82 festival 21 sept 6 oct 2012 – Strasbourg www.festival-musica.org 1 Édito Rém

82 festival 21 sept 6 oct 2012 – Strasbourg www.festival-musica.org 1 Édito Rémy Pflimlin, Jean-Dominique Marco p. 2 Le programme p. 4 Les cahiers de Musica John Cage, américain chéri par l’Europe Evan Rothstein p. 39 Petite cartographie des ensembles européens Éric Denut p. 42 Arnold Schoenberg, de Erwartung à Moïse et Aaron Beat Föllmi p. 46 Trilogie d’imaginaires Antoine Gindt p. 48 Les nouvelles possibilités d’expériences de Hans Zender Jörn Peter Hiekel p. 51 L’affiche p. 54 Les compositeurs et les œuvres p. 58 L’équipe p. 62 Les partenaires de musica p. 63 Infos pratiques p. 75 Les lieux p. 76 Tarifs, ventes & réservations p. 78 Calendrier p. 80 2 3 Libérer les sons « Je n’ai rien à dire… et je le dis » C’est par ces mots que John Cage s’adresse en 1949 aux membres de l’Artists’ Club de New York en assumant une attitude originale et radicale. Celui qui, lors de son passage à Musica en 1990, affirmait avec malice et ironie qu’il n’était qu’un touriste dans la musique n’aura jamais cessé d’être ce provocateur plein d’humour et de modestie alors qu’il est l’un des plus beaux exemples d’artiste désinhibé et libre. Amoureux du silence, il introduit le bruit et le hasard dans la musique, remodèle la pensée esthétique en l’extirpant de tout académisme, apprivoise le son électronique et se détermine par l’indétermination. Tout à la fois compositeur, plasticien, poète, théoricien, il s’est attaqué aux frontières de la musique, les a repoussées au-delà de tout conformisme pour nous livrer une œuvre unique et inclassable. Celui qui cultiva un minimalisme épris de pureté, parfois teinté de naïveté – sommé par Schoenberg en 1934 d’abandonner la musique faute de ne rien comprendre au sens de l’harmonie – laisse pourtant derrière lui une œuvre et une pensée d’une richesse inépuisable. Cent ans après sa naissance et à l’occasion du vingtième anniversaire de sa disparition, Musica lui rend hommage et invite des artistes d’aujourd’hui à revisiter son héritage. Du piano préparé à ses liens constants à la danse, le festival sillonne son univers et ouvre le bal insolent du Cabaret Contemporain dans lequel le spectateur est invité à boire un verre et à danser sur ses musiques avant de finir la soirée par un set de DJ sur des partitions contemporaines. Le pianiste Wilhem Latchoumia s’empare de sa Suite for Toy Piano et s’entoure de compositeurs d’aujourd’hui qui s’inspirent de son œuvre. Robert Wilson reprend sa Lecture on Nothing tandis que le chorégraphe Rui Horta réinvente un dialogue poétique pour piano et corps préparés sur ses Sonates et Interludes. De cet artiste complet et si attachant, Musica fait la figure tutélaire de cette édition. Suites orchestrales Outre les orchestres de Baden-Baden/ Freiburg et de Strasbourg, Musica invite cette année celui de Bruxelles associé au Chœur de la Radio Flamande pour une œuvre récente de Luca Francesconi, Sirènes. Le compositeur nous pousse au bord des récifs, là où les navigateurs viennent briser leurs navires en tombant sous le charme envoûtant du chant des sirènes. Une œuvre impressionnante par son intensité ! En fin de festival et pour la première fois à Musica, l’Orchestre symphonique de la Casa da Música de Porto témoigne de l’extrême dynamisme de cette maison portugaise en défendant le dernier concerto de Bruno Mantovani, pour deux pianos, et la création du jeune portugais Daniel Moreira. Auparavant, le Remix Ensemble nous aura offert deux créations, l’une de Yann Robin, l’autre de Pascal Dusapin, et François-Frédéric Guy la création d’un nouveau cycle pour piano de Marc Monnet. Le pari du côté obscur Autre clin d’œil, Musica célèbre l’un des groupes de rock les plus mythiques de l’histoire en convoquant Pink Floyd et leur album emblématique The Dark Side Of The Moon. C’est le pari fou de Thierry Balasse, spécialiste de la réalisation sonore et de la composition électroacoustique entouré d’une dizaine de musiciens et de leurs instruments d’époque. Il ne s’agit pas ici de plagier Pink Floyd sur scène mais de reconstituer le groupe en studio en reproduisant en live l’intégralité de la musique, effets sonores compris, chose alors techniquement impossible sur scène. Exit donc les bandes et les magnétophones, tout est en direct ! La Face cachée de la lune nous offre une plongée spectaculaire au cœur des années 70 quand ce groupe frappait les esprits par son extraordinaire inventivité dans l’exploration du son. Sur les chemins de l’Europe Dans une sorte de chassé-croisé, Musica parcourt l’Europe, celle des ensembles musicaux, avec le Kammerensemble Neue Musik de Berlin, Ictus de Bruxelles, les Neue Vocalsolisten de Stuttgart, Linea et Accroche Note de Strasbourg, Divertimento de Milan, l’Athelas Sinfonietta de Copenhague, l’ensemble Prague Modern et le Remix Ensemble de Porto. Ils jouent pour l’essentiel la musique des pays voisins dans un vaste brassage des esthétiques. Ils témoignent tous de la vitalité de la création du vieux continent en soulignant la forte circulation des œuvres et de leurs auteurs dans cet espace plus que jamais curieux et ouvert à toutes les influences artistiques. C’est aussi la reconnaissance des réseaux qui œuvrent inlassablement non seulement pour la création mais aussi pour une meilleure diffusion des œuvres musicales et de leurs auteurs. De même, Musica et ARTE programment une soirée Music’Arte avec un double hommage. D’abord, en début de soirée à l’Ensemble Modern de Francfort avec Quand la scène brûle, un portrait magistral filmé de cet excellent ensemble par Manfred Scheyko. Ensuite à Hans Zender, compositeur et chef allemand emblématique. Après sa relecture du Voyage d’hiver de Schubert, le voici qui réitère son expérience avec les Variations Diabelli de Beethoven en faisant sienne la réflexion de Nietzsche : « La relation entre l’ancien et le nouveau est telle que le nouveau finira toujours par détruire l’ancien. Il n’y a qu’une seule manière d’éviter cet écueil : planer sans crainte au-dessus de l’abîme de l’histoire. » Münchhausen mis en scène par Franc Aleu, vidéaste attitré de La Fura dels Baus. De cet invraisemblable personnage – ayant réellement existé au XVIIIe siècle sous un autre nom – et qui raconte des histoires à dormir debout, Mitterer nous livre un spectacle hautement burlesque où il donne libre cours à son inspiration musicale débridée ponctuée de ses samples ravageurs. Épilogue Une édition riche en événements inattendus qui pourrait se résumer par la phrase de Cage : « Si un son vous dérange, écoutez-le ! » Alors bonne écoute et joyeux festival ! Rémy Pflimlin Jean-Dominique Marco Président Directeur — Mais cette façon de libérer les sons, d’échapper aux codes musicaux européens, ne lui est pas exclusive. D’autres compositeurs américains ont, chacun à leur manière, cultivé cette nécessité. Parmi eux, Charles Ives et John Adams que Musica met en avant avec l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et son nouveau chef Marko Letonja, tandis que le Jack Quartet et l’ensemble Linea défendent la jeune création aux États-Unis. Enfin – clin d’œil – le festival plonge dans l’univers de la fin des années 20 à Hollywood au moment où le cinéma parlant fait irruption avec la projection du film aux innombrables récompenses internationales The Artist et, pour la première fois, la musique originale de Ludovic Bource interprétée en live par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg. L’incontournable Schoenberg Musica retourne néanmoins aux univers musicaux de l’Europe qu’il défend en ouvrant et clôturant le festival avec Arnold Schoenberg, référence fortement revendiquée par le festival depuis ses origines. D’abord Moïse et Aaron en ouverture, opéra inachevé, donné ici en version concertante comme à sa création en 1954, avec l’Orchestre de Baden-Baden/ Freiburg et l’EuropaChorAkademie sous la direction de Sylvain Cambreling. Une vision forte d’un sujet biblique au moment où Schoenberg se rapproche de son identité juive dans les heures sombres de l’Europe. En clôture, le monodrame Erwartung donne libre cours à l’atonalité où le compositeur excelle avec une grande expressivité et une économie des moyens musicaux parfaitement maîtrisée. Vous avez dit comique ? Libérer la musique, rendre compte de la création dans sa diversité scénique et du désir d’association aux autres arts reste un objectif constant à Musica. Le spectacle qui relie la musique au théâtre et à la scène occupe une place de choix dans nos programmations. C’est encore le cas cette année avec trois opéras contemporains qui expérimentent et renouvellent la réflexion menée conjointement par des compositeurs et des metteurs en scène. Ils s’affranchissent de leur territoire et osent la rencontre aux frontières de leur art, loin du champ du lyrique traditionnel. Et c’est le comique qui les unit cette fois-ci. Sujet grave et oppressant dans Thanks to my Eyes d’Oscar Bianchi et Joël Pommerat, quand un père possessif et autoritaire tente désespérément de transmettre à son fils l’art du comique qui fit sa gloire. Mais est-il bien l’homme qu’il prétend avoir été et dont l’image écrase le fils ? Un univers sombre, taillé à la serpe par Pommerat, où se déploie la musique de Bianchi, subtile et mystérieuse. Un tout autre registre avec la création de Limbus Limbo, cadeau d’anniversaire des Percussions de Strasbourg, mis en scène par Ingrid von Wantoch Rekowski uploads/s3/ festival-musica.pdf

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