Flux Grands réseaux techniques, modèles de développement dans le temps : l'exem
Flux Grands réseaux techniques, modèles de développement dans le temps : l'exemple des chemins de fer et de l'électricité Stephen Salsbury, E. Waton Citer ce document / Cite this document : Salsbury Stephen, Waton E. Grands réseaux techniques, modèles de développement dans le temps : l'exemple des chemins de fer et de l'électricité. In: Flux, n°22, 1995. pp. 31-42; doi : https://doi.org/10.3406/flux.1995.1045 https://www.persee.fr/doc/flux_1154-2721_1995_num_11_22_1045 Fichier pdf généré le 12/05/2018 Abstract This essay analyses the growth of large technical systems in the nineteenth and twentieth centuries. For examples, it uses the development of railways in the early nineteenth century and later during the second half of the twentieth century. It also analyzes the problems in developing electric power networks, particularly in the late nineteenth and early twentieth centuries. The purpose of the work is to describe large technical systems at the time of their foundation with the emphasis upon their technical configurations. The paper then analyses the adjustments such systems must make when they interface with other enterprises at the time when they cross political, cultural or geographic boundaries. One issue which is highlighted is the problem of whether large technical systems are driven mainly by engineering forces or whether the predominant forces are political or economic. Résumé Cet article analyse la croissance des grands systèmes techniques au xixe et XXe siècles en prenant comme exemple le développement des chemins de fer au début du xixe siècle et plus tard, dans la deuxième moitié du XXxe siècle. Y sont analysés également les problèmes du développement des réseaux électriques, particulièrement à la fin du xixe et au début du XXe- L'objet de ce travail est aussi de décrire les grands systèmes techniques à l'époque de leur création en insistant particulièrement sur leurs configurations techniques. L'article analyse ensuite les ajustements que ces systèmes doivent opérer quand ils s'interconnectent avec d'autres entreprises à la traversée des frontières politiques, culturelles ou géographiques. Une question est particulièrement soulignée : le problème de savoir si les grands systèmes techniques sont dirigés par les techniciens ou si les forces prédominantes sont politiques ou économiques. Grands réseaux techniques, modèles de développement dans le temps : l'exemple des chemins de fer et de l'électricité STEPHEN SALSBURY Ala hn du xxe siècle, les grands réseaux techniques nous paraissent tout à Lfait ordinaires et naturellement intégrés au paysage économique, social et politique du monde : certains d'entre eux, comme les chemins de fer et l'électricité se sont développés à l'échelle de nations entières ; d'autres, comme les réseaux de télécommunication, ont rapidement dépassé les frontières des pays où ils sont nés pour devenir vraiment internationaux. Avec la tendance croissante à la coopération régionale, dont la quintessence est l'Union Européenne et l'Accord de Libre-Echange Nord- Américain, il apparaît de plus en plus évident que d'autres grands réseaux techniques franchiront les frontières et deviendront des entreprises globales. Dans ces conditions, il est assez facile pour un observateur d'oublier les leçons du passé et de négliger que, dans de nombreux cas, ces grands réseaux techniques débutèrent dans des aires géographiques limitées, sous une juridiction politique unique. Ce travail se concentre sur les origines de deux variétés de grands réseaux techniques : le chemin de fer, qui le devint par hasard et le réseau électrique, la quintessence du modèle, rigoureusement construit presque dès le départ, et sur les problèmes inhérents à leur croissance d'abord jusqu'au niveau véritablement national et ensuite, vers le niveau d'unités transnationales. Stephen SALSBURY est Professeur d'Histoire Economique et Doyen de la Faculté d'Economie à l'Université de Sydney, Australie. Il a fait ses études aux États-Unis et a obtenu son Ph.D d'Harvard University. Ses livres traitent de l'histoire des entreprises, et ses principaux ouvrages sont The State, The Investor and the Railroad: The Boston and Albany 1825-1867 (1967); Pierre S. du Pont and the Making of the Modern Corporation (avec Alfred D. Chandler Jr., 1971); No Way to Run a Railroad: The Untold Story of the Penn Central Crisis (1982); et The Bull, the Bear and the Kangaroo: The History of the Sydney Stock Exchange (with Kay Sweeney, 1988). Il écrit actuellement l'histoire de Westpac, la plus grande banque australienne. QUELQUES DEFINITIONS A ce stade, il est nécessaire de donner quelques définitions. Bien que beaucoup de choses aient été écrites sur la nature des grands réseaux, je suivrai pour ce travail la définition du Webster's Dictionary qui maintient qu'un système est un "groupe d'objets régulièrement interactifs formant un tout unifié" ou "un groupe d'outils ou d'objets artificiels, ou une organisation formant un réseau, spécialement dans le but de distribuer quelque chose ou servir à un usage commun" comme un réseau de transport ou de communications. Les réseaux eux-mêmes n'ont pas besoin d'être particulièrement techniques. Par exemple, les anciennes administrations postales reposaient sur un haut degré d'organisation humaine pour transporter et délivrer le courrier à travers un pays et même à travers le monde mais, au début au moins, avec une technologie fort peu avancée : chevaux, chariots, diligences et voiliers constituaient les moyens de base du transport du courrier avant le chemin de fer. 31 FLUX n°22 Octobre - Décembre 1995 De façon analogue, les réseaux de transport sur l'eau, même les canaux, étaient faits de composants techniques fort peu sophistiqués. La partie la plus complexe d'un canal, c'est sa construction même, et spécialement la conception et la mise en oeuvre des bassins et écluses qui permettent aux péniches de monter ou de descendre les obstacles du terrain qui séparent les voies navigables. Les canaux demandent aussi occasionnellement des tunnels, des ponts et des viaducs, cependant, fort peu de la technologie utilisée pour construire et entretenir des canaux aurait été inconnue des ingénieurs romains. En outre, la conduite des péniches nécessite encore moins d'organisation. La plupart des canaux étaient gérés, et continuent à être gérés, comme des autoroutes : ils sont ouverts à tous ceux qui veulent les emprunter et qui sont prêts à payer les droits de passage. En conséquence, l'organisation des mouvements le long d'un canal n'occupe que des douzaines de petits, moyens et grands exploitants de batellerie qui considèrent comme totalement inutile de coordonner leurs activités avec le constructeur ou l'exploitant même du canal. La seule restriction qui puisse se présenter est la limitation des dimensions des bateaux, dictée par la profondeur et la largeur des écluses et des canaux eux-mêmes. Ainsi donc, même les grands réseaux de canaux comme celui de l'Etat de l'Ohio, aux États-Unis, qui, dès 1845, exploitait, sous la supervision d'un Bureau du Canal, plus de 900 miles d'ouvrages d'art, n'avaient que des équipes techniques et administratives très réduites. Harry Scheiber, dans son livre The Ohio Canal Era, note "qu'une fois les canaux originaux sur le point d'être achevés, la quantité et la complexité de la tâche accomplie par le ... [Bureau du Canal] diminua considérablement : l'exploitation nécessita bien moins d'organisation véritable qu'au moment où devaient être coordonnés entre eux des milliers d'ouvriers, des tas d'entreprises et un large état-major d'ingénieurs." En fait, le vaste réseau de l'Ohio, qui était l'un des plus grands des États- Unis en 1858, n'employait régulièrement que moins de 200 personnes à temps plein (ou équivalent temps plein). La plupart de ces derniers étaient des péagers ou autres ouvriers qui n'avaient que très peu ou pas de qualification technique1. Le second élément, qui doit ainsi entrer dans notre définition est que les réseaux, afin d'être des grands réseaux techniques doivent contenir un apport scientifique substantiel. Il est capital que des considérations techniques et scientifiques aient un impact vital sur la façon dont un réseau est organisé et exploité. Ces contraintes doivent dépasser, ou au moins contrebalancer, les apports politiques et économiques au réseau. En conséquence, les réseaux techniques, en particulier dans l'industrie (électricité, transport par rail, télécommunications) doivent développer des structures similaires et présenter des modes opératoires analogues même dans un environnement radicalement différent, politiquement, économiquement et socialement. A la lumière de ces définitions, les grands réseaux, comme la poste à ses débuts, les canaux ou les autoroutes et le transport routier, ne sont pas de grands réseaux techniques. Au contraire, la définition convient parfaitement aux diverses entreprises qui ont construit et exploité les chemins de fer, le télégraphe, le téléphone, l'énergie électrique et le contrôle aérien. Il doit être souligné que, dans ces cas précis, les considérations techniques et scientifiques sont d'une suprême importance à la fois dans la construction et l'exploitation de ces systèmes. Certains grands réseaux techniques anciens, les chemins de fer en particulier, n'étaient pas conçus de prime abord. Une analyse des premiers statuts des chemins de fer, aux États-Unis, montre que le corps législatif envisagea le chemin de fer comme une nouvelle sorte de voie de déplacement à péage qui fonctionnerait par traction équine, ou peut-être à la vapeur. Les statuts de la Boston & Worcester Railroad de 1831, délivrés par l'État du Massachusetts, laissaient supposer que la circulation se ferait sur les voies ferrées comme sur les canaux : c'est- à-dire, sous le contrôle d'exploitants différents qui feraient fonctionner les trains à leur gré sans uploads/Ingenierie_Lourd/ grands-reseaux-techniques-chemins-de-fer-et-electricite.pdf
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- Publié le Jul 07, 2021
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