C. Schmidt-Lainé, A. Pavé Natures Sciences Sociétés « Sciences pour l’ingénieri
C. Schmidt-Lainé, A. Pavé Natures Sciences Sociétés « Sciences pour l’ingénierie de l’environnement », 10 : S1, 2002, 5,25 Claudine Schmidt-Lainé et Alain Pavé 3 Environnement : modélisation et modèles pour comprendre, agir ou décider dans un contexte interdisciplinaire Claudine Schmidt-Lainé1 et Alain Pavé2 « Modélisation et analyse mathématique de situations scientifiques, industrielles ou économiques, étapes suivies de la construction d’algorithmes et du développement de logiciels adaptés aux évolutions technologiques, l’ensemble de cette démarche est devenue classique. Même si d’autres phénomènes échappent encore à cette méthodologie, elle est en passe d’acquérir un caractère universel, non seulement pour la compréhension et la conception, mais encore pour l’intervention active sur les systèmes qui évoluent au cours du temps. ». J.-L. Lions (19963). Résumé Tous les secteurs scientifiques sont maintenant concernés par la modélisation. Méthodologie en plein devenir, elle est source de progrès, mais son emploi n'est pas sans risque. Les recherches sur l'environnement et les technologies afférentes concernent de nombreuses disciplines ; chacune d'entre elles a sa propre expérience de la modélisation. Outre son intérêt propre, le champ de la recherche sur l'environnement constitue donc un bon laboratoire où s'échangent des savoirs et des savoir-faire et où une méthodologie commune peut être développée. Tout en privilégiant un point de vue sur la modélisation, celui s'intéressant à la dynamique des systèmes, il s'agit d'en décrire les principes, de citer les principaux problèmes environnementaux où la modélisation intervient de façon déterminante, d'en cerner les limites et d'identifier les progrès à faire. On remarquera, qu'en plus de son intérêt propre, pour comprendre et résoudre un certain nombre de problèmes, la modélisation devient de plus en plus un moyen de dialogue entre les disciplines. Enfin, l'environnement est un bon exemple de système complexe. La modélisation apparaît efficace pour l'étude de tels systèmes et les progrès méthodologiques réalisés en matière de recherches sur l'environnement ont sans doute une portée plus générale et peuvent être utiles pour aborder d'autres systèmes, eux-aussi qualifiés de complexes. Environment : modelling and models to understand, to manage and to decide in an interdisciplinary context Summary If the physical sciences were the cradle of modelling approaches, now almost all disciplines are concerned by this methodology. First based on mathematical language, the modelling formalisms become more and more diverse. Computer sciences contribute widely to the extension of the methodology at two levels: the first to make easier the use of mathematical models, the second to develop new formalisms, such as cellular automata or neural networks. The fields of basic and applied research on the environment and related technological developments give good examples of applications of this methodology, from global modelling at the planet level, for example for the study of climate changes, to local and specialised models, for example in population dynamics or water transfers in soils. Models are also developed to reach various goals: in basic research, to understand how environmental systems work, in technological development, to design adapted techniques, and in decision making process, as 1 Directeur de recherche au CNRS, Directeur scientifique du Cemagref, Cemagref, Parc de Tourvoie, BP 44. 92163 Antony cedex, France. Tél. 33 (0)1 40 96 62 57. Email : Claudine.Schmidt-Laine@cemagref.fr. 2 Professeur des Universités, consultant auprès de la direction scientifique du Cemagref. Laboratoire de Biométrie et de Biologie Evolutive. UMR CNRS 5558. Université Claude Bernard Lyon 1. 69622 Villeurbanne cedex, France. Tél. 33 (0)4 72 44 81 42. Email : alainpave@aol.com 3 Cette citation tirée de : « Modélisation de la combustion » (Images des mathématiques, CNRS, 1996) avait été reprise en en-tête de la présentation du programme « modélisation et simulation numérique » du CNRS (Schmidt-Lainé, 1997). Elle est toujours d'actualité et résume parfaitement l'état de l'art. C. Schmidt-Lainé, A. Pavé Natures Sciences Sociétés « Sciences pour l’ingénierie de l’environnement », 10 : S1, 2002, 5,25 Claudine Schmidt-Lainé et Alain Pavé 4 an argument, among others, to elaborate a decision. The recent expansion of modelling, to almost all disciplines implied in environmental research, makes it also a tool in interdisciplinary dialog. The model becomes a link between disciplines, for example between natural and social sciences, by combining dynamics of ecological and social systems. But the use of models is not exempt of hazards. Used in bad conditions, off its limits of validity, or running with a deficient simulator, it may lead to incorrect results. It may also be a screen to hide an insufficient knowledge. It such cases, it can be a wrong decisive argument in decision process or to lead to a bad technical device or protocol. Anyway, built and used carefully it is a precious and efficient tool. So, the state of the art and actual methodological problems and applications in environmental basic and technical research are presented. The foreseeable advances and endeavours are also envisaged. The text is essentially illustrated by examples developed by scientists and engineers of the Cemagref. Finally, the environment is an example of a complex system. Modelling is a good tool for complexity analysis and methodological advances in environmental research would be useful for other systems which are qualified "complex", and then have a larger range of application than studies on environment. Mots-clé : modélisation, environnement, modèles mathématiques, modèles informatiques, ingénierie, écologie. Dans un récent numéro, Natures, Sciences, Sociétés a lancé le débat sur la modélisation (Legay, 1999). Dans des parutions antérieures, plusieurs allusions avaient été faites, notamment pour son utilisation dans les recherches sur l’environnement (Jollivet et Pavé, 1993). Le propos de cet article est de présenter un point de vue sur cette méthodologie, de souligner à nouveau son emploi dans ce champ scientifique, mais aussi d’en voir l’utilisation en matière d’ingénierie et d’outil d’aide à la décision. On insistera évidemment sur son intérêt, mais aussi sur ses limites. Bien au-delà des sciences physiques, qui en furent le berceau, la modélisation est devenue une méthode commune à beaucoup de disciplines4. Les sciences de la Terre, puis les sciences de la vie et enfin les sciences de l’homme et de la société s’en sont emparées. Son usage dans les sciences physiques pour l’ingénieur a permis un grand nombre de progrès technologiques. D’abord fondés sur les mathématiques, les formalismes se sont diversifiés. Le développement de l’informatique a largement contribué à l’extension de cette méthode, aussi bien en tant qu’outil de mise en œuvre de modèles mathématiques que comme source de nouveaux moyens de représentation. C’est le cas, par exemple, des automates cellulaires, des réseaux de neurones ou des systèmes multi-agents. Mais pas uniquement, ainsi certaines disciplines, comme la géographie avec les chorèmes, se sont dotées de leurs formalismes propres (cf. encadré 1). Les apports de la modélisation sont nombreux aussi bien à des fins de compréhension, que pour des développements technologiques, mais aussi comme fondements de l’action ou encore comme élément d’aide à la décision. C’est ce qui explique son succès. Cependant, l’emploi du modèle n’est pas non plus sans risque, le principal étant une mauvaise utilisation, hors de son champ de validité, ou lors d’une mise en œuvre maladroite par l’utilisation d’un simulateur déficient. Une confusion est encore possible : assimiler le modèle à la réalité. En effet, le modèle sert à représenter le monde tel que nous le pensons, comme nous le percevons, quelquefois tel que nous le souhaitons et non pas comme il est. Ce n’est que par la 4 Si l'on peut faire remonter l’occurrence du mot modèle, dans le vocabulaire scientifique, au début de année 40, en revanche, son emploi ainsi que l’invention du mot « modélisation » ne remontent qu’à la fin des années 60 et au courant des années 70 (plus précisément en 1975, ainsi que le verbe modéliser, selon le dictionnaire historique de la langue française). Cependant, il faut attendre la fin des années 80 et le début des années 90 pour le voir mentionné dans les dictionnaires courants. C. Schmidt-Lainé, A. Pavé Natures Sciences Sociétés « Sciences pour l’ingénierie de l’environnement », 10 : S1, 2002, 5,25 Claudine Schmidt-Lainé et Alain Pavé 5 constante confrontation entre le réel tel qu’on peut l’appréhender et les diverses formes de ce modèle, de ses avatars successifs, qu’il devient moyen de compréhension ou support de l'action. Les divers secteurs de la recherche se sont approprié la modélisation. Depuis quelques années l’enseignement y fait référence. Ainsi, on en parle déjà dans des ouvrages de l’enseignement secondaire (cf. encadré 1), alors que les premières formations doctorales incluant le mot modélisation datent seulement des années 80. Depuis trois ans, l’agrégation de mathématique a introduit la modélisation à son programme. Il est d’ailleurs fort juste que les mathématiques et les mathématiciens soient en première ligne, si l’on considère, non seulement l’histoire, mais aussi l’extraordinaire ouverture de cette discipline et de cette communauté, depuis une vingtaine d’année, vers les « applications » et donc vers les autres disciplines. Les concepts, les méthodes et les formalismes de la modélisation sont de plus en plus largement partagés par les disciplines. Elle devient progressivement un moyen de synthèse, un trait d’union entre elles (Schmidt-Lainé et Pavé, 1999). En effet, un modèle représente le uploads/Science et Technologie/ art-01-schmidt-laine-et-pave-environnement-v2.pdf
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- Publié le Mar 08, 2021
- Catégorie Science & technolo...
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