Christine Février : cours sur le thème « Puissances de l'imagination ». Premièr

Christine Février : cours sur le thème « Puissances de l'imagination ». Première mise en ligne : 18 septembre 2006, complétée le 26 septembre, le 17 octobre, le 10 novembre et le 26 décembre 2006. Mise en ligne achevée le 22 février 2007. © : Christine Février. Ce texte est le plan d'un cours de Philosophie fait en classes préparatoires au Lycée Chateaubriand de Rennes. Il peut faire l'objet seulement d'un usage personnel : aucune reproduction n'en est permise, sous quelque forme que ce soit. Christine Février est professeur de Philosophie en Classes Préparatoires Économiques et Commerciales et en Classes Préparatoires Scientifiques au Lycée Chateaubriand de Rennes. Prépas scientifiques 2005-2006 Épreuve de français et de philosophie « PUISSANCES DE L'IMAGINATION » Don Quichotte de Cervantes, édition Points/Seuil De la recherche de la vérité de Malebranche, édition GF Un amour de Swann de Proust, édition GF ---------- Plan du cours de Mme Ch. Février - Lycée Chateaubriand à Rennes Ce cours combinera l'étude des questions posées par le thème « Puissances de l'imagination » et l'approche plus spécifique que chacune de nos œuvres en propose. Introduction : Le sens et les enjeux d'une réflexion intitulée « puissances de l'imagination », et s'appuyant sur les trois œuvres au programme. I - Analyse sémantique et conceptuelle des termes composant l'intitulé du thème 1 - « Le terme imagination désigne […] une collection d'expériences faiblement apparentées » Ricœur, Du texte à l'action 1.1 - L' imagination, c'est l'acte de penser qui consiste à former des images d'objets absents ou ne correspondant à rien de réel : « Nous imaginons les objets […] en nous en formant des images. » (RV, p. 20) 1.1.1- Imaginer c'est représenter de façon sensible des objets dépourvus de présence sensible ; imaginer se distingue de percevoir, concevoir, se souvenir. 1.1.2 - Si l'imagination forme des images, toutes les images ne sont pas le produit de l'imagination. 1.1.3 - La matérialité bien réelle dans laquelle peut s'exprimer le travail de l'imagination n'empêche pas l'irréalité ou l'absence de ce qui est imaginé. 1.1.4 - « On veut toujours que l'imagination soit la faculté de former des images. Or elle est plutôt la faculté de déformer les images […]. » (Bachelard, L'Air et les songes) 1.2 - « L'imagination […] pouvoir d'écart grâce auquel nous nous distançons des réalités présentes. » (Starobinski, La Relation critique). 1.2.1 - L'imagination est l'instrument du possible : « Swann avait envisagé toutes les possibilités. » (ASW, p. 247) 1.2.2 - C'est aussi ce qui produit l'imaginaire au sens de « ce qui n'existe qu'en imagination ». 1.2.3 - Mais « les relations entre le réel et l'imaginaire sont en fait beaucoup plus voisines et intimes qu'on se le figure habituellement. » (C. Rosset, Fantasmagories, l'imaginaire) 1.3 - « L'imagination […] c'est l'opération même de saisir le semblable. » (P. Ricœur, Du texte à l'action) 1.3.1 - Le terme grec « eikon » qu'on traduit par image signifie « qui ressemble à » : imagination et imitation. 1.3.2 - « L'imitation est une technique ; la simulation modélisante et le simulacre sont deux usages différents de cette technique » (J.-M. Schaeffer, Pourquoi la fiction ?) 1.4- On peut aussi définir l'imagination comme activité de modélisation fictionnelle : du jeu à faire comme si au roman en passant par le mensonge. 1.5 - Une des caractéristiques constitutives de l'imagination c'est sa force motrice et pas seulement reproductrice ou créatrice : « Chrysostome subit les tourments bien réels d'une jalousie imaginaire. » (DQ, XIV p. 152) 1.6 - Par conséquent on ne s'étonnera pas de la grande dispersion des usages de ce terme ainsi que des termes associés ; ce dont témoigne d'ailleurs le lexique des langues européennes. 1.7- Même s'« il est vain d'espérer circonscrire l'imagination dans une activité unique, homogène et indépendante » (J. Wunenberger, L'Imagination), évitons un emploi trop lâche de ce terme, car trop peu discriminant. 2 - L'expression « puissances de l'imagination » désigne les pouvoirs (capacités/dispositions) de l'imagination, leur actualisation ainsi que la force, l'emprise, l'impact de l'imagination 2.1 - Le champ sémantique de « puissance »… 2.2 - … appliqué au phénomène de l'imagination 2.3 - La connotation politique ou militaire du terme « puissances » invite à envisager dans quels rapports de force entre l'imagination, avec quelles puissances elle entre en rivalité ou en coopération ; elle peut s'avérer impuissante comme avoir une puissance irrésistible. II – On peut donc dégager les éléments de problématisation du thème « puissances de l'imagination » 1 - Les divers pouvoirs (capacités) de l'imagination lui confèrent bien une puissance (impact). 1.1 - La variété de ce que rend possible l'imagination permet de mesurer toute l'étendue de sa puissance. 1.2 - Ainsi l'imagination est telle qu'elle peut figurer, défigurer, préfigurer, reconfigurer, transfigurer la réalité. 2 - On peut décrire objectivement, sans jugement de valeur, les puissances de l'imagination. 2.1- Dans un vocabulaire qui dénote les modalités et les finalités de son efficience. 2.2- Dans un vocabulaire qui dénote le degré de sa puissance ou de son impuissance, la force ou la faiblesse de son impact, les rapports de forces entre puissances. 3 - On est amené également à évaluer ces puissances de l'imagination. 3.1 - Dans un vocabulaire normatif (laudatif, dépréciatif). 3.2 - Ceci renvoie aux traditions qui valorisent ou dévalorisent l'imagination. 3.3 - Toutefois, tous les arguments concluant au caractère bénéfique ou maléfique des puissances de l'imagination sont réversibles. 3.4 - En fait les puissances de l'imagination sont ambivalentes. L'imagination est comme un pharmakon, à la fois poison et remède. 3.5 - On est invité à plus de subtilité encore dans notre évaluation, pour plusieurs autres raisons. 4 - Statuer sur les puissances de l'imagination suppose de prendre en compte leur ambivalence. 4.1 - Condamner les puissances de l'imagination ou en faire l'éloge, radicalement ou univoquement, n'est ni possible ni souhaitable. 4.2 - En revanche bien des attitudes face aux puissances de l'imagination vont prétendre en incarner le bon usage, et faire de l'imagination une puissance éclairée. 5 - La question de savoir quelles puissances accorder à l'imagination est surdéterminée par celle de savoir quel genre de vie on estime bon pour l'homme. 5.1 - Et s'il n'y a pas unanimité quant à la façon d'évaluer ces puissances, c'est qu'il n'y en a pas sur la question de savoir ce qui est bon pour l'homme. 5.2 - Ainsi l'examen des puissances de l'imagination nous conduit à une réflexion globale sur l'homme : « Comprendre ce qu'est l'imagination, c'est comprendre la possibilité de l'humain. » (Ch. Bouriau, Qu'est-ce que l'imagination ?) 6 - Se dessine donc la problématique suivante : quelles bonnes puissances de l'imagination promouvoir pour quelle bonne puissance de l'homme, dans quel bon rapport au réel, aux autres et à soi-même ? 7- Le traitement des sujets de dissertation sur ce thème devra s'inscrire, directement ou indirectement, dans cette problématique. III – Don Quichotte de Cervantes permet d'aborder plus particulièrement certains aspects du thème « puissances de l'imagination » 1 - Résumé analytique de cette fiction romanesque. 1.1 - Les chapitres I à XXXII de la première partie (1605). 1.2 - Brève présentation des chapitres XXXII à LII et de la seconde partie (1615). 2 - Don Quichotte est un roman où triomphe et défaite de l'imagination se mêlent. On y célèbre et critique les puissances de l'imagination selon l'emploi qu'elle fait de ses pouvoirs. 2.1 - Don Quichotte est un homme qui confond la vie et les romans, le réel et l'idéal : « comme il voulait imiter les exploits qu'il avait lus dans ses romans » (DQ, IV, p. 79). Son imagination semble dotée d'une puissance irrésistible. 2.2 - Les images de grandeur et de richesse exercent leur séduction sur Sancho et celles d'amour pur sur Chrysostome. Elles troublent leur perspicacité à distinguer le réel de l'imaginaire : « croyant très sérieusement que […] deviendrait empereur ». (DQ, XXIX, p. 328) 2.3 - D'autres personnages considèrent l'imagination comme ambivalente et qu'il faut en faire un usage lucide et circonstancié. 3 - Cervantes écrit avec Don Quichotte une œuvre d'une radicale originalité et d'une grande fécondité, qui témoigne de la puissance créatrice de son imagination. 3.1- Vie et œuvres de Cervantes, héritier des idées nouvelles des humanistes concernant les pouvoirs ambigus de la fiction. 3.1.1 - Biographie de l'auteur et chronologie des œuvres. 3.1.2 - Cervantès a été impliqué dans une des plus grandes aventures historiques et culturelles de l'Espagne. 3.1.3 - La notion d'imagination à la Renaissance. 3.1.4 - Cervantès disciple d'Érasme, l'auteur de l'Éloge de la folie 3.1.5 - La question de l'imagination dans l'ensemble de l'œuvre de Cervantes. 3.2 - Un art inédit du mélange narratif mobilise les pouvoirs d'imitation et d'invention de l'imagination. 3.3 - Un prologue qui en dénonçant « ces inventions chimériques que sont les romans de chevalerie » (p. 43), se révèle un véritable exercice de fiction. 3.4 - L'invention d'un auteur fictif est un autre tour de son imagination : « histoire de don Quichotte uploads/s3/ christine-fevrier.pdf

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