Revue des études byzantines Un acte grec inédit du despote serbe Constantin Dra

Revue des études byzantines Un acte grec inédit du despote serbe Constantin Dragaş V. Laurent Citer ce document / Cite this document : Laurent V. Un acte grec inédit du despote serbe Constantin Dragaş. In: Revue des études byzantines, tome 5, 1947. pp. 171- 184; doi : https://doi.org/10.3406/rebyz.1947.954 https://www.persee.fr/doc/rebyz_0766-5598_1947_num_5_1_954 Fichier pdf généré le 14/11/2018 UN ACTE GREC INÉDIT DU DESPOTE SERBE CONSTANTIN DRAGAS De tous les monastères de l'Athos celui de Batopédi semble avoir conservé le nombre le plus considérable de diplômes de tous genres1, allant de la minute hésitante de notaires inhabiles aux actes impeccables de la chancellerie impériale. Une tradition de défiance jamais démentie2 à l'égard du visiteur étranger est cause que le catalogue exhaustif et critique n'en a jamais été publié. C'est bribe par bribe que son riche chartrier a été partiellement débité par des savants presque exclusivement grecs ou russes dans des recueils les plus hétéroclites d'après des copies toujours hâtives et parfois frelatées. Ces éditions fragmentaires ont le tort de livrer au lecteur sans défense, pêle-mêle, le vrai et le faux ou de soumettre à son étude des textes insuffisamment élaborés. Mieux vaut néanmoins ces initiatives d'une érudition tâtonnante que le silence absolu. La vraie science ne saurait s'y tromper et s'y est de fait reconnue3. (1) Le plus récent catalogue que l'on en ait donné est dû à Mgr Eustratiadès, ancien métropolite de Léontopolis. Publié dans Ελληνικά, III (1930), 45-68. En tout, cent six pièces grecques dont vingt-quatre seulement d'époque byzantine. On peut en déduire à coup sûr que le savant prélat n'a pas vidé tous les tiroirs, s'il les a tous vus. Ancienne liste de P. Uspenskij dans ΈπετηρΙς εταιρείας βυζαντινών σπουδών, VIII (1931), 104, 105 ; voir aussi V. Langlois, Le Mont Athos et ses monastères, Paris, 1867, 41, 42. Les actes grecs des princes serbes sont à peine touchés et l'on y relève très peu de chartes intéressant les nombreux métoques de Batopédi. Je n'y ai retrouvé en particulier aucune des pièces d'un dossier qui y figure certainement et dont je parle ci-dessous p. 172, n. 1. (2) Des Grecs et non des moindres, tel Sp. Lampros, qui ne fut pas autorisé à dresser le catalogue de ses manuscrits, en sont restés victimes. A la veille de cette guerre, les moines eurent l'ingénieuse et lucrative idée d'imposer une taxe sur toute photographie que l'on y voudrait prendre. Nonobstant cela, un savant de la qualité du regretté M. Binon se vit interdire, lors de son dernier voyage en 1938, tout usage de son appareil. (3) Sur les éditions des actes conservés à Batopédi consulter l'article de Fr. Döl g er 172 l'.TUDES BYZANTINES Aussi est-ce sans scrupule qu'au risque de grandir le mal je produis à mon tour une pièce obtenue de seconde main, d'un intérêt limité quant à son objet, mais particulièrement recom- mandable vu la qualité de son auteur. Elle m'est venue dans un lot assez étendu d'autres actes du même fonds concernant divers couvents ou églises de la ville macédonienne de Melnik1, plus spécialement le monastère de la Théo to kos Spélaiotissa. La copie dont il va être fait état est de la main même de M. Gédéon, le doyen de. la science hellénique. Le long, très long usage des écritures de toutes époques acquis par cet éditeur infatigable mort presque centenaire, doit offrir à lui seul une garantie suffisante de fidélité. Les possibilités d'erreurs, au reste tangibles à quelques étrangetés de style ou anomalies de pensée, ne sont pas exclues. Mais, par une rare chance, ces défectuosités, sensibles en d'autres textes d'une conservation sans doute moindre, ne portent que sur des points secondaires. C'est pourquoi, si la consultation de l'original permettra de donner de l'acte une édition diplomatique, elle ajoutera sans doute peu à la correction de son texte2. Le diplôme en question appartient à une catégorie spéciale, celle des actes émis par les chancelleries slaves, serbes ou bulgares, en faveur d'institutions byzantines. En élargissant leurs possessions en Thrace et Macédoine aux dépens de l'empire byzantin, les princes balkaniques, tsars, rois ou simples dynastes, se substituèrent à celui-ci comme patrons de la république athonite, l'ensemble des terres dédiées dont vivait la Sainte-Montagne se trouvant réparties dans leurs domaines. Grâce à l'opportunisme des moines, traditionnellement prompts à courtiser le vainqueur chrétien ou turc3, ce dernier, intéressé par piété ou par politique à ne rien changer au statu quo tomba d'accord dès le premier moment pour que chaque nouveau régime lésât le moins possible les fondations pieuses. Néanmoins si pour les biens précédemment Chronologisches und diplomatisches zu den Urkunden des Athosklosters Vatopedi dans Byz. Zeitschr., XXXIX (1939), 321-340. (1) Ces actes ont été copiés sur les originaux soit par M. Gédéon en personne (en septembre 1922), soit par un autre voyageur dont le même M. Gédéon a recollationné le texte. L'ensemble paraîtra dans les Actes de l'Académie bulgare des Sciences. (2) Je dois maintes indications bibliographiques et des précisions historiques à M. Lascaris, professeur à l'Université de Thessalonique. Qu'il veuille bien trouver ici, pour son obligeante courtoisie, l'expression de ma plus sincère gratitude. (3) Cf. C. Korolevskij, art. Athos dans le Dictionnaire d'Histoire et de Géographie ecclésiastique, tome V, 1931, col. 89, 90. L'étude a-surément la plus complète touchant les relations de l'Athos avec les nouveaux maîtres turcs doit être celle de P. Lemerle et P. Wittek, Becherches sur Vhisloire et le statut des monastères athoniles sous la domination turque, I. Trois documents du monastère de Kuilumus. Archives d'histoire du droit oriental, III, Bruxelles. Elle n'a pas encore paru. Voir aussi ci-dessous, p. 179. IN ACTE INÉDIT DE CONSTANTIN DRAGAS 173 acquis le renouvellement des titres ne s'imposa pas en principe, les anciens chrysobulles gardant force de loi, chaque nouvelle donation ne fut plus possible que par l'initiative ou sous la sanction de l'autorité de fait et l'on dut, en chaque cas, recourir à la rédaction de diplômes émanant de lui1. Il se posa dès lors une question de langue, car, si le grec n'était pas de toute évidence l'organe officiel du pouvoir établi, la population n'en avait pas changé et l'on ne pouvait l'atteindre qu'en en usant soi-même. Et c'est ce que firent les maîtres successifs qui, s'ils ne possédèrent pas de chancellerie selon la rigueur du terme, ne manquèrent toutefois jamais de secrétaires aptes à interpréter leurs volontés. De fait, à côté d'un lot compact d'actes écrits en slavon, il nous en est parvenu un autre rédigé dans le parler des populations soumises. Le recueil des documents de cette catégorie, dus aux princes serbes, a été publié et c'est dans son sein que l'on eût dû s'attendre à trouver celui dont nous nous occupons. S'il est absent de cette consciencieuse compilation2, c'est évidemment qu'il n'a pas vu le jour. Au reste, il s'y serait trouvé, bien qu'à sa place, en marge de la collection qui ne comprend que des actes de krals de Serbie tandis qu'il émane, lui, d'un simple dynaste macédonien. Cette particularité ajoute à son intérêt, car elle permet de se rendre un certain compte de la manière dont ces souverains improvisés, astreints à créer des chancelleries sans tradition diplomatique, instrumentaient dans le coin de province dont le sort les avait rendus maîtres presque absolus. Et c'est pourquoi, si l'objet, tout banal, du diplôme ajoute peu à l'histoire générale, le seul fait de son existence nous renseigne opportunément sur la survivance des traditions byzantines dans certaines parties du territoire (1) Cf. VI. Mosi.n, Gab es unter den serbischen Herrschen des Mittelalters eine griechische llofkanzlei? dan> Archiv für Urkundenforschung, XIII, 1935, 183-197. L'auteur dont les conclusions se trouvent également dans les Actes du IVe Congrès international des Études byzantines. Sofia, II, 1936, 7S, 79, a été suivi par maints savants (Voir entre autres M. Laskaris dans Revue internationale des études balkaniques, III, 1937 5-6 et P. Lemerle dans Annales de l'Institut Kondakov, XI (1940), 145). Mais il a été vivement pris à partie par Fr. Dölgek, Empfänger ausslelhing in der byzantinischen Kaiserkanzlei? Methodisches zur Erforschung der griechischen Urkunden des Miltellaters, XV, 1937, 393-414 et quatre planches. L'expression «chancellerie« paraît en toute hypothèse trop prétentieuse. Parler de bureau serait sans doute encore trop et peut-être serait-il prudent de réduire le service compétent à quelque poste de fonctionnaire préposé aux lettres grecques. (2) Cf. A. Soloviev et VI. Mosin, Diplomata graeca regum et imperatorum Seruiae, Belgradi, 1936, 373 pages (texte grec et traduction serbe) précédées d'une longue introduction (cxxxn pp.) et suivies d'un précieux répertoire (377-507 pp.) qui rendrait les plus grands services s'il était rédigé dans une langue internationale. 174 ÉTUDES BYZANTINES conquis par le Turc et échappant pour un temps encore à sa domination effective. Le document est dûment daté et signé ; indices chronologiques et historiques concordent si parfaitement que tout soupçon d'erreur doit être écarté. C'est bien en octobre 1393 (= an du monde 6902 de la deuxième indiction) que le despote Constantin, seigneur de Melnik et autres lieux, céda au monastère athonite de Batopédi le petit couvent local de Pantanassa. Toute délabrée qu'elle fût, uploads/Religion/ un-acte-grec-inedit-du-despote-serbe-constantin-dragas-laurent-v.pdf

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  • Publié le Jui 11, 2022
  • Catégorie Religion
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