Comptes Rendus Mathématique Alessandro Chiodo On the construction of the ´ Sr¯

Comptes Rendus Mathématique Alessandro Chiodo On the construction of the ´ Sr¯ ı Yantra Volume 359, issue 4 (2021), p. 377-397 <https://doi.org/10.5802/crmath.163> © Académie des sciences, Paris and the authors, 2021. Some rights reserved. This article is licensed under the Creative Commons Attribution 4.0 International License. http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/ Les Comptes Rendus. Mathématique sont membres du Centre Mersenne pour l’édition scientifique ouverte www.centre-mersenne.org Comptes Rendus Mathématique 2021, 359, n4, p. 377-397 https://doi.org/10.5802/crmath.163 Dissemination of mathematics, History of mathematics / Diffusion des mathématiques, Histoire des mathématiques On the construction of the ´ Sr¯ ı Yantra Alessandro Chiodoa a Institut de Mathématiques de Jussieu — Paris Rive Gauche, Sorbonne Université, UMR 7586 C.N.R.S., 4 Pl. Jussieu,75252 Paris cedex, France E-mail: alessandro.chiodo@imj-prg.fr Abstract. The ´ Sr¯ ı Yantra (or ´ Sr¯ ı Cakra) is a sacred diagram of Tantric Hinduism. Its study stimulated a vast effort of specialists from different fields. In mathematics, its construction sets an elementary and nontrivial problem. In this note, we work out a straightedge and compass method for constructing concurrent models of ´ Sr¯ ı Yantras. The question is equivalent to the circle-line-point problem of Apollonious. Résumé. Le ´ sr¯ ıyantra (ou ´ sr¯ ıcakra) est un diagramme sacré dans les traditions hindoues tantriques. Il a fait l’objet de nombreuses études dans différentes disciplines. En mathématiques, sa construction pose un problème élémentaire et non trivial. Dans cette note, on fournit une méthode de construction à la règle et au compas. La question est équivalente à celle d’un problème d’Apollonius qui consiste à trouver un cercle tangent à un cercle donné, à une droite donnée et passant par un point donné. Manuscript received 6th October 2020, revised 21st October 2020 and 30th November 2020, accepted 30th No- vember 2020. Version française abrégée Les yantras sont des objets sacrés dans l’hindouisme. De façon remarquable, plusieurs d’entre eux possèdent des propriétés mathématiques intéressantes. Le ´ sr¯ ıyantra est l’un des plus fameux parmi les yantras. Il peut être décrit ainsi : un point au centre, le bindu, un diagramme polygonal qui l’entoure et qui est lui-même inscrit dans un motif circulaire. Celui-ci est constitué de huit pétales de lotus, encerclés à leur tour par un lotus à seize pétales et par un triple carré dit bh¯ upura. Le polygone fait l’objet de ce papier. Il est issu de la réunion de neuf triangles maximaux t1, ..., t9 tous symétriques par rapport à un même axe vertical et numérotés de 1 à 9 selon la position de leurs bases à commencer par celle qui se situe le plus en haut.1 Les propriétés de concurrence suivantes sont satisfaites (on appelle point de base d’un triangle isocèle le milieu de la base). 1Dans les Figures 2 et 8, on utilise pour les contours de t1, ..., t9 la séquence de neuf couleurs suivante : gris (t1), violet (t2), bleu (t3), vert (t4), jaune (t5), rose (t6), orange (t7), rouge (t8) et marron (t9). Avec notre choix de notation, ti est orienté vers le bas si i ≤5; autrement, il est orienté vers le haut. ISSN (electronic) : 1778-3569 https://comptes-rendus.academie-sciences.fr/mathematique/ 378 Alessandro Chiodo Figure 1. ´ Sr¯ ı Yantra (i) Les triangles t3 et t7 sont inscrits2 dans le même cercle. (ii) Le sommet du triangle t′ est le point de base du triangle t′′ pour tout couple (t′,t′′) égal à (t8,t1), (t6,t2), (t9,t3), (t1,t6), (t5,t7), (t4,t8) et (t2,t9). (iii) De chaque côté de l’axe de symétrie, la jambe3 du triangle orienté vers le bas t′, la jambe du triangle orienté vers le haut t′′′ et la base du triangle t′′ ont exactement un point en commun pour tout triple (t′,t′′,t′′′) égal à (t1,t2,t7), (t2,t3,t7), (t1,t3,t8), (t1,t4,t6), (t1,t5,t9), (t4,t6,t9), (t2,t7,t9), (t3,t7,t8), (t3,t8,t9), (t4,t4,t8), (t5,t5,t6) et (t2,t6,t6). Nous nous référons aux conditions ci-dessus avec les notations (i), ((ii); ti,t j ) et ((iii); ti,t j ,tk). À titre d’exemple, nous avons détaillé la condition ((iii); t5,t5,t6) dans la Figure 3. Le dessin de la Figure 1, basé sur des réalisations faites à la main, illustre ces concurrences, mais met aussi en évidence de légères imprécisions visibles à l’œil nu (vérifier par exemple la condition ((iii); t3,t7,t8)). Le programme GeoGebra [10] que nous avons écrit ici [https://www.geogebra.org/ m/zdvxtdvv] permet au lecteur de comprendre ces contraintes en faisant varier la position des triangles enchevêtrés tout en respectant (i), (ii) et (iii). Le lecteur peut déjà le consulter sans lire davantage, en ignorant dans un premier temps la construction géométrique qui y apparait en traits légers (voir aussi l’Appendice A pour quelques outils supplémentaires sur la construction du ´ sr¯ ıyantra). 2Un triangle est inscrit dans un cercle si le cercle passe par ses sommets. Dans ce cas, le cercle est dit circonscrit au triangle et est uniquement déterminé par ce dernier. 3L’axe de symétrie étant fixé, on appelle jambes d’un triangle isocèle les deux côtés symétriques. C. R. Mathématique — 2021, 359, n4, 377-397 Alessandro Chiodo 379 Les origines Les origines du ´ sr¯ ıyantra sont inconnues. On doit les chercher dans les rituels qui lui ont été associés (voir Padoux [17]). Michaël [14] décrit l’un de ces rituels à partir du texte Saundarya Lahar¯ ı, « Les vagues de la beauté ». Il s’agit d’un poème attribué à l’un des disciples du philosophe du VIIIème siècle, ¯ Adi ´ Sa˙ nkara (voir aussi [13]). Dans [6], R. C. Gupta considère un large nombre de yantras de grand intérêt mathématique; (parmi eux, on en trouve certains, comme le chautisa yantra, qui ont déjà fait l’objet d’études purement mathématiques, voir G. Bhowmik [1] et A. Navas [16]). Quant au ´ sr¯ ıyantra, Gupta le décrit comme l’un des plus importants et des plus fameux parmi les yantras. La présentation qu’il en donne permet d’établir quelques points cruciaux de sa définition au cours de l’histoire. On suit son texte, mais on se réfère aussi à Huet [11], Mookerjee et Khanna [15], Rao [19] et Zimmer [26]. Gupta [6, p. 180] cite le Rudr¯ ayamala Tantra et notamment le vers faisant référence à un yantra constitué par un bindu, un triangle central et des « enceintes » de 8, puis 10, puis encore 10, puis 14 triangles, entourées de trois cercles et de trois bh¯ upura. Ces quatre rangées de 8, 10, 10 et 14 triangles apparaissent effectivement dans le ´ sr¯ ıyantra et sont mises en évidence dans la Figure 2.b par deux tons alternés de gris. Elles sont souvent regardées en tant que cakras (roues).4 Gupta [6, p. 181] mentionne aussi trois variantes tridimensionnelles, k¯ urma (la tortue), padma (le lotus) et meru (la montagne fabuleuse), alternatives à la variante plane que nous considérons ici (dite bh¯ u, c.-à-d. la Terre). Dans la version dite k¯ urma, les segments sont remplacés par des arcs de cercle sur une calotte sphérique (sur ce point Gupta se réfère au Gaur¯ ıy¯ amala Tantra). Kulaichev fait référence à de Casparis : on trouverait une mention du ´ sr¯ ıyantra dans une inscription bouddhiste de Sumatra du VIIème siècle (voir Kulaichev [13, p. 279] et de Casparis [3, p. 34 et p. 41]). Dans [13, p. 279], il fait aussi allusion à un hymne dans Atharva Veda (XIIème siècle av. J.-C.) qui porterait sur une figure analogue constituée de neuf triangles. Toujours selon Kulaichev [13], une représentation datant du XVIIème siècle est située dans le monastère de ´ Sr . ˙ ng¯ ar¯ ı Mat .ha fondé par ¯ Adi ´ Sa˙ nkara. On conclut en rappelant, comme le fait Huet, que, même si plusieurs sources suggèrent que ce symbole est très ancien, nous ne connaissons pas de représentations publiées antérieures au XVIIème siècle (Huet, [11, p. 622]). La question de la datation des premières créations du ´ sr¯ ıyantra demeure ouverte et l’intérêt que l’on porte à cette question est temoigné par ce passage dans Mookerjee et Khanna [15, p. 61] : « Dans son contenu formel, le ´ sr¯ ıyantra est un chef d’œuvre d’abstraction, et doit avoir été créé par révélation plutôt que par l’ingéniosité et l’habilité de l’homme ». L’histoire de la construction du ´ sr¯ ıyantra Dessiner un ´ sr¯ ıyantra pose un problème mathématique élémentaire et non trivial. En 2007, Gupta dresse la liste des différentes méthodes connues à ce jour. Méthodes traditionnelles Des méthodes traditionnelles sont dues à deux commentateurs du texte Saundarya Lahar¯ ı : Kaivaly¯ a´ srama Figure 2.a et Laks .m¯ ıdhara Figure 2.b. 4Le ´ sr¯ ıyantra est décrit en termes de cakras par exemple dans Mookerjee–Khanna [15] et Zimmer [26] (voir aussi Jung [12]). Les neuf cakras (roues) inscrits les uns dans les autres et entourant le bindu sont le bh¯ upura, le triplet de cercles, les 16 pétales, les 8 pétales, l’enceinte de 14 triangles, celle de 10, puis 10, puis 8 triangles et le triangle central. Gupta signale que le terme cakra est aussi parfois attribué aux neuf triangles ti . C. R. Mathématique — 2021, 359, n4, 377-397 380 Alessandro Chiodo La méthode A, décrite par Kaivaly¯ a´ srama est uploads/Litterature/ on-the-construction-of-the-sri-yantra.pdf

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