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Tous droits réservés © Revue québécoise de psychologie, 2017 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 9 mars 2023 16:40 Revue québécoise de psychologie LA VIE DE COUPLE ET LE BONHEUR MARRIAGE AND HAPPINESS Léandre Bouffard Volume 38, numéro 2, 2017 LE BONHEUR 3.0 (2e partie) HAPPINESS 3.0 (2nd part) URI : https://id.erudit.org/iderudit/1040774ar DOI : https://doi.org/10.7202/1040774ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Revue québécoise de psychologie ISSN 2560-6530 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Bouffard, L. (2017). LA VIE DE COUPLE ET LE BONHEUR. Revue québécoise de psychologie, 38(2), 127–151. https://doi.org/10.7202/1040774ar Résumé de l'article Le présent essai a pour objectif de donner un aperçu – non pas une revue exhaustive – des résultats de recherche sur l’association couple – bonheur. Il existe une corrélation universelle et présente à toutes les périodes de la vie. De plus, il apparaît que la relation maritale doit être nourrie et qu’elle doit évoluer pour durer. Les résultats appuient également l’idée qu’il faut un certain temps pour que se dissipe l’effet du mariage, du divorce et du veuvage. Enfin, des études récentes font état d’une relation négative entre la cohabitation et le bonheur, mais les résultats ne sont pas concluants. En conclusion, il est suggéré d’effectuer un important travail d’éducation auprès des jeunes qui abordent la vie de couple sans préparation. Il y aurait lieu de poursuivre la recherche sur la cohabitation, particulièrement dans la société québécoise. Revue québécoise de psychologie (2017), 38(2), 127-151 LA VIE DE COUPLE ET LE BONHEUR1 MARRIAGE AND HAPPINESS Léandre Bouffard2 Université de Sherbrooke L’attachement intime à d’autres êtres humains est le pivot autour duquel tourne la vie d’une personne, non seulement lorsqu’il est bébé, enfant ou écolier, mais aussi au cours de l’adolescence, des années de maturité et jusque dans la vieillesse. De tous ces attachements, une personne tire sa force et sa joie de vivre (Bowlby, 1980, p. 442, traduction libre). Un bon mariage vous donne des ailes et fait sortir le meilleur de vous; un mauvais mariage vous emprisonne et fait sortir le pire (Lyubomirsky, 2013, p. 51, traduction libre). Le mot ‘aimer’ en chinois englobe trois idéogrammes : une main, un cœur et un pied, parce que l’on doit exprimer son amour en tenant son cœur dans ses mains et marcher jusqu’à la personne qu’on aime pour le lui tendre (Kim Thuy, 2013, p. 117). Mieux vaut vivre à deux que seul […]. En cas de chute, l’un relève l’autre. Dommage pour l’isolé qui tombe, sans personne pour le relever (Ecclésiaste, 4, 9-10). INTRODUCTION Le mariage – la vie de couple – favorise-t-il vraiment le bonheur? À première vue, il semble que non : « Le mariage n’a plus la cote », selon Myers (1993). « Le mariage connaît une crise de légitimité », selon Bruckner (2010). Le philosophe3 Schopenhauer (1788-1860) ne disait-il pas que le mariage « C’est une dette contractée dans la jeunesse que l’on paye dans l’âge mûr ». On observe qu’on se marie moins et plus vieux, qu’on divorce plus et qu’on préfère l’union libre. Quant aux couples qui durent, que d’ennuis, de conflits et de violence physique et verbale. Myers (1993, p. 159) rapporte le témoignage d’une institutrice de 34 ans : « Cette semaine mon mari était absent : quelle belle semaine! […] Est-ce que je me marierais encore? Non! ». Et que de tristes expériences pourraient rapporter les psychothérapeutes. 1. L’auteur remercie Sylvie Lapierre, Albert Drouin et Hélène Bourassa pour leurs judicieux commentaires lors de la rédaction du présent texte. 2. Adresse de correspondance : leandrebouffard1939@yahoo.ca. 3. Incidemment, plusieurs grands philosophes n’étaient pas mariés; par exemple, Héraclite, Platon, Descartes, Spinoza, Leibniz, Kant, Schopenhauer et Nietzsche. Socrate a été l’exception et Bouddha quitta son foyer. Vie de couple et bonheur 128 L’attitude à l’endroit du mariage s’est donc aigrie (Tashiro et Frazier, 2003), comme le traduit la sentence cynique : « Le mariage est une forteresse : ceux qui sont à l’extérieur se battent pour y entrer tandis que ceux qui sont à l’intérieur se battent pour en sortir » (anonyme). D’où la réticence de certains : « Pourquoi m’engager? ». D’où la recommandation de Paul de Tarse : « Je dis aux célibataires et aux veuves qu’il est bon de demeurer comme moi [célibataire] » (Cor, I, 7, 8). D’où ce livre de Hardy (1887) dont le titre est fort évocateur : How to be happy though married4. Pourtant, la littérature scientifique donne un autre son de cloche. Ces écrits sont si abondants – fondements théoriques, facteurs de succès de la relation, problèmes spécifiques, corrélations nombreuses, variables modératrices, conditions socio-économiques, etc. – qu’une revue exhaustive déborderait des cadres du présent article. Nous présenterons plutôt, dans cet essai, un certain nombre d’études récentes afin de donner un aperçu de l’association entre la vie en couple et le bonheur, de l’amour qui soutient la relation conjugale, de la durée de l’effet du mariage sur le bonheur et du phénomène relativement nouveau de la cohabitation particulièrement important au Québec. Les fréquentations en ligne ne sont pas abordées (voir Aiken, 2016, chapitre 5; Cacioppo, Cacioppo, Gonzaga et al., 2013; Pinker, 2014). ASSOCIATION COUPLE – BONHEUR Appui empirique Il existe, d’emblée, un lien significatif entre le fait de vivre à deux et le bonheur. Peu d’associations ont une base empirique aussi solide en science du bonheur (par exemple, Demir, 2010; Dush et Amato, 2005; Gustavsona, Nilsena, Orstavika et Roysamba, 2014; Guarnieri, Smorti et Tani, 2015)5. Les personnes mariées sont en général plus heureuses que celles qui ne le sont pas : divorcées, séparées, veuves, en union libre ou jamais mariées. Lucas et Dyrenforth (2005) considèrent que l’on a exagéré l’importance de l’association mariage – bonheur, mais l’ensemble des résultats appuie l’idée d’une relation « modeste », mais significative. Par exemple, dans leur méta analyse, Proulx, Helms et Buehler (2007) ont obtenu une corrélation de 0,37 pour les 66 études transversales recensées 4. Comment être heureux, même marié. Tim LaHaye a publié un ouvrage sous le même titre en 1968 et l’a réédité en 2002. 5. À ces études spécifiques, il convient d’ajouter quelques revues de recherches : Arriaga (2013); Carr et Springer (2010); Gable et Goswell (2011); Kashdan (2009, chap. 6); Lyubomirsky (2013, chap. 1 et 2); Myers (1999); Pinker (2014, chap. 8); Shaphire- Bernstein et Taylor (2013) ainsi que la méta analyse de Proulx, Helms et Buehler (2007). Signalons également quelques grandes recensions sur le bonheur qui consacrent une section au mariage : Argyle (2001); Becchetti, Pelloni et Rosetti (2008); Diener et Seligman (2004); Diener, Suh, Lucas et Smith (1999); Helliwell et Putnam (2004); Wilson et Oswald (2005). RQP, 38(1) 129 et de 0,25 pour 27 études longitudinales. La qualité de la relation conjugale donne une corrélation plus élevée (0,42) que le statut marital (0,15), selon l’étude de Dush et Amato (2005) (sur la qualité de la relation, voir Chapman et Guven, 2016). Le mariage rehausse donc le niveau de bonheur, comme nous venons de le voir, mais le bonheur favorise également la rencontre d’un partenaire et diminue la probabilité du divorce (Luhmann, Lucas et Diener, 2013). Il s’agit donc d’une relation bidirectionnelle (Stutzer et Frey, 2006). La relation couple – bonheur vaut pour les deux sexes, pour tous les âges et pour tous les pays6 (Graham, 2009). Au terme de l’exploration d’une abondante littérature, Pinker (2014, p. 221) présente, pour sa part, une synthèse selon laquelle le mariage est associé à une mortalité réduite et à une vie plus longue, à une résilience plus grande, à moins d’hospitalisation et à une récupération plus rapide à la suite d’une intervention chirurgicale, à moins de criminalité, à moins de dépression et de suicide et, évidemment, à un plus haut niveau de bonheur. Par contre, un mariage qui ne fonctionne pas est corrosif pour la santé et le bien-être subjectif (Kielcolt-Glasser, Glasser, Cacioppo et Malarkey, 2006). Cette relation couple – bonheur est illustrée par la Figure 1 qui provient des données du Centre de recherche sur l’opinion publique des États-Unis obtenues entre 1972 et 2002, auprès d’un échantillon représentatif de plus de 40 000 personnes. La figure fait bien voir également que la conclusion vaut pour les deux sexes7. De plus, des résultats ont démontré que les gens mariés sont moins vulnérables aux risques de dépression, comme l’illustre la Figure 2. Relation universelle Les études interculturelles ont démontré que la relation positive couple – bonheur était universelle (par exemple, Kang, Shaver, Sue, Min et Jing, 2003). Diener, Gohm, Suh et Oishi (2000) ont utilisé les données du World Values Survey II recueillies dans 42 pays auprès de 59 169 participants (au-delà de 1000 par uploads/Litterature/ la-vie-de-couple-et-le-bonheur-marriage-and-happiness-leandre-bouffard.pdf
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- Publié le Aoû 16, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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