G CHAPITRE 8 Construire un temps de louange Après avoir évoqué les principaux i
G CHAPITRE 8 Construire un temps de louange Après avoir évoqué les principaux ingrédients du culte – prières, chants, lectures bibliques, invitation à la louange, etc. – se pose la question de la construction du moment de louange. Selon quelle logique préparer et organiser les divers éléments ? Les propositions qui suivent représentent diverses possibilités, qui ne sont pas nécessairement entièrement distinctes les unes des autres, ni incompatibles entre elles. Fil conducteur biblique La louange est assez souvent et logiquement colorée par le reste du culte, qui lui-même peut être orienté par une thématique ou un fil conducteur biblique. Ce thème peut provenir – de la prédication ; – d’une décision conjointe du prédicateur et de la ou des personnes qui président au reste du culte et à la louange ; – du calendrier de l’Église : une Église peut décider, par exemple, de consacrer trois cultes de suite à une série 140 T Au cœur de la louange comme celle-ci : l’Écriture seule, la grâce seule et la foi seule ; ou d’organiser un dimanche de la mission qui donnera à la louange une qualité multiculturelle marquée ; – ou du calendrier chrétien : on est, par exemple, le deu- xième dimanche de l’Avent, ou le dimanche de Pâques. L’avantage de cette approche thématique est d’abord pédagogique : elle donne au culte une homogénéité qui façonne la communauté, qui lui permet de recevoir le même message sous diverses formes, pas seulement sous la forme du discours de la prédication, mais aussi par des chants, des prières, de brèves réflexions, bref par l’ensemble des éléments du culte qui sont mis au service de l’instruction de l’Église. Cette méthode fait aussi du culte un moment harmonieux, elle aide à préparer les interventions et oblige les acteurs du culte à travailler en équipe. Il faut cependant noter que tous les thèmes ne se prêtent pas à être « mis en louange ». Certains textes ou thèmes bibliques, qui peuvent faire l’objet d’une prédication, don- neront plus difficilement naissance à la louange. Et donc le thème imposé peut compliquer le travail des personnes qui préparent le culte, ou donner lieu à une prise en compte artificielle. Le risque de l’excès didactique peut aussi être évoqué, même s’il est rare : cet excès consisterait à orienter toutes les prières, tous les chants, toutes les prises de parole vers l’enseignement du thème choisi. Le culte devient alors une salle de classe, la liturgie un dis- cours pédagogique, la prière un moyen de faire passer un message, le chant un moyen de l’apprendre par cœur. La liturgie est en effet une pédagogie, mais cela n’efface pas le fait que, dans la rencontre de la communauté avec Dieu, Construire un temps de louange T 141 tout ne relève pas de l’explication et de la raison. Plus fré- quemment, le thème peut susciter une double ou triple pré- dication. Conduire la louange, ce n’est pas dire : « aujourd’hui, je vais vous parler de la foi », même si c’est le thème du culte. Le rôle des intervenants n’est pas de « nous parler de la foi », mais de « mettre le thème de la foi en louange » à l’aide des ingrédients que sont la prière, le chant, les paroles préparées ou spontanées, etc. Historiquement, on peut rattacher cette méthode, au moins dans certains de ses aspects, au culte de la Réforme, centré sur la prédication, ou aux mouvements de Réveil de l’époque moderne, où tout le culte n’était que préparation à l’annonce de l’Évangile et à l’appel à la conversion 1. Dans certains cas, le thème biblique peut être remplacé par un texte biblique, par exemple la lecture d’un psaume ou d’un hymne du Nouveau Testament ou d’un discours de Jésus, un texte adapté à une lecture progressive, de manière à ce que ce soit le texte même de l’Écriture qui donne sa ligne directrice à la louange voire à l’ensemble du culte. Le risque peut être, dans ce genre de démarche, de construire un temps de louange haché, fait d’une lecture, un chant, une lecture, une prière, une lecture, etc., le tout accompagné d’un assis-debout régulier… Chemin d’Évangile Si l’on donne à la « louange » un sens large, comme on le fait souvent aujourd’hui, on peut lui attribuer la démarche classique du culte protestant : l’Église se ras- semble à l’appel de Dieu ; elle loue le Dieu qu’elle découvre et se rapproche de lui ; elle prend conscience de ce que 1. Voir, entre autres, Greg Scheer, The Art of Worship, p. 90-91. 142 T Au cœur de la louange Dieu est et donc de ce qu’elle est devant lui, pécheresse et aimée ; elle dit : « parle Seigneur ». La « louange » commencera donc, dans cette logique, par des paroles, prières et chants qui expriment l’unité du peuple de Dieu, rassemblé autour de son Seigneur. « Dieu tu es grand » est l’étape suivante de ce que dit l’Église ; Dieu est créateur, il est bon, sa bonté se voit dans ses œuvres, son Église le célèbre. La confession des péchés, étape importante de la liturgie classique, amène les croyants à reconnaître leur situation devant Dieu, et à s’en remettre à son pardon ; le pardon généreux de Dieu suscite la reconnaissance ; les croyants célèbrent le Christ et le salut qu’il offre, et se consacrent à lui. L’avantage de cette approche est de « déposer » la louange sur une structure bien rodée et cohérente, qui cor- respond à la trame de l’Évangile. La présence de la confes- sion des péchés dans la louange, cependant, peut surprendre, et peut amener à se demander s’il est juste d’appeler « louange » toute cette démarche. Mais cette confession des péchés est en fait le moment où les croyants rassemblés sont invités à se voir tels qu’ils sont devant Dieu. « Il ne s’agit donc pas tant, durant le culte dominical, de demander pardon pour des péchés particu- liers, pour les injustices, les erreurs et les omissions qui caractérisent notre vie quotidienne (certes, pour cela aussi, bien sûr) que de reconnaître notre commune condi- tion humaine de femmes et d’hommes qui vivent loin de Dieu et qui ne peuvent se présenter devant sa majesté que comme des graciés 2. » On évitera naturellement, dans cette partie confession, les cantiques qui surestiment les 2. Ermanno Genre, Le culte chrétien, p. 104. Construire un temps de louange T 143 capacités humaines d’adoration, d’amour, de consécra- tion… La consécration, dans cette démarche, fait aussi partie de la louange, car dire la grandeur de Dieu, c’est dire aussi : « je me soumets à cette grandeur ». Ce « chemin » peut être coloré par une thématique comme celle du point précédent, mais ce n’est pas obliga- toire. Il a l’avantage, qui vaut aussi pour d’autres démarches, de permettre de varier les « rythmes » de la louange : une louange qui ne serait que méditative pour- rait devenir monotone ; une louange qui ne serait que dynamique et joyeuse pourrait devenir fatigante… Vers le trône de Dieu À l’invitation du Seigneur, le peuple de Dieu se pré- sente devant Dieu et lui offre sa louange. La première étape, celle de l’invitation à la louange, est une étape plu- tôt dynamique. Au cours de cette phase d’appel, chacun est invité, par des paroles, par une exhortation biblique, par un chant, à orienter son attention vers Dieu. Parmi les cantiques choisis, certains peuvent éventuellement être adressés par des croyants à d’autres croyants (comme « Viens, ne tarde plus », Brian Doerksen, JEM 720), d’autres parler du Dieu vers lequel les croyants sont invités à se tourner (« Dieu ta fidélité », T.O. Chisholm, JEM 400). Le chant accomplit remarquablement cette fonc- tion : créer l’unité (ou en faire prendre conscience) et orienter le groupe dans une même direction. Mais pour que l’invitation ne soit pas trop vague, il est bon d’utiliser des paroles bibliques pour la formuler. Célébrez l’Éternel car il est bon ; Car son amour dure à toujours. 144 T Au cœur de la louange Que tous ceux que l’Éternel a délivrés le proclament : Louons l’Éternel pour son amour et pour les choses mer- veilleuses qu’il a faites ! Amen. (Psaume 107) Cet appel étant entendu, l’assemblée se tourne vers Dieu et se présente devant lui. Elle reconnaît sa présence, par exemple par la prière et par le chant. Puis vient l’étape de la reconnaissance, de l’adoration et de la louange, dans laquelle on peut prendre en compte deux aspects de notre rapport à Dieu : notre rapport au Dieu grand, majestueux, au Roi des rois, qui nous met face à notre humanité et à notre fragilité ; et notre rapport au Dieu qui se fait proche de nous, le bon berger qui prend soin de ses brebis, le Père qui a compassion de ses enfants. La louange est alors l’expression de la proximité respec- tueuse, avec la tension que cela peut représenter, uploads/Religion/ construire-un-temps-de-louange-chapitre-8.pdf
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- Publié le Apv 18, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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