1 Paris, le 17 octobre 2017 M. Edouard Philippe, Premier Ministre Hotel Matigno
1 Paris, le 17 octobre 2017 M. Edouard Philippe, Premier Ministre Hotel Matignon 57 rue de Varenne 756007 PARIS Monsieur le Premier Ministre, L’accord de libre-échange entre la France et le Canada, le « CETA », est entré en vigueur provisoirement le 21 septembre 2017. Ainsi, l’ensemble des dispositions de l’accord relevant de la compétence de l’UE en matière de politique commerciale sont d’ores et déjà en application. La ratification de l’accord par l’Assemblée Nationale et les autres parlements des États-membres est nécessaire pour permettre une entrée en vigueur définitive de l’accord. Face aux nombreuses interrogations que ce traité suscite, vous avez commandé un « rapport de la commission d’experts indépendants en charge de l’évaluation de l’impact attendu de l’entrée en vigueur du CETA sur l’environnement, le climat et la santé », que vous avez reçu début septembre. Les député-es LREM ont constitué un groupe de travail permettant de tenir compte des analyses et appréciations de chacun -qui peuvent être assez diverses-, de définir une position du groupe et de faire des propositions concernant des conditions de mise en œuvre qui répondraient efficacement à ces interrogations. En préalable, les députés du groupe de travail soulignent l’importance de promouvoir une insertion positive de notre économie dans le marché international, alors que la France accuse un déficit commercial de 60 milliards d’euros, tout en se plaçant dans une nouvelle approche du libre-échange qui tienne enfin compte des enjeux climatiques, de santé et de solidarité. En France, plus de 2,2 millions d’emplois dépendent des exportations vers des pays en dehors de l’Union européenne. Il est donc nécessaire de promouvoir un commerce extérieur régulé par des accords de libre-échange de nouvelle génération, les plus favorables possibles pour l’économie française et européenne, et pour l’environnement et la santé. Sur le plan économique, les député-es du groupe de travail notent que le CETA devrait offrir des gains économiques potentiels réels pour les secteurs industriels (élimination des droits sur les biens industriels, reconnaissance des certificats d’évaluation de la conformité, protection des brevets pharmaceutiques), les marchés publics, l’exercice des professions réglementées ou la protection des investissements... Pour les produits agricoles, il est prévu d’ouvrir sur chaque marché des contingents de façon progressive. En outre, un certain nombre de produits dits “sensibles” sont exclus de la libéralisation des droits de douane. Le CETA vise à faire converger les normes en définissant des standards communs élevés. Il présente un certain nombre d’avancées potentielles par rapport aux accords existants: reconnaissance des appellations géographiques, remplacement de l’ancien mécanisme de 2 règlement des différends investisseurs-États (ISDS) par l’instauration d’une cour permanente d’arbitrage (ICS), protection du droit à réguler des deux parties, rappelé par la décision du 30 juillet 2017 du Conseil Constitutionnel… La commission d’experts a cependant appelé à la vigilance et à l’action dans de nombreux domaines : transparence dans les négociations, santé, environnement, changement climatique et filière bovine. En outre, elle invite à tirer le bilan des avancées obtenues dans le cadre du CETA, tout autant que dans des problèmes soulevés, pour les futurs accords commerciaux que l’Union Européenne sera amenée à négocier. Dans le prolongement de ces recommandations, les député-es du groupe de travail ont donc souhaité contribuer à définir des modalités de bonne mise en œuvre de l’accord qui offrent des garanties aux parties prenantes et à la représentation nationale face aux craintes légitimes exprimées par la société civile, sur lesquels nous sommes particulièrement sensibles. Elles concernent la transparence dans la mise en œuvre du CETA, le renforcement des dispositions prévues en matière sanitaire, environnementale et climatique, et enfin la prise en compte de ces préoccupations dans les négociations commerciales à venir. A quelques jours de la présentation du plan d’action du gouvernement sur le CETA, nous souhaitons partager avec vous ces propositions, annexées à la présente lettre. Il apparaît en effet indispensable que la représentation nationale soit associée aux accords de libre- échange, comme l’a souligné le Président de la République, gage de prise en compte des attentes de nos concitoyens. Cela permettra également de faciliter le processus de ratification et d’en assurer une mise en œuvre optimale. Convaincus de l’attention que vous accorderez aux propositions du groupe LREM, nous vous adressons, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de notre haute considération. Pour les députés du groupe LREM, les membres du groupe de travail : Jacques Maire, député des Hauts-de-Seine ; Matthieu Orphelin, député du Maine et Loire ; Pieyre-Alexandre Anglade, député des Français de l’étranger ; Hervé Berville, député des Côtes-d’Armor ; Jean-Michel Clément, député de la Vienne ; Coralie Dubost, députée de l’Hérault ; Laurence Gayte, députée des Pyrénées-Orientales ; Sandrine Le Feur, députée du Finistère ; Jean-Claude Leclabart, député de la Somme ; Martine Leguille-Balloy, députée de Vendée ; Roland Lescure, député des Français de l’étranger ; Sandra Marsaud, députée de Charente ; Ludovic Mendes, député de Moselle ; Monica Michel, députée des Bouches-du- Rhône ; Sandrine Mörch, députée de la Haute-Garonne ; Anne-Laurence Petel, députée des Bouches-du-Rhône ; Liliana Tanguy, députée du Finistère ; Nicole Trisse, députée de Moselle. Copie :Mme Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès du Ministre d’Etat, Ministre de laTransition Ecologique et Solidaire M. Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères 3 Annexe : contribution du groupe de travail des député-es LREM sur le CETA I) Optimiser la transparence de la mise en œuvre du CETA et de son évolution La représentation nationale doit se saisir plus en amont des enjeux autour des accords de libre- échange afin d’en faciliter le processus de ratification et la mise en œuvre. En ce sens, les députés du groupe de travail recommandent: 1. La présence de parlementaires et représentants de la société civile (dont les syndicats dans leur diversité, les ONG, les producteurs et les consommateurs) dans le comité chargé du suivi de l’application du CETA (et en particulier de ses nouveaux instruments, tribunal d’arbitrage et forum de coopération réglementaire, sur lequel la transparence doit être exemplaire) ainsi que la publication régulière des avancées du comité; 2. D’associer directement les parlementaires aux actions complémentaires qui seront engagées par le gouvernement afin de venir corriger les impacts potentiels négatifs du CETA en matière sanitaire et environnementale ; 3. La communication des travaux des comités thématiques, mis en place par le CETA, aux commissions compétentes des parlements nationaux; 4. Clarifier par des critères non susceptibles de contournement la définition des investisseurs ; 5. Assurer que les représentants de l’Union Européenne au sein du Forum de Coopération Réglementaire soient exempts de tout conflit d’intérêt. 6. La remise d’un rapport au Parlement sur la mise en œuvre du CETA un an après l’entrée en vigueur définitive de l’accord avec l'organisation d’un débat parlementaire, ainsi que d’une mise à jour annuelle du rapport. II) Répondre au manque d’ambition en matière environnementale et sanitaire Le rapport de la commission d’experts a noté que le CETA ne comportait en soi aucune mesure nouvelle contraignante en matière environnementale et sanitaire, en plus des mesures règlementaires de chacune des parties. Il s’agit donc de bien s’assurer que cet accord ne remettra pas en cause les normes européennes en matière environnementale et sanitaire. Ainsi, les députés du groupe de travail recommandent : 4 Sur les questions relatives à l’agriculture : 1. D’être associés à la conception de l’étude d’impacts afin d’approfondir notamment les questions sanitaires et environnementales ; 2. D’y intégrer une étude d’impacts sur les régions les plus exposées à l’import de viande bovine et porcine canadienne afin d’en mesurer les conséquences économiques sur les filières d’élevage ; 3. De préparer des mesures économiques d’accompagnement de la filière en cas de déstabilisation des marchés concernés par la mise en place de l’accord ; 4. D’engager des travaux sur les enjeux et la faisabilité d’étiquetage (en priorité sur les produits carnés y compris sur les produits transformés) et de labels de qualité européens permettant une plus grande lisibilité de la composition de nouveaux types de produits sur le marché européen et notamment sur la question des critères autres qu’OGM (antibiotiques, substances chimiques, ractopamine, accélérateurs de croissance, etc.) ; 5. De s’assurer que les organismes de contrôle européen et les postes d’inspection frontaliers européens permettent un respect optimal des normes applicables aux produits en provenance du Canada; amener la Commission Européenne à améliorer les dispositifs de contrôles officiels par la mise en place de contrôles inopinés sur les produits sensibles au regard des critères sanitaires (OGM, substances chimiques, farines animales…) ; il convient par exemple de s’assurer que les saumons transgéniques ne puissent être importés en France et en Europe ; 6. De renforcer les moyens sur les contrôles en France, en les dimensionnant aux besoins et de faire un reporting régulier et transparent de ces contrôles; 7. D’étendre le moratoire français actuel sur les OGM aux nouveaux OGM et aux OGM cachés ; 8. D’engager une réflexion sur un rapprochement des normes européennes et canadiennes touchant au bien-être animal (élevage, transport, abattage); Sur les questions relatives au climat : 9. De renégocier dès que possible la directive européenne sur la uploads/Finance/ lettre-ceta.pdf
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- Publié le Jan 30, 2021
- Catégorie Business / Finance
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