© Groupe Eyrolles 28 La théorie moderne du portefeuille : théorie et applicatio

© Groupe Eyrolles 28 La théorie moderne du portefeuille : théorie et applications PATRICE PONCET ET ROLAND PORTAIT Patrice Poncet est professeur à l’ESSEC Business School. Diplômé de l’ESSEC, maîtrise de droit privé (Paris-II Assas), agrégé des Universités en sciences de gestion, et PhD en finance de l’université de Northwestern (Kellogg School). Ex-directeur du M2 Recherche « Finance de marché » et de l’école doctorale en sciences de gestion de l’université Paris-I Panthéon- Sorbonne. Consultant à la Société Générale. Auteur de nombreux ouvrages (dont Dyna- mic Asset Allocation with Forwards and Futures et Finance de marché (avec Roland Portait)) et articles (dont Management Science, Journal of Economics, Dynamics and Control, Journal of Banking and Finance, European Economic Review, Finance…). Roland Portait est professeur titulaire de la chaire de finance au CNAM et professeur à l’ESSEC Business School. Ingénieur des télécommunications, diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, et PhD en finance de la Wharton School. Directeur du master profes- sionnel de « Finance de marché et gestion de capitaux » au CNAM et consultant auprès d’institutions financières. Auteur de nombreux ouvrages (dont Les Décisions financières de l’entreprise et Finance de marché (avec Patrice Poncet)) et articles (dont American Economic Review, Management Science, Journal of Business, Journal of Economics, Dynamics and Control, European Economic Review, Finance…). INTRODUCTION La théorie moderne du portefeuille est née en 1952 avec la publication de l’article fondateur de Harry Markowitz. En partant du postulat que le risque d’un portefeuille peut être correctement mesuré par la variance de sa rentabilité, Markowitz explicite et formalise le dilemme fondamental de la finance moderne : obtenir une rentabilité faible mais certaine, ou accepter de prendre un ris- que dans l’espoir d’accroître cette rentabilité, l’espérance de rentabilité étant d’autant plus élevée 4986_.book Page 795 Vendredi, 11. décembre 2009 3:46 15 > STDI FrameMaker noir 796 MBA FINANCE © Groupe Eyrolles que le risque est important. Il formalise et quantifie également l’effet de diversification selon lequel une combinaison judicieuse de nombreux actifs dans un portefeuille permet de réduire le risque total subi pour un taux de rentabilité espérée donné. Les travaux de Markowitz devaient s’avérer extrêmement importants et modifier profondément la façon de concevoir les problèmes finan- ciers. Ils montrent, en particulier, que l’intérêt d’investir dans un titre financier ne doit pas être évalué séparément mais dans le cadre de l’ensemble du portefeuille constitué par l’investisseur et d’un marché concurrentiel où de nombreux véhicules d’épargne (actions, obligations, dépôts à terme, immobilier, foncier, etc.) sont en compétition. Une dizaine d’années après les travaux de Markowitz et sur les bases de ces derniers, Sharpe, Lintner et Mossin développèrent un modèle (le modèle d’équilibre des actifs financiers ou MEDAF) qui aboutit, sous certaines hypothèses, à la rentabilité espérée d’équilibre d’un titre quelconque. Et une dizaine d’années plus tard, dans les années soixante-dix, en s’appuyant sur des modèles multifactoriels, S. Ross développa une alternative au MEDAF nommée APT (arbi- trage pricing theory). Le modèle de Markowitz, le MEDAF et l’APT constituent le noyau de la théorie classique du portefeuille. Nous présentons la théorie des choix dans l’incertain et le paradigme espérance-variance sur lequel les modèles classiques sont fondés ($$ p. 00 $$), le concept de diversification et sa formali- sation ($$ p. 00 $$), la construction des portefeuilles efficients (modèle de Markowitz) ($$ p. 00 $$), le modèle d’équilibre des actifs financiers ($$ p. 00 $$), les modèles factoriels ($$ p. 00 $$), l’APT ($$ p. 00 $$), les problèmes de mise en œuvre et des applications ($$ p. 00 $$), et un résumé des principaux concepts et résultats en guise de conclusion ($$ p. 00 $$). CHOIX RATIONNELS DANS L’INCERTAIN : AVERSION AU RISQUE, ESPÉRANCE D’UTILITÉ ET PARADIGME ESPÉRANCE-VARIANCE Ce paragraphe présente succinctement la théorie des choix dans l’incertain et le critère espé- rance-variance. Les choix financiers dans l’incertain et le critère de l’espérance de l’utilité Il s’agit de déterminer la décision optimale parmi des alternatives conduisant à différents gains (ou pertes) aléatoires prenant un nombre fini de valeurs (w1,…,wN) avec des probabilités res- pectives (p1,…, pN). On peut interpréter comme la valeur positive (gain) ou négative (perte) du gain généré par une loterie et il s’agit d’établir un critère qui permette de comparer différentes loteries afin de choisir la « meilleure ». Avant les travaux de Bernoulli et Cramer, au début du XVIIIe siècle, « l’attrait » d’une loterie était censé être fondé sur l’espérance mathématique de son gain : % W % W % W 4986_.book Page 796 Vendredi, 11. décembre 2009 3:46 15 > STDI FrameMaker noir LA THÉORIE MODERNE DU PORTEFEUILLE : THÉORIE ET APPLICATIONS 797 © Groupe Eyrolles Selon une telle conception, un individu rationnel devrait être indifférent entre la loterie au résultat incertain et une somme certaine égale à E ( ) et, entre plusieurs loteries, devrait pré- férer celle qui a l’espérance de gain la plus élevée. Cet a priori simpliste est en fait contredit par le comportement effectif de la plupart des indivi- dus face au risque. Donnons-en un contre-exemple. Soit une loterie donnant, avec des probabilités égales, soit 0 soit 100 000 euros. La plupart des individus préfèrent une somme certaine de 50 000 euros à la somme aléatoire alors même que E( ) = 50 000 euros. Cette préférence pour le résultat certain reflète l’aversion au risque qui caractérise la plupart des agents économiques. Cette aversion est liée au fait que l’utilité marginale de l’euro supplémen- taire décroît. En effet, l’individu rationnel classe ses projets de dépense par ordre de priorité décroissante : les 50 000 premiers euros sont affectés à des projets plus « utiles » que les 50 000 euros suivants et, de ce fait, l’utilité de 100 000 euros est inférieure au double de l’utilité de 50 000 euros. On dit que l’utilité marginale de la richesse diminue et que l’« équivalent certain » de la loterie , qui dépend en fait de chaque individu, est strictement inférieur à 50 000 euros. Ces idées, introduites par Bernoulli et Cramer dès le XVIIIe siècle, ont été systématisées et rigou- reusement formalisées par le mathématicien John Von Neumann, associé à l’économiste Oscar Morgenstern (VNM ci-après). Dans un ouvrage fondamental publié en 1944, VNM démontrè- rent formellement que tout individu obéissant à quelques principes de rationalité cherche à maximiser, non pas l’espérance de sa richesse, mais l’espérance de l’utilité de sa richesse. Synthéti- quement, le programme d’un individu confronté à des choix aux conséquences aléatoires se résume à maximiser . La fonction d’utilité U(.) traduit les préférences de chaque individu, lui est spécifique, et dépend notamment de sa richesse initiale au moment de la décision et de son aversion au risque. Cependant, la fonction d’utilité U(.) de la plupart des individus, possède les deux caractéristiques suivantes : (i) elle est croissante avec la richesse (on désire toujours être plus riche) ; dès lors, si elle est dérivable : U’(.) > 0 ; (ii) elle est concave (la pente U’(.) décroît donc U’’(.) < 0) ; cette concavité traduit, sur le plan mathématique, non seulement la décroissance de l’utilité marginale, mais aussi l’aversion à l’égard du risque. Cet individu dont la richesse initiale est égale à W0, est confronté à la décision d’investir x euros qui rapporteront x – y ou x + y avec des probabilités égales à 0,5 : le profit (+ y ou – y) a donc une espérance nulle. En absence d’investissement, la richesse de W0 génère une utilité de U(W0) (cf. le point 3 sur la figure 28.1). En revanche, si l’opération est entreprise, l’utilité sera soit égale à U(W0 – y) (avec une E W p w i i N i %    Â 1 % W % W % W % W % W % W E U W %   È Î ˘ ˚ 4986_.book Page 797 Vendredi, 11. décembre 2009 3:46 15 > STDI FrameMaker noir 798 MBA FINANCE © Groupe Eyrolles probabilité de 0,5), soit à U(W0 + y) (avec une probabilité de 0,5). Remarquons que E[U ] = (ordonnée du point 1 sur la figure) et qu’elle est inférieure à U(W0). Exemple Soit un agent économique dont la richesse initiale est de 100 K€. Cet individu pourrait entrepren- dre un investissement dont la mise initiale est de 50 K€ et qui peut lui rapporter soit 100 K€ avec la probabilité 0,5 soit 0,00 euro avec la probabilité 0,5. L’espérance du gain est donc nulle (0,5 × (150+50) – 100) et l’individu qui maximiserait l’espérance de la valeur de son patrimoine serait indifférent entre les deux termes de l’alternative entreprendre/ne pas entreprendre. Tel ne serait pas le cas si sa fonction d’utilité était concave, par exemple la fonction logarithme népérien (ln). En effet, si l’investissement n’est pas entrepris, l’espérance de l’utilité de sa richesse est : ln(100) = 4,60. Dans l’éventualité où l’investissement serait entrepris, sa richesse serait aléatoire et égale à 150 (avec probabilité 0,5) ou 50 (avec probabilité 0,5). L’espérance d’utilité de cette richesse est de : 0,5 ln(150) + 0,5 uploads/Finance/ showdeclfileres-pdf.pdf

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  • Publié le Apv 20, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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