La poésie des troubadours et des trouvères - textes Jaufre Rudel « Il ne sait p
La poésie des troubadours et des trouvères - textes Jaufre Rudel « Il ne sait pas chanter, celui qui ne fait pas le son » Il ne sait pas chanter celui qui ne fait pas le son ni trouver des vers celui qui ne fait pas les mots et il ne sait pas comment il en va de la rime s’il ne comprend pas le sujet en lui-même pourtant mon chant commence ainsi plus vous l’entendrez, plus il en aura de valeur. Que nul ne s’étonne à mon sujet si j’aime ce que jamais je ne verrai ni rien ne me fait tant de mal comme ce que jamais de mes yeux je ne vis et qui jamais ne me dit vrai ni me mentit et je ne sais si jamais cela se fera. Cela m’a blessé d’un coup de joie qui me tue avec une peine d’amour qui me soustrait le cœur dont la chair maigrira s’il ne prend pas, sans tarder, pitié de moi jamais on n’est mort si noblement d’un mal si doux, et ça ne peut arriver. Jamais je ne m’endormais si doucement que mon esprit ne fût là-bas avec la belle qui possède mon cœur où mes désirs vont sur le droit chemin et il [l’amour] peut bien dire s’il me tue, moi qui l’aime que jamais il n’aura quelqu’un de si fidèle. Le vers est excellent car moi je n’y commets pas de faute et tout ce qui y est s’y trouve bien et que celui qui de moi l’apprendra se garde de n’y rien changer qu’ainsi l’entendent en Quercy le vicomte et le comte du pays toulousain. Le son est excellent et on y fera quelque chose dont mon chant s’embellira. No sap chantar qui so non di ni vers trobar qui mots no fa ni conois de rima co-s va si razo non enten en si pero mon chans commens’aissi com plus l’auziretz mais valra. Nuls om no-s meravilh de mi s’eu am so que ne verai ja si nul ares tan mal no-m fa com so qu(anc de mos olhs no vi ni no-m dis ver ni no-m menti ni no sai si ja lo fara. Colp de joi me fer que m’auci ab ponha d’amor que-m sostra lo cor don la carn magrira s’em breu merce no-l pren de mi et anc om tan gen no mori ab tan dous mal ni no s’escha. Anc tan suau no m’adormi que mon esperitz no fos la ab la bela que mon cor a on mei voler fan dger cami e pot ben dir s’aman m’auci que mais tan fizel no-n aura. Bos es lo vers s’eu no-i falhi ni tot so que-i es ben esta e cel que de mi l’apenra gart si que res no mi cambi que si l’auzon en Caerci lo vescoms ni-l coms en Tolza. Bos es lo sos e faran i quas que don mon chans gensara. La Comtesse de Die « Il me faut chanter à propos de ce que je ne voudrais pas » Il me faut chanter à propos de ce que je ne voudrais pas tant j’ai de rancœur envers celui dont je suis l’amie, ca moi je l’aime plus que nulle autre chose qui soit, mais devant lui ne valent merci ni courtoisie ni ma beauté, ni mon mérite, ni mon esprit car je suis trompée et trahie ainsi que ce devait être si je n’étais pas avenante. De ceci je me console, que je n’ai point failli, ami, envers vous, par nulle mauvaise conduite, car je vous aime plus que Seguin n’aima jamais Valence, et il me plaît que d’aimer je puisse vous vaincre mon ami, vous qui êtes le plus vaillant, vous me montrez votre orgueil dans vos propos et en apparence alors que vous êtes si francs envers toute autre personne. Je suis bien étonnée [de voir] comment votre cœur se montre prétentieux envers moi, ami, pour cela j’ai des motifs qui m’attristent, il n’est pas juste qu’un autre amour vous éloigne de moi, quels que soient ce qu’il vous dit et comment il vous accueille. Et souvenez-vous quels furent les débuts de notre amour ! Que jamais Dieu ne veuille que je porte la faute de notre séparation ! La grande valeur qui en votre cœur réside et le noble mérite que vous avez m’irritent car je n’en connais une lointaine ou proche qui, si elle désire aimer, vers vous ne s’incline, mais vous, ami, vous avez tant de jugement que vous devez connaître la plus fine, et souvenez-vous de nos conventions. Je dois faire valoir mon mérite et ma naissance et ma beauté et davantage ma sincérité de cœur, c’est pourquoi je vous envoie là-bas où vous demeurez cette chanson en guise de messager, et je veux savoir, mon bel et noble ami, pourquoi vous vous montrez envers moi aussi rude et si sauvage, je ne sais si c’est par orgueil ou bien par cruauté. Mais ainsi, surtout, je veux que tu lui dises, messager, que par excès d’orgueil ont grand dommage maintes gens ! A chantar m’er de so qu’eu non volria tan me rancur de lui cui sui amia car eu l’am mais que nul ares que sia vas lui no-m val merces ni cortezia ni ma beltatz ni mos pretz ni mos sens qu’atressi m sui enganada e traia com degr’ esser s’eu fos dezavinens. Be-m meravilh com vostre cors s’orgolha amics vas me per qu’ai razon que-m-dolha non es ges dregs qu’autr’amors vos mi tolha per nula ren que-us diga ni acolha e membre vos quals fo-lh comensamens de nost’amor ja Domnedeus non volha qu’en ma colpa sia-lh departimens. Proeza grans qu’el vostre cors s’aizina e lo ricz pretz qu’avez m’en ataina qu’una non sai lonhdana ni vezina si vol amar vas vos non si’aclina mas vos amics etz ben tan conoissens que ben devetz conoisser la plus fina e membre vos de nostres convinens. Valer mi deu mos pretz e mos paratges e ma beutatz e plus mos fis coratges per qu’eu vos mand la ion es vostr’estatges esta chanson que me sia messatges e volh saber lo meus bels amics gens per que vos m’etz tan fers ni tal salvatges non sai si s’es orgolhs o mals talens. Mas aitan plus volh li digas messatges qu’en trop d’orgolh an gran dan manhtas gens. Châtelain de Coucy « La douce voix du rossignol sauvage » La douce voix de rossignol sauvage Que nuit et jour j’entends jaser et bruire, Adoucit tant mon cœur et le soulage Que de mes chants je me veux réjouir Bien dois chanter puisqu’il vient à plaisir A celle à qui de mon cœur fis hommage. Je dois avoir grand joie en mon courage, Si me veut-elle près d’elle retenir. Onc envers ell’ n’eus cœur faux ni volage, Il m’en devrait pour ce mieux advenir ; Je l’aime et sers, adore par usage, Et ne lui ose mes pensers découvrir, Car sa beauté me fait tant ébahir Que je ne sais devant ell’ nul langage, N’osent mes yeux regarder son visage Tant ils redout’ avoir à en partir. Tant ai en elle assuré mon courage Qu’ailleurs ne pense, Dieu m’en laisse jouir ; Jamais Tristan, cil qui but le breuvage, Si tendrement n’aima sans repentir. Car j’y mets tout, cœur et corps et désir, Sens et savoir, ne sais si fais folie, Encore je crains qu’à travers tout mon âge Ne puisse assez elle et s’amour servir. Je ne dis pas que je fasse folie, Mêm’ si pour elle il me fallait mourir ; Au monde n’est si belle ni si sage, Et il n’est rien que j’aie tant à plaisir. J’aime mes yeux qui surent la choisir ; Dès que la vis, je lui laissai en otage Mon cœur, depuis il y a fait long stage, Jamais nul jour ne l’en peut départir. Chanson, va t’en pour porter mon message Là où je n’ose aller, ni repartir, Car tant redoute la male gent ombrage Qui sent avant qu’ils puissent advenir Les biens d’amour : Dieu les puisse maudire ! A maint amant ont fait ire et dommage, Mais j’ai sur eux ce cruel avantage, Contre mon gré, je les dois obéir. Chrétien de Troyes « Voici comment je me plains d’Amour » Voici comment je me plains d’Amour qui m’a ravi à moi-même et ne veut pas me tenir pour sien : je consens à tout jamais qu’il me traite selon son bon plaisir. Pourtant je ne peux m’empêcher de me plaindre de lui et voici pourquoi : souvent, je vois ceux qui le trompent parvenir à leurs fins, alors que moi, à cause de ma fidélité, je n’y parviens pas. Si Amour, pour rehausser son pouvoir, veut rallier ses ennemis, il est en cela inspiré par le bon sens, me semble-t-il, car ceux qui sont véritablement les siens, il ne peut pas les perdre. Quant à moi qui ne peux me séparer de celle devant uploads/Litterature/ poezija-trubadura-i-truvera.pdf
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- Publié le Aoû 25, 2022
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