La guerre secrète contre la Russie soviétique LA GRANDE CONSPIRATION Michel SAY

La guerre secrète contre la Russie soviétique LA GRANDE CONSPIRATION Michel SAYERS et Albert E. KAHN Traduit de l’Américain par ALBERT GERMAIN 1 AVANT-PROPOS Dans la préparation de cet ouvrage, les auteurs ont copieusement utilisé les documents officiels du Département d'Etat des États-Unis, les débats et les rapports de diverses Commissions du Congrès des Etats-Unis, les documents officiels publiés par le Gouvernement de Grande-Bretagne, et les comptes rendus in extenso, publiés par le Gouvernement soviétique, des débats des procès d'espionnage, de sabotage et de haute-trahison qui ont eu lieu en U.R.S.S. depuis la Révolution. Aucun des événements ou dialogues mentionnés dans ce livre n'a été inventé par les auteurs. Tous les matériaux utilisés proviennent des diverses sources indiquées, dans le texte ou dans les notes bibliographiques. Ils désirent exprimer leur gratitude en particulier à Messieurs Harper, pour l'autorisation qu'ils leur ont donnée de citer longuement Britain's Master Spy : Sidney Reilly's Narrative written by Himself, edited and compiled by his Wife (Un maître espion anglais: les aventures de Sidney Reilly écrites par, lui-même, éditées et réunies par sa femme). Ils désirent aussi reconnaître ce qu'ils doivent à M. Cedric Belfrage, pour l'aide qu'il leur a apportée dans les recherches et la rédaction des premiers états de cet ouvrage. Le lecteur trouvera à la fin de certains chapitres une liste des principales références, relatives au ou aux chapitres qui précèdent. Ces références ne constituent en aucune façon une bibliographie qui épuise le sujet. Elles n'ont pour objet que d'indiquer les sources que les auteurs ont jugées particulièrement utiles, et dans certains cas, indispensables. 2 3 LIVRE PREMIER RÉVOLUTION ET CONTRE-RÉVOLUTION 4 5 CHAPITRE PREMIER LA MONTEE DU POUVOIR SOVIETIQUE 1 Mission à Petrograd1. Au cours de l'été de la décisive année 1917 et tandis que le volcan révolutionnaire russe grondait et bouillonnait, un Américain, le major Raymond Robins arriva à Petrograd, chargé d'une mission secrète de la plus haute importance. Officiellement, il voyageait en qualité de chef adjoint de la Croix-Rouge américaine. Mais en fait il appartenait au Service de renseignements de l'armée américaine. Sa mission secrète consistait à aider an maintien de la Russie dans la guerre contre l'Allemagne. La situation sur le front oriental était désespérée. L'armée russe, misérablement équipée et mal commandée, avait été mise en pièces par les Allemands. Ebranlé par la guerre et pourri de l'intérieur, le régime féodal tzariste avait chancelé et s'était écroulé. En mars 1917, le tsar Nicolas II avait dû abdiquer et un Gouvernement provisoire avait été mis en place. Le mot d'ordre révolutionnaire: « Du Pain, la Paix et de la Terre ! » se répandait dans le pays, résumant toutes les aspirations anciennes et les espoirs de l'heure des millions de Russes pauvres, affamés, fatigués de la guerre. Les alliés de, la Russie, la Grande-Bretagne, la France et les Etats-Unis d'Amérique, craignaient que l' armée russe abandonnât la lutte. A tout moment, un million de soldats allemands pouvait tout à-coup être retiré du front oriental et jeté, à l'Ouest contre les forces alliée épuisées, La perspective que le blé de l'Ukraine, le charbon du Donetz, le pétrole du Caucase et toutes les autres ressources illimitées du sol russe puissent tomber dans les griffes rapaces de l'Allemagne impériale, était également alarmante. Les Alliés s'efforçaient désespérément de maintenir la Russie en guerre, au moins jusqu'à ce que les renforts américains eussent atteint le front occidental. Le major Robins 'était l’un des nombreux officiers du Service de renseignements, diplomates et militaires à la fois, qu'on avait dépêché d'urgence à Petrograd pour tenter l'impossible afin de conserver la Russie en guerre... Agé de 43 ans, d'une énergie sans limite. doué d'une éloquence extraordinaire et d'un grand charme personnel, avec ses cheveux noir, et son visage d'aigle, Raymond Robins était une personnalité distinguée, bien connue du public américain. II avait abandonné une situation brillante dans les affaires à Chicago pour se consacrer à la philanthropie et au travail social. Politiquement; il était du parti de Roosevelt., Il avait joué un rôle de premier plan dans la fameuse campagne de 1912, où son héros, Théodore Roosevelt, avait essayé de parvenir â la Maison blanche sans l'aide de la haute finance ou des machinations politiciennes. Robins était un militant libéral, un combattant infatigable et vibrant pour toutes les causes où il s'agissait de lutter contre la réaction. Quoi, Raymond Robins? Cet homme de Roosevelt? Qu'a-t-il à faire ici?, s'exclama le colonel William Thompson, chef de la Croix-Rouge américaine en Russie, quand il apprit que Robins lui était donné comme adjoint. Le colonel Thompson était un républicain et un opportuniste. Personnellement il avait des intérêts considérable dans des affaires russes, dans des mines de cuivre et de manganèse. Mais le colonel Thompson était aussi un observateur réaliste et clairvoyant. Et il avait déjà, en privé, décidé qu'on n'obtiendrait rien par la manière conservatrice que les dirigeants officiel du Département d'Etat des Etats-Unis adoptaient a l'égard de la situation troublée de Russie. David Francis, l'ambassadeur américain en Russie à cette époque, était un vieux banquier de Saint- Louis, entêté et grand joueur de poker qui avait été auparavant gouverneur de l'Etat de Missouri. Il faisait étrange figure dans l'atmosphère fiévreuse du Petrograd révolutionnaire, avec ses cheveux blancs, ses grands faux-cols empesés à la vieille mode et son habit noir. Le vieux Francis, disait un diplomate britannique, ne distinguerait pas un socialiste révolutionnaire d'une pomme de terre ! Mais l'ignorance de Francis en ce qui concerne la politique russe ne faisait que renforcer ses convictions. Lesquelles découlaient généralement du bavardage des généraux et des millionnaires tzaristes incompréhensifs qui fréquentaient l'ambassade américaine à Petrograd. Francis affirmait donc que toute la Révolution russe était le résultat d'un complot allemand et que tous les révolutionnaires russes étaient des agents de l'étranger. En tout état de cause, il pensait que toute cette affaire serait rapidement, liquidée. Le 21 avril 1917, l'ambassadeur Francis avait envoyé un télégramme confidentiel à Robert Lansing 1 Petrograd était la capitale de la Russie tsariste. La ville s'appelait à l'origine Saint-Pétersbourg, en l'honneur de son fondateur Pierre-le-Grand. On donna à son nom la forme plus russe de Petrograd au début de la première guerre mondiale. Après la Révolution bolchevique, Moscou devint la nouvelle capitale ; et en 1924, après la mort de Lénine, on donna à l'ancienne capitale le nom de Leningrad. 6 secrétaire d'Etat des Etats-Unis : «SOCIALISTE EXTRÉMISTE Ou ANARCHISTE NOMMÉ LÉNINE FAIT VIOLENTS DISCOURS SOUTENANT DE CE FAIT LE. GOUVERNEMENT ; A DESSEIN ON LUI LAISSE CHAMP LIBRE; SERA DÉPORTÉ EN TEMPS OPPORTUN » Mais la Révolution russe loin de s'apaiser après le renversement du tsar, ne faisait que commencer. L’armée russe se dissolvait et personne en Russie: ne semblait capable de s'y opposer. Alexandre Kerenski, l'ambitieux premier ministre du Gouvernement provisoire, faisait des tournées au front oriental, eu prononçant d'éloquents discours devant les soldats ou il les assurait que « la victoire, la démocratie et la paix » étaient à portée de la main. Nullement impressionnés, les soldats russes affamés et révoltés continuaient à déserter par dizaines de mille. En uniformes déguenillés, leurs flots se répandaient sans fin dans les campagnes, dans les champs embourbés par la pluie, le long des routes et des chemins, dans les villages et dans les villes2. A L’arrière, les soldats russes, de retour au pays, rencontraient les ouvriers et paysans révolutionnaires. Partout, soldats, ouvriers et paysans formaient des comités révolutionnaires, ou Soviets, comme ils les appelaient, et élisaient des députés pour' faire entendre leurs mots d'ordre : « Paix, Pain et Terre », au quartier général du Gouvernement à Petrograd. Quand le major Raymond Robins arriva à Petrograd, le pays était submergé par un flot de pauvre gens désespérés et affamés. Dans la capitale, parvenaient sans cesse des délégations de soldats venant en droite ligne des tranchées boueuses du front et réclamant la fin de la guerre. Des émeutes provoquées par la famine se produisaient presque tous les jours. Le Parti bolchevik de Lénine, l'organisation des communistes russes que Kerenski avait déclaré illégale et qui se maintenait, clandestinement, croissait rapidement en puissance et en prestige. Raymond Robins refusa de tenir pour vraies les opinions de l'ambassadeur Francis et de ses amis tzaristes sur la Russie. Il perdit peu de temps dans les salons de Petrograd et se mit en « campagne », selon ses propres termes, pour voir, la situation de ses propres yeux. Robins croyait passionnément à ce qu'il appelait « l'esprit de la rue, cette chose qui est commune en Amérique chez les hommes d'affaires qui réussissent, un état d'esprit qui ne s appuie pas sur les bavardages, mais qui cherche constamment à atteindre les faits ». Il voyagea dans le pays, visita les usines, assista aux réunions syndicales, entra dans les casernes militaires et alla même dans les tranchées infestées de rats du front oriental. Pour voir ce qui se passait en Russie, Robins se mêla au peuple russe. Cette année, la Russie ressemblait à un immense congrès turbulent. Après, des siècles de silence forcé, le peuple uploads/Litterature/ la-grande-conspiration-contre-la-russie.pdf

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