SÉANCE D'ACTUALITÉS EN DROIT DU MARCHÉ DE L'ART Institut Art & Droit - 6 févrie

SÉANCE D'ACTUALITÉS EN DROIT DU MARCHÉ DE L'ART Institut Art & Droit - 6 février 2020 Le 6 février dernier, la promotion du M2 Droit du marché et du patrimoine artistiques (Université Paris 2 Panthéon-Assas) assistait au premier séminaire d’actualités juridiques organisé à l’Institut national d’histoire de l’art par l’Institut Art & Droit, qui regroupe les principaux professionnels et enseignants du droit du marché de l’art et du patrimoine culturel. Des étudiants volontaires se proposent pour vous de revenir sur une sélection des interventions qui les ont marqués lors de cette journée, et d’en livrer une synthèse. La diffusion de ces comptes-rendus est libre sous réserve d’en mentionner l’auteur et de n’y apporter aucune modification. « Le refus de la qualité de coauteur pour un tableau » - Marie-Hélène Vignes Par Adélie Michel Marie-Hélène Vignes, avocate spécialisée en droit de la propriété intellectuelle, nous offre une analyse d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 20 mars 2019 relatif au refus de la qualité de coauteur d’oeuvres graphiques. En 1997, Jacques Villeglé s’installe chez Michele et Yves Di Folco, amateurs de ses tableaux. En contrepartie de l’atelier fournit à l’artiste, le couple bénéficiait d’une commission de 50% sur le prix de vente des œuvres réalisées dans ce contexte. Après quatorze ans, les liens se distendent au point que le couple saisisse le tribunal en 2013. Ils revendiquent la qualité de coauteurs de plus de 900 toiles réalisées durant cette période et à ce titre, la propriété de 2/3 des oeuvres. Les requérants désiraient que les oeuvres soient considérées comme étant de collaboration. Pour ce faire, le couple insistait sur trois éléments. 1. La signature L’article L.113-1 du Code de la propriété intellectuelle pose une présomption de titularité des droits d’auteur en faveur de la personne « sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée ». En l’espèce, l’artiste signait seul ses oeuvres ce qui laissait penser qu’il était l’auteur des toiles en question. Toutefois, cette présomption ne s’oppose pas à ce que d’autres personnes puissent être qualifiées de coauteurs. Ainsi, le couple arguait que la mention « AA » (Atelier Aquitaine) apposée sur les oeuvres était une signature collective et qu’il existait un accord occulte entre les parties pour garder secret le lien qui les unissait. 2. L’assistance dans la réalisation Le deuxième élément soulevé par le couple s’inspirait de la célèbre affaire Guino / Renoir. Le maître, âgé et atteint de rhumatismes devait faire exécuter les sculptures des mains de Guino. Ce dernier avait revendiqué la qualité de coauteur des oeuvres, quarante-cinq ans après le décès de Renoir, ce qui fut reconnu par le tribunal car il jouissait d’une certaine liberté dans la création. Ainsi, les époux Di Folco estimaient que tout comme le sculpteur, Villeglé était un homme âgé qui avait eu besoin d’assistance dans ses travaux. 3. L’apport créatif Enfin, le combat se poursuivait sur le terrain de l’apport créatif. Les Di Folco considéraient qu’ils avaient apporté leur vision de la création à l’oeuvre du fait de la sélection et l’arrachage d’affiches dans des lieux publics avant que celles-ci ne soient assemblées sur une toile. La Cour de cassation censure partiellement la cour d’appel et tranche la question cruciale du statut de coauteur en jugeant que les Di Folco n’avaient pas cette qualité pour les oeuvres qui avaient été produites par Villeglé durant la période litigieuse. La position des juges sur le sujet est classique. Ce qui l’est moins est que le litige oppose un artiste à un collectionneur ou un galeriste et non pas l’artiste face à son assistant. Le conflit est toujours d’actualité sur les réseaux sociaux. En effet, les Di Folco tiennent un blog et écrivent fréquemment sur le sujet tandis que Villeglé leur répond sur Facebook. Notons qu’un paradoxe existait : le couple était désireux d’obtenir la qualité de coauteur mais ne voulait surtout pas être désignés comme seuls auteurs car les toiles n’auraient plus été considérées comme de Villeglé, ce qui aurait eu une incidence sur le prix. Cela n’est pas sans rappeler la célèbre affaire For Pok opposant Vasarely et son assistant Valluet en 1980, à l’issue de laquelle c’est ce dernier qui s’est vu reconnaître seul la qualité d’auteur d’une œuvre certes exécutée à partir de directives de Vasarely, mais considérées comme trop vagues pour lui faire partager la paternité de la création. uploads/s3/ comptes-rendus-art-amp-droit-3-le-refus-de-la-qualite-de-coauteur-pour-un-tableau.pdf

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