Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Univ

Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'Érudit : erudit@umontreal.ca Article Normand Perron Revue d'histoire de l'Amérique française, vol. 57, n° 1, 2003, p. 23-32. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/008350ar DOI: 10.7202/008350ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'URI http://www.erudit.org/apropos/utilisation.html Document téléchargé le 7 mars 2013 12:34 « Le Chantier des histoires régionales et la Public History » Le Chantier des histoires régionales et la Public History normand perron INRS-Urbanisation, Culture et Société L e Chantier des histoires régionales de l’Institut québécois de recherche sur la culture (IQRC), lequel a été intégré à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) en 1994, a débuté en 1980 sous la gouverne de Fernand Harvey. Depuis octobre 1991, j’en assume la direction. Il s’agit d’un ambitieux projet dont le premier objectif est la publication d’une synthèse historique de chacune des régions du Québec. Il visait dès le début à doter la collectivité québécoise de travaux qui fassent connaître les particularités des milieux régionaux et qui permettent de nuancer les hypothèses et les conclusions des ouvrages généraux sur l’histoire sociale, économique et culturelle du Québec. Ces synthèses, tout en répondant aux normes de rigueur scientifique, se veulent accessibles au grand public. Le Chantier des histoires régionales est toujours en cours de réa- lisation, ce qui en fait certes l’un des plus anciens projets de recherche en activité dans le domaine des sciences sociales au Québec. Depuis 1981, seize synthèses ont été publiées dans la collection «Les régions du Qué- bec» (Éditions de l’IQRC/Presses de l’Université Laval)1. Les travaux se 1. Histoire de la Gaspésie (1981, 1999), Histoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean (1989), Histoire des Laurentides (1989), Histoire de la Côte-du-Sud (1993), Histoire du Bas-Saint-Laurent (1993), Histoire de l’Outaouais (1994), Histoire de l’Abitibi-Témiscamingue (1995), Histoire de Lévis-Lotbinière (1996), RHAF, vol. 57, no 1, été 2003 24 revue d’histoire de l’amérique française poursuivent pour les huit dernières régions : Mauricie, Centre-du- Québec, Québec, Lanaudière, Montréal, Laval, Baie-James, Nunavik. La télésérie Les Pays du Québec (1989-1994)2, la publication de brèves histoires sur les régions depuis 19993 et l’ouverture du site Encyclobec4 en 2003 élargissent l’éventail de diffusion à l’intention du grand public. Présentons maintenant diverses observations concernant ce vaste Chantier qui dure depuis plus de vingt ans en regard de la problématique de la Public History. Où se situe ce Chantier dans le cadre de l’émergence et du développement de l’histoire publique ? Quelles sont les relations qu’il entretient avec les milieux régionaux ? Répond-il à la fois aux attentes des historiens du milieu universitaire et à celles du public ? Dans les années 1970, des changements dans la pratique de l’histoire sont perceptibles. Des spécialistes en histoire commencent à produire en dehors de l’institution universitaire des ouvrages destinés au grand public. Des travaux sur des établissements d’enseignement et de santé sont, entre autres, confiés à des historiens professionnels. Ces derniers font aussi dès cette époque sentir leur présence dans d’autres créneaux jusque-là souvent dominés par des historiens amateurs. L’on pense ici aux revues d’histoire régionale de diverses sociétés d’histoire. La pré- sence d’historiens en région, certes favorisée par le réseau des consti- tuantes régionales de l’Université du Québec, avait créé un contexte favorable à ce changement. Si le Chantier des histoires régionales est clairement identifié à l’ex- IQRC, il n’en trouve pas moins son origine dans l’intention de la Société historique de la Gaspésie de doter sa région d’une synthèse historique. Le projet d’une histoire de la Gaspésie est finalement le projet de Gas- pésiens, le projet de gens du milieu qui ont confié à des historiens de métier le soin de donner à la région une véritable première synthèse5. Ce Histoire de la Côte-Nord (1996), Histoire des Cantons-de-l’Est (1998), Histoire du Piémont-des- Appalaches (1999), Histoire du Haut-Saint-Laurent (2000), Histoire de Charlevoix (2000), Histoire du Richelieu–Yamaska–Rive-Sud (2001), Histoire des Îles-de-la-Madeleine (2003) et Histoire de Beauce- Etchemin-Amiante (2003). 2. Cette série de documentaires de 30 minutes, sous la direction scientifique de Fernand Harvey, produite par Synercom Téléproductions et qui a été diffusée par Télé-Québec, en plus d’être disponible aux PUL sous forme de vidéocassettes, a été réalisée avec la collaboration de différents chercheurs rattachés au projet des histoires régionales de l’IQRC. 3. Ces brèves synthèses sont publiées aux Éditions de l’IQRC dans la collection «Les régions du Québec – histoire en Bref» que dirigent Léo Jacques et Normand Perron. 4. Encyclobec (www.encyclobec.ca) a été conçu par Normand Perron et Jérôme Coutard. 5. Jules Bélanger, Marc Desjardins, Yves Frenette, avec la collaboration de Pierre Dansereau, Histoire de la Gaspésie (Montréal, Boréal Express/Institut québécois de recherche sur la culture, [1981]), voir les pages 8 et 9 de l’avant-propos. Le Chantier des histoires régionales et la Public History 25 milieu veut alors davantage que les modestes histoires locales rappelant la vie des ancêtres et éveillant l’attachement au passé; il veut une histoire qui permette de mieux comprendre la région actuelle et de s’identifier à celle-ci. Il se rapproche d’une réflexion de Mgr Albert Tessier qui, en 1929, tout en soulignant l’importance d’encourager la production de biographies et de monographies de paroisse par les «amateurs que groupe la Société d’Histoire régionale» trifluvienne, écrivait que les indispensables synthèses à venir sur sa région seraient l’œuvre de «maîtres» en histoire6. La finalisation de ce projet sous la direction de l’IQRC mènera à la création du Chantier des histoires régionales. Ainsi naît un chantier dont les principaux paramètres de fonctionnement trouvent leurs origines dans le projet d’une publication destinée à la fois aux chercheurs et au grand public, produite par une équipe de chercheurs professionnels sous la direction de Marc Laterreur, un historien originaire de la Gaspésie et professeur à l’Université Laval. Le succès de librairie de cet ouvrage laisse par ailleurs croire qu’il répondait aux attentes d’un large public en quête d’un savoir sur une région et son histoire. Aborder l’histoire sous l’angle de la région, de la synthèse et du transfert des connaissances, en partenariat scientifique et financier avec le milieu, voilà ce qui allait caractériser le Chantier des histoires régionales. Au début des années 1980, le Chantier des histoires régionales ne fait pas explicitement référence à la notion américaine de Public History, même si le projet véhiculait des préoccupations analogues en ce qui concerne la participation humaine et financière du milieu régional et l’accessibilité à un vaste public au-delà des seuls spécialistes. Ce Chantier, note Marc Riopel7 dans une réflexion récente sur l’histoire appliquée, se rapprochait dès lors de la Public History en vogue aux États-Unis, où des historiens et universitaires publiaient à l’intention du grand public. Il est par ailleurs instructif de compiler les principaux objectifs que les équipes de chercheurs ont fixés à leurs travaux. En bref, ils souhaitent produire une synthèse utile aux chercheurs, aux décideurs, aux enseignants, tout en voulant être accessible au public désireux de mieux connaître une ou 6. Albert Tessier, «Réveil régionaliste», Almanach de la langue française (Montréal, Librairie d’Action canadienne-française, 1929), 102-103. Voir aussi Fernand Harvey, «L’historiographie régionaliste des années 1920 et 1930 au Québec», Les Cahiers des Dix, 55 (2001): 53-102. 7. Marc Riopel, «L’historien et le milieu. Réflexions sur l’application de l’histoire: la publi- cation d’une synthèse historique sur le Témiscamingue», thèse de Ph.D. (histoire), Université Laval, 2001, vii-550 f. Voir son article dans ce numéro. 26 revue d’histoire de l’amérique française les régions qui composent le Québec. Il s’agissait donc de rendre dis- ponibles des matériaux pour de multiples usages8. L’absence de statut universitaire de l’IQRC et sa particularité de ne pas être identifié à un centre de recherche établi dans une ville ou dans une région spécifique9 ont probablement facilité le développement de parte- nariats avec les diverses régions du Québec. Plutôt que de miser seulement sur des chercheurs et sur des organisations particulières pour la réalisation d’un projet, le Chantier des histoires régionales a privilégié la formule d’un partenariat où sont représentés les milieux sociaux, économiques, culturels et politiques d’une région. Des liens étroits ont alors été tissés autour d’un projet rassembleur avec la mise en place de comités nommés Comité d’honneur et Comité de financement. Ces deux comités, qui ont servi d’interlocuteurs au Chantier des histoires régionales dans les régions et qui ont donné à chaque projet une légitimité, regroupent diverses instances du milieu: administrateurs d’institutions financières, délégués des universités et des cégeps, dirigeants d’institutions religieuses, gens du milieu des affaires, intervenants dans les milieux culturels, préfets de municipalités régio- nales de comté et autres. Certains membres proviennent du milieu privé, d’autres du milieu public, y compris des élus de la population. uploads/Litterature/ perron-n-2003-le-chantier-des-histoires-regionales-et-la-public-history.pdf

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