rencontre entre deux disciplines. La uploads/Ingenierie_Lourd/ g-modelisation.pdf

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