Book Chapter Reference Enrichissement illégitime : entre contrat et gestion d'a

Book Chapter Reference Enrichissement illégitime : entre contrat et gestion d'affaires CHAPPUIS, Christine CHAPPUIS, Christine. Enrichissement illégitime : entre contrat et gestion d'affaires. In: Blanc, Matthieu. L'évolution récente du droit des obligations : travaux de la journée d'étude organisée à l'Université de Lausanne le 10 février 2004. Lausanne : CEDIDAC, 2004. p. 25-66 Available at: http://archive-ouverte.unige.ch/unige:8576 Disclaimer: layout of this document may differ from the published version. ENRICHISSEMENT ILLEGITIME: ENTRE CONTRAT ET GESTION D'AFFAIRES par CHRISTINE CHAPPUIS' Professeure à iafacuité de droit de Genève Je tiens li remercier mon collègue. le Professeur Gilles PETITPIERRE. des réflexions enrichissantes qu'il a partagées avec moi. Enrichissement illégitime: entre contrai et gestion d'affaires 1. INTRODUCTION L'enrichissement illégitime est, à côté du contrat et de l'acte illicite, une source propre d'obligations. L'article 62 al. 1 CO oblige à restitution « celui qui, sans cause légitime, s'est enrichi aux dépens d'autrui )), Il tend ainsi à corriger un déplacement indu entre deux patrimoines. Les conditions de la prétention en enrichissement illégitime sont controversées, compliquées plus qu'éclairées par des emprunts au modèle allemand, au point que la situation actuelle a été qualifiée de « verwirrend»J, La jurisprudence récente, loin de clarifier les choses, est parcourue par deux courants contradictoires. D'un côté, le Tribunal fédéral constate que « la tendance est [. .. ) à une restriction générale du champ d'application du droit de l'enrichissement illégitime ))2, notamment au profit du contrat. D'un autre côté, on observe une certaine extension du champ d'application de l'enrichissement illégitime à des hypothèses en réalité visées par la gestion d"affaires sans mandae. Sans aborder l'ensemble des controverses, j'examinerai successivement ces deux mouvements contradictoires. II. L'ENRICHISSEMENT ILLEGITIME ECARTE PAR LE CONTRAT Selon l'énoncé classique du rapport entre contrat et enrichissement illégitime, le premier écarte le second. Le créancier d'une prétention contractuelle ne peut pas être considéré comme appauvri; le débiteur n'est pas enrichi du montant de la prestation contractuelle qu'il n'a pas encore effectuée; il existe une cause aux différents transferts intervenus entre les Peter GAueH 1 Walter R. SCHLUEP 1 Jôrg SCHMID 1 Heinz REY, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. L gème éd., Zurich 2003, N. 1466 s. : Heinrich HONSELL, Drei Fragen des Bereicherungsrechts. in: Nedim Peter VOGT 1 Dieter ZOBL (édit.), Der Allgemeine Teil und das Ganze: Liber Amicorum fUr Hermann Schulin. Bâle, etc. 2002, pp. 25 ss, p. 32, constate. par exemple. que le principe de la subsidiarité de J'enrichissement illégitime - diese ver/eh/te Lehre - a été importé par la doctrine suisse d'Allemagne, ({ Dort ist sie indes liingst aufgegeben », ATF 126 III 119 consid. 3e = JdT 2000 r 630, 634; cf aussi ATF 129 III 264 consid.4.1. ATF 129 III 422. 425; cf déjà, mais moins clair, ATF 11911 40 consid. 2d. 27 Christine Chappuis parties, i.e. le contrat'J.. C'est ce que l'on nomme improprement) la subsidiarité. Cette affirmation mérite ct' être nuancée. Si l'existence d'une prétention en exécution contractuelle exclut effectivement l'enrichissement illégitime, tel n'est en revanche pas le cas de la prétention contractuelle en dommages-intérêts6• Ainsi, le vendeur qui a livré dispose d'une prétention' en paiement du prix de vente (art. 211 CO), mais on ne peut effectivement pas considérer que le transfert de la chose ou l'absence de paiement du prix enrichisse l'acheteur de manière illégitime, ce qui ouvrirait au vendeur la voie de l'enrichissement illégitime. En revanche, le locataire d'une voiture qui vend celle-ci à un tiers de bonne foi est responsable du dommage résultant pour le bailleur de la violation de l'obligation de restituer la chose (art. 97 al. 1 et 267 al. 1 CO, art. 933 CC); il est également tenu de restituer son enrichissement consistant dans le prix de vente de la voiture, dans la mesure de l'appauvrissement du bailleur du fait que son patrimoine est diminué d'un montant correspondant à la valeur de la voiture. L'enjeu de la qualification d'une prétention en remboursement comme relevant du contrat ou de l'enrichissement illégitime est double. Outre la conséquence sur la prescription (décennale selon l'art. 127 CO, annuelle selon l'art. 67 CO), la restitution est limitée à l'enrichissement qui subsiste dans le patrimoine de l'enrichi, pour autant qu'il soit de bonne foi (art. 64 CO). Cette limite - d'application rare, il est vrai' - n'est pas opposable à une prétention contractuelle en restitution. Le rapport entre les prétentions a été remis en cause à propos de la restitution des prestations réciproques après résolution du contrat suite à la 28 GAUCH / SCHLUEP / SCHMID / REY, (n. 1) N. 1507; Hermann SCHULIN in: Heinrich HONSELL / Nedim Peter VOGT / Wolfgang WIEGAND (édit.), Basler Kommentar, Obligationenrecht I, iUle éd., Bâle 2003, ad art. 62 CO N. 38. Ingeborg SCUWENZER, Schweizerisches Obligationenrecht, AJlgemeiner Teil, 3 erne éd., Berne 2003, N. 59.11; ChristineCHAPPUIS, La restitution des profits illégitimes, Le rôle privilégié de la gestion d'affaires sans mandat en droit privé suisse, thèse Genève, Bâle et Francfort-s-I-Main 1991, pp. 150 ss. Tres critique à l'égard du principe de la subsidiarité: HONSELL, (n. 1) pp. 32 s. Gilles PETITPIERRE in: Luc THÉVENOZ / Franz WERRO (édit.), Commentaire romand, Code des obligations 1, Bâle 2003, ad art. 62 CO N. 45-46; CHAPPUIS. (n. 5) pp. 163 ss. Non soumise ci l'exception dilatoire de l'art. 82 CO. Luc THÉVENOZ, in: Luc TIfÉVENOZ / Franz WERRO (édit.), Commentaire romand, Code des obligations I, Bâle 2003, ad art. 109 CO N. 7. Enrichissement illégitime: entre contrat et gestion d 'qDaires demeure de l'une des parties (art. 109 al. 1 CO) (A.) et de la restitution des montants payés en trop dans un cadre contractuel (B.). A. Restitution des prestations réciproques après résolution Une décision - déjà ancienne9 - a modifié le paysage traditionnel de l'enrichissement illégitime, en soustrayant les conséquences de la résolution du contrat suite à la demeure du débiteur du champ des articles 62 ss CO qui, auparavant, étaient appliqués à la restitution de prestations échangées en vertu d'une cause qui a cessé d'exister (ob causam fini/am), Le Tribunal fédéral a en effet suivi la théorie du rapport de liquidation (Umwandlungstheorie, Liqllidations- ou A bwicklllngs ve rhiiltn is) aujourd'hui largement admise lO , Il a reconnu que la résolution n'a pas pour effet de mettre à néant le contrat, mais de le transformer en un rapport de liquidation, les obligations réciproques de restitution prenant le relais des obligations initialement convenues. Cette conception permet de rendre compte des obligations qui naissentll avec la résolution ou qui subsistentl2 après celle-ci, ce que n'explique fondamentalement pas l'idée, défendue jusqu'à cet arrêt, de la mise à néant du contrat avec effet rétroactif13 conduisant à l'application des règles de l'enrichissement illégitime. Elle donne en outre un fondement uniforme à la prescription 14 : le délai est de dix ans conformément à l'article 127 CO, aussi bien pour la prétention en Il " li 14 ATF 114 !l152 ~ JdT 19881523. THÉVENOZ, (n. 8) ad art. 109 CO N. 6: PEllTPIERRE, (n. 6) ad art. 62 CO N. 34 ss; Wolfgang WIEGAND in: Heinrich HONSELL 1 Nedim Peter VOGT 1 Wolfgang WIEGAND (édit.), Basler Kommentar, Obligationenrecht 1. 3en,e éd., Bâle 2003, ad art. 109 CO N. 4 ss: GAUCH 1 SCHLUEP 1 SCHMID 1 REY, (n. 1) N. 1567 ss: SCHWENZER. (n. 5) N. 56.10,66.33: Guillaume VIONNET 1 Hans Caspar VON DER CRONE, Nature de l'action en répétition, Arrêts de la 1ère Cour civile du Tribunal fédéral du 28 mars 2003, de la 1ère Cour d'appel civil du Tribunal cantonal fribourgeois du 3 octobre 2002, Commentaires, in : RSDA 2003 pp. 328 ss, p. 330 n. 30-31. Contra: Markus KNELLWOLF, Zur Wirkung des Rücktritts, in: ROS 1990 1 pp. 389 ss, pp. 403 ss. L'obligation de restituer les prestations réciproques. P. ex., l'obligation de confidentialité. THÉVENOZ, (n. 8) ad art. 109 CO N. 6. La question était tranchée de longue date (cf ATF 61 Il 255 "" JdT 19361 143), sans qu'on puisse expliquer pourquoi, si la restitution relevait de l'enrichissement illégitime (art. 109 al. 1 CO), le délai de prescription était le même que celui de la prétention en dommages-intérêts, soit de dix ans. 29 ChrÎstÎne Chappuis dommages-intérêts (art. 109 al. 2 CO) que pour la prétention en restitution (art. 109 al. 1 CO) du fait que les deux prétentions en cause sont de nature contractuelle. La théorie du rapport de liquidation mérite pleine approbation. n faut toutefois éviter de l'absoJutiser au point de rendre la partie tenue à restitution responsable sans sa faute de la disparition de la chose à restituee:5, problème que ne pose d'ailleurs pas la restitution d'une somme d'argent (sous réserve de l'art. 64 CO). Quene que soit la portée qu'on lui confère, cet aménagement des conséquences de la résolution donne un fondement contractuel à la restitution réciproque après résolution. Ce faisant, il écarte les règles de l'enrichissement illégitimel6• L'approbation a été presque unanime17• Certains auteurs yont plus loin et proposent que l'invalidation pour erreur donne également lieu à une restitution contractuelle 18• Le Tribunal fédéral avait, dans l'arrêt Picasso 19 , rendu la même année, soumis uploads/S4/ chappuis-christine 1 .pdf

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  • Publié le Sep 04, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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