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HAL Id: halshs-00999461 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00999461 Submitted on 6 Jun 2014 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Les formes de l’adjectif attribut en russe: prédication ”effectuée” versus prédication ”mentionnée” Sergueï Sakhno To cite this version: Sergueï Sakhno. Les formes de l’adjectif attribut en russe: prédication ”effectuée” versus prédication ”mentionnée”. Revue des études slaves, Institut d’études slaves et EUR’ORBEM, 2001, 73 (1), pp.77- 96. <halshs-00999461> 1 SAKHNO Serguei Les formes de l'adjectif attribut en russe : prédication "effectuée" versus prédication "mentionnée" (publié dans la Revue des Etudes slaves (Paris), t. 73, fasc. 1, 2001, pp. 77-96 ) Le problème de l'emploi de la forme courte (FC) et de la forme longue (FL) des adjectifs en fonction prédicative est l'un des plus classiques de la grammaire russe (1). Il a fait l'objet d'une importante littérature linguistique dont il n'est pas possible de faire ici un aperçu tant soit peu satisfaisant. Le phénomène est propre, avec des traits spécifiques, à d'autres langues slaves, notamment au tchèque (Roudet 1998). Malgré l'existence de nombreux travaux proposant des théories plus ou moins plausibles dont plusieurs sont basées sur des descriptions très détaillées, le mécanisme général de cette catégorie morpho- syntaxique en russe semble nous échapper. Les russisants (apprenants et enseignants) ont souvent la pénible impression qu'il s'agit d'une des bizarreries de la langue russe, d'un phénomène obscur, voire inexplicable, où l'on est confronté à une multitude de facteurs, à de nombreuses règles contradictoires et difficiles à maîtriser (2). L'état actuel de la question est bien résumé par M. Guiraud-Weber dans un article récent (1993) dont l'approche nous semble à la fois raisonnable et stimulante. En démontrant l'extrême complexité du système et l'hétérogénéité des facteurs en jeu (qui relèvent de différents niveaux de l'analyse linguistique : morphologie, lexique, syntaxe), M. Guiraud-Weber insiste sur la nécessité de concilier le caractère dynamique du phénomène avec sa description en synchronie (3). Nous retenons en particulier son observation (qui replace le problème dans une longue perspective historique) selon laquelle dans le russe moderne, la FC se maintient le mieux dans les énoncés de "vérité générale" du type Mir - prekrasen 'Le monde est beau' , phrases où la FC n'est jamais concurrencée par la FL (cf. l'impossibilité de Mir - *prekrasnyj). Ce serait un vestige important de la "phrase nominale" indo-européenne dont le russe a hérité (4). La "phrase nominale" est assez proche ce que nous appelons plus loin prédication effectuée. Notre approche dans l'explication du fonctionnement des FC / FL de l'adjectif attribut russe s'appuie sur deux considérations : a) nous estimons que ce fonctionnement peut être décrit comme un résultat, un aboutissement logique de l'évolution du système de l'adjectif du russe ancien vers l'état moderne; b) il nous semble important de tenir compte du mécanisme même de la prédication (5), de sa nature linguistique et sémiotique profonde et de ses variations dans la langue. Précisons cependant que cet article ne propose pas une théorie (au sens strict du terme) de l'adjectif FC / FL, mais qu'il s'agit plutôt d'un modèle explicatif volontairement "modéré", élaboré à des fins pédagogiques. L'utilité d'un tel modèle pour l'enseignement du russe nous paraît indiscutable. Faits diachroniques On admet généralement que l'adjectif épithète (6) vieux-slave et vieux-russe avait - une forme "indéterminée", dite aussi "nominale" (krasna deva 'UNE belle fille', Acc. krasnu devu, etc.) et - une forme "déterminée", dite également "pronominale" (krasna-JA deva 'LA belle fille', Acc. Krasnu-JU devu, etc.). Les deux se déclinaient. La première est à l'origine de l'actuelle FC, la seconde est à l'origine de l'actuelle FL. 2 La catégorie de la détermination, rendue en français par l'article, pouvait donc être exprimée en vieux-russe au niveau de l'adjectif accompagnant le nom. Il y a des systèmes analogues dans plusieurs langues modernes (notamment, en lituanien), où la forme de l'adjectif épithète sert à marquer la détermination ou l' indétermination du groupe nominal. Notons cependant que certains linguistes pensent qu'on ne peut pas définir avec certitude la différence exacte entre la forme "nominale" et la forme "pronominale" du point de vue de leur fonctionnement en slave commun, avant l'apparition de l'écriture. Les textes anciens reflètent un état évolué, où les différences d'emploi entre ces formes n'étaient plus très nettes (7). En tout état de cause, la détermination du substantif (auquel se rapportait l'adjectif FC / FL) semble avoir été la fonction principale de cette opposition. La morphologie historique de l'adjectif confirme cette idée. La forme "déterminée" était obtenue par l'adjonction à la forme "indéterminée" du pronom démonstratif et anaphorique i 'celui, il' (fém. ja, neutre je). Cet ancien pronom se retrouve aujourd'hui avec suffisamment d'évidence dans les terminaisons des adjectifs à la FL (krasny-J, krasna-JA, krasno-E). Aux cas obliques, la forme casuelle correspondante de ce pronom s'ajoutait à la forme fléchie de l'adjectif "indéterminée" (par exemple, au datif : dobru+emu stolu > dobromu stolu). On sait que dans les langues européennes, l'article défini remonte également aux pronoms démonstratifs (ainsi, le pronom latin ille a donné en français d'une part le pronom il et l'article le d'autre part). On voit que du point de vue historique, une séquence telle que dobra-JA sestra (добра-Я сестра ) peut s'interpréter littéralement comme "bonne-elle-sœur". Il faut préciser également que la forme "déterminée" de l'adjectif signalait non seulement la détermination du substantif à proprement parler, mais aussi le fait que l'attribution de la propriété en question soit considérée comme déjà connue, établie, pré-existante au discours. Ainsi, dobra-ja sestra s'interprétait en particulier comme 'la soeur dont on sait déjà qu'elle est bonne'. La propriété "bonne" y était présentée comme ne jouant pas un rôle particulier dans l'énoncé. En revanche, la forme "indéterminée' (dobra sestra) était souvent employée pour indiquer que la qualité attribuée était considérée comme nouvelle, comme non établie à l'avance, et que le narrateur insistait sur cette qualité en la présentant comme jouant un rôle particulier dans l'énoncé et dans le texte (Bulaxovskij 1958 : 321- 322). Ce fait est d'une importance toute particulière pour notre analyse. Par ailleurs, la forme "indéterminée" (FC) était la forme "non marquée" non seulement du point de vue morphologique (cf. dobra / dobra-JA), mais aussi du point de vue fonctionnel. Lorsqu'on n'avait pas besoin d'exprimer l'opposition détermination / indétermination, on utilisait la forme "indéterminée" (FC). Ainsi, dans le nom de la ville de Novŭ-gorodŭ ( > Novgorod) l'adjectif est à la FC, car le mot est déjà déterminé en soi à cause de sa référence définie (il renvoie toujours à une ville bien déterminée). Il en était de même dans les adjectifs d'appartenance, où il était souvent inutile de marquer la détermination : synŭ Volodimirĭ 'le fils de Vladimir' se disait habituellement du fils connu d'un Vladimir connu. Cette particularité a entraîné l'incapacité pour la plupart des adjectifs de ce type à avoir une FL. C'est un trait important qui se maintient dans le russe moderne. On sait en effet que les adjectifs d'appartenance n'ont pas de FL et se conjuguent d'après le type dit "nominal" (otcov dom, otcova doma, etc.). Quant à l'adjectif attribut vieux-russe, il ne s'employait qu'à la FC. Ce phénomène peut être expliqué : dans un prédicat adjectival, la propriété est normalement attribuée à un sujet déjà présent dans le discours, connu ou considéré comme tel (Ivanov 1990 : 293), cf. en français La maison est grande face à l'étrangeté de ??Une maison est grande. La situation était donc inverse par rapport à celui du russe moderne, où l'adjectif épithète n'a que la FL (mis à part quelques archaïsmes), alors que l'adjectif attribut peut avoir la FC ou la FL. On peut parler donc d'une "inversion de la marque" (Veyrenc 1970 : 65). Soulignons que le changement est significatif : la FC, qui est historiquement le terme non marqué de l'opposition, devient le terme marqué 3 dans la langue moderne. Mais dans les phrases de "vérité générale", de type syntaxique archaïque, le caractère non marqué de la FC semble être conservé. La FL, qui correspond historiquement au terme marqué de l'opposition, est aujourd'hui le terme non marqué. Ce système du russe ancien rappelle un peu celui de l'allemand moderne, sauf qu'en allemand, l'adjectif attribut n'a pas de désinence et ne s'accorde pas avec le substantif auquel il se rapporte. Cf.: all. Das Haus ist schön, Die Rose ist schön, russe Dom krasiv, Roza krasiva. L'adjectif épithète allemand a deux formes : 1) une forme dite "faible", issue historiquement de la forme "déterminée", qui s'emploie avec l'article défini (das schöne Haus 'la belle maison') ; 2) une forme dite "forte", issue de la forme "indéterminée", qui apparaît avec l'article indéfini (ein schönes Haus 'une belle maison'), mais uploads/s3/ sakhno-adjectif-russe-fc-et-fl-sept10.pdf
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