Lettre ouverte à Madame Elisabeth BORNE Première Ministre Madame la Première Mi

Lettre ouverte à Madame Elisabeth BORNE Première Ministre Madame la Première Ministre, Le 26 février 2021, votre prédécesseur signait le 1er contrat français de relance et de transition écologique (CRTE) avec la Présidente de Nantes Métropole. Au cours de sa visite éclair, Monsieur Castex s'était rendu à la station d'épuration de la Petite- Californie, à Rezé, pour inaugurer les installations de la nouvelle unité de méthanisation des boues urbaines. Faire d'un déchet domestique un sous produit énergétique. Autrement dit, lui donner une seconde vie en le recyclant sur place. Belle initiative publique d'économie circulaire qui méritait d'être saluée, effectivement. A cette occasion, j'avais sollicité Madame le Maire de Nantes pour qu'elle remette au Chef du Gouvernement, un courrier par lequel j'attirais son attention sur un autre projet géographiquement proche, le projet de Méthaherbauges. Cette fois, il ne s'agit plus de valoriser des déchets urbains, les boues, mais de faire produire massivement des bouses et des cultures par des agriculteurs-éleveurs-énergiculteurs pour fabriquer du gaz. Changement de paradigme pour l'économie agricole ! Dans les deux cas, il s'agit bien de méthanisation. Mais on ne parle pas de la même chose. N'entretenons pas la confusion ! Avec Méthaherbauges, de quoi parle t-on ? D'une usine à gaz 10 fois plus grosse que toutes celles existant en France. 500 000 tonnes par an ! Le site d'accueil de ce projet prométhéen est à une demi-heure de Nantes, dans une petite commune rurale du sud de la Loire-Atlantique où vivent paisiblement 3000 habitants venus, pour la plupart depuis moins de 20 ans, de l'agglomération nantaise pour y trouver un cadre de vie préservé et riche de ses sociabilités. Cette commune, Madame la 1ère Ministre, C'est la commune où je suis né il y a 67 ans alors qu'elle ne comptait pas 2000 âmes, beaucoup de paysans et quelques rares tracteurs. C'est la commune où j'ai grandi dans une famille modeste, parmi d'autres familles tout aussi modestes d’agriculteurs, de vignerons, d'ouvriers, d'artisans, de commerçants. C'est la commune que nous aimons et que nous avons eu à cœur de développer au fil des générations en respectant son histoire culturelle et ses gens et en s'ouvrant au monde comme en témoigne la mosaïque géante réalisée par 350 habitants pour marquer l'entrée de notre communauté villageoise dans le 3ème millénaire. C'est une commune qui, anticipant la loi Marcellin du 16 juillet 1971, naissait d'une fusion volontaire entre trois petits villages. Un véritable défi à une époque où chacun ne lisait l'actualité du monde qu'à l'aune de son clocher. Cette commune a été nommée Corcoué-sur-Logne, « le petit bois sur l'eau » en pré- celtique, toponyme fédérateur qu'arboraient fièrement les Corcouéens, anciens et nouveaux, en fêtant l'an dernier le demi-siècle de leur rendez-vous réussi avec l'histoire contemporaine. C'est une commune où les habitants se répartissent entre trois bourgs rénovés et 87 hameaux qu'ils ont repeuplés. C'est une commune où 30% de la population a moins de 25 ans, où deux écoles primaires accueillent chaque jour plus de 400 enfants pleins de vie. C'est une commune rurale vivante où les gens travaillent, se parlent, se rencontrent et ont envie de faire mille choses ensemble. C'est une commune tournée résolument vers l'avenir et fourmillante d'initiatives citoyennes, un vivier associatif où les bénévoles rivalisent d'imagination collective pour lui conférer un rayonnement envié. C'est une commune rurale qui a su conserver un esprit sain et hospitalier, première petite collectivité française à avoir obtenu en 2020 le double label Diversité et Egalité. Cette commune, Madame la Première Ministre, c'est la commune dont je suis fier d'être le maire depuis 2008, après en avoir été le premier adjoint pendant 13 ans. C'est dans cette commune, qu'une Coopérative agricole et une Société danoise ont décidé d'implanter sans concertation, la plus grosse usine à gaz agricole de France pour y digérer les effluents d'élevage et les cultures végétales provenant de plus de deux cents exploitations, extérieures à 98% au territoire communal, et disséminées dans un rayon supérieur à 20 kilomètres. C'est vers cette commune que convergeront chaque jour 80 à 100 poids lourds de 40 tonnes, soit 160 à 200 passages, sur des routes communales et départementales dont le gabarit permet tout juste le croisement d'une voiture et d'un car scolaire. C'est dans cette commune qu'on devra accueillir chaque jour, sans l'avoir demandé, 1500 tonnes de bouses et cultures transportées pour produire annuellement 24 millions de m3 de méthane destiné au réseau régional GDF auquel les Corcouéens et les habitants des communes rurales voisines n'ont et n'auront pas accès. C'est dans cette commune et dans bien d'autres semblables, que les terres fertiles deviendront le support inerte de cultures alimentaires détournées vers la production d'une énergie qui n'est ni verte ni renouvelable, contribue à l'appauvrissement des sols et rejette lors de sa combustion des molécules de dioxyde de carbone qui est aussi un gaz à effet de serre. Sans compter les fuites observées sur la plupart des méthaniseurs et qui représentent environ 4,5% du méthane produit. C'est dans cette commune que 10 000 tonnes de bois seront consommées annuellement pour chauffer cette gigantesque usine à gaz. C'est ce qu'il faut pour chauffer 2000 maisons individuelles pendant un hiver. Une telle quantité de biomasse n'est pas disponible localement. Le bois nécessaire sera donc acheminé plusieurs fois par semaine par poids lourds, sur de longues distances. Que restera-t-il aux travailleurs de la terre, des 26 millions d'euros de recette annuelle de la vente du méthane au prix garanti par l'Etat pendant quinze ans, à 100 euros le MGW ? (soit environ 4,5 fois plus cher que le gaz fossile d'importation), sachant que la société multinationale danoise dispose à elle seule de 49% du capital ?.. Comment expliquer à mes concitoyens, notamment à ceux dont les fins de mois sont difficiles, que le prix de l'énergie augmente pour payer ce gaz agricole à prix garanti par l'Etat alors que cet argent pourrait être dédié aux aides à l'isolation de milliers de logements? Ils savent mieux que quiconque que l'énergie la moins chère c'est celle qu'ils ne consomment pas et que celle qui pollue le moins est celle qu'on ne produit pas ! Comment justifier que 130 000 tonnes de cultures, céréalières notamment, seront destinées chaque année à ce seul méga méthaniseur alors que, partout, les pandémies et les guerres font planer le spectre d'une crise alimentaire mondiale? « Que m'importe le gaz me disait un aîné du village, si je n'ai plus d'aliment à faire cuire ! » Cette commune, ma Commune, Madame la Première Ministre, n'a pas le projet ni l'envie de devenir l'emblème de la Nouvelle Agro-Energie-culture de notre Pays et considère que c'est l'agriculture de demain, sur l'ensemble du territoire national, qui est interrogée par ce modèle économique et par l'actualité internationale. C'est dans ce contexte et au vu des nombreux témoignages recueillis auprès de la population que le Conseil municipal de ma commune a unanimement délibéré dès le 19 octobre 2020 pour que soit saisie la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). Demande effectuée via la préfecture mais restée sans réponse. Quelques mois plus tard, en janvier 2021, le président de la SAS Méthaherbauges saisissait à son tour la CNDP. Au mois de mai suivant, deux garantes étaient missionnées par la Commission Nationale pour « ...effectuer la mission de conseil relative à la participation du public... ». Leur diagnostic fut sans appel : concertation insuffisante et nécessité pour les porteurs du projet de préciser les modalités d'une réelle concertation qui ne se limite pas à une simple explication justificative. Celle-ci a eu lieu d'octobre 2021 à Janvier 2022 sous forme de réunions publiques et d'ateliers thématiques ouverts qui ont fait ressortir l'inacceptabilité du projet par la population locale. Le Sénat, dans sa grande sagesse, a produit en septembre 2021, un rapport d'information sur le sujet, dans lequel on peut lire : « Parmi les projets de méthanisation « XXL » à l'étude, celui de Corcoué-sur-Logne, en Loire-Atlantique, mérite à lui seul une mention particulière pour son caractère démesuré...il s'agirait, si toutefois cette installation à l'étude venait un jour à entrer en production, d'un véritable cas d'école de ce qu'il ne faut pas faire. » De son côté, le Département de Loire-Atlantique, sollicité en tant que propriétaire et gestionnaire du réseau routier départemental, a émis un avis défavorable sur le projet à deux reprises. Le président du Département de la Vendée s'est aussi prononcé défavorablement et publiquement en session le 20 septembre 2021. Malgré toutes ces oppositions, le président de la SAS Méthaherbauges campe sur sa position lors de la réunion de bilan de la concertation du 28 janvier 2022 « Rien. On ne change rien » : la réponse du président de la coopérative est aussi franche qu'étonnante. Extrait de Ouest- France édition de Loire-Atlantique. Le projet de méthanisation XXL s'enlise. » La SAS Méthaherbauges a déposé à deux reprises une demande de Permis de construire et d'autorisation d'ICPE (Installation classée pour la protection de l’environnement) les 16 avril et 2 décembre 2021. Instruites par les services de uploads/Ingenierie_Lourd/ lettre-au-premier-ministre-1.pdf

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