Andrée PUTTEMANS François GLANSDORFF Nicole VERHEYDEN-JEANMART Corinne MOSTIN P
Andrée PUTTEMANS François GLANSDORFF Nicole VERHEYDEN-JEANMART Corinne MOSTIN Pierre van OMMESLAGHE Michèle GRÉGOIRE Lucien SIMONT ASPECTS RÉCENTS DU DROIT DES CONTRATS Sous la direction scientifique de M. Paul Alain Foriers, avocat, chargé de cours à l'Université Libre de Bruxelles ÉDITIONS DU JEUNE BARREAU DE BRUXELLES 2001 Le présent ouvrage contient les rapports qui ont été présentés lors du colloque que la Conférence du Jeune Barreau de Bruxelles a organisé le 13 décembre 2001. La Conférence remercie chaleureusement les auteurs de ces contributions et, plus spécialement, Me Paul Alain Foriers, qui a assuré la direction scientifique de nos travaux, les a introduits et en a tiré les conclusions. Je tiens également à remercier Me Carole De Ruyt, commissaire de la Conférence du Jeune Barreau en charge de nos activités scientifiques. Son concours a été très précieux dans la préparation et la coordination de ce colloque. Emmanuel CORNU Président INTRODUCTION par Paul Alain FORIERS 1. Un an presque jour pour jour après les obligations contractuelles, voici les "contrats spéciaux". Cette suite était inévitable. Les deux matières sont intimement liées. À la Faculté de droit de l'Université Libre de Bruxelles, les exercices pratiques relatifs aux deux cours sont communs depuis quarante ans au moins, en réalité depuis que de véritables travaux pratiques existent. Mieux encore, jusqu'il y a quelques années, les examens d'obligations et de contrats se passaient le même jour dans le même couloir, qui aura marqué des générations d'étudiants ... 2. Il est vrai que les deux cours permettent des comparaisons intéressantes. Le droit des contrats spéciaux n'est en effet pas, pour le tout, un droit spécial des principaux contrats 1• Nombre de règles reprises aux articles 1582 et s. du Code civil ne constituent en effet que la répétition ou l'application du droit commun des obligations contractuelles. Il suffit de penser en matière de vente, par exemple, aux articles 1583 (cf. art. 1138), 1591 (cf. art. 1129), 1610 et 1654 (cf. art. 1184) ou en matière de bail, par exemple, aux articles 1722 ( cf. théorie des risques dans les contrats synallagmatiques) et 17 41 (cf. art. 1184 C. civ.) Mieux encore, il peut arriver que ce soient des règles propres à tel ou tel contrat qui, en l'absence de dispositions générales aux articles 1101 et s. du Code civil, se sont imposées comme l'expression même du droit commun. Le plus bel exemple, est sans (1) Cons. not. J. HUET, Traité de droit civil (sous la dir. de J. Ghestin), Les principaux contrats spéciaux, Paris, LGDJ 1996, n° 4 et s. spéc. 6 et 7. 1 doute, à cet égard, le régime de la cession de créance dont les règles organiques se retrouvent au titre de la vente (art. 1689 et s. C. civ.) alors qu'elles ont vocation à s'appliquer, en principe, à toutes les transmissions ut singuli d'obligations, à tout le moins dans leur aspect actif. Si on tient compte par ailleurs du fait qu'en l'absence de texte particulier, les contrats spéciaux sont en principe soumis au droit commun, on risque d'aboutir à la conclusion déconcertante que les règles spécifiques applicables à ces contrats sont bien moins nombreuses que les quelque cinq cents articles que le Code civil leur consacre. Mieux, si l'on devait faire abstraction du droit du bail, qui, au cours des cinquante dernières années, a connu un foisonnement législatif, et du contrat d'hypothèque, noyé dans la loi hypothécaire qui dépasse de loin le droit des contrats, je ne suis pas sûr que les règles véritablement spéciales l'emporteraient sur le droit commun des obligations. 3. Dans une logique purement scientifique, le sujet s'imposait donc. Encore fallait-il le cerner. La notion même de "contrats spéciaux" est en effet fuyante 2• De manière intuitive pour le juriste, elle désigne en tout cas les "petits contrats", c'est-à-dire les contrats principaux que, dans la tradition romaine perpétuée par l'ancien droit, les auteurs du Code civil ont entendu réglementer aux articles 1582 et s. Plus largement, l'expression est synonyme de "contrats nommés" par opposition aux "contrats innommés", aux "contrats sui generis" 3• Or si, en 1804, les contrats nommés se résumaient essentiellement aux contrats spéciaux du Code civil, dès l'adoption du Code de commerce, le nombre de contrats nommés s'est accru. Le (2) Il est curieux de constater à cet égard que le Vocabulaire juridique de Capitant (publié sous la direction de G. Cornu) ne la définit pas expressément mais l'utilise, en revanche notamment, dans l'explication de la notion de contrat innomé "employée pour désigner, par opposition aux contrats spéciaux nommés (bail, vente, etc.), tous ceux qui sont soumis, à défaut de dénomination propre et de réglementation particulière dans la loi, au droit commun des contrats" (p. 201). (3) Voy. LE BOYER, V 0 , Contrats et conventions, Encycl. Dalloz, Rép. Dr. Civ., 2° éd., n° 89 et la référence citée à la note précédente. 2 développement économique, la complexité croissante des opérations commerciales et le besoin de protection de certaines catégories d'acteurs socio-économiques ont conduit par ailleurs le législateur à multiplier les réglementations particulières parfois intégrées dans le Code civil, mais le plus souvent dans d'autres textes qui relèvent du droit économique, du droit de la consommation ou du droit social. Au sein du Code civil, le droit du bail a ainsi éclaté. À côté des principes généraux applicables aux baux de biens immeubles sont apparues des réglementations complètes du bail à ferme, des baux commerciaux et plus récemment des baux relatifs à la résidence principale du preneur. Les baux soumis au droit commun du louage de choses sont devenus l'exception: à côté des baux de seconde résidence, on n'y trouve plus guère que les baux de bureaux, dont l'importance économique est certes considérable. En dehors du Code civil, on songera bien sûr au contrat de travail et à la loi Breyne mais aussi notamment à la réglementation du crédit à la consommation, du crédit hypothécaire, à la loi sur les assurances terrestres, aux lois sur les contrats d'agence ou de concession exclusive de vente, etc. Le domaine des contrats spéciaux au sens large s'est donc enrichi de manière vertigineuse. Il en est d'autant plus ainsi si l'on y ajoute les contrats nommés par les usages 4. L'on connaît en effet, spécialement en matière commerciale, une série de contrats innommés par la loi mais dont les usages et la jurisprudence ont, au fil du temps, élaboré un cadre juridique précis et aussi stable que s'il résultait de textes légaux, que l'on pense au contrat de compte courant 5, aux dépôts de fonds en banque, aux garanties bancaires autonomes et au crédit documentaire 6, etc. 4. Mais il est vrai que cette dernière extension du domaine des contrats nommés réduit considérablement l'intérêt du concept de (4) Comme le suggère le Vocabulaire juridique de Capitant (V 0 nommé, p. 524). (5) Voy. notamment J.M. NELISSEN, De relœning courant, Berchem-Antwerpen - Amsterdam, Kluwer 1976; VAN RYN et HEENEN, Principes de droit commercial, T IV, 2° éd., n° 480 et S. (6) Voy. notamment VAN RYN et HEENEN, op. cit., T IV, 2° éd., n° 597 et s. et n° 651 et s.; CL MARTIN et M. DELIERNEUX, V 0 Les garanties bancaires autonomes, RPDB, Compl. VII. 3 "contrat innommé". S'il est vrai que de manière générale, la distinction entre contrats nommés et innommés joue un rôle essentiel sur les règles applicables, lesquelles dépendent évidemment de la qualification retenue, une des questions les plus importantes en pratique est de savoir dans quelle mesure une opération juridique tombe ou non sous le coup de règles impératives donc, en principe, de règles légales auxquelles on ne peut déroger. Sous cet angle, ce qui importe, ce n'est pas tellement de savoir quelles sont les règles applicables à tel ou tel contrat (les parties prudentes les auront d'ailleurs souvent déterminées), mais bien de savoir si tel ou tel contrat est réglé par la loi et plus précisément par des dispositions légales impératives ou d'ordre public. On sait en effet qu'une opération innommée, véritablement originale, échappe à la réglementation même impérative de contrats proches. La Cour de cassation a ainsi reconnu l'autonomie de la convention d'occupation précaire par rapport au bail qui implique une idée de durée dans le temps 7 et donc notamment par rapport au bail à ferme et au bail commercial 8 • Elle a de même reconnu l'originalité de certaines opérations de location-fmancement, pourtant expressément bâties sur des baux commerciaux, avec pour conséquence que rien n'empêcherait, dans ce type d'opérations, de déroger aux dispositions impératives de la loi sur les baux commerciaux - celle-ci n'étant applicable que conventionnellement, à défaut d'être en présence de véritables baux 9• (7) Art. 1709 C.civ.; cons. N. VERHEYDEN-JEANMART et C. MOSTIN, "Jouissance d'immeuble: bail et notions voisines", ce volume n° 19 et s., P.A. FORIERS, ''Notion de bail et notions voisines" in Le bail: questions diverses, CUP, volume XXVIII, janvier 1999, n° 19 et s., p. 20 et s. (8) Cons. notamment Cass. 30 avril 1971, Pas 1971, I, 781; Cass. 17 mars 1972, Pas 1972, I, 671; Cass. 25 uploads/S4/ aa-vv-aspects-recents-du-droit-des-contrats-2001.pdf
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- Publié le Jul 11, 2022
- Catégorie Law / Droit
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