TEMPS, ESPACES, LANGAGES : LA HONGRIE A LA CROISEE DES DISCIPLINES COLLOQUE ANN
TEMPS, ESPACES, LANGAGES : LA HONGRIE A LA CROISEE DES DISCIPLINES COLLOQUE ANNIVERSAIRE INTERNATIONAL DU CIEH - SORBONNE NOUVELLE Atelier 1 De la voix et du sens – autour de l’oeuvre d’ Iván Fónagy ! "##$# % ##&#!'()* +,-./*01112 3 % &45-1112 6&&6 78 9:;! : « Iván Fónagy, un grand pionnier : l’exemple de la prosodie » <#!=# &>-4112« Iván Fónagy : un linguiste (et phonéticien) d’exception » 1) Préface par Jacqueline Vaissière http://montaigne.univ-paris3.fr/ram/Colloque/CIEH/2007/jacqueline_vaissiere.ram C’est un grand plaisir que d’inaugurer un atelier intitulé « de la voix vers le sens », dédié à Iván Fónagy. Cet atelier fait suite à la magistrale intervention de Ferenc Kiefer, « Hommage à Iván Fónagy, maître du dialogue des disciplines et des cultures », reproduite dans le même ouvrage. Le présent atelier rassemble un modeste échantillon de ses très nombreux admirateurs, de tous ceux qui ont puisé leur inspiration dans ses multiples travaux de recherche et qui ont eu la chance de connaître et d’apprécier cet homme si chaleureux et d’une si grande galanterie. Je rappellerai dans un premier temps ce qui fait de l’oeuvre de Iván Fónagy et du personnage quelque chose d’unique et d’intemporel. Danielle Duez, quant à elle, a choisi d’insister sur les apports de Iván Fónagy à la phonostylistique et à l’étude des variations, deux notions que Iván Fónagy considérait comme indissociables, et dont l’association est source de changement, une idée en avance sur son temps, et qui l’a conduit aussi à évoquer l’évidence d’une double accentuation des mots lexicaux en français, comme une conséquence stylistique. Yuji Kawaguchi, pour sa part, insiste sur la notion du double encodage du langage, déjà mentionnée par Ferenc Kiefer comme l’idée maîtresse de l’oeuvre de Iván Fónagy, avec celle de la métaphore et l’approche évolutive en synchronie dynamique. Georges Boulakia, en guise de conclusion, rappelle combien Iván Fónagy fut un linguiste (et phonéticien !) d’exception. 2) L’oeuvre de Iván Fónagy, une oeuvre unique et intemporelle par Jacqueline Vaissière Dans son intervention, Ferenc Kiefer a insisté sur la multitude des domaines maîtrisés par Iván Fónagy : la linguistique, les sciences littéraires et la psychanalyse. Il fut aussi un très grand phonéticien et reconnu comme tel par le monde phonétique. Iván Fónagy s’est intéressé à l’ensemble de la chaîne de la communication parlée, de la conception psychique du message à son interprétation, en passant par les détails de sa production par le locuteur, le signal acoustique produit, et sa perception par l’auditeur. Puisant avec sagesse et gourmandise dans halshs-00676273, version 1 - 4 Mar 2012 Manuscrit auteur, publié dans "Temps, Espaces, Langages : La Hongrie à la croisée des disciplines, Renaud Patrick, Judith Maár (Ed.) (2008) 56-70" les oeuvres de ceux qu’il appelait modestement ses maîtres, il a ravivé un certain nombre d’idées anciennes, étouffées par le brouhaha médiatique des théories du moment ; il en a proposé des nouvelles, vers lesquelles s’orientent (enfin) les recherches les plus récentes, qui se centrent de plus en plus sur les détails de la Vive Voix longtemps considérés comme peu dignes d’intérêt. Il ne serait pas très difficile de dresser la liste des arguments qui font de Iván Fónagy un chercheur unique, un génie incontestable, un penseur philosophe en superbe décalage par rapport aux modes de son temps, et surtout en avance sur les idées qui émergent aujourd’hui dans les congrès et qui seront celles de demain. Nous citons ici quelques points, en complément des interventions de Ferenc Kiefer, de Danielle Duez, de Yuji Kawaguchi et de George Boulakia. Le style fónagien : Le premier point qui frappe le lecteur est le style particulier de Iván Fónagy, surprenant, unique en son genre. Le style à la Fónagy est un mélange très atypique d’érudition humaniste, pétrie de sa connaissance éclairée et de son respect des oeuvres de ses prédécesseurs, et sa compréhension critique, parfois acérée, des travaux plus modernes, et d’anecdotes relatant d’expériences personnelles ou de ses proches, de ses enfants. Sa triple maîtrise de la linguistique, des sciences littéraires et de la psychanalyse, comme l’a rappelé Ferenc Kiefer, ainsi que sa maîtrise étonnante de plusieurs langues de travail, son intérêt pour la poésie et la musique sont sans nul doute uniques au monde et ce mélange savant de compétences diverses a marqué chacun de ces écrits. Le style fónagyien, où tout se mêle avec légèreté est inimitable. Un critique éclairé de la recherche contemporaine : Le second point est la force avec laquelle il exprime ses convictions et son implication. Par exemple, même bien après sa retraite, Iván Fónagy, toujours aussi passionné, a continué à se tenir au courant des dernières publications parues sur l’intonation, et à part quelques exceptions, il ne les appréciait guère. Il considérait comme inquiétant cette persistance post-chomskyenne à considérer les écarts de prononciation, actualisés par des différences de production aux niveaux sous-glottique, glottique ou supra-glottique, comme des bruits hors système de la communication parlée, et donc peu dignes d’intérêt, alors que pour lui ces déviations par rapport à la norme étaient au centre du système et appartenaient à la fois à la phonétique et à la phonologie. Elles étaient l’essence même de la voix vive, porteuses de sens, et au coeur même de sa différence avec l’écrit. Il trouvait aberrant de ne retenir de l’intonation que deux fonctions seulement, celui du marquage de tons, et des indices de frontières (comme dans le système ToBI, par exemple, dont il ne pensait guère de bien), pour les seuls besoins de l’aspect esthétique de leur « représentation » sur papier. On lui doit quelques succulentes expressions que lui seul pouvait se permettre. Il parle avec humour des intonologues qui essaient de mettre à l'intonation au pas avec leurs « énoncés forgés, insipides ou grotesques, qu'on rencontre trop souvent dans les publications linguistiques ». Les courants phonologiques modernes lui semblaient trop statiques et trop restrictifs, trop préoccupés de se parer d’une apparence scientifique trompeuse. Il cite « une communication hermétique, autistique, caractérisée par une multitude de cycles et de formules quasi mathématiques, et la haute fréquence d'expressions préfabriquées qui risquent de constituer une langue de bois scientifique. ». La vive voix réunit selon lui deux langages, d’une part, la langue évoluée, l’encodage linguistique (ou Grammaire) et d’autre part, un système sémiotique préverbal, le code phonogestuel ou Modulateur qui a pour tâche l'expression des émotions et des attitudes. Il reprochait à la phonologie moderne de traiter de la parole comme s’il s’agissait d’un texte écrit, et de ne s’intéresser qu’à l’un des deux codes, celui de la grammaire. Plus grave encore à ses yeux, Iván Fónagy déplorait le mélange actuel entre les notions d’accent et d’intonation, halshs-00676273, version 1 - 4 Mar 2012 dont la différence avait été bien clarifiée, selon lui, après bien des efforts, dans les écrits des auteurs du passé. Sévère, il considérait comme un recul scientifique l’extension de plus en plus courante du système ToBI (développé à l’origine pour décrire la mélodie de l’anglais) à d’autres langues, et ce fut un de nos sujets de conversation favoris, et il aimait aussi parler de ses souvenirs personnels avec Roman Jakobson. Un admirateur de Bolinger : Un chercheur, pourtant, trouve grâce à ses yeux : Dwight Bolinger, dont Iván Fónagy était un fervent admirateur. Il pensait comme Bolinger que l'intonation est un sujet trop important pour être confiée aux seuls linguistes. L’accentuation, en français du moins, ne serait pas figée, comme le laissent sous-entendre les livres et articles classiques sur le sujet. Elle dépend avant tout du genre du discours : tendance oxytonique dans la conversation, barytonique dans les informations radiodiffusées. Iván Fónagy a trouvé chez Bolinger, pour la première fois, une analyse systématique du fonctionnement simultané de la mimique et de l'intonation, qui l’a séduit. A l’instar de Bolinger, et par un souci de simplicité, il a recommandé l’utilisation des lettres dansantes pour représenter la mélodie de la langue, lettres dansantes qui font encore leur preuve de nos jours pour la pédagogie. Un grand précurseur : Fónagy est devenu une référence incontournable dans un grand nombre de domaines (difficile de les énumérer tous !), et certaines expressions ou mots évoquent automatiquement son nom. Nous pourrions citer les termes de « vive voix », « double encodage », « l’arc accentuel du français », « les clichés prosodiques », « la phonostylistique », la « métaphore en phonétique », « le caractère motivé et arbitraire de l’intonation », et bien d’autres. Bien avant l’heure, il a montré que l'intonation d'une phrase ne peut être interprétée qu’en fonction de son contexte : une phrase interprétable comme neutre dans un contexte serait considérée comme une marque d’indifférence dans un autre. Il a insisté avec clarté sur le caractère arbitraire mais motivé de l’intonation, et en cela, il appréciait beaucoup le travail de J. Ohala (j’ai eu le plaisir de les faire se rencontrer) qui avait remis à l’honneur « le code fréquentiel »: il y a un lien uploads/s3/ vaissiere-et-al2008 1 .pdf
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- Publié le Apv 20, 2022
- Catégorie Creative Arts / Ar...
- Langue French
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