Agrégation externe de mathématiques, session 2017 Épreuve de modélisation, opti

Agrégation externe de mathématiques, session 2017 Épreuve de modélisation, option B : Calcul Scientifique (public2018-B2) Résumé : On étudie un modèle mathématique de la dynamique des relations amoureuses expliquant les difficultés à maintenir une vie de couple dans la durée, en minimisant une fonctionnelle et en se ramenant à un système d’équations différentielles. Mots clefs : Equations différentielles ordinaires. Propriétés qualitatives. Optimisation. ▶ Il est rappelé que le jury n’exige pas une compréhension exhaustive du texte. La présen- tation, bien que totalement libre, doit être organisée et le jury apprécie qu’un plan soit annoncé en préliminaire. L’exposé doit être construit en évitant la paraphrase et met- tant en lumière les connaissances, à partir des éléments du texte. Il doit contenir des illustrations informatiques réalisées sur ordinateur, ou, à défaut, des propositions de telles illustrations. Des pistes de réflexion, indicatives et largement indépendantes les unes des autres, vous sont proposées en fin de texte. 1. La dynamique du couple : la vie en couple vue comme un problème d’op- timisation Le modèle que nous allons décrire ne discute pas de la dynamique des interactions entre les individus qui forment un couple amoureux; le couple y est considéré comme une en- tité formée sur le désir commun de vivre heureux ensemble et pour toujours. En particulier, le modèle s’applique à un couple déjà constitué, disons au moment de l’engagement du mariage ou de la signature d’un PACS et ne décrit pas l’embrasement initial de la flamme amoureuse. Nous allons voir qu’un modèle mathématique permet de rendre compte du pa- radoxe selon lequel une part importante des relations de couple ne sont pas durables 1 alors qu’une relation éternelle et sans nuage semble être un objectif très largement partagé dans la population. L’état du couple est décrit par une mesure du « bien-être commun », une quantité x(t) dépendant du temps. En supposant que la relation s’établit sur de bonnes bases, l’état ini- tial x0 ≫1 est très élevé alors que la rupture se produit lorsque le bien-être passe en-deçà d’un certain seuil xmin. L’évolution du couple est régie par deux phénomènes : une tendance naturelle à l’érosion du sentiment amoureux, décrite par un taux r > 0 qui peut être compen- sée par des actions positives. On note par c(t) les efforts réalisés à l’instant t pour maintenir l’harmonie du couple. L’évolution du bien-être obéit donc à l’équation différentielle (1) d dt x(t) = −r x(t)+c(t). 1. En France, environ 1/2 des mariages se concluent par un divorce. Page 1/6 2017CY1X 25 (public2018-B2) Option B : Calcul Scientifique La réalisation des efforts obéit elle-même à une compétition entre le contentement qu’ils procurent et les sacrifices qu’ils nécessitent. Ces effets sont décrits par — Une fonction de contentementU, de classe C 2 sur R+ telle queU ′ > 0,U ′′ < 0 et de plus limx→+∞U ′(x) = 0. — Une fonction de sacrifice D, de classe C 2 sur R+ telle que D′′ > 0, limc→+∞D′(c) = +∞, et il existe c⋆≥0 tel que D′(c⋆) = 0. Autrement dit, c⋆caractérise le niveau d’effort qui minimise le sacrifice. La forme non monotone de D, lorsque c⋆> 0, signifie qu’il peut toujours y avoir un avantage à réaliser certains efforts... tant qu’ils restent à une valeur modérée proche du seuil c⋆. La vie en couple consiste alors à maximiser la satisfaction totale comme nous allons le dé- tailler maintenant. Étant donné ρ > 0 (dit paramètre d’impatience), on introduit la fonction- nelle 2 J qui associe à deux fonctions t 7→x(t) et t 7→c(t), le réel (2) J (x,c) = Z∞ 0 e−ρt¡ U(x(t))−D(c(t)) ¢ dt. On définit donc t 7→c♥(t) comme maximisant (3) c 7→J (xc,c) = Z∞ 0 e−ρt¡ U(xc(t))−D(c(t)) ¢ dt, parmi les fonctions c positives, de classe C 1 (C 1 par morceaux serait plus réaliste) telles que c(0) = c0 et où t 7→xc(t) est solution de (1) associée à la fonction c et à la donnée initiale x0. On admettra dans toute la suite que, pour x0 et c0 fixés, il existe une unique fonction c♥ convenable qui maximise c 7→J (xc,c). 2. Les équations de la vie de couple On va maintenant établir que la stratégie d’effort optimale t 7→c♥(t) vérifie une certaine équation différentielle. À cette fin, on introduit la fonctionnelle (4) (x,c,λ) 7→L (x,c;λ) = J (x,c)− Z∞ 0 e−ρtλ(t) ³ d dt x(t)+r x(t)−c(t) ´ dt. Intuitivement, l’introduction de λ peut s’interpréter comme l’attribution d’un coût lié à la non satisfaction de l’équation (1). Définition 1. On dit que (x♥,c♥,λ♥) est un point selle de L si pour tout (x,c,λ) on a L (x,c;λ♥) ≤ L (x♥,c♥;λ♥) ≤L (x♥,c♥;λ). Théorème 1. Les assertions suivantes sont équivalentes i) (x♥,c♥,λ♥) est un point selle de L , ii) L (x♥,c♥;λ♥) = max(x,c) minλL (x,c;λ) = minλ max(x,c)L (x,c;λ). 2. qui est définie sur une classe de fonctions de classe C 1 « ne croissant pas trop vite à l’infini »; dans toute la suite on ne se préoccupera pas de la construction des espaces fonctionnels qui rendrait la discussion totale- ment rigoureuse. 2017CY1X 25 Page 2/6 (public2018-B2) Option B : Calcul Scientifique Preuve. On a toujours (5) max (x,c) µ min λ L (x,c;λ) ¶ ≤min λ µ max (x,c) L (x,c;λ) ¶ . Si (x♥,c♥,λ♥) est point selle alors max(x,c)L (x,c;λ♥) = L (x♥,c♥;λ♥) = minλL (x♥,c♥;λ), d’où on déduit ii). □ Théorème 2. Si (x♥,c♥,λ♥) est point selle de L alors on a (6) J (x♥,c♥) = max c n J (x,c), d dt x = −r x +c o = max c J (xc,c). De plus, les équations suivantes sont vérifiées d dt x♥(t) = −r x♥(t)+c♥(t), (7) d dt λ♥(t) = (r +ρ)λ♥(t)−U ′(x♥(t)), (8) λ♥(t) = D′(c♥(t)) si c♥(t) > 0, λ♥(t) ≤D′(0) si c♥(t) = 0. (9) Preuve. Pour toute fonction t 7→µ(t), on a (10) L (x♥,c♥;λ♥+µ)−L (x♥,c♥;λ♥) = − Z∞ 0 e−ρtµ(t) ³ d dt x♥(t)+r x♥(t)−c♥(t) ´ dt ≥0, qui permet de justifier (7), puis d’en déduire (6). On étudie de la même manière le compor- tement de L vis-à-vis de perturbations de x♥et de c♥: la formule de Taylor (11) f (y) = f (y0)+ f ′(y0)(y −y0)+ Z1 0 (1−τ) f ′′¡ y0 +τ(y −y0) ¢ (y −y0)2 dτ permet d’exploiter les propriétés de convexité de U et de D pour établir que, pour toutes fonctions t 7→ξ(t) et t 7→κ(t) vérifiant ξ(0) = 0, κ(0) = 0 et c♥(t) + κ(t) ≥0 pour tout t, la quantité (12) Z∞ 0 e−ρth U ′(x♥(t))ξ(t)−D′(c♥(t))κ(t)−λ♥(t) ³ d dt ξ(t)+rξ(t)−κ(t) ´i dt = Z∞ 0 e−ρth ξ(t) ³ U ′(x♥(t))−(ρ +r)λ♥(t)+ d dt λ♥(t) ´ −κ(t) ³ D′(c♥(t))−λ♥(t) ´i dt est négative. On en déduit les relations (8) et (9). □ Les hypothèses sur D permettent de définir la fonction suivante (13) Φ(λ) = ( (D′)−1(λ) si λ ≥D′(0), 0 si λ < D′(0), de sorte que le système (7)–(9) s’écrit (en omettant l’indice ♥dans toute la suite) d dt x(t) = −r x(t)+Φ(λ(t)), (14) d dt λ(t) = (r +ρ)λ(t)−U ′(x(t)). (15) Page 3/6 2017CY1X 25 (public2018-B2) Option B : Calcul Scientifique Le théorème de Cauchy-Lipschitz s’applique à ce système et nous donne l’existence d’une unique solution maximale (x,λ) associée à toute donnée de Cauchy (x0,λ0) où on a posé λ0 = D′(c0). Cette solution étant connue, on récupère a posteriori la fonction c, par la formule c(t) = Φ(λ(t)). 3. Vie en couple et portrait de phase : à la recherche de la variété stable Nous allons procéder dans cette section, à une analyse qualitative du système obtenu pré- cédemment. Pour cela, on commence par vérifier les propriétés suivantes : Proposition 1. Soit (x,λ) une solution maximale de (14)-(15) associée à une donnée initiale (x0,λ0) vérifiant x0 > 0. On note c = Φ(λ). (1) S’il existe t0 > 0 tel que x(t0) = 0, alors la solution étudiée est définie sur [0,+∞[ et vérifie x(t) = 0, c(t) = 0 pour tout t ≥t0. (2) S’il existe t0 > 0 tel que c(t0) = 0, alors la solution étudiée est définie sur [0,+∞[ et vérifie c(t) = 0 pour tout t ≥t0, x(t) > 0 pour tout t ≥0, et limt→+∞x(t) = 0. En particulier, la fonction x reste positive, ce qui est cohérent avec le modèle proposé. La fonction λ, en revanche, n’a pas de signe particulier. On se ramène à étudier ce problème sur le demi-plan {(x,λ) ∈[0,∞[×R} avec x ≥0. Cette proposition montre également que, dans le modèle proposé, l’abandon des efforts conduit irrémédiablement à la rupture du couple. Dans le demi plan considéré, on peut tracer les courbes isoclines définies par (16) x 7→D′(r x) et x 7→U ′(x) r +ρ . Ces deux courbes sont monotones et on vérifie qu’elles s’intersectent en un unique point Xeq = (xeq,λeq) avec xeq > 0. Notons que la valeur ceq = Φ(λeq) = r xeq correspondante vé- rifie ceq > c⋆. Il y a donc un unique état d’équilibre du système. Celui-ci uploads/s3/ public2018-b2.pdf

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