Histoire des bourses de valeurs L'histoire des bourses de valeurs retrace les é
Histoire des bourses de valeurs L'histoire des bourses de valeurs retrace les étapes de l'émergence d'espaces de valorisation des obligations puis des actions, du XIIIe siècle à nos jours. Par leur intercon- nexion, les cités commerçantes italiennes et celles de la mer Baltique créent des places bancaires, où s’échangent des effets de commerce, qui ne deviendront boursières que beaucoup plus tard. Grâce à un marché de l'épargne déjà international, les obligations prennent un formidable essor au XVIIIe siècle, sous forme de dette publique an- glaise, française, autrichienne puis américaine, sophisti- quée et soutenue par les banques centrales, les compa- gnies commerciales à monopole, dites « des Indes », ou le Trésor public. Les obligations dominent ainsi jusqu'au milieu du XIXe siècle les bourses de valeurs, car le finan- cement des armements navals vénitiens et hollandais sous forme d'actions reste une exception. L'émergence de la presse écrite et du télégraphe per- met aux actions de prendre le relais vers le milieu du XIXe siècle, le développement des chemins de fer, de l'extraction de matières premières et précieuses s’ajoutant à celui des banques et des canaux. La Bourse reste affaire de territoires et concessions, même si elle se mondialise grâce à l'apparition du télégraphe et se passionne déjà pour les technologies (électricité, automobile, acier). Jus- qu'au XXe siècle, les entreprises industrielles n'y prennent qu'une place minoritaire, avant d'y connaître ensuite un âge d'or, en profitant de leurs économies d'échelle. Ce siècle finissant voit aussi apparaître les échanges électro- niques, puis décentralisés, la dématérialisation des titres et la montée de secteurs d'activité gourmands en capi- taux (biotechnologies, informatique) pour qui les actions deviennent le principal mode de financement, grâce à des performances (capitalisation, hausse des cours) très supé- rieures à la moyenne. 1 XIIIe et XIVe siècles 1.1 Les moulins du Bazacle, première so- ciété par actions C'est en 1250 à Toulouse qu'est née la première société dont les actions pouvaient s’échanger, leur prix variant en fonction de la conjoncture économique. La Société des moulins de Bazacle regroupait 60 moulins flottants, dits à « nef », sur la Garonne, répartis entre trois lieux dis- tincts : « La Daurade », « Le Château narbonnais » et « Bazacle ». La chaussée du Bazacle, faite de pieux de chêne, traversait en biais la Garonne, sur une longueur La chaussée du Bazacle aujourd'hui de 450 mètres. Toulouse, qui comptait entre 30 000 et 60 000 habitants, assurait les débouchés commerciaux de ces moulins flottants. Chaque associé recevait un papier notarié, en contrepartie de sa participation. En fin d’année, il touchait en nature, c’est-à-dire en farine, sa part des bénéfices. Les rende- ments pouvaient atteindre entre 10 % et 25 % par an[1]. Les actions étaient échangées sur un marché libre, mais qui ne déboucha pas sur la création d'une vraie Bourse[2]. Chaque année, une assemblée générale élisait les admi- nistrateurs, le trésorier et le receveur des grains[3]. La So- ciété des moulins de Bazacle est devenue « Société tou- lousaine d'électricité de Bazacle », reprise par EDF en 1946. 1.2 Venise, première place pour l'échange de parts dans des navires Le canal de Porta Nova, entrée de l'Arsenal de Venise 1 2 2 XVE ET XVIE SIÈCLES À Venise, le quartier du Rialto était proche d'une vraie bourse des valeurs, selon l’historien Fernand Braudel. Même si les obligations y dominent, les marchands du grand commerce mondial y échangent aussi des partici- pations dans les galères vénitiennes, divisées en « carats », et mises aux enchères. Ce système de l’Incanto des galées du marché[4] a permis à Venise d'entreprendre à partir du XIVe siècle des aventures maritimes à très grande échelle. À son apogée, au milieu du XVe siècle, la ville armait une flotte évaluée à 6 000 galères vénitiennes, permettant des convois réguliers pour sillonner la mer Méditerranée. Ce système est créé dès 1283, sous régie d'État, deux ans après la difficile victoire de Chioggia contre Gênes. Il faut attendre 1315 pour les premières enchères à but com- mercial, concernant les lignes menant à l'Angleterre et aux Flandres[5]. L'État vénitien en créé en 1347 une troi- sième menant à Alexandrie, en 1374 une quatrième vers Beyrouth, en 1402 une cinquième vers Aigues-Mortes, puis en 1436 une reliant les ports de la côte africaine à l'Espagne. La création de cette « Bourse du Rialto » sti- mule la construction des flottes marchandes, qui néces- site, entre 1303 et 1325, le quadruplement de la superficie de l'arsenal de Venise, premier site industriel du monde, protégé par une enceinte secrète de 25 hectares. 1.3 Bruges, première place européenne, re- lie Baltique et Méditerranée La Grand-Place de Bruges. Bruges était le grand partenaire commercial de Venise, au moment où la cité italienne a étendu son rayonnement, mais aussi un précieux partenaire financier. La première Bourse moderne aurait ainsi été créée au XIIIe siècle à Bruges[6], lorsque les représentants des comptoirs im- plantés dans la ville prirent l'habitude de se réunir devant l'hôtel de la famille Van der Buerse[7]. Les principaux comptoirs, appelés « nations », se partageaient les mai- sons sur la place Ter Buerse. Une nation était une asso- ciation de marchands étrangers, qui louait le plus souvent ses propres bâtiments. Les marchands y échangeaient les monnaies de toute l’Europe et fixaient les prix futurs des marchandises, ce qui nécessitait d'anticiper l'évolution de l'offre et de la demande aux quatre coins du monde connu. « Des Espagnols, des Italiens, des Anglais, des Allemands, des Orientaux s’y rendent, bref, toutes les na- tions ensemble », racontent les carnets de voyage de Hie- ronymus Muenze, un médecin allemand de Nuremberg en 1495. Bruges a joué un rôle majeur dans la naissance du marché des valeurs[8]. Sur fond de déclin des foires de Champagne, elle a facilité aux Italiens l'accès à l’Europe du Nord, au croisement des empires commerciaux italiens et du réseau de villes commerciales de la Hanse. 2 XVe et XVIe siècles 2.1 Anvers, première place mondiale, relie l'Inde à l'Amérique La Casa de la Moneda, où était frappé l'argent des mines de Po- tosí (Bolivie), convoyé à travers l'océan jusqu'à Anvers. Le port de Bruges s’ensabla et Anvers prit le relais grâce à sa position à l'embouchure de l'Escaut, alors principale artère fluviale des Flandres et du Hainaut, les deux ré- gions de l'Europe les plus riches. Anvers devient la ca- pitale de l'imprimerie Plantin, profitant de l'invention de la presse à imprimer par Gutenberg en 1454. En 1508[9], la couronne du Portugal décide d'y installer la Feitoria de Flandres, pour ses navires qui reviennent chargés d'épices des Indes, en longeant les côtes africaines. Anvers leur fournit l'argent des mines autrichiennes du Tyrol, puis ce- lui du Mexique, car elles appartiennent à l'Empire espa- gnol. Anvers n'a pas de véritable banque, ni même de flotte de commerce. Il n'y est pas question d'écrire les dettes dans un seul livre de comptes comme à Venise. La place flamande développe alors le principe de la lettre de change, document fiduciaire qui peut être escomptées[10]. L'achat à terme se développe : il arrivait « de plus en plus fréquemment » que la date des livraisons soient reportées, l'écart de temps « permettant d'escompter la hausse ou la baisse » du cours des marchandises[11]. Vers le début du XVIe siècle, les transactions se concen- trèrent à Anvers, qui devient une place pour les négociants de tous les peuples et toutes les langues. La Bourse d'Anvers est un bâtiment, aujourd'hui disparu, de grande taille où se retrouvent marchands et financiers, espagnols et flamands, allemands et portugais, italiens et suédois. En 1592, apparait la première liste publiant les cotes des matières premières [12]. Très vite, les Espagnols amènent des marchandises de toute l'Amérique latine, en particu- lier du Potosí bolivien après 1560 et les convois portugais 2.3 La première nationalisation de dette, par Thomas Gresham 3 poussent jusqu'au Japon, nouant les premiers échanges dans la région de Nagasaki. 2.2 Lyon, première place des emprunts pu- blics à long terme La Rue Mercière et ses voisines réunissaient une centaine d'imprimeurs de Lyon Lyon fut en 1540 la première des bourses des valeurs ré- gionales françaises, qui ont d'abord été des bourses de commerce. Toulouse remonte à 1549 et Rouen à 1566. « Création des marchands italiens » comme Laurent Capponi, venu de Florence, la place de Lyon centra- lise les nouveaux échanges sur les effets de commerce et l'escompte, qui font le succès d'Anvers à la même époque. Spécialiste du commerce de gros, grande organisatrice de foires depuis 1463[13], Lyon est « censée donner la loi à toutes les autres places d'Europe [14]. Vers 1550, c'est une grande ville de soyeux et la capitale de l’imprimerie européenne, avec près de 100 ateliers dans la rue Mer- cière et ses voisines, même si nombre de marchands fran- çais s’établiront ensuite à Anvers, nouvelle rivale[15]. Les banques italiennes de Florence et Lucques, implantées à Lyon, fusionnent : la Banque Gadagne est absorbée par les Capponi[16]. Elles prêtent aux souverains espagnols et français qui se combattent. Le banquier uploads/Finance/ histoire-des-bourses-de-valeurs-pdf.pdf
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- Publié le Aoû 12, 2021
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