Institut d’études politiques de Lille Pierre Martin Hong Kong : patrimoine, act

Institut d’études politiques de Lille Pierre Martin Hong Kong : patrimoine, activisme et décolonisation Année universitaire 2008-2009 Sous la direction de : Emmanuel Brunet-Jailly 1 2 Institut d’études politiques de Lille, année 2008-2009 Master Politique internationale et comparée Hong Kong : patrimoine, activisme et décolonisation Mémoire soutenu en juillet 2009 Membres du jury : Emmanuel Brunet-Jailly et Jean-Louis Thiébault 3 Remerciements Nos remerciements vont à notre directeur de mémoire, Emmanuel Brunet-Jailly, ainsi qu’à Jean-Louis Thiébault, pour avoir accepté de participer à notre jury de soutenance. Nous tenons à adresser des remerciements particuliers à Sebastian Veg pour ses nombreux commentaires et éclaircissements au sujet du patrimoine et de Hong Kong en général. Merci également à David Au Chi-wai, Milk Chan Nga-man, Suki Chau Hei-suen, Fong Fong, Cyd Ho Sau-lan, Hung Wing-tat, Ronnie Kwok, Lam Oi-wan, Patrick Lau Sau- shing, Emily Lau Wai-hing, Ambrose Law Yu-hin, Lee Ho-yin, Chantal Martin, Jo Lee Yee-ting, Fione Lo, Rose Lo Ho-yu, Kevin Parthenay, Howard Shum, Mirana May Szeto, Tse Ming Ming, Wong Faye, Icarus Wong Ho-yin, Ada Wong Ying-kay et Justy Yeung Wai-keung pour leur participation à l’élaboration de ce mémoire. Sans oublier Siu Ding : un grand merci pour les photos. 4 A Lam Pang de Mei Foo 5 Sommaire MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE.....................................................................................................29 Liste des abréviations et des acronymes utilisés - AA : Antiquities Authority (Autorité du patrimoine) - AAB : Antiquities Advisory Board (Conseil consultatif des antiquités) - ACP : Architectural Conservation Programme (Programme de conservation architecturale) - AMO : Antiquities and Monuments Office (Bureau de antiquités et des monuments) - DB : Development Bureau (Bureau du développement) - HAB : Home Affairs Bureau (Bureau des affaires intérieures) - MSQ : Mouvement pour la préservation de l’embarcadère du Star Ferry et du Queen’s Pier - SAR : Special Administrative Region (Région Administrative Spéciale) - SARS : Severe and Acute Respiratory Syndrome (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) - UNESCO : United Nations Educational Scientific and Cultural Organization (Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture) - URA : Urban Renewal Authority (Services du renouvellement urbain) - URS : Urban Renewal Strategy (Stratégie du renouvellement urbain) 6 Introduction Certains la comparent à « un nénuphar ayant rompu ses racines »1 ; d’autres insistent sur l’héritage d’un passé qui ne lui a jamais appartenu et évoquent son avenir incertain2 pour faire de la « contingence » sa principale caractéristique3. Il est vrai qu’à première vue, Hong Kong semble être une erreur historique. A l’issue de la première guerre sino- britannique (1839-42), c’est bien en s’emparant des îles Zhoushan4, situées à quelques encablures des côtes du Zhejiang, que la Couronne britannique souhaite punir la Chine. L’île de Hong Kong, « rocher stérile et quasiment dépeuplé »5, ne l’intéresse pas. Mais Charles Eliott, le négociateur britannique, juge hasardeux d’éparpiller encore un peu plus la communauté britannique en Orient en ouvrant un nouveau port ; préférant consolider Canton comme avant-poste du capitalisme en Chine, c’est donc l’île de Hong Kong qu’il 1Henry Gérard, « L’année du Cochon, à la recherche d’une mémoire collective », Chroniques Hongkongaises, Editions ZOE, 2008, p. 265. 2 La Déclaration conjointe (Joint Declaration) du 19 décembre 1984, qui prévoyait les modalités de la rétrocession du 1er juillet 1997, promettait dans son Annexe 1 de préserver le système légal, économique et social de la Région administrative spéciale durant 50 ans à compter de la date fatidique, posant les bases du principe « un pays, deux systèmes ». Néanmoins, évidemment, personne ne sait ce qu’il se produira le 30 juin 2047 passé. 3 Abbas Ackbar, Hong Kong, Culture and the Politics of Disappearance, Public Worlds, Volume 2, Minneapolis, University of Minnesota Press, 1997. 4 Zhoushan est aussi la ville ancestrale de Tung Chee-hwa (en mandarin : Deng Jianhua), le premier chef de l’exécutif de la Région administrative spéciale. 5 « A barren rock with hardly a house upon it », telle est la fameuse formule utilisée par Lord Palmerston, ministre des affaires étrangères britanniques lors de la signature du traité de Chuenpi, pour décrire l’île de Hong Kong, alors peuplée d’environ 5 000 âmes. 7 soutire à l’Empire céleste par le traité provisoire de Chuenpi, signé à l’automne 1840. Il est remercié sitôt la nouvelle parvenue à Londres, mais le traité de Nankin du 29 août 1842 entérine l’occupation de l’île, qui devient une colonie de la Couronne...6 L’Empire britannique profite ensuite de la seconde guerre de l’opium pour étendre sa souveraineté à la péninsule de Kowloon (convention de Tientsin de 1858, convention de Pékin de 1860) avant qu’en 1898, avec le second Traité de Pékin, les Nouveaux territoires ne lui soient cédés par un bail de 99 ans. Les frontières hongkongaises ne bougeront alors plus (voir le plan du territoire, en annexe 1). Néanmoins, en signant ce bail, la Grande-Bretagne se fixe un « rendez-vous avec la Chine »7 et condamne sa colonie à vivre sous l’empire de la précarité, « sur un temps qui ne lui appartient pas et sur des lieux d’emprunt »8. Puisque, pour beaucoup, Hong Kong naît avec l’arrivée des Britanniques, chaque instant de sa courte histoire semble porter le signe de cette contingence. En tant qu’« entrepôt economy » au début des années 1950, Hong Kong, bâtit en effet sa fortune sur sa proximité avec la Chine communiste, pour laquelle elle constitue un point d’accès privilégié – une faille dans le « mur de bambou » qu’a dressé la Guerre Froide autour du continent. Les marchandises ne font alors qu’y transiter - et les hommes également. Ilot de confort et de stabilité9, Hong Kong accueille entre 1949 et 1955 plusieurs centaines de milliers de Chinois fuyant les troubles de la mère patrie10 . Cette main d’œuvre travailleuse, flexible, opportuniste et bon marché – et, surtout, peu exigeante quant à la protection sociale et aux droits qui lui sont accordés – est récompensée par un pécule qui 6 Voir: Tsang Steve, A Modern History of Hong Kong, Hong Kong, Hong Kong University Press, 2004, p. 12. 7 Ibid., p. 41. 8 Borrowed Place, Borrowed Time est le titre du célèbre livre que le journaliste anglais Richard Hughes a dédié à Hong Kong. Dans son préambule, l’auteur déclare avoir emprunté l’expression à l’écrivaine hongkongaise Han Suyin. Hughes Richard, Borrowed Place Borrowed Time, Hong Kong and its many faces, second edition, André Deutsch, 1976. 9 Bien que la stabilité ait toujours été l’objectif primordial de l’administration coloniale, Hong Kong n’est pas totalement épargnée par la Révolution culturelle. A partir de mai 1967 jusqu'à la fin de l’année, la violence maoïste gagne la ville (plusieurs milliers de bombes sont notamment posées). Bilan : 51 morts et 1 172 blessées. Voir : Tsang Steve, op. cit., 2004, pp. 183-190. Cette période de trouble, creuset de l’identité hongkongaise pour certains, est évoquée pudiquement comme « la Confrontation » par les habitants de la ville. 10 En 1961, seulement 67% de la main d’œuvre hongkongaise était déjà sur place avant 1949. Voir : Tsang Steve, op. cit., 2004, p. 167. Et en 1966, malgré les restrictions portées à l’immigration par le Restriction Act de 1955, Hong Kong comptait 1,7 million de réfugiés, pour 3 millions de résidents. Voir : Liu William T., “Chinese Value Orientations in Hong Kong”, Sociological Analysis, Vol. 27, No. 2, pp. 53-66, été 1966, p. 56. 8 lui permet de repartir vers de nouveaux horizons. Ville-étape, Hong Kong l’est d’ailleurs restée: beaucoup de ses citoyens se sont durablement installés à l’étranger - en Grande Bretagne, au Canada ou en Australie par exemple - et détiennent un passeport de leur pays d’accueil11. Et l’immigration illégale, la contrebande (de voitures et de DVD aussi bien que d’arbres magiques…12), l’intégration de la ville dans les flux financiers13, commerciaux14 et dans ceux de l’information sont encore d’autres éléments dans lesquels les frontières de Hong Kong se fondent jusqu'à disparaître, participant à la dévaluation de toute « idée physique de l’espace et du temps »15. Si l’on souscrit à un tel compte-rendu de l’histoire hongkongaise, l’on ne sera guère surpris d’entendre parler de l’apathie politique des Hongkongais - effet secondaire de la « mentalité de réfugiés » que l’histoire leur a léguée -, ou de lire les conclusions de Lau, selon lesquelles ceux qui se présentent comme Hongkongais sont aussi les plus prompts à quitter le territoire16. Mais force est de reconnaître que le bref récit de l’histoire hongkongaise que nous venons de présenter est problématique : comme tend à le montrer l’historiographie récente, dire que Hong Kong était un village de pêcheurs insignifiant avant l’arrivée des Britanniques et que c’est la coopération de la population locale avec l’administration coloniale qui a fait du territoire ce qu’il est aujourd’hui, les deux moitiés d’une telle affirmation sont malhonnêtes17. Si la période coloniale de Hong Kong est un moment crucial de son histoire, Hong Kong n’est pas pour autant pas une création ex- 11 La majorité de 3 500 000 détenteurs du passeport « British National Overseas » résidaient dans la RAS en 2008. S’y ajoutent 220 000 uploads/Politique/ hong-kong-patrimoine-activisme-et-decolonisation-hong-kong-cultural-heritage-activism-and-decolonization.pdf

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