Informatique décisionnelle et management de la performance de l’entreprise Chak

Informatique décisionnelle et management de la performance de l’entreprise Chaker HAOUET Maître de Conférences en Sciences de Gestion LOG, Rue de Blois - B.P. 6739 45067 ORLEANS CEDEX 2 Chaker.haouet@univ-orleans.fr Résumé Les premières applications dans les entreprises des outils informatiques d’aide au pilotage et à la décision, désormais appelés «Business Intelligence», datent du début des années quatre- vingt-dix ; les «Executive Information Systems» étaient à l’origine réservés à l’information des dirigeants. La banalisation dans les entreprises, vers le milieu de la décennie quatre-vingt- dix, des technologies de «datawarehouse» et de «data mart» a accru la possibilité de développer des systèmes d’information organisant les données de façon facilement accessible et appropriée à la prise de décisions et les représentant de manière intelligente au travers d’outils spécialisés tournés vers l’analyse multidimensionnelle avec notamment les bases «OLAP». Ce qui a pour effet de faciliter le management de la performance de l’entreprise. Le présent article examine d’abord la question de l’apport des technologies de l’information au processus décisionnel. Puis, il montre tout l’intérêt d’une architecture décisionnelle fondée sur un entrepôt de données pour le management de la performance. Plus précisément, il tente de montrer comment l’informatique décisionnelle facilite la modélisation d’une performance multidimensionnelle pour en permettre le pilotage au travers d’un des modèles possibles de sa représentation : le tableau de bord prospectif. Mots clés Décision, Information, Informatique décisionnelle, management de la performance, performance, pilotage, tableau de bord prospectif. 2 Informatique décisionnelle et management de la performance de l’entreprise L'être humain a deux grands problèmes : le premier est de savoir quand commencer, le second est de savoir quand s'arrêter. Paulo COELHO Dans un environnement devenu de plus en plus incertain et complexe, la mise au point d’une stratégie susceptible de mieux d'atteindre les objectifs, l'élaboration de plans d'action, la vérification des écarts avec la prédiction initiale, l'adaptation incessante des politiques, ne peuvent s’imaginer sans recours aux technologies de l’information pour aider les gestionnaires dans leurs prises de décisions. Avec la mondialisation des marchés, l'entreprise doit s'adapter, si possible anticiper, parfois influencer, en tout cas réagir avec agilité. Pour y parvenir dans de bonnes conditions, les gestionnaires ont besoin de l'information appropriée, au moment opportun, pour la prise de décision. La place centrale qu'occupe l'information dans le processus de décision n'est plus à démontrer. Cette idée de prépondérance de l'information a été soulignée, il y a déjà plus de trente ans, par Le Moigne (1973, 1974) au point qu'il attire l'attention sur la confusion souvent faite - tacite certes - entre l'information et la décision. Selon l'auteur, information et décision sont reliées mais ne sont pas confondues. Grâce aux progrès réalisés en technologies de l'information (logiciels, bases de données,...), les entreprises peuvent aujourd'hui recueillir, traiter, stocker et diffuser de gros volumes d'information, et toutes ces opérations s'effectuent de plus en plus rapidement et à un coût raisonnable. Mais, si l'information n'est plus, comme dans le passé, une ressource rare, c'est son organisation dans une base de données décisionnelle qui permet son analyse et son exploitation à des fins de prise de décisions. Parallèlement à l’évolution des outils informatiques d’aide à la décision, les tentatives de rénovation du contrôle de gestion, introduites par les apports du «juste à temps» qui s’est développé dans les années quatre-vingt (Haouet, 1993), se sont succédées et ont fait pris conscience de la nécessité de dépasser la vision seulement financière de la performance pour prendre en compte le caractère multidimensionnel de celle-ci. Dans le même temps, on ne se contente plus de mesurer la performance ; on cherche à agir sur ses déterminants et à appréhender la relation de causalité pouvant exister entre chaque action et sa conséquence sur 3 l’objectif stratégique. C’est ce que l’on désigne aujourd’hui par le vocable «management de la performance». L'intérêt croissant des entreprises pour le management de la performance rencontre aujourd'hui l'opportunité technologique de mettre en place une architecture informatique, communément appelée «informatique décisionnelle», appuyée en règle générale sur un entrepôt (et/ou des magasins) de données. Notre présentation propose ainsi d'apporter une réflexion sur l'aide qu'apporterait un système d'information décisionnel fondé sur un entrepôt de données au management de la performance de l’entreprise. Dans une première partie, nous nous penchons sur l’évolution des technologies de l’information en matière d'aide à la décision. Après avoir brièvement rappelé le rapport entre information et décision (1.1.), nous abordons l’aide à la décision en mettant en exergue l’apport des technologies de l'information au processus décisionnel (1.2.), puis l’architecture décisionnelle fondée sur un entrepôt de données (1.3.). Dans une seconde partie, nous nous intéresserons à l’usage de l'informatique décisionnelle pour le management de la performance. Nous caractérisons d’abord la notion de performance (2.1.) et celle de management de la performance (2.2.). Puis, après avoir brièvement décrit l’un des modèles possibles de représentation d’une performance multidimensionnelle (2.3.), nous nous interrogeons sur la façon dont l'informatique décisionnelle facilite le management de la performance de l’entreprise (2.4.). 1. EVOLUTION DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION EN MATIERE DE PILOTAGE ET D’AIDE A LA DECISION C'est dans les années soixante que sont apparus, dans les entreprises, les ordinateurs et les premières applications informatiques (Reix & Rowe, 2002). Ces applications avaient, pour l'essentiel, concerné les activités classiques de soutien comme la paye, la facturation, les achats, la comptabilité (Van Der Ghinst, 1992, Azan, 2007). Elles avaient pour fonction essentielle d’automatiser les processus de production de l’information afin de réduire les ressources consommées en diminuant les tâches redondantes. On situe dans les années soixante-dix le début de l'utilisation de l'outil informatique à des fins d'aide à la décision. L'approche de la problématique se limitait alors à l'automatisation du traitement de certains modèles issus de la recherche opérationnelle (Reix & Rowe, 2002), mobilisés par le décideur pour résoudre des problèmes complexes, certes, mais structurés. Un bon nombre de systèmes d'information d'aide à la décision (en anglais : MIS pour 4 Management Information System), conçus à la même époque, à la suite des travaux de Simon, avaient conduit à de sérieuses désillusions. Attendant beaucoup des technologies de l'intelligence artificielle, les chercheurs avaient, à l'époque, tenté de modéliser le processus de décision dans sa totalité. Les limites de cette solution étaient surtout liées à l'accessibilité des données. Ces systèmes présentaient le défaut de «se vouloir prématurément … aussi … systèmes de décisions!» (Le Moigne 1974, p. 70). On attribue généralement à Gorry et Scott Morton (1971) le premier modèle décrivant la conception d'un système d'aide spécifique aux décisions semi structurées ou mal structurées (Le Moigne 1974, 1986 ; Lebraty, 2002 ; Fernandez, 2003). Le modèle proposé, «Decision Support System» (DSS), traduit par «systèmes interactifs d'aide à la décision» (SIAD), a été à l'origine de l'apparition des premiers outils informatiques d'aide à la décision qui allaient principalement s'appliquer, par un dialogue «Homme-Machine», aux processus de décisions exécutés aux niveaux hiérarchiques supérieurs. Avant d'aborder l’apport des technologies de l'information au processus décisionnel, nous commençons par rappeler brièvement le rapport entre information et décision. 1.1. LE RAPPORT ENTRE INFORMATION ET DECISION L'information est donc liée à toute problématique de la décision. Mais ce lien entre information et décision est ambigu (March, 1991 ; Mayère, 1993). Selon Mayère, «les organisations tout d'abord utilisent toute une part de leurs informations pour exercer une veille sur leur environnement et non pas à des fins de décision. Par ailleurs, l'information est plus souvent rassemblée pour justifier une décision a posteriori, pour contrôler une interprétation ou créer une vision commune que pour clarifier a priori une décision» (Ibid., p. 102). Nous ne nous engageons pas dans l'analyse des ambiguïtés qui entourent le lien entre information et décision. Notre propos est ici de signaler qu'il ne faut pas négliger cet aspect dans la réflexion sur les systèmes d'information. Nous allons simplement rappeler brièvement les notions d'information et de système d'informations. 1.1.1. Qu'est-ce que l'information ? Il n'existe pas vraiment de définition unique du mot «information». Les définitions varient en fonction des référentiels. Parmi les nombreuses définitions proposées, retenons celle donnée par Davis, Olson, Ajenstat et Peaucelle (1986), et qui se réfère aux fonctions de l'information, indépendamment de sa forme et de son traitement : «l'information est une image des objets et des faits ; elle les représente, elle corrige ou confirme l'idée qu'on se faisait. L'information 5 contient une valeur de surprise, en ce sens qu'elle apporte une connaissance que le destinataire ne possédait pas ou qu'il ne pouvait pas prévoir» (p. 116). Cette définition reconnaît que l'information, en tant qu'élément de connaissance, réduit l'incertitude en modifiant les probabilités assignées aux états possibles du futur. Pour March (1991), «la principale incertitude dans la prise de décision est l'ignorance des informations détenues par les autres et leurs actions probables ; et la principale raison d'être de l'information est son rôle dans la diminution de cette incertitude» (p. 232). L'information a une valeur car elle permet de choisir, de prendre des décisions et d'agir. Sa valeur est donc liée à son emploi dans le contexte de prise de décisions. Ainsi pour March (1991), «l'information donne son sens à une situation de uploads/Management/informatique-decisionnel-et-management.pdf

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  • Publié le Dec 23, 2022
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