UNIVERSITE DE LA SORBONNE NOUVELLE – PARIS III U.F.R. d’Études Ibériques et Lat

UNIVERSITE DE LA SORBONNE NOUVELLE – PARIS III U.F.R. d’Études Ibériques et Latino-Américaines Thèse de Doctorat Nouveau Régime Études Lusophones (Littérature Brésilienne) Ilana HEINEBERG LA SUITE AU PROCHAIN NUMÉRO : Formation du roman-feuilleton brésilien à partir des quotidiens Jornal do commercio, Diário do Rio de Janeiro et Correio mercantil (1839-1870) Thèse dirigée par Mme Jacqueline PENJON Soutenue le 30 septembre 2004 Volume I Jury : Mme Jacqueline PENJON, Professeur (Paris III) Mme Anne-Marie QUINT, Professeur émérite (Paris III) Mme Magdelaine RIBEIRO, Professeur émérite (Bordeaux III) Mme Rita GODET, Professeur (Rennes II) Introduction C’est en 1839, trois ans seulement après le lancement du roman- feuilleton par l’éditeur français Émile Girardin dans le quotidien La Presse1, que le Jornal do commercio publie O Aniversário de D. Miguel em 1828. Il s’agit du premier texte brésilien en épisodes paru en bas de page, ou, selon le jargon journalistique, au « rez-de-chaussée ». À l’instar de leurs confrères français2 les principaux écrivains brésiliens, comme Machado de Assis, José de Alencar et Joaquim Manuel de Macedo, se lancent dans ce genre de publication. Cependant, si les journaux français comptent sur le roman-feuilleton pour attirer des abonnés, au Brésil, ce genre contribue à la naissance du roman national. D’une part, la presse rend rapidement accessible les derniers succès romanesques européens à un public naissant ; d’autre part, elle représente pour les écrivains nationaux une alternative au marché du livre qui fait alors ses premiers pas. Le roman-feuilleton apparaît par conséquent comme un passage obligatoire pour comprendre la genèse du genre romanesque au Brésil. Les nombreuses études récentes sur le sujet témoignent de l’intérêt de la critique 1 Il s’agit de la nouvelle Patrona Calil d’Alphonse Royer. Au même moment, Armand Dutacq, ancien associé de Girardin, lance Le Siècle, sur des principes identiques à ceux de La Presse. À l’exemple de l’Angleterre, le prix de l’abonnement du journal est réduit de moitié grâce aux annonces publicitaires. Pour attirer les abonnés et donc les annonceurs, les éditeurs ont recours au roman, le genre à la mode. Dans Le Siècle, une version du roman picaresque espagnol Lazarillo de Tormes inaugure la formule du roman en épisodes. Le Capitaine Paul, d’Alexandre Dumas, publié en 1838 par Le Siècle, est le premier roman complet, paru en feuilletons, à mettre en œuvre le savoir-faire du découpage. littéraire pour cette problématique, même si peu d’entre elles se sont véritablement penchées sur l’analyse des textes en question. Marlyse Meyer donne une nouvelle impulsion aux recherches sur le roman-feuilleton, notamment grâce à son Folhetim : Uma história3. Dans cette étude, la critique part d’une recherche sur les sources européennes du roman brésilien, essentiellement celles qu’elle considère comme étant de la « sous- littérature4 ». La critique entreprend un travail de longue haleine, ce qui lui permet de mettre en évidence les phases générales du roman-feuilleton. Même si la matière de son corpus est extraite de la presse brésilienne, sa recherche s’appuie sur les textes d’auteurs étrangers publiés au Brésil. La thèse de Pina Arnoldi Coco5 a pour objectif de déterminer la spécificité du roman-feuilleton brésilien à partir de la lecture de récits fictionnels dans une cinquantaine de périodiques, de 1840 à 1880. L’ampleur de son corpus apporte une vision de l’ensemble ; il manque néanmoins une analyse détaillée de la poétique et de la rhétorique feuilletonesques. Flora Süssekind, à son tour, sans proposer d’étudier spécifiquement le roman- feuilleton, a recours à celui-ci pour établir la constitution du narrateur de fiction brésilien dans O Brasil não é longe daqui. À noter également son travail de récupération de A Família Agulha, roman de notre corpus, par le biais d’études critiques et de deux nouvelles éditions de ce texte6. José Ramos Tinhorão, quant à lui, se tourne vers les textes nationaux dans Os Romances em folhetins no Brasil7, où il établit une liste de textes fictionnels publiés par épisodes de 1830 à 1994. Compte tenu de ce vaste objectif, son inventaire est loin d’être exhaustif. D’autres chercheurs se sont 2 Les principaux romanciers et nouvellistes de la Monarchie de Juillet (1830-1848) ont publié des romans-feuilletons : Honoré de Balzac, Alexandre Dumas, Eugène Sue, Paul Féval, Frédéric Soulié. 3 Marlyse MEYER, O Folhetim : uma história, São Paulo, Companhia das Letras, 1996. L’auteur commence à étudier le roman-feuilleton à la fin des années 1860. Cf. Bibliographie. 4 En fait, Marlyse Meyer parle de « novelas de segundo time ». 5 Pina Maria Arnoldi COCO, O Triunfo do bastardo : uma leitura dos folhetins cariocas no século XIX, Tese de doutorado, Rio de Janeiro, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro, 1990, 2 vol. 6 Cf. Bibliographie. 7 José Ramos TINHORÃO, Os Romances em folhetins no Brasil, São Paulo, Livraria Duas Cidades, 1994. 3 souciés de réhabiliter les textes des journaux du XIXe siècle. Tania Rebelo Costa Serra, après avoir effectué plusieurs études critiques sur le genre8, publie une Antologia do romance-folhetim9. Ce travail, qui doit se poursuivre avec la publication d’un deuxième volume, sans privilégier les inédits, propose une nouvelle édition des textes déjà inscrits dans l’anthologie de Barbosa Lima Sobrinho10. Mamede Moustafa Jarouche11, quant à lui, à partir de la récupération de la version originale de Memórias de um sargento de milícias publiée dans le Correio mercantil, propose une nouvelle lecture de l’œuvre de Manuel Antônio de Almeida. En rétablissant le contexte de publication de l’œuvre, l’auteur fait ressortir son caractère politique (libéral), comique et pamphlétaire. Nous trouvons, en outre, des travaux qui, à partir des bases historiques de Marlyse Meyer, se penchent sur les spécificités régionales du roman-feuilleton. C’est le cas notamment de la thèse d’Antonio Hohlfeldt12 qui se consacre à l’étude de trois romans-feuilletons publiés dans la presse gaúcha. L’auteur situe sa recherche dans le champ des études culturelles, sans négliger la perspective marxiste d’Antonio Gramsci et les outils d’analyse du formaliste russe Boris Tomachevski. La thèse de Yasmin Jamil Nadaf13, quant à elle, après une reprise de l’histoire du roman-feuilleton jusqu’à son arrivée à Rio de Janeiro, s’intéresse aux bas de page des journaux du Mato Grosso. Malgré l’étendue de ces études, nous constatons de nombreuses lacunes, notamment en ce qui concerne l’analyse des textes. Nous nous proposons donc de suivre la formation du roman-feuilleton au Brésil à partir du 8 Cf. Bibliographie. 9 Tania Rebelo Costa SERRA, Antologia do romance-folhetim (1839-1870), Brasília, Ed. UnB, 1997. 10 Barbosa LIMA SOBRINHO, Precursores do conto no Brasil, São Paulo, Civilização Brasileira, 1960. 11 Mamede Moustafa JAROUCHE, Sob Império da Letra : Imprensa e política no tempo das « Memórias de um Sargento de Milícias », Tese de doutorado, São Paulo, FFLCH, 1997. Suite à cette recherche, l’auteur a préparé une nouvelle édition pour le texte (Manuel Antônio de ALMEIDA, Memórias de um sargento de milícias, São Paulo, Ateliê Editorial, 2001). 12 Antonio HOHLFELDT, Deus escreve direito por linhas tortas : O romance-folhetim dos jornais de Porto Alegre entre 1850-1900, Tese de doutorado, Porto Alegre, Pontifícia Universidade Católica do Rio Grande do Sul, 1998. 13 Yasmin Jamil NADAF, Rodapé das miscelâneas, Rio de Janeiro, Sete letras, 2002. 4 matériel fourni par notre corpus : son organisation narrative, ses thématiques récurrentes, ses emprunts. Au fil de nos lectures, le dialogue entre le narrateur et son narrataire, reflétant les rapports entre l’auteur et son public, s’est imposé comme un indicateur de l’évolution du genre et du système littéraire. Les extraits discursifs peuvent contenir une notice explicative, un rappel du pacte de lecture ou, plus tard, une mise à nu des artifices fictionnels. Nous nous sommes servie des approches narratologiques classiques14 pour comprendre ces enjeux, ainsi que, plus généralement, des théories sur le roman et le roman- feuilleton15. Nous nous sommes intéressée aux textes accessibles non pas au public de spécialistes qui suivait de près la vie littéraire de l’époque dans les revues littéraires, mais aux lecteurs moyens, donc plus nombreux. Par conséquent, nous avons choisi de travailler sur les quotidiens d’information, laissant de côté les journaux hebdomadaires ou spécialisés, comme les périodiques littéraires, satiriques, ou féminins16. Nous avons ainsi affaire à un public hétéroclite qui comprend non seulement le chef de famille, mais aussi son épouse, la sinhazinha17, ou l’étudiant, probablement tous attirés par cette tranche de fiction quotidienne. Ce public hétérogène représente, selon nous, 14 Les concepts de Gérard Genette et Tzvetan Todorov nous ont été particulièrement utiles. Cf. Bibliographie. 15 Cf. Bibliographie. 16 À l’époque, la presse fleurissait à Rio de Janeiro, mais la plupart des périodiques étaient des publications éphémères. Pour exemple, nous citons quelques titres qui publiaient des romans- feuilletons : Correio das Damas (jornal de literatura e modas), Gabinete de Leitura (Serões das Famílias Brasileiras), Correio das Modas (Jornal crítico e literário das modas, bailes, teatros, etc.), A Nova Minerva (Periódico dedicado às ciências, artes, literatura e costumes), Revista Universal Brasileira, Íris (Periódico de religião, belas artes, ciências, letras, história, poesia, romances, notícias e variedades), Museo Pitoresco, Histórico e Literário ou Livro Recreativo das Famílias, Guanabara (Revista mensal artística, científica e literária dirigida por uma associação de literatos), A Marmota na Corte, O Beija-Flor (Jornal uploads/Litterature/ heineberg-la-suite-au-prochain-numero.pdf

  • 14
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager