LA BALADODIFFUSION : DE LA RÉÉCOUTE À LA CRÉATION SONORE DE PODCASTS Évelyne Co

LA BALADODIFFUSION : DE LA RÉÉCOUTE À LA CRÉATION SONORE DE PODCASTS Évelyne Cohen Éditions de la Sorbonne | « Sociétés & Représentations » 2019/2 N° 48 | pages 159 à 167 ISSN 1262-2966 DOI 10.3917/sr.048.0159 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2019-2-page-159.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Éditions de la Sorbonne. © Éditions de la Sorbonne. Tous droits réservés pour tous pays. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) Évelyne Cohen, « La baladodiffusion : de la réécoute à la création sonore de podcasts », S. & R., no 48, automne 2019, p. 159-167. Évelyne Cohen La baladodiffusion : de la réécoute à la création sonore de podcasts Depuis les années 2000 on assiste à un essor et à une large diffusion de « pod- casts » sur la toile, que ceux-ci soient des rediffusions d’émissions préalable- ment retransmises sur les chaînes de radio et de télévision ou qu’ils soient de véritables créations sonores natives sur le web. L’arrivée de l’internet, après 1991, a profondément modifié les usages des programmes de radio par les auditeurs ainsi que leurs possibilités d’accéder directement à des émissions sonores natives1. Elle a favorisé une plus grande indépendance des auditeurs et téléspectateurs vis-à-vis des « grilles de programmes » des radio-télévisions traditionnelles. « Podcaster » une émission, la télécharger, permet d’écouter ou de voir en différé sur des supports mobiles des programmes que l’on choisit, à l’heure que l’on souhaite et dans le lieu qui convient à chacun. Le podcast renvoie aussi bien au téléchargement d’émissions en réécoute qu’à la diffusion d’une émission faite pour le numérique. Définition du podcast Le mot « podcast » renvoie à une contraction des termes « iPod » et « broad- cast » : l’iPod est un baladeur numérique créé par Apple et lancé le 23 octobre 2001. Le mot « broadcast » peut se traduire par « diffusion ». Afin de rendre compte de la polysémie du mot « podcast », le 15 décembre 2006, la commission 1. Hervé Glevarec , « Le propre de la radio. Fonctions radiophoniques et nouveau statut de la radio dans l'environnement numérique », Le temps des médias, no 22, 2014, p. 123-133. En ligne : http://www. histoiredesmedias.com/Le-propre-de-la-radio-Fonctions.html. © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) Évelyne Cohen, « La baladodiffusion : de la réécoute à la création sonore de podcasts », S. & R., no 48, automne 2019, p. 159-167. 160 générale de terminologie et de néologie a publié une recommandation sur les équivalents français du mot « podcasting » : Rendant compte des possibilités d’utilisation de plus en plus étendues qu’offrent les baladeurs numériques, le néologisme anglo-américain podcast désigne non seulement des émissions et des programmes audio, mais aussi des fichiers et des produits informatiques incluant images et films, susceptibles d’être diffusés (to podcast) au moyen de cette technologie multimédia (podcasting), qui permet une écoute en différé. Parallèlement, le verbe franglais podcaster s’est répandu dans l’usage, employé abu- sivement, notamment par les chaînes de radio, avec le sens de télécharger. Cette dérive crée un amalgame entre deux notions pourtant bien distinctes, la diffusion et le téléchargement. La Commission générale rappelle qu’elle a recommandé comme équivalent français à podcasting le terme diffusion pour baladeur, le mot employé au Québec étant baladodiffusion (Journal officiel du 25 mars 2006). Seuls les mots diffuser, diffusion... correspondent à la notion exprimée en anglais par podcast et par ses dérivés to podcast, podcasting... En revanche, dès qu’il s’agit de l’opération de transfert de fichier ou de pro- gramme sur un support numérique (download ou upload, en anglais), en particu- lier un baladeur, la Commission générale recommande de s’en tenir aux termes en usage : télécharger, téléchargement, téléchargeable... seuls corrects et suffisamment explicites. Dans le même esprit le « petit lexique2 » de La revue des podcasts donne la définition suivante : Son à emporter. Sous-produit numérique de l’ancien monde hertzien ou premier mode de diffusion d’un programme dans le nouveau monde du web, le podcast se veut moderne et conquérant. Ne connaissant pas le direct, il transforme le flux radiophonique en fichiers individuels et le public en abonné-e-s. Synonyme : balado(diffusion). Antonyme : direct3. Le premier podcast est attribué à l’Américain Adam Curry, qui l’a lancé en septembre 2004. En France, Bertrand Lenotre, un ancien professionnel de la radio, a été pionnier. Il a monté un annuaire francophone toujours actif de blogs et de vidéoblogs dénommé Podemus, ainsi que Podcasteur.com. 2. « Petit lexique récréatif de la création sonore et radiophonique », revue en ligne Syntone, 16 février 2018. En ligne : http://syntone.fr/projets/petit-lexique-recreatif-de-la-creation-sonore-et-radiophonique/#d. 3. Ibid. © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) Évelyne Cohen, « La baladodiffusion : de la réécoute à la création sonore de podcasts », S. & R., no 48, automne 2019, p. 159-167. 161 Web radios et podcasts Dans la perspective d’une archéologie des médias, on situe généralement les premiers podcasts dans le prolongement de l’esprit des radios libres des années 1970-1980. Leur essor se fait de façon décentralisée et indépendante des réseaux traditionnels. Il s’apparente à ses débuts à celui d’un média alternatif dont le projet est que tout le monde puisse faire de la radio et ne pas se contenter de l’écouter. Au démarrage « l’Ipodder utilise un fil d’actualités internet (RSS) pour télécharger automatiquement des programmes de radio amateurs4 ». Diffuser du son sur la toile est longtemps resté rare et coûteux. Le mouve- ment des web-radios s’est développé en premier lieu aux États-Unis dès 19935, puis en Angleterre et en Allemagne. Il a servi de point d’appui à celui des pod- casts. En France ARTE Radio naît en 2002 à l’initiative de la chaîne culturelle de télévision franco-allemande. Le projet, confié au journaliste Sylvain Gire et à l’ingénieur du son Christophe Rault, était de concevoir un « magazine sonore », « résolument anti-commercial, et même anti-culturel », composé de « modules […] adaptés à l’écoute sur Internet, qui parlent autrement de société, de politique, de création et d’intimité »6. Silvain Gire exige « du narra- tif qui parle à tout le monde », loin d’une création sonore expérimentale ou éli- tiste. « Je ne veux pas entendre le commentaire de l’auteur. La voix off est sou- vent celle du pouvoir, d’une prétendue vérité. J’aime quand l’interview devient un récit à la première personne »7. Depuis sa création, ARTE Radio explore les possibilités du podcast « natif » sur internet, s’affranchissant des contraintes de la bande FM8. ARTE Radio reste perçu jusqu’à nos jours comme prescripteur et influenceur dans le domaine des podcasts. Histoire du podcast Des expérimentations de créations sonores se sont développées à l’échelle internationale9 : en 2002 Framework est diffusé sur la radio londonienne 4. Annalee Newitz, « Le “podcasting” ébranle la radio de Papa », Courrier international, no 762, 9 juin 2005. 5. Avec l’Internet talk radio. 6. En ligne : http://syntone.fr/il-etait-une-fois-le-podcast-3-des-cabanes-aux-immeubles/#note-1. 7. Télérama, 30 novembre 2012. 8. « Les médias et leurs dirigeants », La correspondance de la presse, 6 novembre 2017. 9. Je reprends ici la synthèse de Juliette Volcher. En ligne : http://syntone.fr/il-etait-une-fois-le-podcast- 3-des-cabanes-aux-immeubles/. © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) © Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 20/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 185.12.0.146) Évelyne Cohen, « La baladodiffusion : de la réécoute à la création sonore de podcasts », S. & R., no 48, automne 2019, p. 159-167. 162 Resonance FM. En 2003 la radio du New Jersey WFMU lance le pro- jet 365 jours dans lequel deux cents contributrices et contributeurs avaient envoyé « des sélections de sons sympas, étranges et souvent obscures ». Une opération qu’elle reconduisit en 2007. Son blog de veille autour du son et de la musique, Beware of the Blog10, fut lancé à la toute fin 2004, qui proposa jusqu’en 2015 « des mp3 hallucinants, des bizarreries audiovisuelles, des infos et des critiques de musiques improbables et des liens vers les sites les plus excentriques du web ». À New York, le musée d’art contemporain MOMA PS1 anima, de 2004 à 2009, une webradio d’art contemporain. Au même moment, à l’autre bout des États-Unis, SfSound inaugurait sa webradio, un flux de « compositions expérimentales, improvisées, électroniques, contemporaines et autres formes de musiques nouvelles entendues dans la baie de San Francisco11 ». En 2005, l’Atelier de création sonore et radiophonique de Bruxelles inaugura silence- radio.org, un « espace radiophonique d’écoute partagée » notamment porté par Irvic d’Olivier et visant à « la mise en lumière d’œuvres et d’artistes qui témoignent d’une qualité d’écoute et qui explorent toutes les potentialités de l’expression radiophonique »12. Elle dura jusqu’en 2012 et devint, au même titre qu’Arte Radio, une référence en termes uploads/s3/ sr-048-0159.pdf

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