La Gazette n° 284 - Du 2 au 29 mai 2013 Tendance jardin: on se la jouait roma L

La Gazette n° 284 - Du 2 au 29 mai 2013 Tendance jardin: on se la jouait roma LE JARDIN DES PLANTES-SUBSTANCES Sur tous les tons C 100 % coton bio, teinture végétale: les tons naturels sans métaux lourds reviennent à la mode. Rouge orangé avec la racine de garance, pourpre avec l’orcanette, bleu avec les feuilles du pastel ou celles de l’arroche sauvage, beige à noir avec l’écorce et les galles de chêne, jaune avec la fleur de souci (photo). Les Romains cultivent déjà les plantes pour teindre leurs vêtements. Ils démêlent la laine avec des cardères (proches des chardons), tannent les cuirs grâce aux tanins extraits de l’écorce des chênes. En guise de colle et d’imperméabilisant pour cruches et jarres, ils utilisent les résines des arbres. Avec la poterie et la taille de pierre, ils développent ainsi une activité artisanale… reléguée à la sortie des villes – l’ancêtre de nos zones d’activité –, du fait de ses nuisances: la fumée, le bruit et l’odeur. LE JARDIN DU TOPIARUS L’esthétique des feuillages C Difficile de créer des spirales? Non: attachez deux ficelles au sommet d’un cyprès et enroulez-les autour en conservant le même écart. Ensuite, il suffit de tailler en creusant entre les deux! Les Romains ne renieraient pas Edouard aux mains d’argent, le cisailleur de Tim Burton. Car, autour du IIIe siècle ap. J.-C., le jardin ornemental devient social, signe de pouvoir et de richesse. Et on s’arrache les jardiniers-artistes reconnus qui, tels des architectes végétaux, sculptent les massifs de buis, de chênes verts, de pins ou de myrtes. Spirales, cônes, globes, colonnes: le feuillage des plantes méditerranéennes, permanent et adapté à la sécheresse, crée une esthétique forte sans irrigation. À Balaruc-les-Bains, malgré l’aqueduc de 5 km retrouvé sous un lotissement – un “petit pont du Gard” –, l’eau est déjà précieuse dans l’Antiquité. Alors pas étonnant qu’aujourd’hui, tout près à Mèze, se trouve l’expert et militant du jardin sec, le pépiniériste Olivier Filippi. www.jardin-sec.com Bien des siècles nous séparent. Mais les pratiques du jardin et la vision de la nature des Romains réinspirent notre époque. Au Jardin antique méditerranéen de Balaruc-les- Bains, tentons un retour vers le futur. Huit clins d’œil fleuris. 48 nature LE JARDIN DE VÉNUS Cosmétiques floraux C L’extraction alcoolique des odeurs, les antiques ne la connaissent pas. Alors que le culte du corps et de l’apparence bat son plein, on embaume avec des onguents, des huiles parfumées, des fumigations. Les fragrances préférées des Romains? La fleur du bigaradier, un agrume frais et féminin, le cyprès, le genévrier ou le chèvrefeuille, plus masculin. Mais surtout la rose, importée par bateaux entiers d’Égypte, de Carthage ou de Cyrénaïque (Libye actuelle): en poudre pour le fard à joue, en lotion ou en crème pour adoucir le visage, en pétales dans les coussins pour parfumer l’atmosphère. Les plus riches peuvent s’offrir des huiles essentielles, extraites par capillarité… grâce à des brins de laine! Un luxe aujourd’hui accessible et très tendance avec l’aromathérapie, les cosmétiques et produits ménagers faits maison. LE JARDIN DE DIOSCORIDE Soins aux plantes magiques C La pharmacie, une affaire de chimie, de dosage, et de principe actif? Pour les Romains, comme aujourd’hui en culture biodynamique, l’effet d’une plante diffère selon suivant son heure et son jour de récolte, la position des étoiles. Perçue comme une substance magique, en lien avec les dieux, elle confère un pouvoir fantastique: la chicorée sauvage soigne les coups de chaleur et attire tout autant la providence. La même plante peut tuer ou soigner et s’utilise en prophylaxie, comme en homéopathie. Arbres à vœux C À leurs branches s’accrochent des bandelettes de tissu où sont inscrits des souhaits, un bout de vêtement pour guérir son propriétaire, ou ces poteries (photo) comme rituel magique. Élevé vers le ciel, l’arbre est le symbole idéal pour parler aux dieux. Surtout que, pour les Romains, il abrite des nymphes, des déités de la nature, telles les amadryades, glissées entre le tronc et l’écorce. Et il est féminin, car il produit des fruits. Ces offrandes païennes, reprises par les religions, se sont parfois transférées vers la Vierge, par exemple au cimetière du Moucadou (mouchoir) à Béziers. LE JARDIN NOURRICIER La vigne dans tous ses états C Alignée toute seule dans un champ? Trop monotone pour la vigne, et l’ivresse des bacchanales! Les Romains cultivent ensemble les vignes (naissantes sur la photo), les céréales, les oliviers et d’autres arbres fruitiers ainsi que des légumineuses (luzerne sur la photo). Ils les plantent en ligne droite, en alvéoles, ou en quinconce selon des espacements très précis. Ils inventent les vignes sur palissades, taillées en corbeille ou en berceaux, et même mariées à des arbres, en prenant ormes ou oliviers pour tuteurs. Car à l’état sauvage, la vigne est une liane dont les deux sexes se trouvent sur des pieds différents, les lambrusques. Aux pieds domestiques, les Romains n’hésitent pas à mêler des pieds femelles sauvages, qu’on retrouve encore sur le pic Saint-Loup. Ensuite, au vin blanc – qui ne tache pas – revient l’exclusivité des libations (les offrandes aux dieux). Et du vin rouge, on fait des cocktails surprenants: on le coupe à l’eau ou à l’eau de mer, on y mêle résines, miel, herbes, ou macération de grenade. À tester? La Gazette n° 284 - Du 2 au 29 mai 2013 Le Jardin antique méditerranéen (JAM) n’est pas une reproduction de villa romaine, mais une création contemporaine, unique en France. Autour d’un bâtiment d’accueil moderne, sur la colline du Puech-d’ Ay, il rassemble sept jardins aux différentes fonctions (agriculture, cuisine, sacré, médecine, cosmétique, artisanat…). Allées fleuries, espaces boisés, fontaines et pergolas rafraîchissantes: la promenade initiatique invite à traverser les périodes de l’ Antiquité, du Iersiècle av. J.-C. au IIIe siècle ap. J.-C, et présente plusieurs belvédères. Mémoire vivante, musée à ciel ouvert, ce jardin évolue au gré des découvertes archéobotaniques et de l’épanouissement de ses 1200 espèces de plantes (dont 485 étiquetées). Créé en 2011 (2M€) et géré par Thau Agglo, il a reçu dès 2012 le label “Jardins remarquables” du ministère de la Culture. Au quotidien, un directeur, deux agents d’accueil et deux jardiniers en prennent soin. Animations: - Parcours ludiques enfants. - Une conférence par mois (24 mai: voir agenda). - 4 expositions: Effigies rituelles ou jouets? Poupées en Antiquité jusqu’au 26 mai. Puis Eaux antiques,etc. - Fêtes de la Nature et de la Biodiversité en mai, Rendez-vous aux Jardins les 1, 2 et 3 juin. - Août: La conférence des oiseaux en lecture poétique et concert. Ouvertdu mardi au dimanche, d’avril à nov., accessible aux personnes à mobilité réduite. Mai-juin: 9h30-12h et 14h-18h30. Vente de miel récolté au jardin, de céramiques, sachets de graines rares et communes,etc. Tarifs:adultes 4€(6€ avec l’audioguide). Gratuit pour les moins de 7 ans, 2€de 7 à 15 ans, 3,50€tarif réduit. Famille 9€(2 adultes et enfants). Visites commentées: 64€par groupe de 10 pers. Rue des Piochs à Balaruc- les-Bains (en tournant à la Cure gourmande, après le premier rond- point, à droite, à côté des serres municipales ou bus n°10), 0467464792, jam@thau-agglo.fr, www.thau-agglo.fr VISITER LE BOIS SACRÉ L’enclos funéraire, un gai cimetière C Des murets et des cyprès, juste à la sortie des villes, bien répartis entre familles et entre catégories sociales. Pas si éloigné de notre cimetière moderne, l’enclos funéraire romain. Comme un temple de la nature cloisonné, pour séparer les morts des vivants… et sans doute à l’origine de tous les jardins ornementaux. Importé de Chypre au Ier siècle ap. J.-C., le cyprès fait figure d’arbre d’éternité. Toujours vert, il tire son nom de la légende de Cyparissos: inconsolable d’avoir tué le cerf favori de son bien-aimé Apollon, ce jeune homme fut transformé en cyprès pour verser des larmes à jamais, emportant l’arbre dans le royaume des ténèbres. Mais chez les Romains, comme au Mexique aujourd’hui, le deuil n’a pas la tristesse facile. Trois fois par an, les Romains font bombance sur place – on retrouve des salles de banquet et des petits restos à Pompéi –, et réservent une part aux morts… jusqu’à envoyer vin et mets dans les fosses par un tuyau! LE CLOS DES APICIUS Arômes culinaires C Fins gourmets, les Romains auraient sans doute fait un carton à Top Chef ou au Dîner presque parfait. Pas vraiment pour la base de leur alimentation – une bouillie fade d’orge et de blé et des pousses de légumes racines –, mais pour leur inventivité à la relever de saveurs âcres, amères, aigres-douces ou “pimentées”. S’ils possèdent déjà des comptoirs “exotiques” d’où ramener des épices, chez eux, ils cultivent les herbes aromatiques bien à part des légumes à gousses, dans leurs parcelles en lanières*. Basilic, thym (photo), marjolaine de Syrie, aneth, cumin, fenouil, sauge ou origan se retrouvent dans les menus gastronomiques et les premiers manuels de cuisine romains. Tout comme le panais ou le radis noir, qui font aujourd’hui un come-back savoureux. *Le potager, lui, n’est apparu qu’au Moyen Âge. et si aine? réalisé par Raquel Hadida / Photos Guillaume Bonnefont - Raquel Hadida / 49 uploads/Ingenierie_Lourd/ gazette-jardin-antique-med-pdf 1 .pdf

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