Comité Justice pour l'Algérie Les centres de torture et d’exécutions - Dossier
Comité Justice pour l'Algérie Les centres de torture et d’exécutions - Dossier n° 6 - Algeria-Watch et Salah-Eddine Sidhoum, octobre 2003 SOMMAIRE Comité Justice pour l'Algérie......................................................................................................1 - Dossier n° 6 -............................................................................................................................ 1 Le DRS, centre et moteur de la machine de mort............................................................... 3 La Direction centrale de la sécurité de l’armée (DCSA).................................................4 La Direction du contre-espionnage (DCE)......................................................................4 La Direction de la documentation et de la sécurité extérieure (DDSE).......................... 5 Le Groupement d’intervention spéciale (GIS)................................................................ 5 La police sous les ordres du DRS....................................................................................... 5 Les forces spéciales de l’armée organisées au sein du CCC/ALAS................................... 6 L’organisation du secret......................................................................................................7 Les centres de détention secrète, de torture et d’exécutions............................................... 7 Une première liste de 95 centres..................................................................................... 7 Les centres du DRS.............................................................................................................9 Le CPMI de Ben-Aknoun............................................................................................. 10 Le PCO de Châteauneuf................................................................................................11 Le CPO, ou « Centre Antar »........................................................................................ 14 Le CTRI de Blida, ou « Haouch-Chnou ».....................................................................15 Le CTRI de Constantine, ou « Centre Bellevue »......................................................... 17 Le CTRI d’Oran, ou « Centre Magenta »......................................................................17 La villa COOPAWI de Lakhdaria.................................................................................18 Les commissariats de police..............................................................................................19 Le commissariat de Bourouba.......................................................................................19 Le commissariat central d’Alger...................................................................................20 Le commissariat de Cavaignac à Alger.........................................................................21 Les brigades de gendarmerie.............................................................................................22 La brigade de gendarmerie de Aïn-Naâdja (Birkhadem).............................................. 22 Croquis de trois centres de torture.................................................................................... 24 1 - CPMI de Benaknoun Alger......................................................................................24 2 - CTRI de Blida..........................................................................................................25 3 - Brigade de gendarmerie de Birkhadem, Alger.........................................................26 La création et l’organisation de la « machine de mort » Ce dossier est tiré du rapport publié par Algeria-Watch et Salah-Eddine Sidhoum : La machine de mort, Un rapport sur la torture, les centres de détentions secrets et l’organisation de la machine de mort, octobre 2003. 2 Résumé Lorsque, dès le premier tour des élections législatives du 26 décembre 1991, la victoire du Front islamique du salut (FIS) fut annoncée, un petit groupe de généraux, soutenu par une partie de l’élite francophone, a mis en application un plan préparé depuis plus d’un an et destiné à faire barrage au mouvement islamiste. Le coup d’État du 11 janvier 1992 a été officiellement motivé par le caractère avéré ou supposé antidémocratique de ce mouvement. Mais de nombreux témoignages concordants attestent que la véritable motivation des putschistes — qui s’étaient assurés de la bienveillance des chancelleries occidentales avant d’intervenir — était leur crainte d’être balayé du pouvoir et de devoir rendre des comptes à propos de la répression sauvage des émeutes d’octobre 1988 et de la grève du FIS de juin 1991. La machine qui allait se mettre en branle utilisera et exploitera tous les rouages de l’État. Mais avant d’assujettir la justice, l’administration et les médias, c’est l’appareil sécuritaire qui connut une nouvelle extension. Le cœur de ce dispositif — nous allons y revenir en détail — était constitué des services secrets de l’armée, la redoutable Sécurité militaire (SM), devenue DRS (Département de renseignement et de sécurité) en septembre 1990 et dirigée par le général Mohammed Médiène (dit « Toufik ») et son second, le chef de la DCE (Direction du contre-espionnage) Smaïl Lamari (dit « Smaïn »). Dès janvier 1992, le DRS chapeaute et coordonne toute la lutte « antiterroriste », en collaboration avec le général Mohamed Lamari, commandant des forces terrestres au sein de l’état-major de l’Armée nationale populaire (ANP). Désavoué en mars 1992 par le président Mohammed Boudiaf, Mohamed Lamari reviendra au premier plan après l’assassinat de ce dernier en juin 1992 : le général-major Khaled Nezzar, ministre de la Défense, l’élèvera en juillet au grade de général-major en lui assignant comme objectif d’organiser les « forces spéciales » de l’ANP au sein d’une nouvelle structure appelée CCC/ALAS (Centre de conduite et de coordination des actions de lutte anti-subversive), communément appelée CLAS ; en juillet 1993, le général-major Mohamed Lamari sera nommé chef d’état-major de l’ANP, poste qu’il occupe toujours à ce jour. Les troupes régulières de l’armée seront elles aussi totalement impliquées dans cette guerre livrée par le commandement militaire à la population, mais dans des formes plus classiques : opérations de ratissages, bombardements, protection de sites sensibles, etc. La gendarmerie nationale, comme corps de l’armée, sera elle aussi partie prenante dans cette tragédie — les témoignages de torturés l’attestent sans aucune ambiguïté —, même s’il faut relever que le commandement de la gendarmerie n’a pas toujours approuvé les méthodes « éradicatrices » des « janviéristes ». Les unités d’intervention spéciale de la gendarmerie, les GIR (Groupes d’intervention rapide), joueront le rôle le plus actif dans la répression, en particulier ceux de la région d’Alger, le GIR 1 (localisé à Chéraga) et le GIR 2 (localisé à Réghaïa), spécialement chargés de réaliser des exécutions extrajudiciaires. Quant à la police (DGSN, Direction générale de la sûreté nationale), corps dépendant du ministre de l’Intérieur et non pas de celui de la Défense, elle a été totalement assujettie à la stratégie de « guerre totale » et placée, dans les faits, sous la direction du DRS. Enfin, à partir du printemps 1994, ce dispositif répressif sera complété par des milices de civils (qualifiés de « patriotes »)1, placées officiellement sous la responsabilité du ministère de l’Intérieur, et qui joueront au fil des années un rôle croissant dans le déploiement de la terreur contre les populations civiles. Le DRS, centre et moteur de la machine de mort 1 Voir dossier n°17 : L’organisation des milices. 3 Le DRS est donc le nouveau nom de la Sécurité militaire (SM), la police politique du régime depuis 1962. Après une première réorganisation en novembre 1987, la SM a été restructurée une nouvelle fois le 4 septembre 1990 (prenant le nom de DRS, conservé depuis lors — mais la plupart des Algériens parlent toujours de la « SM »), à l’initiative des généraux Larbi Belkheir (alors chef de cabinet du président Chadli Bendjedid) et Khaled Nezzar (alors ministre de la Défense). Alors que la principale d’entre elles dépendait auparavant de la présidence de la République, l’ensemble des branches du DRS a été placé sous la responsabilité du ministre de la Défense — le général-major Khaled Nezzar a occupé cette fonction du 25 juillet 1990 au 11 juillet 1993 ; lui succédera le général Liamine Zéroual, futur président de la République et ministre de la Défense jusqu’au 15 avril 1999 ; le président actuel, Abdelaziz Bouteflika, cumule également les deux fonctions. Depuis septembre 1990 et jusqu’à ce jour (octobre 2003), le DRS — dont le siège est situé à Delly-Brahim, dans la banlieue ouest d’Alger — est dirigé par le général-major Mohamed Médiène, dit « Toufik ». Il est constitué de trois directions principales, dont deux disposent de centres de torture sinistrement renommés : la Direction du contre-espionnage (DCE), dirigée depuis septembre 1990 jusqu’à ce jour par le colonel (puis général) Smaïl Lamari, dit « Smaïn », issu de la SM (DCSA) ; et la Direction centrale de la sécurité de l’armée (DCSA), dirigée depuis septembre 1990 à fin 1999 par le colonel (puis général) Kamel Abderrahmane (issu de l’armée de terre ; il a été muté depuis à la tête de la 2e région militaire, à Oran). La Direction centrale de la sécurité de l’armée (DCSA) De la DCSA dépendent le Centre principal militaire d’investigation (CPMI) de Ben- Aknoun, dans la banlieue d’Alger (dirigé de 1990 à 2001 par le colonel Athmane Tartag, dit « Bachir »2), ainsi que ses antennes dans les six régions militaires, les centres militaires d’investigation (CMI, fusionnés à partir de mars 1993 avec les CRI de la DCE — voir ci-après — pour devenir les CTRI). Le CPMI, de 1990 au coup d’État de janvier 1992, a joué un rôle essentiel (en concurrence avec la DCE) dans la manipulation du FIS ; à partir de janvier 1992, il sera un des principaux centres de torture et de liquidation d’opposants. Certains de ses éléments formeront aussi un escadron de la mort (connu selon certains comme « unité 192 »), chargé initialement de l’élimination d’officiers « récalcitrants » et qui étendra plus tard, à partir du printemps 1993, son action à l’élimination de civils « démocrates », dont la mort sera attribuée aux GIA (groupes islamiques armés). La Direction du contre-espionnage (DCE) Le siège de la DCE se trouve au « Centre Ghermoul ». C’est la DCE qui contrôle le Centre principal des opérations (CPO), localisé à Ben-Aknoun dans une caserne appelée « Centre Antar » et chargé des actions illégales du DRS (y compris, là aussi, la manipulation des groupes armés islamistes). Et, à partir de juin 1991, la DCE est également responsable, dans les faits, du Poste de commandement opérationnel (PCO, initialement appelé COB, Commandement des opérations de base), situé d’abord à Aïn-Naâdja (siège du Commandement des forces terrestres), puis, à partir d’avril 1992, à la caserne de Châteauneuf : le PCO est chargé de coordonner l’action du DRS, de la police et de la gendarmerie, de collecter des renseignements et de mener des actions de contre-insurrection pour le commandement. Par ailleurs, la DCE dispose de relais situés dans chacune des six régions militaires, les CRI (centres de recherche et d’investigation), qui fusionneront en mars 1993 avec les uploads/s1/ dossier-6-centres.pdf
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- Publié le Jan 21, 2022
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